Bien qu'elle n'avait pas cette référence cinématographique, l'Ingénieuse ne manqua pas, chemin faisant, de répondre à la boutade de son invitée :
- Mon génie ne saurait se contenter d'une seule copine~
Effrontée, la hobgobeline ! Les rares membres de son espèce n'étaient pas vraiment connu pour garder leur langue dans leur bouche et Arxa, malgré sa grande intelligence, n'allait point à l'encontre de cette réalité. Reste que le commentaire taquin de Rachel renforça ses soupçons comme quoi sa proximité ne la laissait guère indifférente.
Nous allons peut-être bien pouvoir nous amuser un peu, qui sait ?
Tout en affichant un sourire sibyllin, Arxa avait pris place sur la banquette en compagnie d'Iron Girl.
Vixen, quant à elle, jouait les serveuses. Elle leur ramena de quoi s'abreuver, privilégiant la qualité à la quantité, avant de se figer pour mieux évaluer la demande de Rachel.
Du vin d'épines de Tamaran ? Un cru exotique à ne pas mettre entre les mains de n'importe qui, et que l'on a surtout l'habitude de vider dans des conditions bien particulières.
L'androïde voyait très bien où la miss voulait en venir.
Elle afficha un petit sourire de connivence et, sans un mot, retourna derrière le comptoir.
Pendant ce temps, sa génialissime conceptrice se lançait dans cette nouvelle discussion.
- Tu veux dire : mon équipe qui ne compte que deux protagonistes, ma petite poignée d'Arsenaux que l'on a martyrisés et mes petites fesses qui te font vraisemblablement de l'œil ? Ha ! Je ne sais pas si l'on peut appeler ça un trio gagnant.
- Un trio de survivants, plutôt, leur proposa Vixen, qui avait fait drôlement vite pour les servir à nouveau.
- Voilà qui me remonte vachement le moral, Vixen !
- Inutile de se laisser abattre, la consola l'Unité A-Sin-Crown. Tant que l'on respire, il y a de l'espoir. Et je pense que, malgré nos pertes coûteuses, nous nous en tirons à bon compte. (Elle regarda Rachel.) Notre adversaire du jour n'avait rien à voir avec l'un de ces conquérants cosmiques que tu as cités. Nous aurions fait pâle figure à côté de ces tyrans.
Cela donna envie une furieuse envie de boire à la hobgobeline de l'espace ! Ce dont elle ne se priva pas, empoignant le verre qui contenait le fameux vin d’épines de Tamaran.
- Alors c'est sérieux, comme info ? Ce n'était pas de l'intox ? Les terriens ont vraiment remis ces monstres de puissance à leur place ? (Elle siffla d'admiration.) Je me couche ! Personnellement, je n'irai pas vous chercher des noises de sitôt.
- Nous ne sommes pas venues ici pour ça, rebondit Vixen.
- Nan, c'est bien vrai ! A l'origine, j'avais envie de vacances...
Alors qu'elle commençait tout juste à se vautrer dans le canapé, la peau verte se redressa d'un coup et déclara :
- Non, en fait, j'en avais carrément besoin ! (Son regard se fit soudain rêveur.) Un bon petit moment de détente. Sans avoir à tirer sur personne. Dans un endroit tranquille, à me nourrir de vos programmes-
- Débilitants, s'imposa Vixen.
D'un coup d'œil oblique, Arxa lui lança un regard noir.
- Stimulants, corrigea l'Ingénieuse. Ne dénature mes propos, Vixen, quand tu ne peux décemment pas les anticiper.
- C'est parfaitement enregistré.
- Tu mens très mal.
Vixen sourit.
- Je le sais. C'était prémédité.
Arxa secoua la tête et soupira.
- Il y a vraiment des jours où tu m'exaspères.
- Etant donné que c'est toi qui m'a programmée ainsi : tu sais à qui t'en prendre.
- Je ne pratique pas l'auto-flagellation.
- Et encore moins l'autosatisfaction, surenchérit l'androïde dont le rôle ne se limitait pas qu'à de la simple assistance.
L'Unité A-Sin-Crown coula un regard à Rachel avant de lui tapoter affectueusement l'épaule.
- Aujourd'hui, m'est avis qu'elle n'aura pas besoin que je lui rende ce type de service, n'est-ce pas ?
Sur ces paroles, Vixen se détourna des buveuses.
- Tu as bien failli mourir aujourd'hui, Arxa. Et, dans ces conditions, il n'existe pas trente-six façons de célébrer la vie.
Elle se retira, les abandonnant ainsi à leur buverie.
La bouche entrouverte, l'Ingénieuse cligna plusieurs fois des yeux avant d'observer Rachel.
- Elle était bien plus inquiète que je ne le pensais, commenta-t-elle avec un petit rire embarrassé, ses joues déjà rosies par l'alcool. Ne fais pas attention à ses bêtises ! Parfois, j'en viens à me demander si je n'étais pas bourrée le jour où je l'ai remise sur pied.