The Multiversity

Le monstre était l’un des derniers de son espèce. Ou peut-être était-il le seul survivant ? Qu’importe, ce genre de questions ne passent pas dans l’esprit d’un prédateur, encore moins un qui figurait au sommet de la chaîne alimentaire d’une des planètes les plus hostiles de la galaxie.


C’était un animal, mais il y’avait une certaine intelligence en lui. Après tout, il se repaissait des esprits de ses proies, les vidant de leurs émotions, mémoires, connaissance et enfin leur identité même. Ses victimes finissaient en momies desséchées, les orbites vides, rarement en vie si ce n’est sous forme de coquilles vides de toute substance, des corps sans énergie ni volonté, sans âme. Cette alimentation lui donnait parfois l’étrange expérience de rêver, ce qui était pratique pour animer son hibernation. Combien d’années, de siècles même, la créature a sommeillé ? Aucune idée. Elle s’était juste réfugiée dans les profondeurs de la terre, loin, très loin sous la couche rocheuse, s’abritant du soudain bouleversement qui avait frappé son environnement, du manque brutal de proies, de vie tout court. 


Le sommeil a été long, froid et surtout, épuisant. Sans se sustenter depuis tout ce temps, la bête avait presque oublié le goût de la chasse et même le simple fait d’exister. 


Puis vint la chaleur, la lumière. La nourriture. Elle se sentait revitalisée, réanimée. Quelque chose lui soufflait une généreuse quantité de sensations et d’émotions, de plaisirs et de douleurs qui furent avidement siphonnés par le monstre des profondeurs. 


Lentement mais surement, l’abomination se remettait de sa torpeur, révélant sa masse cauchemardesque hors de son nid millénaire.


Les cultistes de Slaanesh étaient les parfaits candidats pour éveiller pareil prédateur, étant eux-mêmes les maîtres de l’excès, des plaisirs les plus extrêmes et des sensations interdites. Certains se mutilaient, d’autres torturaient amoureusement des esclaves au pied du cratère, et la plupart chantaient, dansaient et jouaient d’instruments qui auraient fait saigner les oreilles de tout mortel. Une figure solitaire, enveloppée d’une couche de ténèbres, les supervisaient, silencieuse, deux yeux d’un rouge sang transperçant sa cape d’obscurité totale.


L’ombre repéra en premier l’escouade de cavaliers de Lust, qui fonçaient en direction du rituel impie. Les cultistes ricanèrent, arrachant leurs robes pour dévoiler leurs corps odieusement corrompus par Celle-Qui-A-Soif. Pinces, fouets de chair et d’os, longues lames en flamberge, ailes violacées ... Leur chef, la créature d’ombre, remarqua qu’à leur tête se trouvait la redoutée Angewomon, et un rire glacial et amusé résonna, faisant frissonner de plaisir ses esclaves. Les ombres cédèrent pour que l’instigatrice de ce terrible plan se dévoile, accueillant les héros de Lust à bras ouverts. 


Une parfaite copie d’Angewomon apparut devant eux, mais représentant son opposé, son négatif. Pâle comme un vampire, vêtue d’une combinaison d’un noir d’encre qui transpirait toute la cruauté et l’orgueil de la Némésis aux cheveux immaculés. Lady Devimon ouvrit grand les bras, tandis que derrière elle surgissait doucement l’arme qui allait servir ses sombres desseins. 


“Bienvenue, ma sœur ! Vous arrivez au moment opportun pour assister à l’éveil de cette bestiole. Cette planète regorgeait d’épouvantables monstruosités. Que penses-tu si on jouait un peu avec celle-ci ?”




Losgar avait suivi leur cortège silencieusement, pensif et sérieux soudainement, ce qui concordait mal avec l’étrange conseil que lui avait communiqué Onyxian. 


Ils dépassèrent l’étrange fontaine où barbotaient un groupe d’amants, un spectacle assez érotique mais que le Noxien ignora royalement, son regard scrutant sa planète natale. Il fronça des sourcils, se demandant si ce pari fou allait marcher. Dans quelle étrange aventure s’était-il traîné ? Lui qui était un adepte du contrôle de toute situation, il se sentait comme un fétu de paille emporté par les caprices des vents contraires, suivant le courant sans pouvoir trouver son point de repère.


Et il avait beau préparer tout un discours dans sa tête, la simple vue de la déesse souffla toutes ses pensées. Telle un raz-de-marée impitoyable, le mâle sentit une bouffée de chaleur l’envahir et son corps frissonner malgré lui. Lust. Ishtar. Aphrodite. La Déesse en personne se dévoilait enfin devant lui, et les éloges que lui avait faite Onyxian, Angewomon et les Hautes Prêtresses semblaient loin de faire honneur à l’image divine qui lui brûlait les rétines. Elle était époustouflante et son aura parvenait à bouleverser l’ex-prince, qui pourtant était un avatar même de la résistance et de l’endurance. 


C’était sa première rencontre avec une déité quelconque, et l’expérience était très perturbante, si bien qu’il en resta muet et immobile un instant, incapable de détourner le regard du sien, la sentant le sonder, le jauger, lire son âme avec aisance. 


Mais l’échange de conversation entre Aphrodite et son adoratrice dispersa rapidement l’illusion qui l’avait cloué. Reprenant ses esprits, il sentit l’ébullition du sang de la matriarche des Magoa. Nul doute que ceux qui se faisaient les ennemis d’Onyxian en payaient le prix cher. Très cher. Soupirant longuement, il pesa rapidement ses mots en analysant la déclaration surprenante d’Aphrodite, avant de souffler d’un ton apaisant qui mettait en valeur sa voix virile et forte :


“Déesse, c’est un immense privilège de poser mes yeux sur votre illustre présence. Les poèmes en votre honneur effleurent à peine toute la majesté que vous inspirez. Pour répondre à vos questions, s’il y a une chose que mon peuple valorisait, c’est l’honnêteté brute et directe. Ainsi, je jure sur le sang de mes ancêtres que je n’avais aucune intention de tromper ni vous, ni Onyxian ... sachant pertinemment que je n’étais pas en position de force lors de la signature de notre contrat. “


L’alien croisa lentement ses bras sur son torse, restant attentif à son entourage et arborant la posture la plus neutre possible.


“Nox est belle et bien morte depuis des lustres. Les miens ont mené une guerre si épouvantable qu’ils ont ravagé aussi bien notre civilisation que notre monde. Ma seule théorie est qu’en présence des lois étranges de ce plan dimensionnel, quelque chose aurait été stimulée par Lusst’ghaa. J’ignore quel intérêt a le culte du Prince Sombre, mais je me suis toujours imposé comme son fervent ennemi, ayant déjà terrassé bien des champions par le passé.”


Etirant son cou pour masser une de ses épaules, il avait recouvert ses sens en présence d’Aphrodite, mais ressentait toujours l’imposante présence de la Déesse qui l’évaluait d’un regard infini. S’il échouait à gagner ses faveurs, il pouvait dire adieu à son pari risqué. Ou pire.


“Souhaitez-vous que je vienne en renfort à vos troupes ? Votre hospitalité a été plus que remarquable et je serais un médiocre prince pour ne pas rendre la pareille en vous débarrassant des nuisibles.”

Les Hédonistes de Slaanesh acclamèrent à l’unisson le duel entre l’ange et sa sœur déchue, brandissant leurs armes pour accueillir les autres anges de Lust et leur offrir un accueil digne de leur dieu maléfique. Ces cultistes étaient de redoutables adversaires, exaltés à en juger les mutations qui mutilaient bon nombre de leurs membres. Longues pinces de crabes rosâtres, fouets-tentaculaires barbelés et même des ailes. D’autres étaient lourdement armés d’artefacts enchantés et portaient des armures de champions. Ce n’était donc pas un simple cortège mais bien une cohorte dédiée au service d’un puissant monstre comme Lady Devimon.

Ils entrèrent en contact avec la Cavalerie de Lust et un brutal affrontement s’en suivit, inondant déjà la terre infertile de la planète morte avec le sang des combattants de chaque camp. Les guerriers de Lust pouvaient compter sur la proximité de l’influence de leur Déesse pour gagner en endurance et bannir leurs adversaires, mais leurs ennemis étaient aussi bénits par l’endurance et l’agilité surnaturelle qu’on reconnaissait chez les adorateurs du Celle-Qui-A-Soif. 

“Allons, ma soeur. Tu ne voudrais pas gâcher le plaisir de Slaanesh et casser son futur jouet, hm ?”

L’ange corrompue fit appel à l’ombre maléfique qui l’accompagnait, sorte de fantôme noir qui ne quittait pas son épaule. La créature ouvra grand la bouche et recracha une longue faux à la lame effilée comme un rasoir, que Devimon saisit entre ses mains gantées. 

“Regarde comment cette chose répugnante se goinfre déjà comme un glouton ! Notre maître aime voir un appétit aussi incontrôlable se déchaîner ... surtout contre ses ennemis, ha !”

En effet, la bête psychique avait déjà clamé des victimes. Ses tentacules noirs étaient lents et maladroits, mais elle ne se servait pas de ses appendices pour capturer ses proies. La chose émettait une sorte d’aura dominatrice qui siphonnait l’esprit des créatures à sa portée, les épuisant mentalement de telle sorte qu’une torpeur surnaturelle les frappaient, les rendant incapables d’échapper à la gueule béante du monstre. Le prédateur avala un des anges, ignorant les flèches magiques qui le criblaient de toute part, et un répugnant son de succion s’en suivit. Des couleurs vives parcoururent le monstre avant qu’il recrache le paladin de Lust. Bien qu’indemne physiquement, il ne bougeait plus, et c’est avec horreur que ses compagnons virent l’expression vide de son visage, ses yeux aussi blancs que des perles. Un cocon vide ...

“Par contre, il ne laisse pas grand-chose à tourmenter quand il fait ses ravages. C’est embêtant, mais qu’importe. C’est toi que je veux, ma sœur. Que me suis-je langui de toi depuis tout ce temps ... que de fantasmagoriques sensations t’attendent si tu me rejoins ...”

Se pourléchant les lèvres avec appétit, elle passa à nouveau à l’attaque, tandis que l’alien psychique portait son attention sur la ville qui s’étendait sous la planète, gargouillant d’un appétit immense après des siècles d’hibernation. Lourdement, la créature se mit à léviter pour s’extirper de son cratère.


Losgar se renfrogna silencieusement, acceptant le jugement de la maîtresse du royaume. C’était sa planète à lui, que les cultistes étaient en train de souiller par leur présence, comme des pilleurs de tombes profanant le mausolée qu’était Nox. 

La sensation d’impuissance était très désagréable pour un Noxien, et Losgar dut se contrôler pour ne pas laisser exprimer sa colère. Onyxian et Aphrodite s’entretinrent sur son sort, bien sûr sans lui demander son opinion. L’idée exprimée lui laissa un frisson d’appréhension le parcourir et il ne put s’empêcher de demander :

“Là-bas ? Tu ne parles pas des Enfers, j’espère ? Onyxian, combien d’autres plans dimensionnels et autres univers parallèles vais-je devoir te suivre pour en arriver à l’objet de notre accord ?”

La mâchoire serrée, il aurait pu tenir tête à la matriarche des Magoa malgré sa puissante magie, connaissant la réputation du monde infernal et son empreinte sur le cœur et l’âme des mortels. Mais étrangement, la main d’Aphrodite qui se posa sur son torse effaça son irritation comme une pommade soulageant une plaie saignante. 

“Expliquez-moi ... pourquoi un des Dieux du Chaos vient intervenir dans cette histoire ? Et en quoi consiste ce renforcement ?”

Il avait d’autres questions en tête, mais il préférait éviter d’irriter son hôte. Les dieux étaient réputés être assez prompts à l’impatience et la colère.

Le duel entre les deux sœurs angéliques semblait promettre de s’éterniser sans que l’une ne puisse prendre le dessus sur l’autre, mais ceci jouait en la défaveur des forces de Lust. Plus le combat se prolongeait et plus les guerrières d’Aphrodite se retrouvaient en sous nombre face à l’avantage grotesque accordé par la présence du monstre dans les rangs des cultistes qui, malgré leur manque de prouesse martiale comparé aux valkyries exceptionnelles de la cité, se montraient fanatiquement obstinés à mutiler et se mutiler mutuellement. Après tout, la douleur était un plaisir aussi exquis pour ceux qui vendaient leurs âmes au Prince Sombre.

Un effroyable bruit de succion se fit entendre lorsqu’une des cavalières d’Angewomon se retrouva empêtrée dans les appendices spectraux de la bête psychique. Les tentacules-même servaient aussi bien de bouche que la gueule béante du monstre, et un spectacle extrêmement vulgaire et indécent prit place. Même un résident régulier des plaines de Lusst’ghaa ne pourrait réprimer un frisson de dégoût face au triste sort de celle qui fut dévorée avec obscénité par la créature cauchemardesque. La scène fut d’autant plus insupportable par les rires déments des cultistes qui éprouvaient une profonde jouissance devant la souffrance de leurs ennemis. La douleur était plus qu’un vin pour eux, c’était un puissant tonique qui renforçait leur endurance, leur force et leur agilité. 

“Regarde donc ce que les dons de Slaanesh sont capables ! Vois comment ces simples mortels arrivent à tenir tête à tes prudes en armure d’or ! Tu oses cracher sur ce que tu n’as pas expérimenté, soeurette, et c’est un grave péché. Fort heureusement pour toi, je suis venu spécialement pour t’amener dans l’étreinte de notre divin maître.”

Le sourire de Devilmon s’étira de manière surnaturelle, sa langue profitant de leur proximité pour lécher vulgairement le heaume de sa soeur blonde. 

“Tu partageras la couche des amants les plus terrifiants qui soit. Des Gardiens de Secrets, tous aussi épouvantablement beaux et viriles, avec leurs langues fourchues, leurs pinces, leurs fouets empoisonnés ... que de terribles plaisirs à te faire découvrir.”

Le discours morbide de l’ange déchue était plus qu’une provocation. Une distraction. 

Absorbée par son duel, Angewomon ne remarqua pas que le prédateur psychique s’était tourné vers elle, attiré par l’intensité de ses émotions. Poussant un étrange cri qui ressemblait plus à la plainte agonisante d’un animal blessé, l’épouvantable spectre projeta sa gueule béante et saisi l’un des pieds de l’ange, l’attirant inexorablement vers ses autres bouches affamées, le tout sous le rire amusé de Lady Devilmon.

Les choses prenaient une tournure insoupçonnée. Le Noxien pensa au début de cette aventure invraisemblable et comment il avait “accidentellement” invoqué la matriarche, Onyxian. Un pacte avec le diable était déjà une péripétie pleine de surprises et de mystères, mais jamais il aurait pensé être empêtré dans un conflit entre dieux. Qui plus est, il s’agissait d’une querelle entre deux infiniment anciens rivaux, deux facettes d’une même pièce, l’une représentant ce qui a de plus doux et suave tandis que l’autre était l’extrême, l’excès. Et Nox, sa planète morte, était une fois de plus un champ de bataille où le sang était condamné à abreuver le sol infertile de l’astre déchu.

“Je suis fondamentalement opposé aux forces de la Ruine. Affronter directement un Dieu du Panthéon chaotique est une désillusion dont je suis conscient, car défier les dieux est une garantie de subir une malédiction indescriptible, mais on ne dira jamais que le prince de Nox s’est mis en retraite face à l’adversité d’un dieu maléfique. Votre ennemi est mon ennemi.”

Face à l’adversité la plus improbable, dans les situations les plus désespérées, le cendré ne s’était jamais incliné. Plus que sa fierté, c’était celle de toute une civilisation qui pesait sur ses épaules. Il était la dernière flamme d’un peuple de glorieux combattants et portait en lui l’héritage de leur souveraine défiance. Si la race des Noxiens devait s’éteindre avec lui, ce sera dans un éclat de grandeur ou dans un acte d’ultime défiance face à la mort même. 

Prit dans ses pensées belliqueuses, il ressentit soudain la chaleur presque infernale du corps d’Onyxian sur son dos, sa queue agile venant s’aventurer sous son pagne de cérémonie pour flatter son appendice. Un simple mortel aurait succombé aussitôt à un orgasme incontrôlé sous le contact d’une succube aussi ancienne et puissance que la mère des Magoa, mais l’alien avait prouvé à maintes reprises à la sorcière des enfers qu’il n’était pas aussi susceptible que ses esclaves sexuels. 

Il grogna néanmoins, énivré aussi bien par le parfum de la démone que par la simple aura d’Ishtar, qui continuait d’irradier d’une intense énergie. 

“La fameuse clause de notre pacte, hein ? Tôt ou tard, il allait falloir que je plonge avec toi dans l’antre des damnés, alors ce n’est pas une surprise. Mais je ne me serais pas douté que notre deal devienne aussi un ... comment le décris-tu ? Un entraînement charnel. Je ne vais pas prétendre être un puceau effarouché, j’ai eu bien des conquêtes et aventures nocturnes à travers les étoiles, aussi je me demande quel nouveau plan de débauche réservez-vous dans ces terres obscures.”

L’homme soupira longuement, son corps parcourut d’une vibration d’énergie qui ne manqua pas de parcourir aussi Onyxian. Loin d’être agressive comme elle l’avait expérimenté lors de leur première rencontre sur le vaisseau de Padlock, cette onde d’énergie était plus assurée, confiante, et surtout plaisante, comme une caresse psychique qui ne manqua pas de faire résonner ses cellules d’une délicieuse vibration de ... assurance masculine brute.

“Qu’importe. Je suis prêt.”

Quand Nox était encore peuplée de vie et que les Noxiens étaient l’espèce dominante de cette planète de terreur et de dangers, le prédateur psychique avait été nommé par les chasseurs Avitite, ce qui pouvait être traduit par “syphon”. Le nom décrivait ainsi le mode de chasse de cette créature, qui se repesait des esprits de ses proies plutôt que leurs corps physiques. L’avitite était donc plus attiré par les créatures intelligentes de par la richesse de nutriments comparé à un animal avec un esprit primitif. La confrontation entre ces monstres et les guerriers de Nox était donc une finalité naturelle, et la chaîne alimentaire de la planète exigeait de les voir s’opposer pour le sommet de la pyramide.

Dans leur nature martiale, les Noxiens avaient organisé de grandes chasses où les plus forts combattants partaient faire leurs preuves en exterminant ces êtres nuisibles et néfastes, si bien qu’on crut les Avitites éteints. 

Ce survivant monstrueux, non content d’avoir été éveillé après des siècles d’hibernation dans les cratères d’une planète morte, avait été corrompu, nourrit par les rituels dérangés de Slaanesh. Son appétit, jusqu’à là peu discriminatoire et basé uniquement sur un instinct animal, a été complètement bouleversé au profit d’attraits plus malsains. Et la bête avait ample choix de proies autour d’elle, ne distinguant ni allié ni ennemi, seulement un amalgame d’esprits, d’émotions succulentes, et un immense appétit qui ne demandait qu’à être apaisé. 

Anges et cultistes s’étaient soudain retrouvés emmêlés par les appendices de l’Avitite. Gorgé par ses précédentes proies, la créature avait réussi à dupliquer sa taille et le nombre de ses tentacules, et désormais venait harceler chaque créature à portée. 

“Ah ! Je vous avais dit qu’il fallait le balancer sur le palais avant qu’il ne porte les yeux sur nous !” grommela furieusement Devilmon tandis qu’un large bras translucide s’enroulait fortement autour de sa taille, la clouant au sol.

Anges et cultistes étaient emprisonnés, et chacun réagissait selon sa nature. La cavalerie de Lust était loin de se laisser faire et sectionnait les appendices qui les retenaient, non sans souffrir quand certains tentacules parvenaient à s’immiscer dans leurs parties sensibles et à arracher quelques pièces d’armures. Les cultistes, en revanche, se laissaient joyeusement violer par l’osculation du monstre, dépravés jusqu’à la moelle, et certains riaient et poussaient les gémissements les plus extatiques et sordides avant de finir dans la gueule de l’Avitite affamé. 

Angewomon et Devilmon étaient toutes deux sujettes à un traitement similaire, les tentacules les encerclant se révélant plus frénétiques et intéressés qu’envers les autres. La soeur démoniaque ricana soudainement, fixant les yeux de sa sœur avec une expression d’hilarité incompréhensible, à mi-chemin entre l’amusement et les larmes. 

“Je peux lire ses pulsions grâce à mes dons. Je peux sentir ce qui le rend si agressif, haha ! Tu as l’odeur d’un ennemi que ce beau monstre semble apprécier ... ou détester ! Il en veut plus, il veut sentir son odeur jusqu’au fond, te siroter comme un nectar pour en tirer le jus qu’il désire ! Tu as le parfum du foutre de ce beau ténébreux, c’est ça ! Sache que Slaanesh aussi veut ... gloup !”

Pas le temps qu’elle finisse sa fiévreuse tirade, que Lady Devilmon fut interrompue par l’intrusion disgracieuse d’une épaisse excroissance phallique entre ses lèvres, forçant la barrière de sa bouche au même temps que d’autres ligaments se faufilaient sous sa combinaison noire. Quant à sa soeur angélique, l’Avitite la scrutait avec plus de yeux que les autres, ses tentacules sécrétants un mucus qui semblait lui transmettre des images dans la tête. Celles d’un être à la peau cendrée, flottant dans les airs, arrachant les tentacules de la bête. Celle d’un ange nu, ses bras encerclant l’une des jambes de ce mythique batard. Celle d’une entité impressionnante, puissante et terrifiante, cachée sous un nuage de musc et de soieries, contemplant la scène avec appétit, une pince s’approchant pour les saisir dans son emprise ...
L’homme frissonna malgré lui sous la caresse de la succube. Même le plus frigide des mâles ne pouvait réprimer la sensation que générait la présence d’une créature dont l’existence même était dédiée à la luxure. Losgar pouvait néanmoins se targuer d’être plus résistant aux charmes de la matriarche que le reste des mortels. Sans nul doute avait-elle un pouvoir d’emprise impressionnant, surtout en se rappelant comment elle avait aisément soumis Padlock sous sa botte durant leur première rencontre dans l’espace. 

Un portail s’ouvrit, s’apprêtant à les engloutir vers la terre redoutée des démons. Aphrodite eut tout juste le temps de faire une mystérieuse déclaration à son futur champion, telle une de ces quêtes légendaires murmurées lors d’un rêve, d’une révélation ou inscrites dans les ouvrages les plus anciens qui soient. Et comme toujours avec ce genre de quêtes, les réponses devaient être trouvées par le héros, sinon ce serait trop simple. 

Et le décor disparu, laissant place à un tout nouveau territoire.

Les Enfers.

Voilà que le duo improbable furent téléportés dans ce que Losgar pouvait décrire comme un mélange de luxe et de dépravation comme jamais il n’en avait été témoin. Il devina être dans une sorte de chambre, mais difficile de décrire l’étrange architecture qui l’entourait. Des chandeliers et des bougies lévitaient dans les airs, illuminant les alentours de lueurs chaudes et envoutantes et éclairant un vaste panel de tapisseries aux arabesques complexes et dont les runes donnèrent détranges sensations au Noxien, si bien qu’il détourna rapidement les yeux plutôt qu’essayer de déchiffrer leur sens. 

Le sol à ses pieds était matelassé, tapis et coussins éparpillés dans un désordre volontaire au milieu de tables lourdes de victuailles et de narghilés aux arômes douteux. De longues colonnes noires aux courbes taillées en forme de corps entrelacés soutenaient un plafond richement décoré de mosaïques représentant un cercle où des mortels de toutes espèces paraissaient s’entrelacer dans une frénésie dramatique, le tout sous le regard moqueur de diablotins armés de fourches et de fouets. Charmant.

“Ta chambre, je présume ?”

Passant près d’un miroir, il jeta un bref coup d’œil au balcon qui exposait la pièce à l’extérieur, d’où il pouvait entendre de loin un son consistant qu’il n’arrivait pas à décrire, tel un vacarme dissonant. S’approchant malgré lui, il repoussa l’une des étoffes qui couvraient l’arche, et fut exposé à la vision infernale de l’univers le plus redouté des mortels. Les mots manquaient pour décrire l’apocalyptique vision, entre les terres arides, les volcans en constante activité, le ciel noir et nuageux frappé d’éclairs cramoisis, ou le tumulte d’âmes damnées qui s’empressaient aux portes du Cercle de la Luxure. Le Noxien devait se trouver dans l’un des palais qui surplombaient l’un des royaumes infernaux, de par la hauteur perturbante à laquelle il était exposé. L’odeur de soufre, même à cette distance, était fort désagréable et il préféra abandonner rapidement cette vision cauchemardesque. 

“L’Enfer est un concept alien pour une créature comme moi. Mais les récits autour de votre royaume de damnation sont multiples. Je n’aurais jamais imaginé y mettre les pieds un jour, et certainement pas pour finir dans la chambre d’une puissante diablesse.”

S’approchant d’une des tables, il tint une carafe entre ses mains, inspectant le liquide avant de renifler légèrement le contenu. 

“Ce n’est pas du sang, hm ? Tu bois du sang, Onyxian ? Ton territoire n’a pas l’air d’avoir la terre fertile qu’il faut pour de la viticulture. Ça explique pourquoi vous aimez interférer dans les autres plans plutôt qu’ici. Quoi qu’il en soit, autant en tirer le meilleur maintenant que je suis empêtré ici. Lust, ou Aphrodite, a parlé d’une part d’elle ici ... tu as une idée de quoi elle parlait exactement ?”

Reposant la carafe à sa place, il se laissa tomber lentement sur un des lits qui complémentaient la chambre. Pour quelqu’un qui venait de tomber dans l’un des pires plans de l’existence où l’âme des damnés est à jamais torturée, le bellâtre était étrangement serein.

Losgar renifla bruyamment, ses narines assaillies par les odeurs et parfums de cet univers hostile et inhospitalier. La description que lui fournit Onyxian quant à la fausse commune om les âmes damnés s’accouplaient dans la crasse et la mort était une image peu ragoutante. Un aperçu des infinis tourments que recelait cet endroit damné.

“Nous n’avons aucun concept d’au-delà la mort dans notre culture. Un Noxien vit au jour le jour, jamais soumis à la perspective que ses actes puissent être jugés par une entité supérieure. Nous n’avons ni Enfer, ni Paradis, seulement notre existence. Et nous avons tendance à l’embrasser pleinement.”

Les Noxiens pouvaient vivre longuement, très longuement. Les plus anciens avaient atteint des siècles d’existence. Personne, pas même le peuple de Nox, ne savait quelle était la réelle longévité de leur espèce. Aucun Noxien n’avait expiré dans son lit ou décédé de causes naturelles. Leur destin était de mourir au combat, de faillir face à un prédateur gargantuesque ou tomber sous les phénomènes les plus cataclysmiques. Losgar n’y pensait plus. Il était le dernier des siens et avait longuement cherché à trouver une noble fin dans une quête suicidaire qui ferait pâlir d’envie les héros les plus mythiques de la galaxie. 

Enfin, c’était jusqu’à ce qu’il se décide à signer un pacte avec une démone. Cette dernière, ultime séductrice, l’avait repoussé sur l’une de ses couches, le surmontant de son corps sensuel et provocateur, son parfum puissant se mêlant aux phéromones provenant de sources mystérieuses et indescriptibles. C’était difficile, de ne pas juste la saisir et l’embrasser, la déifier comme une déesse et se prostrer devant sa beauté surnaturelle. Un mortel aurait vite succombé. Seule l’endurance absurde de l’alien lui permettait de garder le contrôle de ses sens et de son appétit, du moins pour l’instant. Il pouvait jouer son jeu.

“Et donc cette partie violente est disséminée quelque part dans ton monde ? Si elle a la puissance divine d’Aphrodite, je suppose qu’elle ne doit pas se faire très discrète, même dans un bordel comme ici. Non seulement dois-je retrouver une déesse de la guerre qui ne doit pas nécessairement être la plus joviale, mais qui plus est un des quatre dieux du Chaos semble nous traquer aussi. Le tout, bien sûr, dans le plus charmant territoire qui existe.”

Losgar soupira lentement, ses prunelles dorées se reposant sur le visage de la belle succube, ne manquant pas d’apprécier la sensation de son corps contre le sien, ses lèvres si proches, ses seins généreux reposant sur son torse musclé, la sensation de sa croupe effleurant son braquemart. 

“Et dire que je cherchais juste à noyer le sentiment glacial d’être seul dans l’univers ... mais j’apprécie tes efforts. On a peut-être eu un partenariat assez tendu, une tolérance assez palpable. Vu les nouveaux enjeux, on devrait bénéficier d’une collaboration plus amicale.”

Galant, le beau mâle effleura du bout des doigts la chevelure rebelle de la matriarche, glissant un index aventurier le long de son cou, s’arrêtant sur le précieux collier et le rubis écarlate qu’il caressa vaguement.

“Nos personnalités sont assez têtues, tu as bien exprimé ton envie de me dompter comme une bête et, moi, de te dominer comme une chienne. Dans l’esprit de notre alliance, je propose qu’on incarne chacun le rôle de dominant et dominé, dans la discrétion de ta chambre. Ça restera notre petit secret à nous deux.”

La main aventureuse vient chercher une des oreilles de la délicieuse démone, la caressant tout en y insufflant un peu de son énergie électrique pour stimuler davantage ses sens, lui donner un avant-goût de ce qu’il pouvait lui offrir.

“Admets-le, tu as été curieuse de découvrir tout mon potentiel en tant qu’amant. Jamais tu n’as eu un noxien dans ta couche, une créature qui peut briser le lit d’une déesse. Quant à moi, je n’ai jamais touché une succube, et tes provocations me donnent l’envie de te prendre sur chaque mur de ta chambre, de te tenir par les cornes et te faire hurler mon nom. Présomptueux, oui, c’est ma nature, mais ne craches pas sur ce que tu n’as pas goûté avant, Onyxian.”

Une autre main vint tirer sur la queue caudale de la succube. Une petite provocation malicieuse. Elle avait peut-être trouvé un digne adversaire.
Meurtrie, l’Avitite se recroquevilla dans sa fosse, agitant furieusement ses appendices pour happer tout autre malheureux à sa portée. La créature, gavée par l’énergie corrompue de Slaanesh, était aussi sujette à l’appétit insatiable du Prince Sombre et de ses cultistes. Elle avait commencé à festoyer avec les deux sœurs, mais c’était sans compter sur l’arrivée d’Eliphera.

La démone guerrière avait été envoyée par la déesse Lust en personne peu après le départ de Losgar et Onyxian. Elle et un contingent de diablesses fidèles à Aphrodite s’étaient élancées pour renforcer la Cavalerie de Lust. Leurs armes embrasées coupèrent bien des tentacules, pour la plus grande douleur du monstre qui relâcha malgré-lui les autres anges prisonniers de sa prise.

Lady Devilmon rouvrit lentement les yeux, encore étourdie par l’absorption de son énergie par l’Avitite incontrôlable. Brièvement, elle avait perdu l’influence que Slaanesh avait sur elle, ses yeux se faisant moins sombres et déments, son visage plus paisible. Elle soupira, en enlaçant sa soeur, lui susurrant au creux de l’oreille :

“J’ai vu ce que le monstre t’a montré. La magie de Slaanesh corrompe tout, même cette bestiole n’y échappe pas. Elle est désormais son esclave et voit les ordres de son maître. Ou sa maîtresse, car le genre ne veut rien dire pour lui. Slaanesh a choisi ton beau ténébreux pour être son nouveau champion, son conquérant. Qui mieux que lui pour faire effondrer l’empire de sa rivale ?”

Elle ricana, l’emprise maléfique du Chaos refaisant surface petit à petit. Elle enroula ses jambes autour de la taille de l’Ange pour l’emprisonner.

“Je n’ai pas besoin d’être sauvée. Mon âme appartient à Slaanesh et, bientôt, toutes celles qui ont juré fidélité à Ishtar ! Au moment même où je te parle, les sympathisants du Chaos traquent ton preux chevalier pour l’escorter jusqu’au Palais d’Argent.  Oh, quel beau et terrible seigneur il fera ! Et nous serons ses traînées, ses chiennes, ses furies pour satisfaire chacun de ses désirs tandis que les larmes d’Aphrodite nourriront Slaanesh !”

L’abomination, l’Avitite, se mit soudainement à léviter, abandonnant le champ de bataille pour quitter Nox et se jeter en direction de la vaste Cité de Lust en-dessous. Devilmon en profita pour déployer soudainement ses ailes et repousser sa sœur, prenant la direction opposée et laissant derrière elle ses cultistes. 

Pour l'intrépide Angewomon le choix était le suivant : poursuivre Devilmon pour la capturer, ou pourfendre l’Avitite avant qu’elle ne se déchaîne sur la cité qu’elle a juré de protéger.

Losgar claqua de la langue pour exprimer son impression de la nouvelle chambre secrète d’Onyxian. Son donjon personnel, comme elle l’avait décrit. Oh, il pouvait sentir dans sa peau que cet antre allait être intéressante. Comme il l’avait deviné, la matriarche des Magoas avait aussitôt annoncé son titre et son rang pour défier la remarque irrespectueuse du galant alien. Leurs deux caractères étaient faits pour s’entrechoquer comme deux félins dans une même cage. 

“Un beau titre, archidémone. Mais là encore, n’oublie pas que tu es en présence de sang royal en ma personne aussi. Nous n’avions, par contre, qu’une seule famille royale, et non 666. J’imagine que c’est difficile de se faire reconnaître avec autant de rivaux.”

Le Noxien arpenta doucement les lieux, curieux, s’arrêtant parfois pour inspecter un curieux objet ici, un artefact là, une peinture sensuelle, un parfum intriguant. Les babioles et jouets de la succube étaient une collection d’étranges curiosités qui ne manquaient pas de faire hausser plus d’une fois les sourcils du beau ténébreux. Diable, la vierge de fer était sans nul doute un effroyable moyen de torture, avec tous les appendices visqueux qui y gigotaient. 

“Ça a ses avantages, d’avoir encore un royaume sur lequel gouverner. Je ne doute pas du nombre de conquêtes que tu as soumis à ta botte. Je ne suis pas sot, juste confiant. Néanmoins, mon honneur ne saurait souffrir que je refuse ton défi.”

Le puissant alien avait toujours levé les défis les plus extrêmes, et celui d’Onyxian promettait d’être un challenge inédit. De plus, n’avait-elle pas dit qu’elle allait le renforcer sexuellement ? Il se doutait bien que derrière ces cérémonies, la matriarche préparait déjà Losgar à son futur rôle de champion de Lust. Le cendré contempla le sablier, le cadran et le lit avec une expression indéchiffrable, pianotant du bout des doigts sur les rebords de la table.

La condition ultime le figea un moment. Elle souhaitait porter son enfant. Leur enfant. Et le faire vivre en Enfer, au milieu des diables et des damnés. L’éphèbe passa une main le long de son menton, cette fois-ci les sourcils froncés et le front plissé. Une décision difficile qu’il digéra lentement tout en marchant autour de la chambre.

“Je ne sais pas quoi penser. L’idée de laisser un de mes descendants ici, surtout après m’avoir montré les affreux tourments subits ... ceci dit, Nox n’était pas nécessairement plus hospitalière. Hm ... soit, mais voici ma propre condition si je gagne : je veux une place privilégiée en Enfer. Tu as parlé de 666 princes et princesses dont tu fais partie. Fais de-moi ton prince-consort, avec les avantages y afférant.”

Faisant face à Onyxian, il saisit le costume de cuir et commença à l’enfiler sans broncher, ne montrant aucune réticence contrairement à son comportement hostile précédent envers elle. 

“Honneur aux dames. Mais ne penses pas que la victoire sera aisée.”
Délivrée de l’emprise des cultistes, l’Avitite s’envola aisément dans les airs tel un zeppelin cauchemardesque, ses multiples gueules suçant avec avidité l’air chargé de désir que Lusst’ghaa renfermait. Plus bas, la ville de Lust s’exposait à ses innombrables yeux affamés. Même à cette distance, l’Avitite pouvait sentir les émotions de ses citoyens. 

Tant d’âmes. Tant de passions. Tant de proies. La bête gloussa presque de joie, encore corrompue par l’influence de Slaanesh et ses perverses pulsions. Plus que de l’appétit, c’était aussi désormais un désir incontrôlable de corrompre et violer la sacralité de la ville qui animait le monstre. 

Dans son cerveau, le chant d’une divinité cruelle et mesquine l’invitait à semer le chaos et le carnage sur son passage, à torturer ceux qui servaient la reine de ces terres et à souiller son nom. L’Avitite ne comprenait pas d’où venait cette présence gargantuesque derrière elle, mais son commandement était absolu. 

Surmontant les hautes tours de la Cité, le monstre fut prit de spasmes violents avant de laisser tomber, dans une sorte de grotesque bombardement, des parties de son corps qui s’écrasèrent mollement un peu partout sur la cité, prenant de court les gardes et les citoyens. Devant les yeux d’Angewomon et ses alliés, les excroissances formèrent des Avitites mineures, de la taille d’éléphants de guerre, qui commencèrent à traquer et chasser les humanoïdes terrorisés. 

La bête principale, quant à elle, se retourna soudain dans les airs pour faire face à la Cavalerie de Lust, prenant d’assaut l’ange et la démone pour les engloutir une fois pour toute.

Pour exprimer sa déception, Losgar claqua de la langue en croisant ses imposants bras sur son torse. Roulant ses yeux dorés autour de leurs orbites, il souffla légèrement en tapant du pied sur le sol dallé de la chambre secrète d’Onyxian. Ce n’était pas tant l’hilarité de la démone qui le vexait mais plus l’ennui de voir un caprice refusé par des raisons qui lui semblaient futiles.

“Ah, la bureaucratie. Je devais bien me douter que ça devait être un des piliers de ton monde. Et la loi de la conquête, alors ? On ne peut plus terrasser un tyran pour prendre sa place ? Mais bref, je ne comptais pas diriger un territoire ici, Onyxian. Je désirais plus une place qui me permettrait ... de naviguer librement en ces lieux. Un certain statut, hm ?”

Baissant des yeux, il regarda la maîtresse des Magoa onduler doucement pour s’agenouiller devant lui, le taquinant déjà avec son charme surnaturel et sa voix sensuelle. Ah, la diablesse savait attiser les passions, il devait l’admettre.

“Cette histoire de libre-arbitre est bien étrange. Mais permets-moi de te corriger sur un point : l’enfant ne sera PAS un vulgaire humain. Les gènes de mon espèce sont très, très dominantes. Les cas de mélange raciaux sont presque inexistants dans nos chroniques, mais du peu que je sache, notre progéniture sera prodigieuse. J’ignore si son héritage démoniaque se manifestera, c’est un domaine dont tu es l’experte, mais je peux garantir que le bébé sera une terreur dès son plus jeune âge.”

Des scénarios étranges commencèrent à circuler dans la tête du Cendré. Un de ses enfants, son tout premier, abandonné pour vivre plus loin. Si la pratique semblait cruelle, elle n’était pas aussi anormale pour Losgar. Les siens avaient souvent abandonné leurs enfants aux éléments pour qu’ils prouvent leur force et leur détermination, un rite de passage, un baptême du feu dès le plus jeune âge. Il se prit à repenser à ses propres parents, le couple royal dominant de Nox, gouvernant d’une main de fer un des peuples les plus belliqueux de la galaxie.

Souriant doucement, il eut soudain une idée. Sa main glissa avec une étrange tendresse le long de la chevelure d’Onyxian, venant flatter la peau de sa joue avant de remonter son menton pour qu’elle croise son regard.

“Si le titre de prince est si embêtant que ça, fais de moi ton consort. Une alliance avec la matriarche des Magoa devrait me permettre d’appeler les services de ton clan en cas de besoin, et m’ouvrirait une porte aux Enfers sans avoir à me damner. Et tu pourras te targuer d’avoir comme époux du sang royal d’une planète de suprêmes guerriers.”

Pour ponctuer ses mots, il approcha soudainement le visage de la succube contre son bassin, collant son visage de séductrice contre l’imposante masse qui se faisait sentir à travers le cuir de son nouveau pantalon. 

“Non seulement tu auras le prestige d’avoir à tes côtés le dernier des Noxiens, mais tu pourras aussi te délecter d’une rare et exotique délicatesse ... tu dois te lasser de tes serviles esclaves. Je t’offre de nouveaux horizons.”
L’Avitite poussa un gargouillement de douleur quand ses appendices furent désintégrés par la soudaine bouffée de magie rose qui émanait d’Angewomon, calcinant ses tentacules et la repoussant avec de fortes ondes de choc. Plus bas, des boules de feu venaient calciner sa chaire, balancées par la démone Elphira qui arpentait les ruelles de la cité. 

En se divisant, la créature s’était considérablement affaiblie, ses forces divisées dans ses drones pour quérir de l’essence psychique chez les citoyens de Lust. Le bouclier magique, sans doute dressé par les Hautes Prêtresses de la déesse, les repoussèrent, attisant ainsi la frustration de la créature qui se montra plus irascible et violente. Les drones s’agglutinèrent autour du Parthénon, tentant de briser sa protection divine par le simple poids de leur nombre et l’énergie néfaste de Slaanesh qui les consumait de l’intérieur. Le bouclier commença à craquer sous les assauts frénétiques des clones de l’Avitite, lorsque soudain apparut les prêtresses pour les chasser. Daphné, Irethiel et Livie avaient franchi les marches du temple pour bombarder de sorts les misérables bêtes qui se désintégrèrent sous leurs sorts combinés.

Privée soudainement de toutes forces, l’Avitite principale se sentit écrasée par une soudaine pression de sorcellerie majeure. Les prêtresses avaient combiné leurs forces pour tenir en place le monstre et laisser Angewomon et ses anges l’achever. Sentant sa fin approcher, le monstre tenta une dernière et suicidaire manoeuvre : elle se jetta de toute sa masse sur Eliphera, cherchant à la recouvrir de sa masse restante afin de la posséder à la manière d’un symbiote ...

Susceptible, la matriarche. Les spécificités complexes des lois infernales et de sa hiérarchie pharaonique avaient de quoi perturber un alien comme Losgar. Il roula des yeux avec agacement, décidément convaincu qu’Onyxian allait refuser chacune de ses propositions jusqu’à ce qu’il finisse par baisser les bras et se contenter d’une position de rencard nocturne pour elle, un nom dans une liste d’amuse-gueules quand son appétit serait vif.

“Gouverner en Enfer, très peu pour moi. Je voulais plutôt le divertissement de pouvoir passer chez vous sans avoir à me damner ou à mourir. L’aventure est ma campagne, le danger est mon pain et le challenge est mon vin. Ma proposition n’était pas pour me faire un nid douillet dans ton palais. Je te croyais polygame, ou peut-être ne suis-je pas assez convainquant dans le rôle d’époux ?”

Son sourire narquois s’effaça quand des appendices magiques enveloppèrent ses bras, jambes et son cou, le clouant au lit central de la pièce, au milieu des multiples outils qui formaient la collection d’artefacts et de jouets de la diablesse. Plutôt que se débattre, le noxien se laissa faire, soumis aux règles de leur petit jeu. Onyxian brandit un fouet suréel avec lequel elle lacéra son torse dans un claquement sonore. Elle ne retint pas son coup, y donnant toute sa force. Il en fallait bien pour faire titiller la peau d’un monstre comme Losgar, et se dernier claqua de la langue.

“Coup bas, Onyxian. Nox a été détruite par les Noxiens, voilà tout. C’est bien le sort de nombreux mondes, de périr par les mains de ses propres enfants, non ? Du peu que je sache sur vous, démons, vous vous entredéchirez joyeusement dans des querelles puériles depuis une éternité. Quant à la corruption chaotique qui infecte Nox ... j’ignore ce que ce maudit dieu veut en faire, mais je ne laisserais personne souiller la mémoire de mon héritage perdu. Personne.”

Brièvement, ses yeux s’étaient illuminés d’une menaçante lueur mauve, un rappel que le prisonnier des tentacules était tout à fait capable d’exploser comme une bombe s’il le désirait. Le courant électrique s’évapora et le Cendré se détendit. Il pinça des lèvres lorsque le serpent qui formait le fouet de la succube s’enroula autour de son pieu, le masturbant lentement. Voilà qui prenait une tournure intéressante. Se sentant d’humeur provoquante, il murmura de sa voix profonde :

“Et bien, je t’en ferais une belle démonstration, mais pas ligoté ainsi. Quand mon tour viendra, je m’assurerais que mon nom résonne dans ce donjon par ta bouche. Mais en parlant de bouche, je me sens bien bavard, à attendre que mon tour vienne. Sois une gentille princesse, et vient donc prendre place sur mon visage princier, que je m’occupe aussi.”


Eliphera offrit une résistance admirable face à la possession de l’Avitite, mais hélas vaine. La créature recouvrit chaque pore, chaque parcelle de son corps comme un linceul vivant, venant même s’insinuer dans ses orifices telles sa bouche, ses narines, afin de prendre totalement contrôle de son corps.

Quand Angewomon et ses alliées se dressèrent face à Elphira, cette dernière avait fini par céder sous le contrôle du monstre. Une couche chitineuse recouvrait ses formes dans une sorte de combinaison translucide, et sa tête était couronnée de multiples yeux avides surmontés par de longs tentacules agités. 

Souriant doucement, la démone possédée parla d’une voix qui n’était pas la sienne. Les mots prononcés appartenaient à un langage guttural, primitif et très, très ancien, qui fit frissonner toute personne à l’entendre. Voyant que ses mots n’étaient pas compris, l’Avitite-Elphira lança soudain une attaque psychique d’envergure, ses yeux s’écarquillant pour frapper les esprits des combattantes de Lust et les enfermer dans une vision prophétique.

Quand Angewomon ouvrit les yeux, elle se trouva au milieu d’un autre univers. Une part de Lusst’ghaa des plus corrompues, où la terre était une forêt de griffes et de mains, de fouets et de langues. Des parfums virulents et des senteurs exotiques abondaient dans les airs, et une musique chaotique résonnait ici et là. L’Ange se rendit compte que l’Avitite lui montrait le Royaume de Slaanesh, un territoire terrible d’où on ne revenait jamais, une damnation éternelle qui rivalisait avec les Enfers. Si elle pouvait contrôler ses mouvements, c’était parce que son heaume de fer la protégeait des plus terribles effets de l’attaque psychique, contrairement à ses soeurs qui subissaient les autres effets de l’illusion.

En effet, elle pouvait voir plus bas que les autres anges étaient harcelées par la magie d’Elphira corrompue. Des démonettes, les démons mineurs de Slaanesh, encerclaient les anges et les harcelaient à coups de pinces et de fouets, leur arrachant leurs armures et les traînant dans le sol. D’autres exhibaient des sexes aux proportions massives qu’elles utilisaient pour copuler avec les prisonnières qui se débattaient mollement. Même Iranaël n’échappa pas à ce sort, car elle était entre les griffes d’un Gardien des Secrets, un des démons majeurs de Slaanesh. Le terrible monstre tenait de ses quatre bras chaque membre d’Iranaël, l’étirant pour ensuite l’empaler sur sa virilité qui n’avait rien de naturelle : un chibre à deux têtes, épais et couvert d’épines osseuses, pénétrant brutalement les deux orifices de l’ange en ricanant.

Seule Angewomon était intouchée, car cette illusion d’un futur terrible réservé par Slaanesh ne pouvait percer son casque béni. Constatant cela, l’Elphira possédée par l’Avitite montra de la main le décor derrière elle en souriant. Sans le décrire, elle dévoila le Palais de l’Excès, la maison de Slaanesh. Un immense édifice qui défiait toute raison et qui suintait la luxure et la décadence absolue, avec ses multiples statues d’argent et d’or, ses jardins luxuriants et mortels, sa musique assourdissante et ses odeurs excitantes. Devant les portes du palais, elle pouvait voir une ombre gigantesque, terrible et impitoyable. Une émanation de Slaanesh en personne, communiquant à travers l’Avitite et promettant ce futur à Lust et ses fidèles.

“Rejoins ta sœur. Nous avons tant de merveilles à te faire découvrir. Ce spectacle, cette scène, c’est la destinée de ceux et celles qui servent Lust. Tu seras mienne, toi, elle, et mon champion ...”

L’ombre s’écarta pour laisser sortir une autre créature. Devant le regard incrédule d’Angewomon, une manifestation corrompue du futur quitta le palais, marchant avec panache et orgueil absolu. Il était couvert de bijoux exotiques et rares, son corps était tatoué d’or et de platine en arabesques scandaleux, et des tissus surnaturels pendaient en une cape vivante derrière lui. Malgré ses atouts étranges, elle le reconnut. C’était Losgar le Noxien, ou plutôt, une version de Losgar qui est tombé sous le joug de Slaanesh.

“Je viens clamer ma nouvelle concubine. Approches, et agenouilles-toi devant ton maître.”

Et que personne n’ose dire après ça que l’art de la persuasion n’était pas dans l’arsenal de Losgar ! Non sans grands efforts pour convaincre la princesse infernale de l’attrait d’avoir un Noxien comme époux, il fallait se demander réellement pourquoi l’alien souhaitait un tél statut, sachant pertinemment qu’il était peu intéressé par les politiques et intrigues d’un plan où corruption et trahison étaient monnaies courantes.

Mais y’avait-il une explication plus poussée que le simple désir d’un mâle belliqueux de clamer une place de conquérant aux côtés d’un prospect prometteur ? Onyxian était une succube, et la matriarche d’un clan puissant. Sa place au sein de la hiérarchie infernale devait ouvrir bien des portes. Sentant qu’une fois avoir trempé ses pattes dans les affaires d’un démon, il était à jamais lié aux jeux des Enfers, il préférait se trouver des alliés qui connaissaient très bien les règles étranges de ce monde.

“Des guerres, hein ? Je serais curieux d’entendre ces histoires croustillantes. Mais ton côté du sablier commence à se vider, et je compte déclarer une guerre sans merci quand mon tour viendra, Onyxian.”

Sur cette salace provocation, le guerrier de l’espace fut soulagé de l’emprise des tentacules qui entravaient ses mouvements afin de le laisser à la merci d’une autre prise bien plus sensuelle et provocante. Quelle vue, quelle vue ! Des poètes auraient tari leurs encriers pour décrire le spectacle absolument scandaleux et sulfureux de la mère des succubes, nue et puissante, à califourchon au-dessus de sa tête, prête à l’exécuter en l’étouffant sous la généreuse masse de son fessier aux rondeurs absolument parfaites. Par le sang des comètes, même le parfum qui émanait d’elle était puissant, envoutant même. S’il ne disposait pas de l’endurance d’un être surnaturel, il aurait probablement perdu l’esprit et succombé aux charmes maléfiques de la tentatrice. S’il gardait toute sa tête, Losgar néanmoins ne pouvait résister à toutes les influences qui saturaient son corps, à en juger par l’érection presque douloureuse qui se dressait à la portée d’Onyxian, attendant, non, hurlant d’être soulagée immédiatement.

Plutôt que s’élancer dans une nouvelle tirade malicieuse, l’éphèbe laissa tomber ce jeu de proses et d’utiliser sa langue pour un duel plus passionné. Enfermant ses deux bras le long de chaque cuisse de la diablesse, il attira contre son menton sculpté la fleur de son désir, et s’y attaqua sans patience. S’il était un amant de nature à prendre son temps, les multiples tentations et charmes que la dominatrice avait lancé sur l’alien avaient gratté sa patience jusqu’à l’émincer. C’était donc avec la fougue d’un lion affamé qu’il entreprit d’honorer l’intimité de son amante, embrassant, léchant, soufflant et doigtant sans retenue ni mesure, sans pudeur ni résistance.

Il sentit sa fierté masculine, sa virilité se faire prendre entre les doigts chauds et accueillants de l’infernale hôte, et il grogna malgré lui. Il avait du mal à l’admettre, mais ses tours avaient commencé à faire leur effet. Une fine pellicule de pré-sperme avait en effet commencé à glisser le long de son gland enflé de frustration.

La Magoa était très talentueuse, et devait être une des rares à avoir réussi à pousser à bout ses remparts avec autant d’efficacité. Mais loin d’être vaincu et de jouir comme un puceau, le Cendré avait aussi ses atouts à utiliser. Malicieux et joueur, il arrêta un instant son manège buccale pour caresser la queue caudale de la démone, y appliquant sa propre énergie, chaleureuse et stimulante, soufflant en elle un courant électrique des plus excitants. Sans crier gare, un de ses doigts alla explorer son fondement, y appliquant la même source d’énergie qui émanait de son être, tandis que sa langue reprenait ses assauts sur son intimité humide.


Le dôme fut brisé, libérant ainsi les anges d’Aphrodite de l’emprise de l’Avitite et sa très puissante illusion. Les daemonettes qui jusque-là avaient harcelé en toute impunité la cavalerie de Lust s’étaient évaporées comme un mauvais rêve, et le décor apocalyptique du royaume de Slaanesh commença à s’estomper tandis que le dôme tombait en miettes.

Tel était le pouvoir d’Héra, la matriarche de l’Olympe et une des plus anciennes divinités de Terra. Mais sa présence, aussi inspirante soit-elle, laissait signifier une chose : c’est que pour amener un dieu au champ de bataille, la menace devait être sévère.

Eliphera, possédée par le monstre, continuait à rester immobile dans son coin, comme non perturbée par la présence de l’olympienne et sa fille. La créature, corrompue par le rituel de Devilmon, avait été gavée par l’influence néfaste du Prince de l’Excès afin d’emprisonner Lust dans cette terrible illusion qui aurait sapé ses forces. En effet, peu de créatures pouvaient se targuer de survivre la folie qu’était le monde de Slaanesh.

Le plan avait, naturellement, échoué. Ayant trop tardé à affronter Angewomon et ses alliées, l’abomination de Nox avait lancé son piège bien tardivement et n’avait pas capturé Aphrodite. Son échec signifiait une chose : soit elle allait être détruite par Héra, Angewomon, Iranaël et les autres, soit elle fuirait et subirait le courroux terrible de Slaanesh.

Même Eliphera commençait à tenter de résister, son esprit se clashant contre celui de la bête tentaculaire pour répondre à l’appel de sa déesse. Cependant, une partie de l’illusion était encore maintenue par la magie de l’Avitite, qui s’alimentait dans les ressources de la démone qu’elle possédait physiquement.

Cette écharde d’illusion, c’était le faux Losgar, la réflexion corrompue et malveillante d’un héros devenu l’esclave du Chaos. Tenir cette illusion physique lui coûtait beaucoup d’énergie et la rendait vulnérable, mais l’Avitite comptait bien utiliser cette arme offerte par son nouveau Dieu tant qu’elle en avait encore le pouvoir. Slaanesh lui avait promis de ne plus jamais sentir la faim. Elle devait remplir son rôle.

Le Losgar Déchu se releva après avoir été frappé par l’onde de choc d’Héra. Hautain et fier, il dépoussiéra son corps couvert de tatouages complexes et de bijoux maléfiques d’un revers dédaigneux de la main. Lévitant en l’air, il fit face aux anges et aux deux déesses, au milieu de l’Oasis, son corps vibrant d’une énergie à peine contenue.

“L’ancien jouet de mon maître et sa catin de mère. Je serais presque honoré, mais il se trouve que c’est moi qui vous offre le privilège de ma présence. J’accueille tout nouveau défi, même affronter une déesse. J’ai été exalté par les pouvoirs du Prince. Il était temps que je soumette sous mon pied une olympienne.”

Des serpents d’énergie mauve commencèrent à surgir du corps musculeux du noxien corrompu, lacérant les murs des habitations alentours et faisant trembler le sol jusqu’à en faire flotter les cailloux et la poussière. L’Avitite, qui contrôlait l’illusion, commença à reculer dans les ombres des édifices, cherchant à fuir l’oeil vigilant des anges.

Poussant un rire tonitruant, le faux Losgar fusa vers le duo de déesses, son corps enveloppé de foudre, transperçant les murs et les piliers comme une couteau brûlant dans du beurre ...

On disait qu’il n’y avait pas plus proche de l’essence même de la luxure et des plaisirs de la chair qu’une succube, une créature née et éduquée à explorer tous les penchants des pulsions sexuelles des mortels. Si une succube était un avatar du sexe, que pouvait dire Losgar du cas d’Onyxian, celle qui a enfanté une multitude d’incubes et succubes et dont l’expérience devait dater sur des millénaires ? Elle avait surement dévoré bien des âmes dont elle jugea l’utilité ou le divertissement comme expiré. Ayant un vaste palmarès d’amants, il était difficile d’imaginer pouvoir surprendre Onyxian au lit, encore moins la satisfaire jusqu’à l’extase. Elle était après tout dans son domaine de prédilection et avait aussi bien l’expérience que les pouvoirs physiques et magiques pour surmonter même les créatures à la réputation la plus lascive et belliqueuse, tels les centaures, les satyres ou les sirènes.

Losgar pouvait-il être à la hauteur du défi ? Les plus sages diraient qu’il était fou et présomptueux. Stupide, même, d’envisager la possibilité de rivaliser avec la Matriarche des Magoas, dont les rejetons avaient entraîné les âmes les plus prudes à la débauche et avaient surpassé les plus endurants des cavaliers nocturnes. Seule une divinité comme Aphrodite pouvait surpasser cette race infernale dans ce contexte, non ?

Et pourtant, aucun doute ni hésitation ne venaient embrumer l’esprit belliqueux du dernier survivant de Nox. Le Cendré était, si on ignorait toute tentative de modestie, un être biologiquement parfait, un corps à l’endurance terrifiante et aux compétences surnaturelles. Sa planète natale avait été un foyer très hostile, avec sa gravité écrasante, son atmosphère arrachée de catastrophes climatiques, une activité tectonique brutale et une faune et flore adaptée à anéantir des légions pour les engloutir. Tout cela façonnait, modelait un homme dans une tranchée brûlante et oppressante jusqu’à en faire l’être qu’il était aujourd’hui. N’avait-il pas, il y a quelques jours, transpercé de part-en-part un Hécatonchires gigantesque durant leur voyage étrange au sein de Lusst’ghaa ? Losgar n’avait pas besoin de se convaincre qu’il était à la hauteur des attentes démesurées de son amante, tout ce qui comptait en l’instant était de profiter de sa présence, de s’énivrer de son contact. Coucher avec la reine des Magoas était un privilège qu’il comptait bien savourer.

Elle était douée, très douée, Onyxian. Ce qu’elle faisait à son braquemart, avec sa langue serpentine et ses mains griffues ... maudite démone, elle savait stimuler les désirs jusqu’à leur paroxysme. Le beau ténébreux pouvait sentir son pieu se dresser avec une rigidité telle qu’il le sentait sur le point d’exploser entre les lèvres de la fourbe matriarche. Et il ne pouvait se lasser du parfum et du goût de sa fleur intime contre sa bouche, inondant ses sens avec un effet aphrodisiaque si puissant qu’il aurait fait fondre le plus frigide des seigneurs de glace.

Il pouvait sentir la queue caudale enserrer sa gorge, tentant de l’étrangler doucement. Il en fallait bien plus pour presser le cou du Noxien, mais l’appendice était un excellent moyen de sentir les vibrations de plaisir du corps d’Onyxian et ainsi deviner l’effet de ses propres attouchements. Jetant un regard de côté, il vit que le sablier magique du donjon était proche de tourner dans l’autre sens. Encore un peu, et ce serait son tour de la dominer sous son poids ... mais ses barrières s’effondraient à chaque coup de langue de sa partenaire, poussant sa jouissance à sa plus grande proximité.

Ne s’avouant pas vaincu, il attaqua à son tour. Si une de ses mains continuait à doigter le fondement de la terrible succube, son autre main quitta le flanc de la princesse infernale et vint renforcer sa langue. Deux doigts habiles caressèrent les parois humidifiées par sa salive avant de se glisser en elle, lui administrant des caresses intimes qui dévoilaient toute l’expérience accumulée du Noxien. Son énergie électrique faisait l’effet d’un vibromasseur, stimulant au-delà des sens d’une mortelle son intimité, la mettant au défi de résister.


Les deux déesses, ou plus précisément Héra, se défendaient relativement bien. Héra avait dressé une barrière enchantée qui parvint à repousser l’assaut de l’Avitite, qui gardait encore quelques attraits du Noxien qu’elle essayait d’imiter, si on ignorait les nombreux tentacules et dents exorbitantes qui surgissaient de part et d’autre de son corps. Le faux-Losgar fut bousculé jusqu’à un édifice grec, qu’il renversa dans sa chute, faisant plier les antiques piliers. Les hurlements de terreur de réfugiés se firent entendre, mais le monstre était plus concentré sur les deux imminences magiques, qui suintaient de tant d’émotions délicieuses qu’elle en perdait toute concentration, ne pensant qu’à son appétit.

Soudain, Eliphera fut libérée de son emprise, et la créature pointa ses multiples yeux en direction de la nouvelle arrivante, dont l’aura brillante l’aveugla à moitié. Athéna, déesse guerrière de la sagesse. Trois divinités se dressaient en face de l’Avitite, sans compter les légions de Lust qui encerclaint désormais le monstre, coupant toute retraite tout en essayant de réduire les dégâts alentours causés par l’affrontement titanesque. Sifflant sa colère, le faux-Losgar dressa une main tentaculaire vers un énorme monceau de murs brisés, s’emparant d’un des blocs de granite pour le balancer comme une catapulte vers ses ennemis. Le projectile se heurta au bouclier d’Athéna, l’Egide, et explosa en une multitude de miettes qui se dispersèrent devant elle sans pour autant bloquer son élan. Telle une héroïne de la planète Terre, la déesse guerrière lança son bouclier en direction de l’Avitite à la manière d’un disque de lancer. L’abomination tendit une main pour intercepter le projectile, mais rugit de douleur quand le bouclier doré transperça sa chair immatérielle comme un couteau chauffé à blanc coupant dans du beurre. Un bras flaccide tomba sur le sol, prit de spasmes avant de se liquéfier lentement sur le sol dallé de l’Oasis.

Elle essaya de bondir à nouveau vers Aphrodite, celle qui semblait la plus vulnérable des trois, mais se heurta une fois de plus contre la barrière d’Héra. Pire, la Cavalerie de Lust en profita pour surmonter de haut la bête blessée et la transpercer de nombreuses lances, dont celle d’Angewomon. L’Avitite fut clouée sur place par les lances enchantées, tel un pitoyable hérisson.

L’Avitite, le faux-Losgar, l’ancien prédateur enfoui dans Nox, était vaincu. Prisonnier, affaibli par ses nombreuses blessures et le manque de proies consommées, elle abandonna toute agression, perdant la couleur violacée virulente de Slaanesh au profit d’un rose défaitiste. Sans le support de Slaanesh, elle n’était plus qu’une bête primitive soumise aux trois déesses. Surement, avec de l’acharnement, pouvaient-elles arracher au monstre des visions sur les desseins de Devilmon et ses alliées en Enfer ...