Si vous ne prenez pas le temps de bien réfléchir aux choses et aux conséquences, vous allez causer une catastrophe. C’est inévitable. Et je ne veux pas causer de catastrophe. Je remarque qu’elle n’a pas commenté sur une bonne partie de mes paroles et c’est peut-être mieux ainsi. Je n’ai pas trop le cœur au débat philosophique. Est-ce que c’est la meilleure solution ou est-ce simplement une solution? C’est toujours difficile d’anticiper les répercussions de ceci et de cela. N’étant plus omnisciente, je ne sais plus tout donc je n’ai pas de réponse à portée de main à cette question. Tout ce que je sais, et je suppose que je devrai m’en contenter, c’est que je dois prendre la proposition d’une mortelle de la troisième dimension, toute kryptonienne qu’elle fut, et l’analyser avec un œil radicalement différent. Cela pourrait marcher mais avec des pourrait, on pourrait refaire le monde…
Je me dis aussi que je dois me fixer des objectifs réalistes. Repenser le poste que je pourrais occuper. Il faut commencer quelque part et souvent, le bas de l’échelle est la solution la plus sage. Pour comprendre le fonctionnement des choses, ce serait probablement un minimum. Je continue de regarder la ville et d’un air absent, je trace des ronds dans les airs et cela montre plusieurs endroits de la division japonaise de Starr Lab. Des départements, en fait. Entre faire ce que j’aime et faire ce qui est utile, il y a une différence. Chose certaine, ils n’ont pas l’air malheureux, les employés, c’est déjà encourageant. Plusieurs grandes entreprises n’ont pas leurs travailleurs à cœur et je trouve ça regrettable. En même temps, le tout est dirigé par une super héroïne donc… Je pourrais faire support informatique. On a beau vivre au XXI ème siècle, vous seriez surpris du nombre de gens qui peinent encore.
Vous pouvez être un ingénieur informatique et ne pas savoir configurer vos courriels. Il faut de tout pour faire un monde. Et pour bien faire les choses, je devrai aussi, je crois, regarder les offres d’emplois… Étudier davantage la question. Cela prendra du temps. Chance pour moi, j’ai une bulle dimensionnelle où le temps peut s’écouler plus vite ou moins vite. Donc… Je vais réfléchir à ton idée, que je lui dis. Elle n’est pas mauvaise mais elle présente d’éventuelles complications que ni toi ni moi ne voudrions gérer. Je me lève et me mets sur la pointe des pieds pour pouvoir lui donner un bisou sur la joue, suivi d’un câlin. Il faut que je digère tout ça. Pour une première rencontre, elle aura été riche en émotion. Sur ces paroles, je me téléporte chez moi. Power Girl et moi n’aurons pas de contact pendant une bonne semaine. Et un bon matin, une candidature retint son attention…
Quelques temps plus tard...
Le téléphone sonne. Au bout du fil, paniquée, une assistante de direction m’indique qu’elle n’arrive plus à se connecter à son compte. Est-ce qu’à tout hasard la touche majuscule est enclenchée? Moment de silence puis un petit rire soulagé. Cela fonctionne, maintenant. Quelques instants plus tard, je raccroche. Code 18, que je dis simplement avec un haussement d’épaules amusé à personne en particulier. J’ai un bureau. Un petit bureau. Loin d’être extravagant. Mais c’est mon bureau. Je note l’incident dans le système prévu à cet effet, écrit une note détaillée à l’attention de mon superviseur, porte ma tasse à mes lèvres… Vide. Je lève la tête. La théière n’est pas loin, sur un meuble, plus loin. Ce serait facile de juste la faire flotter jusqu’à moi mais… Non. Je me lève, me sers une nouvelle tasse et retourne à mon ordinateur. Un courriel arrive dans ma boite de réception.
Starr Lab convie ses employés… Une sorte de BBQ, donc. Je vais noter ça à l’agenda. Nouvel appel. Mon superviseur. L’homme est agité. Un des employés n’est pas rentré, il est malade, le département va opérer avec moins de personnel. Une chose à la fois, que je réponds en rigolant. Ne jamais mettre la charrue avant les bœufs. Proverbe qu’il ne connait pas vraiment mais que je lui explique brièvement avant de lui dire que pour le moment, le nombre de cas à traiter est plutôt bas. On va gérer. L’appel se termine, je me remets au travail. Il n’y a rien de glorieux pour une déesse à avoir un poste si bas dans la hiérarchie mais en même temps, rien qui s’obtient sans effort ne vaut vraiment la peine. Un raclement de gorge me tire de mes pensées et je lève la tête… Avant de me lever comme un diable sort de sa boite. Je comprends un peu mieux pourquoi personne n’a frappé, en fait.
« PeeGee! Euh… Boss! Euh… Madame la PDG! Que me vaut l’honneur de votre visite? Acting Human est dans son deuxième mois d'opération et jusqu'à présent, aucun incident! »