The Multiversity

Poison avait mené toutes ses petites épreuves pour Miranda, pas par besoin d'argent, aucune des deux n'avait ce besoin urgent de se faire pas mal d'argents. Pas pour ses fans, Poison les gâtes bien assez comme ça, porno ou pas porno. Ni même pour promouvoir un nouveau produit ou autre de Miranda, là encore, l'argent n'était pas un souci pour elles. Un peu à l'instar de Miranda, Poison avait tout. Succès, argent, pouvoir. Elle n'avait pas une milice derrière elle, mais si demain Poison est injustement emprisonné ou pire... Tout Uatis allait réclamer justice pour elle, sans l'ombre d'un doute. Mais Poison avait fait tout cela dans l'unique but que Miranda Forge lui donne au moins une piste sérieuse sur qui était celui/celle qui avait foutue sa mère enceinte. Une des rares choses que son pognon et influence ne pouvait avoir. Même en faisant les yeux doux, même en chatouillant sa fan la plus pointue en informatique, ça finissait dans un cul-de-sac. Alors, vérité ou juste appât du gain ?

Elle l'écouta, commençant à parler de sa mère, ça, elle le savait déjà. C'était le plus simple à savoir de ses deux branches, même si elle savait que sa mère était une simple pute, elle la savait liée à quelques malfrats, lesquels, ça, ça restait un petit mystère... Elle aussi a été une pute pendant un court moment et jamais elle n'a pris les filles de ce métier de haut. Elle savait ce que c'était que devoir se faire de l'argent, elle respectait ses femmes-là. Déjà, Miranda validait une des possibilités... Cet accident n'en était pas un... Cela lui faisait déjà une nouvelle chose sur sa liste, trouver cette bande et surtout cette personne... Même si elle est déjà morte, elle ira chier sur sa tombe, littéralement. Évoqué tout cela ne lui plaisait pas, mais elle devait le savoir... Ce n'était pas pour ça qu'elle avait participé aux épreuves, mais c'était « bon » à savoir. Elle ignorait si c'était via ses recherches ou si a vraiment connu sa mère, mais Miranda semblait en connaître un rayon sur elle, Poison n'a pu récolter que le minimum, l’arbre généalogique, certaines traces de son parcours, rien de bien glorieux.

Miranda continua, évoquant le parcours de Poison, son passé à l'orphelinat, l'exclusion, le retour de Poison alors qu'elle commençait sa carrière en grimpant plutôt vite les échelons. Miranda évitait tout regard direct avec elle, Poison n'était pas stupide, mais elle préférait ne pas se faire de fausses idées donc elle n'intervenait pas, plus elle parlait, plus elle dissipait les doutes de Poison. La voix de Miranda se fit moins puissante, elle entendait de plus en plus son cœur qui battait en elle, et elle prononça enfin les quelques mots qui mettaient fin à ses recherches, du moins, si c'était vrai. Poison restait assise, toujours aussi concentrée en fixant Miranda. Étais-elle heureuse ? En colère ? Euphorique ? Miranda allait vite le voir, c'était un peu tout ça à la fois et Poison ne savait pas alliés ses mots à la bonne intonation ou à la bonne expression faciale.

« Donc... T'es ma mère génitrice ? »

Le ton semblait froid, presque menaçant et pourtant son visage était à mi-chemin entre un sourire et de la colère. Dans sa tête, tout se bousculait, émotions et questions se mélangeaient et elle n'arrivait pas encore à gérer tout cela.

« Mais PUTAIN qui était cette putain de saloperie qui.... c'est qui qui à tuer ma mère, bordel ?! »

La personne, le groupe, Poison avait beau être une personne qui respectait la loi, ayant même refusé la drogue dans les moments où elle touchait le fond dans sa jeunesse, là, elle était prête à fricoter avec quelques nanas qui savaient utiliser du bon matos. Si ce n'était pas déjà fait, elle voulait dézinguer ce groupe, même si ce serait des salopes sous la protection gouvernementale, elle s'en fout. La justice sera sienne. La seule chose que Poison n'a pas dans sa vie, elle ne pouvait pas l'acheter, par leur faute. Elle ignorait quand, mais si un jour elle a un gosse, elle y prendra soin et quiconque lui voudrait du mal... Mieux vaut pas supposer la suite... Ne sachant pas où poser ses yeux, elle observait tout et n'importe quoi, sans parvenir à laisser ses yeux posé sur Miranda.

« Mais... Putain t'aurais pu venir me chercher quand j'étais gosse !!! »

Parlant d'une voix fluette pour grimper dans la colère, elle n'arrivait pas à se contrôler. Poison n'était pas forcément vulgaire, mais elle expulsait tout ça comme elle pouvait. L'orphelinat n'a pas été une partie de plaisir, c'est sûr. Poison était une forte tête et plus le temps passait, moins elle était apprécier. Elle veillait sur Virus dés son arrivée, car les enfants étaient souvent cruel alors une petite aveugle, forcément que ça risquait de se moquer, mais elle a jouer les grandes sœurs pour elle. Même cette hybride, Rouge, elle était plus une boniche, mais Poison la respectait et jouait avec quand elle pouvait. Pourquoi elle n'avait pas droit de s'amuser sous prétexte qu'elle avait une queue, des ailes ou autres ? Sans dire que chaque jour était un enfer, ce n'était pas facile plutôt... Mais bon, si elle a été viré, c'est qu'elle a été trop loin. En grandissant, son corps à changer et lui a demander des choses, elle prit la virginité de Virus, couchant plusieurs fois avec elle, avec Rouge aussi, moins souvent. Puis elle en a voulu plus, allant voir les autres filles de l'orphelinat, certaines étaient d'accord, d'autres curieuses, mais un jour, on l'a surprise et là, plus le choix, elle fut viré.

Poison était encore sous le choc, n'ayant pas forcément relevé le « mes filles ». Même si elle n'avait pas le même sang, la famille Forge avait aussi Isabelle, la chienne de Miranda qui avait été aussi une sorte de fille de substitution. Pourquoi choisir une chienne si jeune pour une fille qu'elle ne pourra croiser qu'une fois adulte sinon ? Enfin, cela sera pour plus tard, il y avait plus urgent que découvrir qui sont les chiens et domestiques autour de... de sa mère.

« Parles moi d'elle... je veux en savoir plus... sur elle... Votre rencontre... tout ça... »

Pour une fois, sa phrase était restée sur le même ton, un peu détachée, mais curieuse quand même. Elle savait si peu de chose sur elle, même sur Miranda même si bon, il était plus simple de se renseigner sur elle. Elle ignorait les petits détails de sa vie, mais bien des sites ou bouquins peuvent parler en long, en large et en travers de Miranda Forge déjà.

Elle y était ! Plus de fuite, plus de retour en arrière, plus d’échappatoire, Miranda allait devoir faire face aux conséquences de ses choix. En définitive, on était toujours jugés par ceux à qui on avait donné la vie, et il ne saurait y avoir pire bourreau et pire juge que son propre enfant. Poison resta silencieuse pendant quelques instants, avant de laisser briser la glace. Elle, l’égérie uatéenne, véritable icône de mode uatéenne, femme hyper populaire, elle laissa parler sa colère, sa frustration, reprochant à Miranda son silence. Celle-ci ne put qu’accepter ce blâme, et lui répondit ensuite :

« Je… Je ne savais pas que tu étais ma fille, Shirley. Je ne l’ai su que récemment, et j’ai cherché un moyen de t’aborder. Enfin… Pour être plus précis, c’est grâce à toi que je l’ai su. Quand j’ai appris que quelqu’un enquêtait sur Bianca, et que ce quelqu’un était toi, j’ai fait le lien. J’ai obtenu un échantillon de ton sang que j’ai comparé au mien… »

De cette manière, Miranda avait tout pu recouper. C’était aussi simple que ça. Si elle avait financé Bianca, c’était par amour pour elle, ce que la PDG  précisa rapidement :

« J’ai juré à Bianca de veiller sur son enfant. Je ne savais pas que c’était le mien… Si j’avais su, je t’aurais adopté, Shirley. Elle n’a pas voulu me le dire, elle voulait sûrement me faire la surprise… »

La voix des Miranda se brisa soudain tandis que le souvenir de Bianca lui revenait à l’esprit. Poison pouvait le sentir ; l’amour de Miranda pour elle avait été réel, sincère, authentique. Elle avait aimé cette femme, elle l’avait aimé sans concession.

Se raclant la gorge, la PDG se leva, et récupéra une bouteille d’alcool dans une armoire. De l’alcool fort, qu’elle se mit à boire d’une bonne rasade. L’alcool lui brûla avec satisfaction la gorge, et elle frémit doucement, laissant le vin la réveiller.

« Elle aimait la musique, elle était… Très vivante, très romantique. Elle aimait aussi ce qu’elle faisait, et aimait que je l’emploie comme courtisane de luxe. Elle couchait avec dès Sénatrices, et elle adorait ça. Ta mère aimait la vie. Je l’aimais au point de vouloir l’épouser… »

Miranda soupira doucement en secouant la tête.

« Je n’ai jamais retrouvé l’assassin. Je n’avais pas à l’époque les moyens que j’ai maintenant. Pour autant, je n’ai jamais arrêté l’enquête. Et nous disposons désormais d’un témoin crucial, celle qui était dans l’appartement de Bianca au moment de son assassinat. »

Un sourire triste se dessina sur les lèvres de la belle blonde, qui enchaîna lentement :

« Toi, son jeune bébé… »

Pour Poison, c'était un choc, oui, c'était le but de ses recherches, trouvé la seconde moitié de son arbre généalogique. Elle n'avait jamais eu de soucis sur l'identité de sa mère porteuse, même si elle trouvait pour ainsi dire rien d'intéressant ou de fluctuant dans ses racines, elle savait qui était sa mère et qu'elle était une Gold. Mais à côté, grand mystère. Avec la mort de sa mère en plus, c'était un choc. On lui avait toujours parlé de l'accident donc forcément, elle s'était simplement dit que ce n'était pas de chance, de là à se dire que c'était fait exprès ? Comme et pourquoi ? Une simple pute qui se fait tuer de la sorte ? Y a des mac pas forcément rigolo, mais de là à s'en prendre à une mère enceinte... Du moins, c'était ce qu'elle avait cru longtemps. Miranda continua, expliquant certaines choses, les distribuant au compte-goutte, on ne pouvait pas changer le passé, mais Poison avait ses raisons, même si elle n'avait su que depuis peu des vraies racines de Poison, pour elle, elle était sûre qu'elle aurait pu savoir ça avant. Elle a détesté l'orphelinat, non pas qu'elle se faisait battre, mais avec son caractère, ça passait mal avec les adultes, voir des gosses partir se trouver une famille, elle restait là avec Virus, les deux rejetés, l'une car elle était grande gueule et le peu de parent s'intéressant à elle, elle expliquait que si elle était adoptée, Virus devait venir aussi. Elle ne pouvait pas laisser son amie seule ici, c'était un coup à ce que les autres l'embêtent !

Elle avait juré de veiller sur elle, mais elle ne l'avait pas adopté, belle mentalité... Avec tout ça, Poison était d'humeur changeante, passant du bon au mauvais et inversement. Enfin, passant sur un autre sujet, elle voulait en savoir un peu plus sur sa mère, au-delà de son identité. Elle aimait la musique, une femme vivante, romantique – c'est pas trop son genre à elle, mais bon, elle n'avait pas encore croisé la bonne femme pour ça – et aimant ce qu'elle faisait. Plus l'aspect sexuel, car faire le tapin, c'est loin d'être un rêve de petite fille. Elle a failli en faire de même en étant à la rue, heureusement ça a duré peu de temps avant d'être repéré par une agence. Concernant l'enfoiré derrière sa mort, elle ne savait pas encore qui, sans pour autant avoir stoppé les recherches car apparemment, Poison était le témoin...

« Hein ? »

Vrai étonnement, elle avait peu de comprendre sur bien des raisons. Jusqu'ici, on lui a toujours dit que sa mère était morte dans un accident de voiture, même si maintenant, elle savait que d'accident, il y en avait que la version officielle, on lui a toujours dit être une miraculée, car sa mère a accouché dans ses derniers souffles de vie. Du moins, même sans avoir les moyens de pousser ou quoi, elle ne s'était éteinte qu'une fois Shirley hors de son ventre, pas avant !

« Je suis née après l'accident, c'est en voyant que ma mère n'allait pas s'en tiré et que moi, je vivais toujours que les médecins m'ont mis au monde avant qu'elle ne s'éteigne ! Tu veux dire quoi, que je suis née avant ça ? Et puis merde ! Même si ce serait vrai, j'aurais eu quoi, quelques jours, comment tu veux que je me souvienne, même inconsciemment de ça ?! »

Même si elle aurait deux ou trois ans à l'époque, ce ne serait pas le genre de souvenir qu'elle aurait voulu conserver. Plus Miranda déballait son sac, plus Poison avait l'impression qu'on lui avait menti si longtemps. L'accident, son passé avec certains malfrats, maintenant ça ? Tout cela commençait à faire beaucoup... Miranda n'avait pas sa confiance habituelle ce soir, Poison avait les émotions en yo-yo, elles étaient deux à ne pas être dans leur assiette...

Miranda avait conscience de ses erreurs. Aurait-elle dû adopter Shirley dès le début, sans savoir avec certitude que c’était sa fille ? Miranda n’était pas alors aussi sûre qu’elle l’était maintenant, et elle savait que l’adoption de Shirley risquait de nuire à son héritage. Miranda avait mal agi à l’époque, et elle n’avait aucune excuse recevable à l’encontre de sa fille. Elle avait répété la « malédiction » des Forge, cette tradition néfaste voulant que les Forge s’éduquent eux-mêmes. Miranda devait faire face à ses actes, mais elle sut attirer l’attention de Shirley en évoquant le décès de Bianca, et le fait qu’elle soit un potentiel témoin. Poison exprima naturellement sa surprise.

Sans répondre immédiatement, la PDG ouvrir un placard, et sortit une bouteille d’alcool fort, de la liqueur de cerise. Elle remplit un verre, puis s’assit face à Shirley, et avala plusieurs gorgées. Miranda ferma les yeux, concentrant ses pensées, puis croisa encore le regard de sa partenaire.

« La mémoire est quelque chose d’incroyable, Shirley. Tout ce que tu as vu au cours de ton existence est en toi, dans ta tête. Rien n’est jamais effacé, mais tes souvenirs sont juste oubliés, inconscients… »

Ce fait était couramment admis, car c’était la meilleure explication des psychologues et des psychanalystes pour justifier l’existence de traumatismes ou de psychoses. Des souvenirs terrifiants, déchirants, dont on ne se souvenait pas consciemment, mais qui affectaient inconsciemment et durablement les patients.

Miranda reprit après quelques instants :

« J’ai développé des programmes, des protocoles pour permettre d’accéder aux souvenirs enfouis. Un scanner cérébral qui balaie tes ondes cérébrales pendant que tu es sous hypnose, et qui te permet de rêver de souvenirs lointains. C’est un programme expérimental, mais je pense qu’il pourrait te permettre de te rappeler cet évènement traumatisant, celui où tu as assisté à la mort de Bianca. »

La PDG croisa les jambes.

« Ta mère n’est pas morte lors d’un accident de voiture, Shirley. C’était un meurtre… Un motif crapuleux, mais les rapports de police ont été falsifiés. Quelqu’un cherchait à protéger le meurtrier. J’ai embauché des détectives, tu sais, j’ai rouvert cette enquête… Bianca était une prostituée qui avait des clients luxueux, et elle s’amusait à enregistrer ses passes. Tu sais, je pense qu’elle travaillait pour des individus dangereux, et qu’elle s’est retrouvée dans une sale histoire. Comment expliquer autrement toutes les difficultés que j’ai eu à obtenir des informations sur sa mort ? »

Miranda secoua la tête.

« Voilà ce que je te propose, Shirley… M’aider à faire la lumière sur la mort de ta mère… En acceptant le fait que je sois ton autre mère. »

Poison était toujours aussi... stupéfaite. Chaque phrase que sortait Miranda la surprenait, elle ne pensait pas que ça aurait été aussi loin ! Elle était venue ici pour savoir qui était celle qui avait engrosser sa mère, c'était elle, la voilà sa réponse. Mais cette réponse s'accompagnait de bien des choses qui n'avaient de cesse de l'étonner ! Même concernant sa mère, elle s'était étonné que sa mort soit si... mise en scène ! Jusqu'à aujourd'hui, elle se croyait miraculée, un accident de voiture qui percute sa mère, elle est maintenue en vie et s'en sort, contrairement à elle ? Faux. Bien des choses qu'elle croyait savoir n'était que des mensonges. Son humeur toujours aussi instable comme un yo-yo partait du positif au négatif en deux secondes ! Grimaçant, souriant, prête à exploser ou à imploser, Poison passait par tous les stades, ça faisait beaucoup trop d'informations à la fois.

« Je suis prête à croire que tu es ma seconde mère, dans le pire des cas, un test ADN et que je le veuille ou non, j'en ai la preuve. »

C'est sûr, comme ça, on ne pouvait pas vraiment dire qu'elles se ressemblaient comme deux gouttes d'eau même si Virus y a vu des ressemblances en touchant le visage de Miranda. Outre leur caractère bien trempé, on ne pouvait pas dire que la ressemblance était frappante, Poison tenait plus de sa mère porteuse ? Physiquement. Mais tout le reste qu'elle lui racontait, mettre la main sur les coupables, bien sûr qu'elle était partante, mais il y avait un souci.

« En admettant que ton bidule fonctionne... Même si je veux faire payer ses enculées... Tu peux me garantir que je ne me souviendrais pas de ce qui s'était passé après ? »

Qui voudrait garder en mémoire la mort de sa mère sous ses yeux ? Personne. Elle avait peur de savoir, de se souvenir. Que ces images soient sur un écran et que ça serve de preuve, d'accord, que ça reste gravé dans sa mémoire ensuite, c'était une autre histoire. Même en ressoudant ce mystère et rendre la justice, il restait des tas de choses concernant Miranda, elle n'allait pas accepter simplement qu'elle était sa mère alors qu'elle savait depuis tout ce temps qu'elle était sa fille biologique. Si encore elle aurait sû ça quand Poison était déjà adulte ou autre, bon, d'accord, mais vu que Miranda semblait savoir pour ses origines... Enfin, pour le moment, elle était méfiante, mais qui sait, une fois cette histoire réglée, elle allait peut-être simplement lui tomber dans les bras en oubliant tout ça ? Difficile à dire... Mais pour en revenir au sujet, outre trouvé le coupable, elle pourrait se souvenir de choses qu'elle ne pouvait pas se rappeler, des câlins de sa mère, de sa voix, de ses mots doux... Une belle perspective en vue.

Poison était… Sur le cul. Miranda le sentait. Elle était comme à bout de souffle, lessivée par tout ce qu’elle avait entendu. Miranda était sa mère, sa mère biologique, celle qu’elle avait toujours recherché. Une situation incroyable ! Et, comme si cela ne suffisait pas, elle venait d’apprendre que sa mère biologique avait été assassinée. Ce qu’elle avait toujours pris pour un accident était en réalité un homicide, et Shirley était ébranlée. Elle l’interrogea alors sur le « bidule », et Miranda sourit doucement.

« Ce n’est pas un bidule, précisa-t-elle, c’est un machin. »

La touche d’humour était peut-être malvenue, alors Miranda enchaîna rapidement :

« Si on réveille de vieux souvenirs en toi, oui, tu t’en souviendras ensuite. Et, malheureusement, tu revivras la scène de la mort de Bianca. Crois bien que cela sera aussi éprouvant pour toi que pour moi. Toi, ta jeunesse t’a protégé de ce souvenir atroce en l’enfermant dans les tréfonds de ta mémoire. Moi, il me suffit d’être seule trop longtemps pour revoir… »

La voix de Miranda se cassa brièvement, et elle se pinça les lèvres en serrant les poings.

« J’étais faible à l’époque… Alors, je suis devenue puissante, riche, influente. Mais crois-moi, revivre la mort de Bianca n’est pas le plus horrible qui puisse t’arriver. Le pire, c’est se souvenir des moments heureux. On en vient à regretter les moments tristes, mais eux ne veulent plus venir. »

Miranda n’avait plus jamais réussi à dormir seule après Bianca. Cet évènement avait été traumatisant pour elle, et expliquait beaucoup ce qu’elle était devenue ensuite. Cette femme parfaite, si sûre d’elle, si puissante, cette nymphomane qui ne se refusait aucune excentricité, qui croquait la vie à pleines dents… Comme un boulimique en manque d’affection, elle s’empiffrait de sexe, elle s’enivrait de stupre pour combler le vide en elle. Miranda avait rencontré bien des personnes magnifiques et formidables ensuite, mais elle ne s’était jamais mariée. Bianca avait été son seul et unique amour.

« Je suis désolée d’avoir été une mauvaise mère, Shirley… Tu méritais mieux que moi, et je suis sincèrement heureuse que tu t’en sois sortie. Je ne te demande pas de me pardonner, Shirley, mais je ferai tout ce que je peux pour honorer la mémoire de Bianca. »

Ses yeux étaient légèrement embués. On pouvait clairement le dire, Miranda avait rarement été aussi émue qu’en ce moment même !

Ce trait d'humour... Mouais, Poison n'eut même pas l'ombre d'un sourire. Avait-elle compris ? Avait-elle jugé cela simplement déplacé de sa part ? Seule elle pouvait répondre, mais elle écoutait Miranda qui, au travers de ce moyen de punir ceux qui ont fait du mal à sa mère, lui demandait quand même d'avoir pour unique souvenir de sa mère, le moment de sa mort. Oui, cela allait éclairer ce qui s'était passé et elle fera d'une pierre, deux coups, en retrouvant sa mère fécondatrice et punir ceux qui lui avait retirer sa mère. Et pourtant, elle sentait dans la voix la tristesse et la solitude de Miranda Forge. Elle connaissait ce genre de choses, Poison n'avait pas la même douleur ou angoisse que Miranda. Elle a su se forger seule et bâtir son empire et sa vie de rêve, l'orpheline solitaire qui n'était pas adoptée ou, dans ses rares chances de l'être, ne l'acceptait que si Virus était adoptée avec elle, cette enfant virée avant sa majorité quand on l'a surprise à coucher avec d'autres enfants de l’orphelinat, cette même enfant qui est aujourd'hui adulée à Uatis. Vraie divinité à qui tout lui réussi et pourtant certains soirs, elle regrettait de ne pas avoir eu une enfance comme les autres, de ne pas avoir connu ses parents, de risquer de finir seule. Elle était encore jeune, mais en dehors de Virus, toutes les femmes qu'elle croisait n'était que des fans qui connaissaient presque sa carrière mieux qu'elle, aucune n'avait un petit quelque chose pour se différencier des autres.

Elle aimait son public, mais parfois, elle se demandait comment le futur allait être écrit du coup ? Fixant un point invisible, Poison laissait ses sentiments se bousculer dans sa tête, elle qui aurait pu penser plusieurs scénarios, elle ne l'avait pas vu venir celui-là... La mère amnésique, celle qui ignorait son existence, celle qui refusait d'admettre que son enfant soit une star du porno, une mère morte ou même un père vivant à Auris, elle aurait pu accepter cela. En soit, elle n'avait rien contre Miranda, mais qu'elle sache pour elle et n'ai rien fait pour l'adopter, elle l'avait un peu mauvaise... Mais savoir que sa mère a été mêlée à ce genre d'histoire, ça en rajoutait une couche, forcément. Poison se redressa en se dirigeant vers Miranda.

« Oublions tout le reste pour le moment... Je vais le faire, ton truc... Pour que ces enfoirées de fils de putes croupissent en prison avant que fasse régler ça par moi-même... Ta rendue ma mère heureuse et elle voudrait sûrement que je t'aide pour la venger, alors... Je vais t'aider... Que ça me plaise ou non, tu es ma deuxième mère. »

Ce n'était pas encore la joie, ni même un « maman » de lâcher par Poison, mais cette dernière venait simplement la prendre dans ses bras. Elle ignorait à quoi ça allait les avancer ni comment leur relation allait évoluer, mais avec toutes ses parts sombres, c'est normal que leur retrouvaille ne se passe pas comme au cinéma avec des scènes larmoyantes et de violons en fond sonore. Au moins, elles n'en venaient pas au mains et elles avaient un but commun. Venger une mère, venger une amante/petite amie. Ensemble, elles allaient « leur » faire payer. La femme la plus puissante d'Uatis, la femme la plus influente d'Uatis. Peu importe comment, elles allaient retrouver les coupables et peu importe qui ou quoi, leur jour était compté. Poison serrait juste sa seconde mère dans ses bras, eh oui... Poison pouvait faire des câlins sans être nue et/ou avec une tric d'enfer !

Poison était prête à le faire. La relation entre elle et Miranda avait évolué, elles avaient franchi le point de non-retour. Miranda savait que Shirley lui en voulait toujours, et elle ne pouvait pas le lui reprocher. Aussi puissantes soient-elles, les Forge n’avaient jamais été très douées pour les sentiments personnels. C’était encore plus vrai pour Miranda, qui avait vécu comme un déchirement le fait de ne jamais pouvoir tenir ses enfants dans ses bras. Shirley était un cas particulier, bien sûr, mais Miranda comptait bien, dans la mesure du possible, rattraper le temps perdu.

« Très bien… »

La soirée était terminée. L’ultime révélation était tombée.

« Il y a encore autre chose que je devais te dire. »

Miranda se déplaça, et récupéra une clef sur le bureau. C’était une clef simple, sans artifice.

« Cette clef ouvre une chambre spéciale au sein de ma villa. Personne d’autre que moi n’y a accès, et c’est probablement la seule pièce de tout le manoir où je n’ai jamais fait l’amour. C’est… C’est là que j’y abrite tous les souvenirs que j’ai pu retrouver sur Bianca, sur toi… Bref, sur ma famille. Quand j’ai su que tu étais de mon sang, je t’ai ajouté dans ce musée personnel. »

C’était sa chambre secrète spéciale, un antre de nostalgie… Le Sanctuaire de Miranda Forge.

« J’ai conçu un double, pour toi… Quand tu iras mieux, tu pourras venir à mon manoir, et tu verras tout ce que j’ai retrouvé sur ta mère. »

Photos d’enfance, souvenirs, vêtements, Miranda avait réuni tout ce qu’il était possible de récolter sur elle, mais cela faisait assez peu. Bianca n’avait jamais été une femme publique, alors il n’y avait pas forcément beaucoup de données sur elle. Mais Miranda avait fait de son mieux.

« Et sache que… Aussi imparfaite que je sois dans ce rôle, je reste ta mère, et je t’ai toujours aimé… Je serai toujours là pour toi, ma chérie. »

Poison avait accepté ce défi pour ça, Miranda avait agité la seule chose à laquelle Poison y consacrait du temps et de l'argent, trouver la personne qui a mis sa mère enceinte ! Autant du côté de sa mère, y avait pas de secret, sa famille était pauvre ou modeste, c'était une vie très simple, à part ce gros chèque sur son compte, tout le reste avait peu de secrets. C'était une pute, elle ne juge pas, à Uatis, ce boulot, c'était très banal. Même elle avait été une pute pendant un temps avant de devenir actrice porno. Mais côté géniteur/rice, silence radio. Pour elle, c'est sûr que cette personne protégeait ses arrières, son ADN, mais elle allait le/la débusquer, et c'était fait. Au fond d'elle, elle espérait que cette personne, sans nier avoir connu ou s'être souvenue de sa mère, ignorait son existence et ne pouvait pas donc se dire qu'elle était sa fille. C'était ça qu'elle reprochait à Miranda, elle savait et elle n'a rien fait. Maintenant, reste à pouvoir lever le voile sur Bianca, sa mère, et qu'elle puisse être en paix en foutant les personnes derrière son meurtre en taule. Poison était prête à enfreindre la loi pour une fois, et engager quelqu'un pour les tuer un à un. Ce n'est pas comme si ce genre de chose était insolite ! À coup sûr, Miranda avait quelques cadavres dans le placard !

Sans être un placard, cette dernière venait lui tendre une clé, une clé d'une pièce chez elle où y étaient conservés des souvenirs. Tant sur elle que sur sa mère. Des souvenirs sur elle, y a des milliers de personnes à Uatis qui ont plus d'un truc sur elle chez eux ! Des films, des affiches, des extraits de journaux et pour les plus collectionneuses, à coup sûr un cheveu ou un peu de sperme ! Non pas qu'elles puissent en tirer grand-chose, mais la collection ! Des trucs de son enfance, il devait bien y avoir des dessins, ce genre de choses, mais ce n'est pas comme si l'orphelinat avait conservé ce genre de choses, à ce jour, des dessins de Poison enfant, elles auraient pu se faire un sacré paquet de pognon ! Des pièces uniques ! C'est sûr, elle était curieuse de voir ce qu'elle avait sur sa mère ? Elle était curieuse pour ses trucs la concernant, mais, forcément, c'était sur sa mère que la balance penchait le plus. Elle allait conserver cette clé, elle ne savait pas encore quand, mais elle allait y jeter un œil, au moins.

« Merci... »

Ce n'était pas dit méchamment, mais comme Miranda, elle était troublée et avait besoin de faire le point sur tout ce qui venait de se passer. Face à sa seconde mère, à son air pas si confiant et sûre d'elle qu'elle affichait en public, ça faisait bizarre. Mais Poison n'était pas si sans-cœur que ça. Sans prévenir, elle la prenait dans ses bras, un simple câlin alors qu'elle posait sa tête dans son cou. Elle avait beau être en colère, lui en vouloir, elle était heureuse de pouvoir enlacer une vraie personne de sa famille. Virus était sa sœur, mais elles ne partageaient pas de lien de sang, elles avaient grandi ensemble, elle avait protégé cette gamine aveugle, elle veillait sur elle désormais. Sans un mot de plus, elle l'enlaçait. Elle savait que si elle ouvrait la bouche, elle pourrait finir en larmes. Miranda le ressentait peut-être aussi, elle serrait la belle contre elle, un peu plus fort en profitant juste de ça, rien de plus. Poison serrant Miranda Forge dans ses bras, cette image aurait de quoi en faire mouiller plus d'une en évoquant ça, mais pas l'ombre d'une érection chez elle. Ce n'était que le coup de l'émotion... Peut-être ? En arrivant, elle se disait bien que ça allait sûrement finir par Miranda qui tenterait de la soumettre comme bon nombre de femmes avant elle, mais maintenant... Elle pourrait coucher avec ?

Uatis avait des mœurs bien plus légères qu'ailleurs, le sexe avait une si grande importance dans la cité après tout ! Peut-être après... peut-être un autre jour... Pour le moment, ce câlin était la chose la plus importante pour elles. La fierté des Forge l'empêchait de parler, mais elle avait quand même les yeux très humides. Elle pouvait cacher l'émotion de sa voix, actuellement, elle cachait l'émotion de ses yeux, mais à moins de faire durer cette étreinte, Miranda allait le voir... Et sûrement que c'était tout pareil pour elle ?

Point d’insistance déplacée chez Miranda, elle avait déballé tout ce qu’elle savait, sur le passé de Poison, sur sa mère biologique, sur tout ce qu’elle savait concernant sa mort, ainsi que sur ses doutes. Cela faisait beaucoup à encaisser pour Poison, qui décida de faire la chose la plus naturelle du monde… Elle enlaça Miranda, qui ferma les yeux en se laissant aller. Elle l’enlaça à son tour, restant stoïque, sentant toute l’émotion parcourir le corps puissant et savoureux de Poison. En d’autres occasions, elles auraient l’occasion de se rapprocher, d’échanger davantage… Mais, pour l’heure, il fallait laisser le trop-plein d’émotions partir, il fallait le }digérer.

Alors, Miranda se contenta de lui faire un câlin, caressant doucement ses cheveux.

« Je t’aime, ma chérie. »

C’était tout ce qu’il y avait à dire. Il n’en fallait pas plus. Poison venait de retrouver sa mère, et d’avoir enfin les réponses qu’elle cherchait à son passé… Des réponses qui appelaient à d’autres questions. Mais était-ce si surprenant ? La vie était faite de cela, après tout.

Mais, pour l’heure, elles étaient unies, ensemble… Une famille.