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Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:36
par Elena Ivory
C’était probablement le plus grand ennemi qui soit. Plus terrible que l’union malfaisante entre un Balrog et un mage noir issu des profondeurs infernales : une vieille femme acariâtre qui passait son temps à aboyer sur tout ce qui passe, que ce soit les adolescents faisant trop de bruit sous sa porte, les contractuels venant lui proposer des conventions juteuses, les agents municipaux venant lui demander de payer ses impôts, ou venant effectuer le recensement de la population. La vieille mégère accueillit comme il se devait Adamante et Shad, en leur balançant un seau d’eau sale. Adamante leva la main, et forma un bouclier, qui fit rebondir l’eau, n’ayant même pas à se déplacer.

« Rassure-moi... Ce n’est pas ton contact ça ? »

Adamante n’eut pas le temps de dire quoi que ce soit que la morue leur hurla à nouveau dessus, avant de sèchement refermer ses volets, d’un claquement sec. La magicienne hésita un peu.

« Non... C’est sa propriétaire. Mon contact, tu l’as vu : c’est cet avocat qui est venu te voir hier, en prison... Sauf qu’il n’est pas vraiment avocat. C’est à cause de lui que nous nous sommes rencontrées, il a envoyé une lettre parlant de toi, et c’est comme ça que je t’ai trouvé. Il a probablement des informations... »

Cependant, Adamante se doutait bien qu’il y avait un problème. Elle réfléchit rapidement sur un moyen de faire céder cette vieille mégère. Elle était à l’étage, or, c’était là qu’était l’appartement de Mallenbraix. Sans doute était-elle du genre inquisitrice, mais Adamante soupçonnait autre chose... Quelque chose de plus inquiétant. Qu’elle ne sache pas où était sa poule aux œufs d’ors. Mallenbraix payait à un prix assez élevé le loyer, un prix beaucoup plus élevé que le tarif en vigueur, mais c’était le prix exigé par la vieille chouette. Il suffisait de voir sa maison délabrée pour constater qu’il s’agissait d’un taudis. Elle était poursuivie par sa banque pour ne pas rembourser des prêts qu’elle avait contracté, et avait du mal à payer la taxe foncière annuelle. Elle touchait de l’argent grâce au système de retraites, mais ce n’était pas assez pour joindre les deux bouts. La Couronne le savait, car elle s’était un peu renseignée sur cette femme, et elle était menacée par sa banque de saisie. Le loyer que le locataire lui versait lui avait permis de trouver un arrangement amiable avec la banque, cette dernière lui ayant fait un échéancier, afin qu’elle ne soit pas saisie, et ne finisse pas dans une maison de santé.

Adamante décida de jouer là-dessus, et toqua à la porte.

« Fichez le camp, ou j’appelle !
Madame, je suis Adamante de Mélisi, la collaboratrice de Maître de Mallenbraix ! Shad est notre assistante ! »

La vieille ne connaissait sûrement pas Adamante, et elle avait inventé le premier mensonge qui lui était venu à l’esprit, en oubliant de changer son prénom. La vieille ne les insultait pas, et Adamante tourna sa tête vers Shad, posant brièvement un doigt sur ses lèvres, comme pour lui faire signe de se taire. Elle tapa à nouveau contre la porte :

« Madame, je venais voir si Maître de Mallenbraix se portait bien, car je n’ai pas eu de nouvelles de lui ce matin. Comme vous le savez, nous luttons ardemment à défendre les honnêtes propriétaires de ce quartier, et j’ai besoin de le voir ! »

Elle se tut un peu, se pinçant les lèvres, résistant à l’envie de lancer un sort pour ouvrir la porte en la faisant sauter. La vieille s’avança alors, et ouvrit la porte en grommelant. Elle était bossue, le dos voûté, et les regarda lentement, soupçonneuse.

« Une jeune femme bien ne devrait pas porter des vêtements aussi indécents, grommela-t-elle.
Maître Mallenbraix est-il ici ? répéta Adamante, en se forçant à rester calme.
Non ! C’est un menteur, lui, un hypocrite, comme tous les autres ! Il prétend pouvoir me défendre, et il passe toutes ses nuits à faire je ne sais pas quoi... un dealer de drogues, sûrement...
Je vous assure que Maître Mallenbraix s’occupe avec attention de votre cas...
Et moi, j’dis que c’est un con, et que vous, m’avez tout l’air d’une pute ! »

Si cette mégère savait qu’Adamante pouvait la mettre à mort rien que pour avoir dit ça... Elle se força à puiser d’ultimes monts de sagesse, et reprit :

« Je pense que je devrais consulter les affaires de Maître Mallenbraix, j’y trouverais peut-être des informations utiles. »

La vieille femme renâcla du nez, les observant tous les deux, en plissant les yeux.

« De ‘façon, vous ne comptez pas me lâcher la grappe... Mais, si la boule de puces laisse un seul poil, j’vous vire ! C’était tout piant là-haut, j’ai du passer le ménage, tché ! Adolescence de cancres. Un avocat ! Bah, on croit rêver ! ‘T’en foutrais, moi, du Code civil. Qu’est-ce que ça prend pour un maître, ça, alors que ça sait même pas ranger ses chaussettes, hé ?! »

Elle pérorait toute seule en leur ayant tourné le dos, et Adamante lui fit signe de passer. Elle grimpa l’escalier en bois, qui mena directement au grenier, sous les combles. Il y avait le lit de Jacques, ainsi qu’un bureau.

« Il faut voir si on peut trouver quelque chose... Des notes, un carnet, n’importe quoi d’utile... »

Elle se doutait que la mégère avait déjà du faire son inspection. Si Adamante avait de la chance, elle n’avait pas vu quelque chose, ou alors, elle l’avait conservé pour elle.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:47
par Shad
L’Okami n’eut d’autres choix que de garder le silence pendant la conversation entre Adamante et la propriétaire des lieux.  Il ne fallait pas être une personne d’une grande intelligence pour comprendre la signification du geste de la mage. Sans un mot donc, la lupine croisa ses mains derrière son dos, sa queue effectuant de petits mouvements pendant qu’elle écoutait les deux femmes argumentées entre elles.  Et elle dû avouer qu’elle se demandait bien comment Adamante faisait pour ne pas s’énerver contre cette vielle mégère.

L’arrogance de la propriétaire était un fait à revoir. Cette femme avait-elle réellement la moindre idée à qui elle s’adressait ? La Okami se demandait même si elle s’adressait ainsi à quiconque. Et parler ainsi à des personnes liées à la Couronne pouvait vous coûter très cher.  Enfin, la Louve était aussi dans le même cas, vu qu’elle ne s’adressait pas comme le protocole l’exigeait à la Reine ou sa conseillère.  Peut-être devrait-elle réfléchir à deux fois avant de parler ? Songeant à cela, elle haussa simplement les épaules. Ce n’était pas la peine de changer subitement sa manière de s’adresser à Adamante ainsi qu’à la souveraine.

Tiens ? Le silence était revenu. La lupine porta son attention sur la porte qui s’ouvrait, laissant voir la vieille propriétaire. Autant dire que la méfiance se lisait dans ses yeux, ainsi qu’une certaine pointe de dégoût  envers la Okami. Cette dernière ne pipa mot quant à la remarque sur les puces. Ce n’était pas le moment pour hausser la voix et tout faire capoter. Pourtant,  elle avait bien envie de prendre une apparence plus animale et de vraiment éparpiller des poils ici et là dans la pièce qu’elles allaient visiter. Mais elle s’en abstiendrait.  Shad suivit donc Adamante à  l’étage, observant dans un premier temps la pièce dans l’ensemble.

« Au moins…Ce n’est pas grand »

Un certains avantage en quelque sorte. Mais si la vieille était passée avant eux et surtout si elle venait de ranger la pièce comme elle l’avait mentionné, il serait étonnant qu’elle n’est pas mis la main sur des écris importants ou tout autres objets pouvant être lié à l’histoire tournant autour de l’abattoir Mandus. La Okami s’avança vers le bureau et l’examina. Elle fouilla dans les  tiroirs vides de tout contenu, observa  en-dessous du meuble en se penchant  légèrement. Rien.  On aurait pu prendre le bureau comme un meuble neuf, tout juste déposé dans la pièce.

Pourtant, si ce faux avocat prenait bien des notes de ses enquêtes, pourquoi n’y avait-il rien ? Pas le moindre dossier, pas la moindre petite  feuille, rien. La lycane commença à suspecter la mégère de les avoir pris avec elle pendant son nettoyage. Si tel était le cas, il leur faudrait donc la voir à nouveau et Shad n’était pas très enjouée à cette idée.  Prise de doute, elle continua à inspecter le bureau, tapotant  sur les planches servant de fond de tiroir.  La louve toqua doucement avec l’index replié  dans les différents  compartiments avant de remarquer qu’un sonnait différemment.
En examinant le meuble et plus particulièrement le tiroir à double fond, la Louve ne trouva aucun moyen de l’ouvrir. S’il était possible de l’ouvrir, ce n’était pas avec les mains en tout cas. Peut-être en usant d’un sort ?  Elle interpella donc Adamante pour lui en faire part :

« je pense que ce tiroir cache quelque chose mais impossible pour moi de l’ouvrir et je crains également qu’il va falloir retrouver notre chère amie en bas. »

L’Okami eut un léger frisson d’appréhension. Non, cette femme ne lui faisait pas peur, mais elle la craignait sur le fait qu’elle risquait fort de vite la faire sortir de ses gonds. Hors, elle devait garder son calme, surtout en ces jours d’inquisition.  La Okami porta donc son regard dans la pièce,  la balayant du regard. Se mordant les lèvres légèrement elle osa demander :

« Si je serais venue de suite à la rencontre de ce Jacques….Tu penses qu’il serait toujours….Là ? »

Indirectement, la lycane se sentait coupable de la disparition du faux-avocat. Elle avait refusé de le rencontre quand elle était au poste et elle venait à se demander si cette rencontre n’aurait pas pu tout changer. Peut-être serait-il encore là et non disparu on ne sait où.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:47
par Elena Ivory
Les espions royaux n’étaient pas des idiots ou des incompétents. Jacques savait que l’espionnage ne se résumait pas à de séduisants individus en costume. Les plus redoutables espions étaient les gens insoupçonnables : les gardes impassibles, les secrétaires, les pages, les domestiques... Ceux qui avaient accès à tout, mais dont, par un excès de confiance et d’arrogance, on ne se méfiait pas assez. Des gens comme cette vieille harpie. Jacques avait du savoir que cette femme l’espionnerait, et fouillerait ses affaires pendant son absence. Il devait donc avoir trouvé un moyen de dissimuler ses informations, et, pour le retrouver, Adamante utilisait un sort magique de clairvoyance, lui permettant de voir à travers le décor, afin de repérer des planques, des caches. Elle commença par le plafond, en estimant que la vieille harpie n’aurait pas pu regarder sous les combles, mais ne vit rien à travers les poutres. Depuis l’une de ses paumes, une sorte de rayon magique filait, permettant de voir à travers la matière, et elle le déplaçait lentement, tandis que Shad, de son côté, inspectait le bureau.

Ne trouvant rien, Adamante fila vers la lourde armoire, et l’ouvrit. Elle abritait la garde-robe de Jacques, et cette dernière put voir une série de costumes, ainsi qu’une robe noire d’avocat. Cette robe était une reproduction d’une véritable robe, mais elle était fausse. Les robes judiciaires étaient exclusivement faites par un tailleur spécialisé de Lumen, ledit tailleur bénéficiant d’une exclusivité sur ce point. Par ordonnance, tout tisserand qui confectionnerait des robes judiciaires supplémentaires serait ainsi coupable d’une contrefaçon. Cette robe noire avait été faite par les services d’espionnage de Lumen, et avait été commandée auprès de ce tailleur. Si elle était fausse, c’est parce que le nom brodé à l’intérieur ne faisait pas référence à un véritable avocat. Il aurait cependant fallu faire plus qu’une simple observation de la robe pour le voir. Ces robes étaient faites dans un tissu très spécial, qui permettait de rouler la robe en boule, sans risque qu’elle ne se froisse. Ce genre de tissus ne se trouvaient pas facilement, et les contrefaçons de robes judiciaires étaient souvent repérées à cause de ça : un tissu différent. Adamante y songeait fugacement, et éclaira la robe, en sachant que ce genre d’instrument pouvait contenir des poches secrètes.

Malheureusement, il n’y avait rien. Adamante continua à observer l’armoire, espérant y voir une cache. Shad intervint alors, la tirant de ses pensées, en lui indiquant qu’il y avait un tiroir récalcitrant, abritant quelque chose en son sein. La magicienne hocha la tête.

*Bien sûr, un tiroir à double fond !*

Elle se rapprocha de ce dernier, et, en utilisant son sort, vit que le mur en bois au fond du tiroir était factice, et qu’il y avait derrière, un petit carnet. Les notes de l’espion ! Adamante eut un sourire ravi.

« Bien joué, Shad ! Il doit sûrement y avoir un mécanisme pour l’ouvrir, mais je suppose que Jacques l’a emmené avec lui… »

Revoir la vieille harpie en bas ne la tentait pas. Elle avait sans doute pu prendre quelques notes, mais Adamante tenait déjà à voir le contenu des informations figurant dans le carnet. Elle utilisa lentement sa magie, et parvint ainsi à enclencher le mécanisme de ce faux mur, l’abattant. Elle tracta ainsi à elle le carnet, alors que Shad lui faisait part de son inquiétude, et, probablement, d’un sentiment de culpabilité naissant :

« Si je serais venue de suite à la rencontre de ce Jacques….Tu penses qu’il serait toujours… Là ? »

Clignant lentement des yeux, Adamante la regarda, et haussa les épaules.

« Je n’en sais rien, Shad, et je me méfie toujours des ‘‘si’’. Ce dont je suis sûre, c’est que tu n’as rien à te reprocher. Jacques est un espion de la Couronne, un homme instruit et aguerri. C’est quelqu’un qui sait ce qu’il fait, et qui n’est pas un incompétent. De plus, nous n’avons aucune preuve qu’il ne lui soit arrivé malheur. »

Le carnet comprenait une série de brèves informations sur l’enquête de Jacques.
J’ai rapidement pu remarquer toute la fascination que ces gens vouaient à Mandus. Son abattoir tourne à plein régime. Les porcs arrivent le matin en grande quantité, et repartent dans la journée. L’emploi créé permet aux gens de vivre mieux, et d’améliorer la sécurité des rues. Serait-il possible que, en définitive, cet homme n’ait rien à cacher ? Le paranoïaque que je suis ne peut s’y résoudre.
Dans d’autres pages, il indiquait que le père Lamb, initialement, était assez hostile à cet homme, le voyant comme « un profiteur de plus », l’accusant de n’être rien de plus qu’un « opportuniste arriviste profitant de la souffrance des gens pour les exploiter ». Visiblement, Lamb avait fini par changer d’avis. L’espion n’avait visiblement pas réussi à réunir de preuves sur ce dernier, mais, plus il avançait dans son enquête, plus il commençait à avoir des soupçons.
Certaines choses ne collent pas. Plus ça va, et plus je m’en rends compte. J’ai réussi à m’entretenir avec l’un des experts-comptables de l’abattoir, et les chiffres ne mentent pas. Chaque matin, les contremaîtres comptent le nombre de porcs qui arrivent dans l’abattoir, et le consignent dans leurs registres. Or, d’après ces rapports, il apparaît qu’il y a une différence de kilos de viande entre celle qui arrive, et celle qui repart. Chaque jour, plusieurs porcs disparaissent dans cet énorme abattoir. Or, on n’a recensé aucun vol... Et voler une carcasse de porc, dans une manufacture aussi peuplée, voilà bien qui ne doit pas passer inaperçu. Où se retrouvent les porcs qui s’envolent ? Je dois aller voir cet expert-comptable pour qu’il me confie son rapport, ainsi que ses doutes sur Mandus. Je n’ai toujours aucune preuve, mais mon instinct me dit que cette âme dévouée et charitable doit bien avoir ses coins d’ombres. Loin de moi l’idée de vouloir influer un peu plus de cynisme dans les rues de Lumen, mais cette différence de tonnage, en vérité, me surprend.
On approchait de la fin du carnet, Adamante fila à la dernière page.
Non, ce ne sont pas que les porcs. Les disparitions... Est-ce qu’elles ont bien lieu à cause de l’abattoir ? Je ne saurais y croire, et pourtant... Mon esprit est en telle ébullition que je peine à coucher les mots sur ce carnet. Trop de doutes, trop de suppositions, trop d’hésitation. Tout cela ne peut être vrai. Je dois aller voir cet expert ce soir. Si cela est vrai... Mais je ne saurais me résoudre à y penser. Il y aurait eu un mort près de l’abattoir. Un témoin oculaire, une Okami, l’aurait vu. J’ai essayé de la récupérer, mais ces damnés gardes ne m’ont pas laissé faire, et je ne pouvais insister davantage sans qu’on risque de surprendre mon identité. J’irais voir du côté de l’abattoir, mais je suis convaincu que ce meurtre est réel. C’est pour ça que j’ai pris la liberté d’avertir mes supérieurs. Si tout cela est vrai, j’irais les voir demain matin... Sans doute devrais-je déjà aller les voir, mais il me faut une preuve, quelque chose... Cet expert-comptable est terrorisé, et n’a accepté de me recevoir que ce soir, dans un entrepôt abandonné. C’est là-bas que je dois me rendre. Avec ce rapport en main, tout ira mieux. Si cette machinerie est vraie, il est impératif de la stopper.
L’écriture était rapide, précipitée, comprenant plusieurs ratures. Jacques terminait en indiquant l’emplacement de l’entrepôt. Adamante s’écarta ensuite, laissant ainsi le soin à Shad de relire le carnet, et se mit dans un coin. Qu’est-ce que Jacques avait donc constaté de si effrayant pour précipiter la rencontre avec ce comptable ? Tout ça ne lui disait rien qui vaille.

Que se tramait-il donc dans cet abattoir ?

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:47
par Shad
La lupine observa simplement Adamante user de sa magie pour déloger le double fond du tiroir. Comme elle l’avait soupçonné, un recours aux arts des arcanes était nécessaire pour atteindre les notes de l’espion de la Cour.  Ce qui expliquait également pourquoi la vieille mégère n’avait pas réussi à mettre la main dessus. Ou si cette dernière avait tenté de déloger la planche à l’aide de sa main, cela avait dû se solder par un échec critique. Ce qui permet au faux avocat de cacher  ses notes, une bonne chose en soit.  La Okami n’osait imaginer ce qui aurait pu se passer si la vieille avait posé ses mains dessus.

Shad laissa  la magicienne à la lecture du carnet,  attendant patiemment qu’elle finisse. Au fil de la progression du carnet, la Louve put noter le changement de faciès de la part d’Adamante. D’abord reposé, ce dernier semblait se renfrognait au fur et à mesure et il était possible d’y lire le doute, l’incompréhension et une certaine forme de questionnement. Après tout, qui ne le serait pas avec tous ce qui se passe actuellement ?  Shad empoigna doucement le carnet que lui tendait Adamante, le lisant à son tour pendant que cette dernière semblait  perdue dans ses pensées.

Plus la Okami lisait, plus elle se disait que l’abattoir et Mandus devenaient de plus en plus suspect.  Il y’avait bien trop d’incohérences dans les écrits de Jacques  pour que ce soit une simple coïncidence, et puis, cette dernière page, ces craintes qui y transpiraient, cette écriture fait à la va vite, comme si le temps était compté.  La lupine eut un sentiment de malaise, n’osant imaginer l’état psychique de  l’espion. Elle referma le livret,  le repassant à Adamante, s’humectant les lèvres avant de prendre la parole.

« Tout porte à croire que Jacques a découvert un fait intéressant et puis tous ces soucis liés à l’entrée des porcs, aux disparitions…Si on suit ses écrits, le dernier endroit où il a été fut cette fameuse réserve. Je pense qu’il faudrait y aller et voir si nous trouverons des traces lui appartenant là-bas. »

C’était pour la lupine, le dernier endroit où avait pu se trouver Jacques, du moins, le dernier endroit dont elles avaient connaissances. Si elles voulaient retrouver ses traces, il était primordial de commencer par ce lieu isolé. Pourtant, beaucoup de fait les engager à la plus grande prudence.  Le lieu ne devait plus être aussi sûr, peut-être était-il même surveillé à l’heure qui l’est ? Tant de questions restées sans réponses mais si énervantes. Il n’y avait que dans les films et les séries sur Terre ou une enquête se faisait sans encombres ou sans grand défi avec un résultat toujours positif à la fin. Réalisant ce fait, elle reprit subitement la parole :

« Peut-être devrions nous prendre gare. Si cet homme a disparu dans cet entrepôt qui sait ce qui nous attend. La prudence serait donc de mise. Mieux vaudrait nous rendre au Palais avant tout. Mais si tu penses qu’on peut y jeter un œil et bien, je te suivrais ».

Libre à Adamante de faire de le choix. En retournant au Palais, il leur serait donc possible de faire examiner la fameuse fléchette, de faire part des découvertes à Elena et également de mieux se préparer pour l’inspection de cet entrepôt désolé.  Au contraire, en se rendant sur place, les deux femmes seraient en mesure de découvrir encore des indices bien frais et de sans doute savoir ce qui aurait pu arriver à Jacques ainsi qu’à son interlocuteur. Mais le risque était présent.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:48
par Elena Ivory
[HS.- Et un petit coup de théâtre, un !]
*
*  *
Tandis que Shad prenait connaissance des notes de Jacques, Adamante, elle, réfléchissait. Comme Shad, elle avait compris qu’il y avait maintenant deux options possibles :
  • Aller à l’adresse de l’entrepôt mentionné par leur espion afin d’y découvrir des indices ;
  • Retourner au Palais d’Ivoire afin de faire le point, et de mentionner ses découvertes à Elena.
Naturellement, le plus tentant était la première option. Mis à part les notes de Jacques, Adamante n’avait rien, et elle savait que, tôt ou tard, les services d’espionnage s’inquièteraient de la disparition d’un de leur agent, et risquaient d’envoyer des agents supplémentaires. Cependant, elle n’avait pas oublié l’attaque que les deux femmes avaient subi. Ce mystérieux assassin devait continuer à rôder dans les environs, et, s’il était lié à cette histoire, alors il était probablement au courant de l’entrepôt, et devait probablement y avoir tendu des pièges. Adamante, tout d’un coup, se mettait à craindre le pire pour son espion. Il était en réalité fort peu probable qu’il ait survécu. Shad continuait à lire, et Adamante se faisait petit à petit à l’idée de ne pas commettre la même erreur que lui. Visiblement, Jacques avait mis la main sur quelque chose de gros, de très important, mais, plutôt que d’en informer ses supérieurs, il avait choisi de sous-estimer l’adversaire, de faire cavalier seul. En soi, les espions royaux étaient relativement libres, tant qu’ils ne commettaient pas d’infractions pénales trop fortes, mais il était manifeste que le faux-avocat avait commis une erreur de jugement. Adamante était une magicienne compétente, certes, et elle effectivement accompagnée d’une talentueuse Okami, mais elle savait aussi qu’elle n’était pas infaillible.

Shad termina sa lecture, puis reporta son attention vers Adamante, pour lui soumettre le même dilemme.

« Peut-être devrions nous prendre gare. Si cet homme a disparu dans cet entrepôt qui sait ce qui nous attend. La prudence serait donc de mise. Mieux vaudrait nous rendre au Palais avant tout. Mais si tu penses qu’on peut y jeter un œil et bien, je te suivrais. »

Adamante, qui avait silencieusement observé la rue, hocha lentement la tête en se retournant vers Shad, comme si elle acquiesçait à cette idée.

« Je dois t’admettre qu’il est très tentant d’aller voir cet entrepôt, mais nous ne devons pas oublier l’attaque que nous avons eu. Je préfère m’assurer que ce carnet soit remis au sein du Palais d’Ivoire. Par ailleurs, nous pourrons aussi en profiter pour nous renseigner sur le personnel administratif de l’abattoir. »

Pour ouvrir sa manufacture, Oswald Mandus avait du suivre la législation en la matière. Or, en droit lumenien, la liberté d’établir son établissement était subordonnée à une autorisation administrative, cette autorisation étant décernée à la suite d’un contrôle. L’objectif était de lutter contre la fraude et l’escroquerie. Pour ouvrir son entreprise, Oswald avait du faire parvenir une copie des statuts de sa société, et ces statuts étaient toujours consignés dans les archives du service commercial. Ces informations étaient compilées et synthétisées dans un registre destiné au public, le registre du commerce et des sociétés, mais l’administration disposait de plus amples informations. Si Adamante voulait consulter ces informations, ce n’était pas pour le plaisir de se perdre dans les profondeurs du jargon administratif, mais pour obtenir l’identité de l’expert-comptable. Il ne devait pas y en avoir cinquante, et elle ne voulait pas prendre de risque. Si cet homme était encore en vie, les soupçons de celui qui était derrière cette machination devaient être forts, et il devait se terrer.

Adamante récupéra donc le carnet, et descendit. La vieille mégère était en train de faire chauffer du thé, mais les entendit descendre, et se rapprocha.

« Attendez ! »

Surprise, Adamante s’arrêta sur le palier, et tourna la tête.

« Écoutez, nous vous remercions pour votre coopération, mais...
Pffuaah ! grogna la vieille. Si vous êtes une avocate, alors moi je suis Nöly Ivory réincarnée ! »

Adamante cligna lentement des yeux, surprise.

« Je... Euh...
Oh, votre ami pouvait bien balancer son jargon juridique à foison et faire son petit avocat, avec moi, ça ne prend pas. Vous croyez que je ne les connais pas, ces gens-là, hein ? Tous à péter plus haut que leurs culs ! J’ai été polie avec Monsieur Mallenbraix, car il payait rubis sur ongle, mais je savais bien que ce n’était pas un homme de loi. Ah, vous, les gens de la haute, vous nous prenez pour plus bêtes qu’on n’est, et vous vous prenez pour plus intelligent que vous z’êtes ! »

Non seulement cette vieille carne était insupportable, mais elle avait visiblement l’œil. Son discours ressemblait à celle d’une paranoïaque, mais, effectivement, elle avait raison. Les vieilles bourriques en savaient plus qu’elles ne voulaient bien l’admettre, et, visiblement, elle sentait qu’elle allait rester seule si Shad et Adamante partaient.

« Je sais très bien ce que Monsieur Mellenbraix voulait... Enquêter sur Môôôssieu Mandus, l’homme qui va sauver Lumen ! Ah, depuis le temps qu’on nous la sort, celle-là ! Mais moi, je sais ! J’entends les bruits, les murmures, les rumeurs ! C’est les autres qui vous envoient, hein ?
Quels autres ? demanda Adamante, subitement intéressée.
’Pas de ça avec moi, jeune fille ! Je gueule, je gueule, mais c’est pour qu’on ne voit pas que la vieille carne, elle a l’œil, hey ! J’sais très bien que vous aût’, vous pouvez pas le sacquer, l’Mandus, et j’peux pas vous le rapprocher, dis voir ! Il en cache des choses, héhé, si vous saviez... Mais moi, je sais. Moi, j’ai vu !
Vu quoi ?! »

La vieille secoua la tête.

« Ça fonctionne pas comme ça ! Si le blondinet est plus là, c’est qu’il a sucé un os trop gros pour ses petits chicots, hein, héhé ? »

Elle le balança avec un sourire hideux, révélant sa dentition pourrie.

« J’vous dirais ce que je sais, si vos amis de la haute me lâchent la grappe ! Ils veulent saisir mes biens, ma maison, l’armure de mon défunt mari ! ‘Trouvez ça normal, vous ?! Il est mort pour servir le pays, et j’ai juré d’entretenir son armure jusqu’à la fin de mes jours. Vous voulez Mandus ? Les autres pécores parleront pas ! Soit ils s’enterrent la tête dans le sable en pétant le cul à l’air libre comme des ânes, soit ils ont trop peur pour oser becqueter ! Moi, tout le monde me prend pour une vieille folle, mais, j’vous le dis, j’ai l’œil ! Assurez-vous qu’on me fiche la paix... J’veux un... Comment que z’appelez ça, vous autres de l’haute ? Hum... Oui... Je veux que mon banquier m’offre un reçu pour solde de tout compte, ou un truc comme ça... Bref, que mes dettes disparaissent ! »

C’était un coup de théâtre inattendu, et, surtout, une autre piste possible. Si cette vieille carne était là depuis des années, il se pouvait qu’elle sache bien plus de choses que ce qu’on pouvait penser. Cependant, elle ne dirait rien si elle n’avait pas ce qu’elle voulait.

« On se comprend bien, ma jolie ?
Je... Je vais y réfléchir.
C’est ça, c’est ça, réfléchissez, mais grouillez-vous le cul une fois, dites ! Maintenant, décarrez d’ici ! »

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:49
par Shad
Les deux femmes étaient bien en raccord sur un point précis : Il était bien plus judicieux de rapporter les découvertes tout autant hétéroclites au palais d’Ivoire avant de s’engager dans une nouvelle inspection d’un lieu inconnu. Surtout que leur dernière enquête avait bien failli coûter la vie à la Okami et elle ne devait que son salut au pendentif qu’elle porte autours de son cou. Se rendre dans cet entrepôt délabré était une piste intéressante mais faisait appel à la prudence. La lupine hocha donc la tête, approuvant la décision d’Adamante :

« Et puis, qui sait, peut-être il  y’va-t-il un message caché au sein de ses notes ? Ce n’est pas à exclure »

La lycane avait pour pressentiment qu’un code avait été noté entre les lignes du calepin et permettrait à celui qui arriverait à le déchiffrer de découvrir un nouveau fait des plus intéressants sur l’enquête établi par Jacques de Malembraix. Ou au pire, il n’y avait aucun message caché mais suffisamment de notes pouvant mettre en doute la bienfaisance de Mandus. Surtout que la lupine n’avait guère oublié cette écriture fait à la va-vite, brouillée, pleine de rature, comme si le temps était compté pour celui qui tenait précédemment la plume.  Non, pour Shad, ce carnet recelait encore bien d’informations qui faudrait lui faire cracher.

Shad marcha donc juste derrière Adamante lorsque les deux femmes sortirent du grenier, faisant office dernièrement de chambre pour le faux avocat.  Les planches de l’escalier de bois grincèrent sous leur pas et la lupine se questionna si ce n’était pas ces sons stridents qui assaillaient ses tympans qui avaient aussi tôt fait de rameuter la vielle à leur rencontre, cette dernière les apostrophant.  Shad laissa parler Adamante, pensant qu’elles sortiront enfin de ce taudis avant de comprendre bien vite qu’elle s’était fourvoyée.  La Okami crû en premier lieu à une blague quand la propriétaire commença à retenir leurs attentions, aboyant qu’elle était au courant de rumeurs.

Pour une surprise, c’était une surprise,  spontanée et inattendue.  Joignant ses mains derrière son dos, Shad écouta sans mot dire la discussion quelque peu virulente se déroulant entre la femme issue de la noblesse et celle issue du bas peuple.  La mégère avait réussi à elle seule un coup de théâtre des plus grandioses. Elle qu’on pensait folle, voilà qu’elle mettait sur le tapis qu’elle avait divers renseignements pouvant intéresser la couronne. Mais le prix à payer était également conséquent : Une suppression totale de ses dettes. La Okami ne put s’empêcher de se demander comment cette femme allait faire pour payer ses nouvelles dettes.  Elle allait sans doute retomber dans un cercle vicieux sans fin.

Cependant, c’était bien ce qu’elle voulait et accentua bien le fait qu’elle ne parlera pas avant d’avoir eu la confirmation que  sa requête  avait belle et bien été acceptée. La Okami osa quand même prendre la parole, attirant immédiatement les foudres de la propriétaire. Si le regard de cette mégère aurait pu lancer des éclairs, sans doute les auraient-elles envoyées sur la Louve pour oser lui adresser ainsi la parole et mettre en doute ses dires.

« Et…Avons-nous la moindre preuve que vous savez des choses ? Qui nous dit que ce n’est pas pour qu’on vous retire vos dettes ? »
« Pouah ! Le sac à puce tente de faire son intelligente ? je sais des choses moi mâdame ! Des choses importantes pour vous ! Mais hé ! Je ne vous dirais rien avant que j’ai eu satisfaction voilà ! »
« Pas la moindre petite information ? »
« Quoi ? Les couards de la couronne ne savent pas rechercher des informations par eux-mêmes ? Je ne dirais rien ! Pas avant que toutes mes dettes  me soient réglées. Maintenant dehors ! »

Ponctuant ses dires, la vieille fit de grands gestes, chassant les deux femmes, leur claquant la porte au nez. La Louve ne put s’empêcher de grogner, ses poils s’étaient hérissés tandis que ses yeux étaient braqués sur la porte close. Elle s’en détourna maugréant à voix basse.

« Elle devrait faire attention, car Othello la hante… »

Pourtant, cette femme était une source d’informations à ne pas exclure. Même si cela pouvait être une supercherie pour ne plus avoir ses créanciers sur le dos.  Encore un fait dont il faudra faire part à Elena lors de leur retour au palais. La Okami souffla un coup et se dirigea vers la jument qu’on lui avait attribuée pour se déplacer au sein de la ville, montant sur la selle, caressant doucement l’encolure de  l’animal. Il était maintenant  temps de rentrer et de mettre déjà tout ce qu’elles savaient au clair tout en informant la Reine.

« Direction le palais il me semble. Je te suis. »

Les deux destriers furent lancés au trot, les passants s’écartant sur leur passage. Les deux cavalières attirèrent bien également des regards d’étonnement et pour  éviter toute cohorte quant à sa race,  Shad rabattu sa capuche d’ébène, mettant ainsi son visage dans l’ombre, cachant à quiconque sa véritable nature. Curieuse, elle se tourna vers Adamante, l’interpellant :

« Et pour la vieille… La couronne va répondre à sa requête ? Est-on sûres qu’elle sache réellement quelque chose ? Quoi que…Nous n’avions pas parlé de Mandus et étrangement elle savait que nous enquêtions sur lui… »

Une coïncidence ? L’Okami n’y croyait pas et commençait réellement à se demander si cette femme ne disait pas la vérité en leur soumettant qu’elle était au courant d’informations des plus utiles. Au loin, la silhouette du palais se faisait plus nette et d’iic quelques minutes les deux femmes pénètrerons dans son enceinte avant de dévoiler leur découverte.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:49
par Elena Ivory
Les deux femmes furent jetées dehors, et Adamante sentit l’irritation de Shad devant le comportement de la vieille. En regardant autour d’elle, la magicienne vit que plusieurs voisins, derrière leurs rideaux, les observaient, ainsi que quelques passants. La vieille mégère claqua les portes en leur vociférant dessus, et les voisins cessèrent de regarder. Adamante fronça lentement les sourcils, tandis que Shad crachait son dépit contre la femme, le poil hérissé.

« Calme-toi, l’encouragea Adamante. Retournons au palais. »

Il n’y avait que là-bas qu’Adamante pourrait aussi s’occuper de l’histoire de cette vieille. Le duo retourna sur leurs chevaux, et remontèrent la rue. Il leur faudrait plus d’une demi-heure pour rejoindre le Palais d’Ivoire, ce qui laissa à Adamante le temps de réfléchir, et de faire le point. Quelqu’un les avait attaquées avec une sarbacane contenant des fléchettes empoisonnées par le venin du basilic de Zerrikania. Or, dans le manoir de Mandus, Adamante avait vu des photographies et des peintures retraçant le voyage exotique mené par Oswald à Zerrikania. C’était un indice laissant supposer que Mandus pouvait être lié à cette tentative d’assassinat. Par ailleurs, Jacques, son contact, avait également des soupçons sur Mandus, et avait visiblement vu qu’il y avait des irrégularités dans les registres de compte. Il aurait du s’adresser à l’expert-comptable de la société, mais Adamante ne savait pas si cet entretien avait eu lieu. Elle allait devoir envoyer quelqu’un dans cet entrepôt, probablement Zephyr. C’était une femme loyale, et, par ailleurs, Zephyr venait aussi de Zerrikania. S’il existait à Lumen une confrérie d’assassins utilisant du venin de basilic zerrikanien, Zephyr serait en mesure de lui dire. Il fallait juste la retrouver.

En chemin, Shad lui parla à nouveau de cette vieille femme. Adamante tourna sa tête vers elle, afin de lui donner son sentiment :

« Tout tourne autour de Mandus et de son abattoir dans cette histoire... Soit un rival cherche à nuire à sa réputation, soit cet homme a réellement quelque chose à cacher. Je pense que cette vieille femme doit savoir des choses. C’est une mégère, mais aussi une commère. »

Elle devait tout simplement s’ennuyer chez elle, et, visiblement, elle était là depuis longtemps, comme le témoignait sa volonté de conserver sa maison. Elle n’était pas, en soi, méchante : c’était juste une vieille femme seule et désolée, une femme fière, avec du caractère, qui refusait d’admettre qu’elle avait besoin des autres. Adamante était sûre que sa demande envers elle n’était pas tant liée à sa protection économique qu’à l’envie de voir des gens puissants se préoccuper d’elle. Comme Shad le pensait, si la Couronne pouvait l’aider à se débarrasser de ses vieilles dettes, tôt ou tard, elle retrouverait des problèmes économiques. La solde de son mari, s’il était soldat, avait sans doute suffi à payer cette maison, mais la petite retraite de cette femme n’y servait à rien. De plus, elle n’avait théoriquement pas le droit de faire un bail. La bicoque était insalubre, et n’importe quel locataire aurait pu obtenir la résolution judiciaire du bail. Le grenier ne respectait pas les arrêtés d’urbanisme sur la hauteur minimale du plafond, les murs avaient des lézardes, la moisissure commençait à recouvrir le bois. Pour autant, Adamante ressentait surtout de la pitié envers cette femme. Mais, si elle pouvait les aider...

Quant à savoir si la Couronne pouvait le faire, c’était une autre histoire.

« Il faudra en convaincre Elena, mais nous ne sommes pas à Mijak. Ici, le pouvoir judiciaire est indépendant, et n’a pas à répondre aux injonctions de la Couronne. »

Il allait falloir trouver un moyen d’intervenir. Adamante y réfléchissait tout en rejoignant le Palais. Les deux femmes descendirent à terre, laissant les palefreniers ramener les chevaux dans les écuries royales, et Adamante remonta dans le château, s’avançant rapidement le long des couloirs. La Reine de Lumen était dans une pièce navale. C’était une sorte de petite pièce avec des maquettes de bateaux et de navires. Sous l’ère de sa mère, Nöly, il y avait parfois des visites organisées par la Couronne auprès des classes d’école. Les écoliers visitaient notamment cette pièce, et avaient alors la chance de voir la Reine leur parler des navires de guerre de Lumen.

« Nous avons du neuf, Elena ! »

Entre elles, Adamante et Elena s’appelaient par leurs prénoms. La Reine, qui était en train de lire un livre sur la marine, écouta Adamante lui faire le récit de leur séjour. La Reine pâlit quand elle apprit qu’on avait tenté de les tuer, et resta silencieuse, laissant Adamante parler, contant ensuite ses pérégrinations avec la vieille folle.

« Je pense qu’elle doit savoir des choses, mais, si l’affaire est devant le tribunal... »

Ce ne pouvait être que devant le tribunal civil.

« Je vois... Venez. »

Elena réfléchissait vite, et conduisit les deux femmes dans une autre pièce. La Couronne avait son propre service juridique, regroupant les avocats les plus compétents du pays, ainsi que ses propres huissiers. Ce service était dissocié de la Cour royale. D’un point de vue administratif, le service juridique de la Couronne disposait d’un secrétariat, et la Cour royale de son greffe, dans des locaux distincts. C’est dans ce cabinet qu’Elena se rendit, allant dans la pièce des archives. Il y avait là un recensement de tous les dossiers ayant impliqué la Couronne, des armoires entières, et elle passa cette pièce, rejoignant la documentation juridique : revues juridiques, essais, etc... Il y avait notamment la carte judiciaire de Lumen, que chaque cabinet avait. La Reine dut batailler un peu dans tout ce fatras de papier, mais réussit à la trouver, et la posa sur une table.

Comprenant où elle voulait en venir, Adamante lui indiqua où la vieille vivait, ce qui permit de voir à quel tribunal civil cet endroit était rattaché.

« C’est le cinquième tribunal » décréta Elena.

Jadis, la carte juridique de Lumen était découpée entre plusieurs tribunaux civils de différents degrés. Il y a quelques siècles, une ordonnance royale avait décidé de tous les unifier en une seule juridiction civile globale, compétent pour connaître de tout le contentieux civil commun, à l’exception des contentieux spécialisés, comme les litiges entre commerçants*. L’idée avait été d’essayer d’empêcher les erreurs de procédure, d’accélérer le traitement des dossiers, les différentes juridictions ayant en effet chacune des compétences propres, exclusives les unes des autres, ce qui était susceptible, en cas d’erreur de saisine de la juridiction compétente, de rallonger les délais.

« Il faudrait connaître l’étendue de sa dette.
Le cinquième tribunal... Son président, ce n’est pas Jacquard, de mémoire ? »

Elena hocha lentement la tête. Maître Jacquard était un magistrat compétent, mais qui accepterait difficilement que la Couronne s’immisce dans ses affaires. Une tête de mule. On ne pouvait pas envoyer des agents royaux au tribunal pour demander à en savoir plus sur ses dossiers. Elena réfléchit silencieusement. Elle connaissait bien le droit, et se rappelait d’une ordonnance royale qui pourrait les aider.

« Il me semble que la Couronne peut intervenir dans les contentieux opposant une banque à son client, si cette banque est subventionnée par l’État. »

La récente crise économique avait conduit l’État à devoir investir financièrement dans les banques déficientes pour les sauver et les renflouer. Cependant, cet investissement public n’avait pas été sans conséquences. Lumen n’avait pas pour politique d’intervenir dans les affaires privées, ce que certains regrettaient. L’État avait toutefois demandé, en contrepartie des investissements publics, de pouvoir jeter un regard sur les comptabilités des banques, afin de s’assurer que les fonds publics ne soient pas utilisés à mauvais escient, par exemple pour financer les bénéfices des actionnaires, ou les retraites dorées des membres du conseil d’administration.

« Nous allons demander une information à la banque, conclut Elena. Je préfère ne pas me heurter à Jacquard.
Il n’y a pas qu’une banque à Lumen... nota Adamante. Comment trouver la bonne ?
S’il y a des poursuites judiciaires, on devrait pouvoir les trouver dans les archives du greffe du tribunal, résuma Elena. Je vais envoyer l’un de mes avocats sur place... À moins que tu ne souhaites y aller, Shad. Visiblement, tu disposes de ressources insoupçonnées. »

De fait, Elena n’était pas non plus totalement sûre que Shad ait bien tout compris à ce qui venait de se passer. Il s’agissait avant tout de détails juridiques et administratifs... Le genre de choses relativement barbantes, en somme.

(*) Remarque : pour information, en France, il y a une séparation du contentieux civil entre trois juridictions : la juridiction de proximité, le tribunal d’instance, et le tribunal de grande instance. Dans la grande réforme judiciaire que Madame Taubira veut lancer, l’une des propositions issue des différents rapports commandés par la Chancellerie est notamment de simplifier la procédure en regroupant ces trois juridictions en une seule. Je m’inspire donc de ça pour décrire le système judiciaire luméen ^^

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:50
par Shad
Tout ce qui passait depuis leur arrivée au palais était un enchevêtrement  de déclarations et d’idées pour la Okami. Depuis que sa jument avait posé un sabot dans la cour du palais et qu’elle avait été confiée à un palefrenier pour qu’il la prenne à sa charge, la Louve n’avait prononcé que très peu de mots. A vrai dire, Shad avait seulement donnait de temps à autres  des renseignements quand la Reine lui adressait sa parole ou de temps à autre, elle acquiesçait d’un mouvement de tête  affirmatif les dires d’Adamante. Mais mis à part cela, la lupine était relativement discrète et il aurait été simple d’oublier sa présence.

Shad suivit Adamante et Elena au travers des couloirs les écoutant, tentant de comprendre tout ce qu’elle disait. Quand elle était encore sur Terre, elle avait pu étudier un peu de droit et grâce à cela, la lycane n’était pas totalement perdue par les notions d’ordres juridiques que les deux femmes utilisaient. Même si une conversation purement juridique aurait tôt fait de lui donner une bonne migraine. Il n’était pas à douter que la Couronne cherchait en cet instant des renseignements liés à la vielle propriétaire du taudis précédemment visité.

Après quelques recherches et toujours des paroles échangées, la tâche semblait être toute trouvée. Se rendre dans le fameux cinquième tribunal et y cherchait des renseignements sur la vielle. Des renseignements d’autres civiles et financiers. Rien de bien difficile n’en soit et la Louve haussa un sourcil d’interrogation quand la Reine lui demanda si elle désirait se rendre sur place pour effectuer les recherches appropriées.  La lupine ne répondit pas de suite, sa queue fouettant un instant nerveusement l’air. Etait-ce sans risque après ce qui venait de se passer ? Non, si elle commençait à craindre de sortir, elle risquait de se mettre dans de sombres états.  Soufflant un peu d’air par les narines, elle acquiesça.

« Je veux bien m’y rendre et tenter de trouver toutes les informations sur cette femme. Mais, à certains endroits, les Okamis ne sont pas réellement « bien vu ».  Pour éviter tout conflit, si on m’éjecte, je ne forcerais pas et il faudra donc, envoyer un de vos avocats. »

Shad se remémora la fois où elle avait tenté de renter dans une bibliothèque au sein de la cité. Quand le propriétaire des lieux l’avait vu, il s’était empressé de la chasser, hurlant que ce n’était pas une place pour une bête ignare. Alors un tribunal….La Okami espérait vraiment pouvoir y entrer sans encombre. Après, tout ce qui était à faire était de partir à la recherche des informations permettant de passer l’accord avec la propriétaire. Ou du moins, d’avoir assez de dossier pour  passer devant un tribunal et régler cette affaire de dettes.

La mégère avait sans douter une carte dans sa manche et avait attendu le bon moment pour l’abattre. Il ne restait maintenant plus qu’à espérer que ses informations soient fondées et véritables. Encore un fait qu’il faudra vérifier une fois que tout cela sera tiré au clair.  Enfin, pour le moment, il valait mieux déjà se mettre en route. Le dossier n’allait pas apparaître ainsi par magie.  La Okami s’excusa un instant, observant la carte dépliée sur la table, notant de mémoire l’emplacement du tribunal.

« Bon, autant s’y rendre de suite.  Au faite Adamante, as-tu passé la fléchette empoisonnée et les notes du Père Lamb à un alchimiste royal comme convenu ? »

Pour tout avouer, l’Okami avait un doute à ce sujet, mais vieux valait demander plutôt que d’oublier un élément qui pouvait s’avérer important dans l’investigation autours de l’abattoir Mandus. Finalement, Shad jeta un dernier regard sur la carte avant de tapoter un bâtiment situé à deux rues. Un bâtiment qu’elles étaient censées visiter.

« Ne serait-ce pas l’entrepôt où Jacques était censée avoir son entrevu ? Peut-être pourrions-nous y faire un crochet et…Au tribunal ne risquent-ils pas de demander le nom et le prénom de la personne concernée ? Je veux bien chercher des informations mais sans indications civiles, ça risque d’être bien difficile. A moins que l’on puisse la retrouver par son adresse et ses dettes. »

Cette vieille femme devait bien être notée quelque part dans les dossiers de ce tribunal, d’une manière ou d’une autre. Pourtant, maintenant que la Okami avait reconnu l’emplacement du fameux entrepôt elle venait à se demander s’il n’était pas aussi judicieux d’y faire un saut en se rendant au tribunal. Mais cela pouvait également s’avérer dangereux, surtout après l’expérience vécue près de l’abattoir.

« A moins que…Peut-être  pourrions-nous y rendre accompagnée et une fois arrivée sur place, nous séparer ? Un groupe restant pour inspecter l’entrepôt, un autre allant au tribunal ? Plus le temps passe et plus nous risquons de perdre des traces ou des informations précieuses dans ce fameux bâtiment abandonné. »

Ainsi, il leur serait possible de couvrir deux lieux à la fois et donc de récolter deux fois plus d’informations et de pièces pour l’enquête en cours.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:50
par Elena Ivory
« Je veux bien m’y rendre et tenter de trouver toutes les informations sur cette femme. Mais, à certains endroits, les Okamis ne sont pas réellement « bien vu ».  Pour éviter tout conflit, si on m’éjecte, je ne forcerais pas et il faudra donc, envoyer un de vos avocats. »

C’était une autre manie agaçante de la part de ses sujets. Une bibliothèque, comme un tribunal, constituait un établissement public, dont la caractéristique principale était d’être ouverte au public... À tout public ! Il était même interdit à un commerçant de refuser le pas de sa porte à un Okami, car il s’agissait d’une forme de discrimination, alors, si même les administrations s’y mettaient... Elena fronça les sourcils, irritée par un tel comportement de la part de ses agents, et précisa rapidement à Shad :

« Ils n’ont pas le droit de te refuser l’entrée, Shad. La prochaine fois que ça arrive, rappelle-leur de consulter à nouveau les recueils jurisprudentiels. »

La Cour royale avait eu l’occasion de rendre des arrêtes particulièrement tonitruants en la matière, où elle avait confirmé des condamnations à l’encontre de commerçants et d’administrations publiques qui avaient refusé de laisser entrer des Okamis, en relevant le caractère discriminatoire de la mesure. Le plus récent arrêt en date datait d’il y a trente ans, et portait sur un acte administratif décidé par l’un des baillis de Lumen, qui, pour refuser la présence de Okamis autour d’une place publique avec une belle fontaine, avait rendu un arrêté limitant la liberté de circulation autour de la fontaine pour des impératifs de sécurité. La Cour royale avait cassé l’arrêté en retenant qu’il instituait une différence de traitement entre les administrés, et était donc contraire au principe de neutralité du service public. Il était navrant de voir que la mentalité des gens peinaient à évoluer.

Adamante répondit aux interrogations de Shad en lui disant qu’elle comptait justement aller voir leur alchimiste. La magicienne ne pouvait malheureusement pas encore se dédoubler. L’interrogation de Shad sur l’entrepôt reçut également une réponse appropriée : Adamante y enverrait probablement un agent, sans en dire plus. Il s’agirait de Zephyr, qui se ferait un plaisir d’y aller. Sa présence était de toute façon requise au Palais d’Ivoire, afin qu’elle puisse renseigner Adamante et Elena sur cette mystérieuse fléchette empoisonnée. Il allait donc falloir convoquer Zephyr.

« Pour l’identité de la dame, le contrat de bail fait par Jacques est consigné dans les archives du Palais. Il suffira d’en demander une transcription, ce qui ne devrait pas prendre très longtemps. Viens, je vais te présenter à l’avocat qui va aller au tribunal. »

Elena s’avança à travers les couloirs, et rejoignit le bureau de Declan. L’homme était un bel avocat fringant, sur la trentaine, qui avait commencé dans un cabinet spécialisé dans le contentieux maritime... Quelque chose de très classique dans un port. Talentueux, il avait fini par être approché des services juridiques de la Couronne de Lumen, et ce n’é&tait pas vraiment le genre d’offres qu’on pouvait refuser. Comme bien des avocats, Declan était issu d’une certaine forme de bourgeoisie, mais, contrairement à ses frères, il avait toujours été irrité de voir la manière dont Lumen se dégradait, estimant que les riches gagnaient bien trop d’argent. Il avait décidé de devenir avocat pour pouvoir, à sa manière, contribuer à favoriser l’essor du droit et son effectivité auprès des plus démunis.

Quand la Reine vint le voir, Declan était en train de réfléchir à un problème qui impliquait la Couronne, et qui portait sur la recevabilité d’une action populaire intentée par un particulier pour protester contre l’insalubrité et l’insécurité de son quartier. L’action populaire était une action qui, pendant des années, avait été interdite à Lumen, avant qu’une ordonnance royale ne finisse pas l’autoriser. Cependant, les conditions de recevabilité de ce recours étaient plutôt stricts, et une action populaire avait été portée devant l’un des quelques tribunaux administratifs de Lumen, à l’encontre de la Couronne. Le propriétaire d’un quartier s’était plaint, au nom de tout le quartier, de l’état catastrophique des voiries, de la remontée des eaux usagées, de mauvaises odeurs, du manque d’entretien des rues et des canalisations, sans parler de l’absence de gardes, entraînant une hausse de l’insécurité, notamment parce que les chaînes fermant les égouts n’étaient pas assez solides, permettant ainsi à des noyeurs de s’échapper et d’attaquer les gens. Le requérant réclamait donc, devant le tribunal, que la Couronne agisse. Il s’agissait plus, en réalité, d’une demande gracieuse que réellement contentieuse, car, pour l’heure, la Couronne hésitait à contester. Il revenait justement à Declan de choisir ce qu’il fallait faire : contester, ou faire droit à la demande, et, si oui, choisir quelle était la mesure la plus adaptée pour répondre aux préoccupations du quartier.

La Reine lui annonça qu’il pouvait remiser son action populaire, car elle avait une demande particulière à lui formuler. Elle lui présenta brièvement Shad, en la présentant comme une servante qui aurait pour tâche de l’aider.

« J’ai besoin que vous alliez au 5ème C, afin de trouver des informations sur un dossier. »

Être un avocat, c’était savoir réagir face à l’imprévu : des assignations en urgence, des gardes-à-vues qui se déclenchaient subitement, une catastrophe qui venait tout droit de tomber... Un métier où on bougeait beaucoup.

« Très bien, Majesté. »

Elle lui indiqua qu’elle allait obtenir des informations sur le dossier d’ici quelques minutes. En attendant, Declan pouvait se préparer à partir. Elena avait aussi choisi Declan, parce qu’elle savait qu’il était un peu plus sociable que d’autres avocats. Elle abandonna donc Shad avec Declan. Son objectif, très simple, était d’aller voir le service d’espionnage du Palais, afin de leur demander une copie du contrat de bail. Elle aurait ainsi le nom de la vieille. Elle aurait aussi pu consulter le service de recensement ou le cadastre, mais ça aurait été encore plus long.

Entre-temps, Declan observait lentement Shad. Il portait des lunettes de vue pour consulter les actes administratifs, et les retira en l’observant.

« Hum...Autant te le dire tout de suite, je sais que tu n’es pas une servante de Sa Majesté. Et je sais aussi que l’abattoir Mandus est dans le ressort du 5ème C. »

Le « 5ème C. » n’était rien de plus qu’un acronyme pour désigner le cinquième tribunal civil. Declan sourit alors légèrement.

« Toutefois, je ne pense pas avoir envie d’en savoir plus. Quand on travaille pour une Reine, il faut savoir tenir sa langue, tu ne crois pas ? »

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:51
par Shad
La Okami hocha la tête quant à la réponse de la Reine face aux divergences qu’elle avait eues par le passé en voulant rentrer dans une bibliothèque. Bien sûr, la Louve savait qu’elle avait été victime de discrimination mais tenter de faire entendre raison n’aurait fait que conduire à des coups et blessures, ce qui aurait pu conduire à  son arrestation. Bien sûr, la lycane ne se gênait pas pour tuer dans la cité si cela était nécessaire, il s’agissait là d’auto-défense plutôt que de vrais meurtres. Même si ces derniers pouvaient  être pris comme tel.

Mais au moins, Shad avait de quoi répondre la prochaine fois qu’on lui interdirait un accès au sein d’un bâtiment quelconque de la cité.  Une bonne chose en soit, qu’elle réutilisera si besoin dans un futur proche ou lointain.  Sa question sur l’entrepôt  eu également droit à sa réponse et la lycane ne chercha pas plus à savoir quel agent y serait envoyé. Elle ne pouvait juste que lui souhaiter de rester sur ses gardes.  Ironiquement, si cet agent viendrait à disparaître alors qu’il était en mission à cet endroit précis, un lien étroit pourrait être créé entre la disparition de Jacques et l’abattoir. Mais cela était créer des conclusions bien trop hâtives. Surtout que Shad ne désirait pas que cet agent court le moindre danger.

Finalement, elle suivit la Reine au travers des couloirs, arrivant jusqu’à un bureau où elle fut présentée à l’avocat présent, du nom de  Declan. La Okami fut de nouveau présentée comme une servante et elle comprit bien vite que cet homme l’accompagnerait dans ses recherches au 5ème tribunal. Bien évidemment, elle n’allait pas s’en plaindre, mieux valait être accompagné d’une personne compétente dans le domaine juridique quand on se rendait dans un tel lieu. De plus, la lycane supposait que Declan pourrait user du jargon propre à sa profession pour trouver plus rapidement les renseignements dont ils avaient besoin.

A peine Elena s’était-elle éclipsée pour chercher les documents liés au bail payée par Jacques à l’encontre de la vieille que l’avocat de la Couronne pointa son doigt sur deux points important. L’identité de la Okami et l’emplacement du 5ème C. La Louve cligna des yeux un instant, avant de sourire d’un air amusé. Décidément, cet homme avait vu juste.

« Je ne peux rien te cacher. Non, je ne suis pas une servante ou une domestique de la Reine, mais une fois arrivée au 5ème C mieux vaut faire comme si c’était le cas. Et je suppose que tu as également des soupçons sur ce fameux abattoir ? »

A croire que les avis face à l’abattoir Mandus étaient divergents. La Okami se demandaient bien de quel côté se rangeait  Declan, était-ce de celui de ceux qui y voit un bienfaiteur ou bien de ceux méfiant à son égards qui trouvaient que cet abattoir dissimulée une face sombre aux yeux de tous ?  La Louve quant à elle était plus du côté du deuxième  groupe, elle se méfiait de cet abattoir dorénavant comme de la peste. Mais temps qu’elle n’avait pas d’élément probant, elle ne pouvait réellement aller contre sa réputation.

La Reine revint bien vite avec les papiers nécessaires aux recherches, ce qui signifiait en soit le départ imminent des deux « enquêteurs ». Shad laissa le temps à l’avocat de se préparer avant de prendre la direction du 5ème tribunal. Les bâtiments  de type juridique avait toujours cette masse imposante qui pouvait impressionner plus d’un.  La lycane pénétra dans le bâtiment en compagnie de Declan, restant à ses côtés comme si elle eut été une domestique de la Reine.  Elle ne put s’empêcher d’observer l’intérieur du bâtiment et vint à se demander dans quelle section ils devraient se rendre.

Elle savait cependant que Declan devait savoir comment circuler sans heurt dans une pareille administration et c’est en silence qu’elle le suivait, répondant de temps à autres à des questions qui lui seraient posés. La première chose qu’ils avaient à faire était d’aller voir le service s’occupant des litiges financiers et de présenter le bail afin d’obtenir des renseignement sur la vieille dame, à savoir son identité et le montant de ses dettes.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:51
par Elena Ivory
« Je ne peux rien te cacher. Non, je ne suis pas une servante ou une domestique de la Reine, mais une fois arrivée au 5ème C mieux vaut faire comme si c’était le cas. Et je suppose que tu as également des soupçons sur ce fameux abattoir ?
Je sais que Sa Majesté souhaite s’y rendre, répliqua rapidement Declan, et que, en conséquence, plusieurs de mes collègues se renseignent sur cet abattoir. »

C’était une réponse très neutre, car, très simplement, Declan n’entendait pas se fier aux rumeurs. Il savait que beaucoup de gens critiquaient cet abattoir, y voyant une manœuvre mercantile de Mandus pour exploiter des gens, une sorte d’action populaire, probablement à des fins politiques. Cependant, Declan savait aussi que ceux qui le critiquaient appartenaient généralement au même milieu : le consortium industriel, le « système », comme on l’appelait parfois. Un regroupement de nobles, de bourgeois, qui étaient tous corrompus, privilégiant leurs intérêts personnels au détriment de la société. Ils voyaient évidemment l’abattoir d’un mauvais œil. Declan ne comptait pas juger Mandus simplement sur la base de préjugés. Faute de preuves, toute atteinte envers l’intégrité de l’homme d’affaires était, soit du cynisme mal placé, soit de la jalousie. Declan n’était ni l’un ni l’autre. Il était un avocat, un homme de loi, et un homme de loi n’émettait un avis que sur la base de faits objectifs Tout ce qu’il savait, pour l’heure, c’était que la manière dont Oswald avait acquis la propriété des anciens immeubles ayant servi à la construction de l’abattoir était régulière, tout comme la provenance des fonds. Il en avait parlé avec un collègue du cabinet, qui avait obtenu une copie des actes notariés ayant permis à Oswald d’acheter des immeubles insalubres, de les raser, et de reconstruire ensuite son abattoir. La construction avait été assurée par l’une des plus grosses guildes de Lumen, et avait réuni de nombreux bâtisseurs et ouvriers.

La Reine ne tarda pas à revenir, en ayant en main une transcription de l’acte de bail. Le nom de la propriétaire y figurait. Elle avait du utiliser un formulaire de contrat-type. Les mairies et les palais de justice en fournissaient gratuitement, les accompagnant d’un formulaire détachable qui permettait d’en expliquer le contenu de manière claire, afin que les propriétaires sachent dans quoi ils s’engagent. Vu l’état de l’appartement, il était probable que la vieille s’était torchée le cul sur les différents articles, mais avait malgré tout signé là où il fallait signer.

« Bon, allons-y. »

Declan se mit en marche. Il ignorait que le locataire était un espion, et la convention n’indiquait pas pourquoi cet homme avait choisi de signer, mais Declan savait que ce n’était pas pour profiter des bas-fonds. La somme proposée était largement prohibitive, et si, en soi, les parties étaient libres de fixer la somme qu’ils voulaient, n’importe qui aurait compris que la propriétaire était en train de rouler le locataire. À ce prix-là, il fallait que tout soit parfait et irréprochable, ce qui, dans les bas-fonds, n’était jamais le cas. D’une démarche élancée, Declan quitta les bureaux. Se rendre au 5ème C. ne lui faisait pas énormément plaisir, car il allait perdre du temps, mais c’était un ordre de la Reine, et la Reine n’était pas une cliente comme les autres.

Tandis qu’Adamante se renseignait sur la comptabilité de l’entreprise de Mandus, afin de trouver l’expert-comptable de la société, Declan alla dans une calèche, en compagnie de Shad, et demanda à ce qu’on les conduise au 5ème tribunal civil. Il y en aurait pour une bonne demi-heure, et, tandis que la calèche s’avançait le long des rues pavées de Lumen, Declan était plongé dans ses pensées. Il savait que cette Okami n’était pas là pour l’espionner, aussi se demandait-il ce qu’elle avait à voir dans cette histoire. Declan, effectivement, était loin d’être idiot, et il avait bien compris que tout tournait autour de l’abattoir Mandus. Qu’est-ce que la Reine soupçonnait ? Son action populaire lui semblait alors passer au second plan devant ce qui se tramait. La calèche, en rejoignant le tribunal, passa d’ailleurs devant l’abattoir, et Declan se permit de l’observer. Les grilles étaient ouvertes, et des ouvriers entraient et en ressortaient fréquemment. Des affiches placardées sur le mur annonçaient fièrement la venue prochaine de la Reine dans l’établissement.

La calèche s’arrêta ensuite devant le palais de justice, reconnaissable avec une série de colonnes en marbre. Remerciant le cocher, et lui demandant de les attendre, Declan sortit, et grimpa les marches du perron, entrant dans l’antichambre du hall d’accueil. Un escalier principal situé devant menait directement à la grande salle d’audience, dont les portes étaient ouvertes. Un huissier de justice surveillait l’entrée, et hocha lentement la tête, saluant Declan.

« Si vous avez des armes, déposez-les à l’entrée, il y a des détecteurs », expliqua Declan à la femme.

Des cristaux détectaient le métal, l’argent, et d’autres matériaux dont on se servait pour forger les armes. Declan rejoignit le bureau du greffe, qui faisait office d’accueil, et annonça vouloir consulter les archives du palais. La greffière, qui était en train de ranger des formulaires, ne s’y opposa pas. Declan était un avocat récurrent du 5ème C., où il plaidait souvent, et c’était un droit individuel que de pouvoir consulter les archives. N’importe quel individu avait le droit de savoir ce que la justice avait sur lui, les seules exceptions tenant à la matière pénale. La greffière conduisit Declan et Shad dans une grande pièce avec des bibliothèques et des armoires abritant tout un fatras de papiers, de formulaires. En théorie, un huissier devait les accompagner, afin de s’assurer qu’ils ne cherchent pas à détruire les papiers, mais la greffière faisait confiance à Declan. De toute manière, il y avait d’autres employés dans la pièce, qui triaient, archivaient, rangeaient, et mettaient à jour.

La remerciant, ce dernier s’aventura sur le registre. Les affaires étaient répertoriées par l’ordre alphabétique du demandeur, et Declan consulta donc les affaires instruites par les banques. Sous le nom du demandeur, on voyait ceux des défendeurs assignés par ce dernier, ainsi que les numéros de rôle. Après quelques minutes à fouiller, Declan finit par avoir ce qu’il cherchait : le nom de la femme, ainsi que le numéro d’inscription au rôle. Declan laissa la page ouverte, et alla chercher un autre registre, répertoriant toutes les affaires pendantes devant le tribunal, et qui étaient classées par leur numéro d’inscription. Il trouva le numéro qu’il cherchait, et put voir que l’affaire était toujours en phase d’instruction, et était jugée par Meynard, une juge intègre. Impossible d’en savoir plus sans se heurter au secret de l’instruction. Declan avait cependant le nom de la banque : la Banque Vivaldi. Elle était tenue par une famille de nains. Ils s’étaient installés à Lumen il y a des siècles, venant des royaumes nains à proximité, d’où ils faisaient du commerce avec les Lumeniens. Ils avaient fondé une banque à Lumen, et, avec le temps, n’étaient plus devenus que des banquiers. Visiblement, Vivaldi poursuivait un certain nombre de débiteurs.

« On a ce qu’on voulait, trancha Declan. Tu veux retourner au Palais, ou me suivre ? Tant qu’à faire, je vais profiter d’être ici pour aller me renseigner sur d’autres dossiers en cours. »

Il s’agissait surtout de son action populaire. Le quartier concerné était à proximité, et il pouvait être bon d’aller le voir, afin d’en savoir plus sur ce qui se passait là-bas.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:52
par Shad
A la simple idée de déposer ses armes à l’entrée du bâtiment, la Louve eut un moment de réticence. Cette idée ne lui plaisait guère mais pourtant elle n’avait pas trop le choix et devait se plier au règlement. Elle retira donc  sa paire de lames sanglée à ses hanches dans un étui de cuir avant de retirer ses gants fait de la même manière, enveloppant les lames à  l’intérieur de ces derniers.  Elle déposa le tout dans la corbeille fait à cet effet et face au regard interrogatif de l’homme chargé de la sécurité et des ports des armes, la Okami lui précisa qu’elle venait simplement de les déposer. Sans donner de plus amples informations.

Elle accompagna par la suite Declan dans sa recherche d’information, observant également les dossiers, aidant à  trouver celui qui était la cible.  Bien évidemment, la Louve aurait préférée avoir un nom pour faciliter l’investigation mais cela ne semblait pas gêner l’avocat qui parvint à trouver le dossier escompté. Ou du moins à savoir à quelle banque était ralliée l’histoire de la propriétaire de Jacques. Demandant accès au dossier, la Okami y jeta également un œil,  lisant rapidement les informations inscrite sur le contrat de bail,  elle sut également quel était le nom de la mégère : Agatha Christie.

Mais rien sur le montant de sa dette, sans doute  faudrait-il se rendre au sein de la banque Vivaldi pour recevoir cette information. Comble de l’ironie, la vieille avait un homonyme terrien qui n’était autre qu’une romancière de série policière. Et l’Agatha de Terra était également mêlée d’une certaine façon à une enquête policière.  Une enquête qui ne se réalisait bien sûr pas d’un simple claquement de doigt, mais la lupine savait qu’à la fin, tous les aboutissements de cette étrange histoire seront dévoilés. Il suffisait juste pour cela d’être patient et de surtout fouiner un peu partout.

« Je pense que je vais rester un peu, qui sait si je découvre encore des éléments intéressants »

Bien sûr, elle ne ferait rien de probant et accompagnerait simplement l’avocat dans  ses démarches, mais la lycane refusait aussi d’admettre qu’elle ne voulait pas le laisser seul pour une bonne raison, le risque qu’il pouvait encourir.  Shad n’était pas dupe au point de ne pas savoir que ses précédents agresseurs ne devaient pas espionner chacun de ses faits et gestes ainsi que ceux de la Couronne. Et il était fort à parier que Declan pouvait être une cible provisoire.  Oh, la Louve ne se nommer pas garde du corps, loin de là, mais c’était pour elle un principe en cet instant. Avoir un deuxième disparu ne serait pas un fait qui pourrait être accueilli à bras ouvert.

« Où se trouve la Banque Vivaldi ? C’est la première fois que j’entends ce nom »

Pourquoi donc nier le contraire ? Si Declan lui avait demandé de se rendre à la banque  Vivaldi, la lycane se serait retrouvée perdue à chercher un bâtiment dont elle en connaissait aucune l’emplacement, cette dernière pouvait aussi bien se trouver dans le même secteur que celui du tribunal ou dans un secteur complétement à l’opposé.  Une dernière question trottait dans la  tête de la Okami, mais elle n’avait pas besoin de la poser à l’avocat. La raison ? Il s’agissait ni plus ni moins des dossiers dont il avait fait mention et elle se demandait leur nature. Bien sûr ces dernières auront bien vite leur réponse.

[hrp : pas grand chose désolé :/ ]

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:52
par Elena Ivory
Le duo sortit du palais, n’ayant plus rien à y faire. On redonna à Shad ses armes, et, une fois dans la rue, cette dernière lui posa une question : l’emplacement de la Banque Vivaldi. Declan s’avança le long du trottoir, et ne tarda guère à lui répondre.

« La Banque Vivaldi a son siège dans un autre quartier que celui-ci, mais elle a des agences et des succursales un peu partout. »

Il lui expliqua que cette banque était surtout connue par les nains, car elle était tenue par les Vivaldi, une famille de nains. Il lui expliqua plus en détail l’histoire de cette banque : elle avait été formée par des mineurs qui avaient décidé de mettre en commun leurs fonds. Les Vivaldi avaient ainsi choisi de collecter l’argent que les mineurs obtenaient à Lumen en vendant leurs minerais pour pouvoir ensuite les distribuer aux différents nains. Le montage financier était un peu compliqué, mais, en gros, les activités minières des nains étaient gérées par des groupements collectifs, qu’on appelait généralement des corporations, chaque corporation ayant à sa tête de puissantes familles naines. En soi, c’était le même schéma que pour les guildes, à peu de choses près. Les nains s’affiliaient à une corporation, et c’était cette corporation qui se chargeait de vendre les minerais extraits par les nains dans les mines, redistribuant ensuite l’argent obtenu.

Declan marchait le long des rues, saluant parfois quelques personnes qui le reconnaissaient. Le quartier du 5ème Tribunal civil était un endroit où Declan se rendait souvent pour plaider. Il s’était notamment fait connaître en poursuivant le maître d’une guilde qui ne respectait pas la législation sociale, en ne donnant pas assez d’argent à ses ouvriers. Ce genre d’affaires, ça assurait votre popularité. On voyait parfois quelques nains passer, ainsi que des elfes, ou encore des Okamis.

« L’avarice des nains n’est pas qu’une légende, Shad, c’est aussi quelque chose de réel. Les nains qui vendaient leurs produits à Lumen craignaient, et à juste titre, de se faire attaquer en cours de route par des brigands. »

Ceci avait conduit les nains à former des convois militaires, mais les mineurs avaient rapidement décidé que ce système n’était pas optimal, car il fallait payer les gardiens, leurs armes, ce qui, naturellement, se ressentait sur les bénéfices. Des charges supplémentaires devaient être prises en compte dans la comptabilité de la trésorerie, et un autre système avait été trouvé : les lettres de change. L’idée était d’amener les nains à ne plus transporter leur or, mais à le laisser à Lumen, dans des coffres verrouillés. D’autres justifications avaient permis le recours à la lettre de change, notamment des problèmes monétaires. La monnaie utilisée à Lumen n’était pas la même que celle des royaumes nains, et, dans ce scénario, une lettre de change permettait de payer dans la monnaie du pays qu’on visait. De plus, en regroupant leur argent, les nains avaient remarqué qu’il était possible de s’enrichir davantage. Ils avaient découvert la notion de taux d’intérêts et de capitalisation boursière.

La Banque Vivaldi s’était ainsi développée, et était aujourd’hui une banque reconnue, favorable aux nains. Cependant, elle ne se résumait pas qu’à cette clientèle. Si Declan avait connu la France, il aurait pu comparer cette banque au Crédit agricole, qui était traditionnellement tournée vers les agriculteurs, mais sans se limiter exclusivement à eux. Par analogie, la Banque Vivaldi était donc favorable aux nains, et aux échanges miniers, où elle avait des spécialistes qui pouvaient conseiller les mineurs, et leur éviter ainsi de se faire avoir.

Tout en dévissant, Declan avait fini par rejoindre le quartier où une action populaire était en cours devant la justice. Il rejoignit le poste de garde, et se présenta devant l’officier le plus haut gradé du petit poste : un sergent moustachu avec un léger embonpoint.

« Oui, oui, je vois... Je vois que le Palais est toujours aussi rapide quand il s’agit de traiter mes demandes, même si, pour être honnête, je ne m’attendais pas à voir un avocat. »

Étonné, Declan fronça les sourcils. Ses demandes ? Quelles demandes ? Le sergent fut également étonné.

« Hum... Et bien, suivez-moi. »

Tout en marchant, le sergent lui expliqua que, ce matin, les récolteurs étaient tombés sur un truc très spécial, si spécial que le sergent avait envoyé un rapport pour transmettre l’information à ses supérieurs hiérarchiques. Declan, de son côté, expliqua à Shad que les récolteurs étaient un terme officieux désignant les manants et les clochards. Le matin, ils se réunissaient près d’une bouche d’égout pour essayer de trouver, dans la fange et la boue, des victuailles et des provisions parmi ce que Lumen recrachait. Ce n’était pas très honorable ni agréable à voir, mais ça leur permettait de vivre... Plus ou moins. Pendant un temps, il avait été question de l’interdire, mais les manants bravaient les arrêtés municipaux, et, plutôt que de l’interdire, la municipalité avait décidé de l’encadrer. L’idée était d’éviter la transmission de maladies contagieuses, principalement.

Le petit trio rejoignit un pont surplombant une espèce de rivière verdâtre.

« C’est ici qu’ils récoltent. »

L’odeur n’était pas très agréable, et le trio descendit un petit escalier menant le long de ce canal boueux. Le sergent était en tête. Declan, de son côté, se disait que l’odeur devait être encore plus difficile à soutenir pour Shad, car elle avait, en tant que Okami, des narines plus sensibles. Ils arrivèrent à l’entrée du canal, une grille d’où de l’eau s’échappait.

« Les gardes qui surveillaient les récolteurs l’ont confirmé... Une grande quantité de sang est sortie du tunnel. Voyez, on peut encore en voir les traces sur les barreaux de la grille. »

Sur ces dernières, on pouvait effectivement voir des traces rougeoyantes.

« C’est curieux, vous ne trouvez pas, non ? »

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:52
par Shad
Les nains étaient très portés sur l’or et il n’était pas difficile de deviner qu’une banque leur appartenant devait être particulièrement protégée. Ainsi, si une personne voulait être sûre d’avoir son argent en sécurité, une banque naine était l’un des choix les plus judicieux qu’il pouvait faire. Mais ce service avait également un prix, et la Louve ne serait pas étonnée d’entendre que poser son or dans un établissement nain revenait plus cher que dans un établissement humain. Cependant, le service y était fort différent ce qui pouvait confirmer cette différence de prix de service. Outre la forte réputation des banques naines, la Okami se demandait si une autre race ouvrait également de tels bâtiments où étaient stockés en masse les revenus de chacun.

Pendant qu’elle marchait aux côtés de l’avocat, la Louve fit rapidement l’inventaire des races qu’elle connaissait.  Des elfes ? Leur banque pourrait être protégée par magie mais ils ne seraient sans doute pas aussi avares que les nains. Alors quelle créature pouvait supplanter ces humanoïdes dans le domaine financier ? La révélation vint quelques minutes plus tard, alors que le groupe prenait un tournant et que Declan saluait quelques-uns de ses anciens clients. Pire que le nain en termes d’avarice il y’avait le gobelin.  Ces petits êtres étaient connus pour leur cupidité et leur avarice légendaire. Un trésor pouvait être découvert contre de nombreuses vies ? Le gobelin y fonçait tête baissée faisait fit des pertes que cela pouvait engendrer. Ainsi, la lupine vint à se questionner si une banque gobeline existait à Lumen.

Si tel était le cas, elle s’imaginait bien que cette dernière devait posséder un système de sécurité fort élaborée et que chaque compte déposé était soigneusement surveillé.  Peut-être partirait-elle à la recherche d’une telle banque si le temps le lui permettait  plus tard, après cette étrange affaire. Outre le fait de chercher une banque gobeline au sein de Lumen, la Okami aurait également tout le loisir d’inspecter et de découvrir des recoins où elle ne s’était jamais rendue pour l’instant n’y voyant aucun intérêt à le faire.  Plongée dans ses pensées, elle ne remarqua pas de suite qu’ils étaient enfin arrivés à destination.

Son regard se porta sur le sergent qui semblait quelque peu gêné par ce qu’il avait dû découvrir le matin même. Le temps n’était plus à la parole et il était mieux avisé de montrer de quoi il en retournait. Le petit groupe fut donc amené aux abords d’un canal boueux, malodorant et poisseux. La forte odeur de déchets et de crasses assaillit la Okami qui mit une main rapidement devant ses narines, fronçant ses sourcils sous l’odeur.  Elle venait même à se demander comment des gens pouvaient vivre dans de telles conditions ou même chercher leurs nourritures au milieu de toutes ces immondices. Mêmes les porcs ne  vivaient pas avec leurs déchets organiques.

« Les gardes qui surveillaient les récolteurs l’ont confirmé... Une grande quantité de sang est sortie du tunnel. Voyez, on peut encore en voir les traces sur les barreaux de la grille. »

Immédiatement,  la ligne de mire de la Louve se porta sur la fameuse grille où il était possible d’y voir quelques traces de sang sur les barreaux. Plissant les yeux, elle observa quelques secondes attentivement avant de voir comme un léger mouvement  se passant derrière la grille où l’eau poisseuse s’écoulait sans cesse.  Le mouvement fut rapide mais elle était sûre d’une chose, quelque chose était coincée derrières ces barreaux de métal. Pourtant il était hors de question qu’elle y mette les pieds dedans et expliquait ce qu’elle avait peut-être vu risquait de prendre du temps. Elle n’avait donc que d’autres choix que d’agir en vitesse avant de voir cette masse disparaître.

Au-dessus de la grille se trouvait une autre qui servait en réalité de rambarde à une espèce de petit pont enjambant l’hideux canal. La Louve retira rapidement sa toge, la cape flottant derrière elle pouvait gêner ses futurs mouvements. Elle resta donc en simple armure de cuir.

« Je reviens, gardez-moi ça. »

La louve prit une inspiration redoutant déjà le moment où son nez  effleurera presque la surface de l’eau. Rien qu’à penser aux odeurs nauséabondes ne lui donnait déjà des hauts le cœur, mais elle ne pouvait se permettre de perdre plus de temps. La  Okami monta rapidement sur le pont et s’y accrocha, se tenant d’une main  à un barreau, l’autre passant entre ceux servant à laisser l’eau s’écoulait. Elle le sentait, ses doigts frôlaient un tissu mais elle n’arrivait pas à l’atteindre, à chaque fois les petits vagues faisaient reculer sa cible. La lycane pesta et vit un garde portant une hallebarde passée non loin. Sans la moindre gêne, elle l’interpella.

« Hé ! Envoie ton arme ! Ne discute pas, je te la rends après ! »


Le garde resta incrédule un moment, clignant des yeux. La Okami n’en démordu pas, réitérant sa demande, mettant cette fois l’accent sur le fait qu’il se devait se hâter. Finalement, la hallebarde lui fut passée et Shad la fit passer entre les barreaux, utilisant l’espèce de pointe recourbée pour agripper sa cible. Tirant un bon coup elle l’emmena contre la grille et le choc produit lui fit perdre l’équilibre. La Okami chuta dans l’eau crasseuse et elle y sortie en toussotant, crachant  les reflux qui avaient pu rentrer dans sa bouche. Son regard se porta rapidement vers la grille et un frisson lui parcouru l’échine.

« Venez voir ! »

Tout contre la grille se trouvait un homme, yeux révulsés, air cadavérique. Un mort dont le corps semblait portée la marque de nombreuses coups de dents, comme si on cherchait à le grignoter. Finalement ne tenant plus face aux odeurs,  la Okami bloqua l’arme de sorte à ce que l’arme et le cadavre reste contre la grille puis elle sortit du canal, frissonnant légèrement. Portant rapidement une main contre sa bouche, elle ravala un haut le cœur, manquant de rejeter sur la voie publique. Son regard se porta vers le cadavre et d’un air cynique, elle déclara :

« On sait maintenant d’où vient cette odeur de mort….Je pense que vous tenez quelque chose d’intéressant. »

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:52
par Elena Ivory
Shad avait visiblement vu quelque chose, et tendit à Declan sa cape. Intrigué, ce dernier l’attrapa et la plia autour de son bras, avant de voir la jeune femme aller sur le toit de la bouche d’égout, se rapprochant d’une autre grille, qui permettait d’entrer à l’intérieur.

« Faites attention ! »

Il aurait aussi été possible de passer par une porte permettant d’entrer dans les égouts, mais cette dernière était fermée, et le sergent avait laissé les clefs au poste de garde. Nerveux, ce dernier se demandait bien ce que cette Okami était en train de faire, et, en quête d’informations, tourna sa tête vers l’avocat.

« C’est votre assistante ? »

Declan pencha légèrement la tête en réfléchissant à la meilleure réponse appropriée.

« C’est la Reine qui me l’a envoyé.
La... La Reine ?! » s’étrangla le sergent, les yeux ébahis.

Declan hocha lentement la tête. Au-dessus de Shad, sur un pont, une patrouille venait de passer, comprenant quelques hallebardiers, qui regardèrent cette curieuse Okami, probablement en la prenant pour un quelconque voyou. L’und ‘entre eux se pencha par-dessus le pont, afin de la chasser de là, mais, à sa surprise, il entendit Shad lui demander son hallebarde.L’homme hésita un peu, ayant bien envie de lui donner un coup de bâton pour ça, mais il remarqua alors, en contrebas, la présence du sergent, qui lui ordonna d’obéir.

« Cette Okami est mandatée par la Reine, bougre d’âne ! »

Le hallebardier pâlit sur place. On avait beau critiquer la Reine et la tourner en dérision dans les rades et les bouis-bouis infects de la ville, la Reine Elena Ivory restait tout de même la Reine. Et, de plus, un ordre d’un sergent, ça ne se discutait pas. Le hallebardier, qui n’était qu’un simple caporal, tendit donc son arme. Il fut assez surpris de voir cette petite Okami être capable de la manier, et elle l’utilisa pour entrer dans les égouts, plongeant dans l’eau la tête première. Néanmoins, elle remarqua la présence d’un cadavre, et aida ainsi Declan et le sergent à le voir.

Declan en fut surpris, et le sergent en resta bouche bée. Il ordonna ensuite à la patrouille d’aller chercher la clef de l’égout, et d’amener un médecin.

« Mais pas demain, remuez-vous le cul, bande d’incapables ! »

L’avocat demanda alors aux hommes d’essayer de leur apporter également une carte des égouts.

« Je suis sûr que ce n’est rien, expliqua le sergent à Declan. Un drogué, ou un récolteur qui aura essayé de s’infiltrer dans les égouts...Les gens racontent quantité de mythes sur des trésors dissimulés dans les égouts, et certains prennent parfois le risque de s’y rendre. Il aura été attaqué par un noyeur ou une goule... Ou alors, c’était un simple trafiquant. »

Rien, en somme, qui nécessiterait qu’un avocat s’y attarde.

« On en met plein dans les morgues » renchérit d’ailleurs le sergent.

Declan hocha lentement la tête, sans rien dire, intrigué malgré lui. Curieusement, il avait en tête l’abattoir de Mandus. Il attendit que Shad revienne. Elle était toute puante, couverte d’une eau crasseuse.

« Hum... Bravo pour votre intervention, Shad, mais je crois que vous avez besoin d’un bon bain... Il y a des thermes à proximité, vous n’avez qu’à y aller, et demander à ce qu’on nettoie aussi vos vêtements. Le temps que ces braves soldats amènent le cadavre et l’auscultent, il s’écoulera bien une petite heure. Nous n’aurons qu’à nous retrouver au poste de garde. Si ça ne vous fait rien, je vais conserver cette cape. »

Declan lui offrit ensuite plusieurs pièces pour qu’elle aille se nettoyer.

« Après tout, se justifia-t-il, c’est en partie de ma faute si vous avez fait un joli plongeon. »

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:52
par Shad
La remarque du sergent fit grimacer la Okami qui était encore dans l’eau poisseuse à cet instant. Pour elle, ce cadavre ne pouvait pas être là par le fruit du hasard. Et puis, une goule ? Sincèrement ? Elle n’y croyait pas. La  Louve avait déjà eu affaire à ses nécrophages par le passé et les coups de morsures présents sur le corps du mort n’était pas l’œuvre d’une goule. De plus, on entendrait cette dernière poussait de longs hurlements lugubres sans arrêt.  Après, la piste du noyeur n’était pas à exclure mais la victime semblait être bien trop amochée pour seulement avoir été noyée.

Non décidemment, l’Okami n’aimait que trop peu sa découverte macabre. Elle relâcha enfin l’arme qu’elle maintenait encore légèrement quand d’autres hommes descendirent dans l’eau crasseuse afin de s’occuper du macchabé. Shad ne se fit pas prier pour sortir de ce canal infect, tentant de ne pas trop humer l’air autours d’elle.  Elle rejoignit ainsi Declan et ne fut guère étonnée d’entendre ses paroles. Le regard de la Okami se porta sur elle-même et elle afficha un air de dégoût, prenant les pièces que l’avocat lui tendait :

« Je m’en serais passée croyez moi.  Vous pouvez la garder je la récupérerai au poste de garde. Faites attention quand même. Et merci pour l’argent. »

Elle se tourna vers le canal où le corps était soigneusement sortie de l’eau et mis sur une espèce de brancard, sans nul doute pour se faire ausculter. Quelques curieux s’étaient attroupés devant la fange et observait  le spectacle avant de retourner à leur occupation. Pour eux,  ce n’était qu’un autre cadavre de plus qu’on sortait de cette eau croupie.  La Okami reporta son attention sur Declan, déclarant à voix basse :

« Je compte sur vous pour me faire part de tout ce que vous auriez pu apprendre et voir si il y’a des liens avec les précédents morts qu’ils auraient pu trouver. »

Certes, cela pouvait être pris comme un ordre mais il s’agissait là plutôt d’une requête. Après tout, la lycane devrait s’absenter quelques temps pour retirer toute la crasse qu’elle avait sur elle et pendant ce temps, elle ne pourrait savoir ce qui serait dit ou découvert. Elle s’inclina donc légèrement, saluant l’avocat avant de filer aux thermes. Quelques minutes de plus à  sentir cette odeur putride et elle aurait pu remettre son déjeuner.  La louve arriva rapidement à destination.

Les thermes étaient un lieu public divisé en deux parties : Les hommes et les femmes. Il n’existait pas de bain mixte bien que certains bravaient cet interdit. L’intérieur du bâtiment faisait fortement pensé à l’architecture gréco-romaine de la Terre. Des colonnes de marbres étaient disposées tout du long, soutenant le plafond, le sol était marbré de dalle blanche comme l’ivoire et diverses fontaines étaient présentes d’où s’écoulaient un filet d’eau continuel.  Plus que des thermes pour se laver, cet endroit avait avant tout l’air d’un lieu où la détente était de mise. Shad se rendit à l’accueil et comme elle aurait pu s’y attendre, on tenta de la chasser prétextant que son odeur pouvait faire fuir les honnêtes clients et qu’en prime vu qu’elle était Terrandie elle n’avait rien à faire ici. Mais cette fois, la Louve répondit au quart de tour, utilisant ce que lui avait dit la Reine dans de tel cas. Une telle réponse étonna la guichetière et la lycane ne lui laissa pas le temps de réfléchir, posant l’or devant elle :

« Comme je l’ai dit, c’est un lieu public, donc ouvert à tous. Même à moi. Et puis je vous paye, vous n’avez pas le droit de m’interdire de me laver. »

Les pièces d’or furent ramassées et rangé dans une sorte de mini-coffret. Puis, la Louve fut conduite dans une partie des thermes où se rendaient tous ceux qui avaient plus besoin de se laver que de profiter des sources chaudes. La Louve remercia la personne d’un hochement de tête et retira ses vêtements crasseux avant de glisser dans l’eau. Un petit soupir d’aise lui échappa quand elle sentit le contact de l’eau chaude contre sa peau. Ne perdant pas une seconde, l’Okami attrapa de quoi se frotter et retira toute la crasse qu’elle avait sur elle avant de se laver jusqu’à être sûre que toute mauvaise odeur était enfin partie.

Pendant ce temps, ses affaires furent prises et rapidement nettoyée. La Okami garda néanmoins prêt d’elle ses armes et son médaillon arachnéen.  Trois quart d’heures plus tard, elle ressortait des thermes, propre et lavée tout comme ses effets personnels. La Louve se dirigea par la suite vers le poste de garde où elle était censé retrouvée Declan.  Sur le chemin, elle espérait ne pas avoir de mauvaises surprises et prises de doute, elle accéléra son pas de course.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:53
par Elena Ivory
Le poste de garde abritait une morgue, qu’on utilisait généralement pour regrouper les individus morts pendant la nuit. Toxicomanes ayant fait une overdose, prostituées de rues tombant sur le mauvais client, soudards, clochards attaqués par des monstres ou par des escrocs, les nuits à Lumen n’étaient jamais très calmes. La ville flanchait sous le poids d’une surpopulation galopante, une conséquence de la guerre entre Lumen et Mijak, qui contraignait bon nombre de pays proches et de serfs à immigrer dans la ville. C’était l’une des principales raisons de la crise économique qui était en train de gangréner le pays, car il était difficile d’accueillir cet afflux de migrants, d’autant plus que le budget royal était en grande partie consacré à l’effort de guerre contre les Mijakiens. Difficile de trouver des fonds pour rénover les logements dégradés par l’afflux de migrants, ou pour construire de nouveaux bâtiments. C’était presque un cercle vicieux, et, en ce qui concernait les morgues et les cimetières, ces derniers avaient tendance à être pleins... Ce qui, par ailleurs, conduisait à une hausse notable des invasions de goules et de créatures nécrophages dans les cimetières de la ville, si bien que certains étaient fermés la nuit.

Le cadavre fut déposé sur une table centrale, et on entreprit de le nettoyer, enlevant la crasse qui recouvrait le corps squelettique.

« Quelle odeur !
- C’est insupportable ! »

Declan devait bien avouer qu’ils n’avaient pas tort. Ce n’était pas que l’odeur des égouts, il y avait aussi quelque chose d’autre... L’un des éléments de détail dont on parlait peu quand on faisait du droit, c’était qu’on tombait souvent sur des gens qui ignoraient toute forme d’hygiène. C’était vrai en prison ou lors des gardes-à-vues, où il arrivait que les prévenus portent leurs vêtements de la veille, au moment de leur arrestation, ce qui dégageait une odeur assez redoutable. Declan se souvenait également de clients incapables de se laver, qui fumaient d’énormes cigares atroces dans les toilettes, avant de balancer leur mégot dans le pot, et de se masturber dans la salle d’attente* en attendant qu’il puisse les recevoir. Les gardes devaient aussi avoir l’habitude, dans le coin, d’arrêter des types éméchés ou défoncés aux narcotiques, qui puaient comme si une congrégation de putois s’était réunie sous leurs aisselles.

Le sergent alla chercher un médecin, tandis que Declan restait dans la morgue. La victime était rachitique, et n’avait littéralement plus que la peau sur les os, et encore... Par endroit, on pouvait voir des morceaux d’os. Il devait être mort depuis plusieurs jours, et son corps avait été partiellement déchiqueté, probablement par des noyeurs, ou par d’autres monstres. Son torse était traversé d’épaisses griffes et de profondes morsures. Il était chauve, et l’une de ses joues avait été arrachée, révélant un morceau de son crâne. Le pire fut cependant l’état de son dos quand on entreprit de le retourner.

« Nom de Dieu ! s’exclama l’un des gardes.
Par la malepeste, qu’est-ce que ça veut dire ?! »

Le dos du malheureux était... Et bien, c’est comme s’il y avait une multitude de trous plantés dedans. Des trous partout, de la tête jusqu’au bassin, qui étaient rectilignes, formant comme une sorte de grille qui s’était abattue sur l’homme. C’était probablement la trace de solides seringues. Tous les trous étaient réguliers, faisant la même taille. Les gardes ne comprenaient pas trop ce que ça voulait dire, mais furent également surpris en voyant, sur le bras de l’homme, un tatouage.

« C’est... C’est un numéro. »

Le numéro était difficile à lire, à cause de l’eau des égouts, mais on discernait une série de chiffres. Un frisson parcourut le corps de Declan. Qu’est-ce que tout ça voulait dire ? Quel était le rapport avec son action populaire ? Avec l’abattoir Mandus ? Un soldat arriva alors, et lui indiqua qu’ils avaient mis la main sur la carte des égouts, dans la salle des archives. En attendant que l’expert arrive, Declan suivit l’homme dans une autre pièce. Il était troublé, et arriva dans les archives du poste de garde, abritant une compilation de procès-verbaux, de jugements, de manuels de police, et de cartes publiques. L’homme s’assit sur une chaise en bois, et inspecta la carte. L’éclairage venait d’une fenêtre, et il n’y avait donc pas besoin d’une lampe à huile pour s’éclairer.

Declan repéra rapidement la bouche d’égout d’où ils avaient vu le cadavre, et inspecta le réseau ferroviaire. Les égouts de Lumen étaient un système très moderne, afin d’éviter le développement de l’insalubrité et des maladies. C’était un précédent Roi qui, il y a quelques générations, avait décidé de créer des égouts. Un travail pharaonique, car les souterrains de Lumen renfermaient quantité de cryptes, de catacombes, mais le seul moyen efficace d’éviter de nouvelles épidémies de peste. Les Lumeniens s’étaient aidés d’ingénieurs nains afin de développer un vaste système d’égouts, qui se chevauchait avec les cryptes, les catacombes, et d’autres endroits. Declan inspecta les égouts, essayant de trouver d’où ce cadavre pouvait venir. Il repéra surtout les sorties d’égout correspondant à l’abattoir Mandus. Une station de maintenance des égouts se trouvait à proximité. Peut-être que les ouvriers travaillant là-bas en sauraient plus sur ce qui se passait.

Les égouts disposaient d’écluses et de différentes voies d’eau différentes, qu’on enclenchait à l’aide de techniciens et d’ouvriers, en se déplaçant dans les égouts, et en tirant sur des valves, permettant ainsi de réguler le traitement des déchets et l’évacuation des eaux. En inspectant la carte, Declan n’eut aucune preuve certaine que le cadavre venait bien de l’abattoir, mais il trouvait la coïncidence... Troublante.

Il remercia le garde, et attendit ensuite que l’expert arrive. Le sergent revint un petit quart d’heure plus tard, amenant avec lui un médecin-légiste, Auster de Noerval. Noerval avait une double casquette : il était à la fois chargé des expertises médicales que les juridictions ordonnaient, mais aussi des autopsies légales. En ce sens, il relevait de la médecine légale.

« Maître Declan, le salua Noerval. Le sergent m’a prévenu que vous assisteriez à l’autopsie.
Oui, et nous serons probablement rejoints par une Okami... J’espère que ça ne vous dérange pas ?
Une Okami ? glissa l’homme. Mais pour quelle raison ? »

Alors qu’il posait cette question, ladite Okami venait justement d’entrer.

* : Authentique.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 17:59
par Shad
La Louve arriva quelques minutes plus tard au poste de garde. Les soldats postés à l’entrée n’étant pas les même que ceux qu’elle rencontré lors de la découverte macabre, la Okami dû montrer patte blanche et se montrer véhémente pour recevoir le droit d’entrée. Encore une fois, elle faillit se faire chasser, l’homme prétextant qu’elle n’avait rien à faire ici et qu’elle devrait passer son chemin. Cependant, en nommant l’avocat présent au sein de leur mur, les gardes se regardèrent un instant incrédule, avant de la laisser passer, non sans la surveiller, prêt à interagir au moindre faux mouvement.

On lui indiqua la pièce où se trouvait le Maître Declan et tout en remerciant le « guide », la lupine partie rejoindre l’avocat. Elle se demanda si ce dernier avait pu découvrir des faits intéressant sur le pauvre homme. Certes, les meurtres étaient monnaies courantes à Lumen, même la lycane avait déjà du sang sur les mains dans cette capitale. Pourtant, inconsciemment,  Shad avait l’impression que ce macchabé avait un lieu direct avec l’abattoir Mandus. Oui, aucune preuve ne prouvait que ce fût le cas mais c’était comme une sorte d’instinct animalier qui lui criait que c’était le cas. Pourtant sans preuve tangible, la Okami ne pouvait accuserà tord Mandus et son établissement.

«  Une Okami ? Glissa l’homme. Mais pour quelle raison ? »
« Car j’ai étais missionnée par la Reine, voilà pourquoi. »

L’Okami venait tout juste de rentrer dans la pièce et même si le médecin légiste avait soufflé sa question, elle avait pu l’entendre distinctement. Un avantage d’avoir des sens plus aiguisée que la moyenne. Elle s’approcha donc du groupe, saluant poliment le médecin légiste avant de se tourner vers l’avocat, lui rendant la monnaie restante tout en lui demandant un rapide résumé des faits. La Louve resta silencieuse pendant ce dernier, sa queue fouettant l’air doucement derrière elle comme si elle était pensive. Et c’était le cas. La description du cadavre avait quelque chose de déconcertant, particulièrement ces marques dans le dos.

« A-t-on relevé d’autres marques identiques sur d’autres morts récents ?  Et ce numéro, la moindre idée  de ce que ça pourrait être ?  Un ancien numéro de détenu ? Ou alors..Non, ça parait fort improbable »

Pensant à l’abattoir, le numéro présent sur le bras du mort remémorait à la Louve les fameux numéros que portait le bétail.  Chaque bête avait son matricule et il était ainsi possible de l’identifier. Mais cette idée semblait bien trop farfelue et irréaliste. Pourtant qu’est ce qui ne l’était pas depuis le début de cette affaire ?  Autant donc tenter le coup et dire à quoi on pensait ! La Okami souffla tout en observant les deux hommes présents :

« L’idée pourrait être folle, mais ce fameux numéro me fait penser au numéro qu’on met sur du bétail prêt à l’abattoir. Après je doute que ce soit le cas. »

Mais au moins, l’idée était dite.  La Lycane demanda également si on sera de quelle créature provenait les marques de crocs présents sur le corps mortifié. Elle savait que les gardes pensaient aux goules mais une partie des blessures qu’elle avait pu voir n’était pas l’œuvre de telle créature. Ce n’était pas leur façon d’arracher la chaire, elle le savait, mais alors quoi ? L’Okami repensa à la créature qu’elle avait vu la nuit précédente,  mais là encore, elle n’avait aucune preuve que ce soit le cas. Un  léger grognement s’extirpa de sa gorge. Bon sang, ils avaient les pièces en mains mais aucun moyen de prouvait qu’elles étaient sans faille.

Prise dans ses pensées, elle ne remarqua pas  un des soldats qui s’approchait. Ce dernier lui attrapa le menton et fit en sorte de dévoiler les crocs de la Okami. Même sous sa forme humaine, Shad gardait une dentition bien plus tranchante qu’un humain et il lui était possible de déchirer la chaire sans souci.  Revenant à elle, la Okami grogna, ses oreilles s’aplatirent sur son crâne, le garde jouait avec le feu.  L’homme la relâcha, les yeux plissés sous son casque.

« Pouah !  Comme par hasard cette bête trouve le cadavre alors que personne ne l’avait vu jusque-là ! Il n’a pas besoin de chercher plus loin ! »
Vociférât-il
« Attends..Tu es en train de m’accuser à tort là ? » Répliqua-t-elle.
« Non, il n’y a pas besoin de réfléchir longtemps pour savoir que tu es la coupable, après tout, les tueurs reviennent toujours sur le lieu du crime et. »

Il ne put finir sa phrase. En une fraction de seconde, la Okami avait bondit en avant  tout en revêtant sa forme animale. Le garde fut donc renversé sur le dos, la patte de la grande Louve plaquée sur son torse pour le maintenir en place, sa gueule contre son cou protégé par le heaume du soldat. Un crissement de métal se fit entendre, l’animal serrait de sorte à imprimer la marque de ses crocs dans le métal mais prenait garde à ne toucher la chaire ni à briser les os de l’homme par accident.  Elle le relâcha après quelques secondes, reprenant une forme plus humaine. Puis,  tout en restant à califourchon sur lui, elle lui retira le casque avant de se relever.

« Vous n’avez qu’à comparer la marque de mes crocs avec ceux présents sur le cadavre s’il vous faut une preuve de mon innocence,  humain stupide. »

Plus de peur que de mal finalement, mais une fierté quelque peu ébranlée. La Okami plissa les yeux vers le garde encore au sol avant de lui tendre sa main pour l’aider à se relever.

« La prochaine fois n’accuses pas à tort sans preuve, désolé pour la frayeur. »


Elle se tourna par la suite vers l’avocat et le légiste, tandis que le dit garde partait relever les empreintes de crocs sur son casque.

« Bien, après ce petit accident et si nous allions nous occuper de cette autopsie ? »

Plus vite l'autopsie serait faite, plus vite les causes de la mort de cet individu serait moins opaque. Elle rassura également les autres gardes présents qui avaient pu assister à la scène que cela ne se reproduirait plus. Enfin, d'un côté, se faire accuser si ouvertement d'un meurtre était une chose très peu appréciée.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 18:00
par Elena Ivory
Était-elle simplement une messagère de la Reine, ou aussi inspectrice de police ? Les questions qu’elle posait mettaient le doute, et Declan resta silencieux, n’ayant aucune réponse à apporter. Noerval, de son côté, se moquait bien de ces histoires. La politique ne l’intéressait pas plus que ça, et, si Sa Majesté estimait de bon ton d’utiliser une Okami comme messagère... Ma foi, qui était-il pour discuter les volontés de Sa Princesse ? Lui-même avait comme assistants quelques Okamis. Ils étaient un peu idiots, mais soucieux de bien faire, et pas du genre à contester ses ordres, ce qui convenait tout à fait à l’expert. Du moment qu’il pouvait mener son autopsie, après tout...

Jadis, Noerval avait été un médecin généraliste, qui avait ouvert son cabinet dans les bas-fonds. Il savait que l’irrespect était de plus en plus fort dans ces quartiers, que les délits y étaient fréquents, comme le racket, la drogue, la prostitution illicite... Cependant, il proposait des prix assez bas aux clients, et était plutôt compétent. C’est dans le cadre de ces activités qu’il s’était retrouvé mêlé à des procédures judiciaires, ses ordonnances médicales pouvant se retrouver produites dans les cours de justice. C’est de cette manière que, progressivement, Noerval avait fini par recentrer ses activités. Il avait transféré sa clientèle auprès d’un autre confrère, et avait décidé de se consacrer entièrement à la médecine légale et aux expertises. D’autres confrères allaient même jusqu’à se spécialiser davantage, en ne recevant plus que les expertises judiciaires, ce qui, en soi, représentait un vaste domaine. Chaque fois qu’il fallait évaluer le préjudice subi par une personne, que ce soit à l’occasion d’un procès civil ou pénal, il fallait faire appel à un expert. Par an, on dénombrait, en moyenne, des milliers d’expertises ordonnées par la justice. Noerval hésitait entre deux branches : devenir définitivement un expert, ou rejoindre la médecine légale, en se rapprochant alors des forces de police. Deux voies qui le tentaient.

Il y songeait fugacement, lorsqu’une altercation éclata entre la Okami et un garde, qui l’accusa d’avoir dévoré le corps. Cette dernière protesta, et se transforma alors en une redoutable et belle louve, qui renversa le garde, poussant des grognements. La tension se mit à monter d’un cran, car les autres gardes débarquèrent, se saisissant de leurs armes, pointant des arbalètes sur le corps de Shad. La Okami mordit dans le heaume du soldat qui gémissait en essayant de la repousser.

« Elle va le bouffer ! s’exclama un soldat.
Mais repoussez-là, bon Dieu ! »

Declan pâlit sur place. Il tenta de se rapprocher de la femme, mais un soldat le poussa sans ménagement, et il heurta un placard. Heureusement, Shad se releva alors, et les encouragea à comparer sa morsure avec celle qu’il y avait sur le corps. Médusé, le garde à terre la contemplait en clignant des yeux, hésitant à attraper sa main, la regardant comme si elle était possédée par un quelconque sortilège.

« Messieurs, intervint alors Declan, je vous suggère d’abaisser vos armes, et de vous détendre. Cette Okami est mandatée par la Reine pour m’accompagner ! En la menaçant sans preuve, vous n’avez fait que la provoquer.
Ce n’est pas une raison pour attaquer nos hommes ! Muselez votre bête, si vous ne voulez pas qu’on se charge nous-mêmes ! »

L’avocat savait que la Reine n’apprécierait guère que sa messagère se retrouve en prison. Les soldats réfléchirent, et leur supérieur finit par baisser son arme.

« OK, on va passer l’éponge là-dessus... Joachim n’avait pas à vilipender l’envoyée de Sa Majesté comme cela... Mais, et que ce soit bien clair, à la moindre altercation supplémentaire, envoyée de la Reine ou pas, elle calmera ses ardeurs en cellule. Est-ce bien clair pour vous ?
C’est limpide. »

La tension décrut, et Declan se sentit un peu mieux. Il observa légèrement Shad, et se permit, à son intention, une brève remarque :

« Vous ne manquez pas de souffle, en tout cas.
Peut-être pourrions-nous commencer, maintenant ? s’impatiente Noerval.
Oui, bien sûr. »

Noerval s’avança le premier, retournant dans la morgue, suivi par Declan, Shad, ainsi que par le caporal qui était intervenu tantôt pour désamorcer la situation. L’expert observa le cadavre, et s’attarda surtout sur son dos.

« Diantre ! C’est la première fois que je vois ça. On... On dirait qu’il a été... Profondément piqué...
Vous pensez que c’est là la cause de son décès ? »

L’expert ne répondit pas sur le coup. Il avait ouvert sa mallette, et enfilait des gants blancs en latex, avant de se retourner vers eux.

« Impossible à dire, pour l’heure. C’est vous qui l’avez retrouvé, n’est-ce pas ? demanda alors le médecin en regardant Shad. Pouvez-vous me dire dans quelles circonstances ? Et, par la même occasion, si vous avez vu quelque chose de suspect, d’étrange, d’anormal... Bref, n’importe quoi, n’hésitez pas à me le dire. »

Si Noerval était surpris par ce qu’il venait de voir, il arriver à conserver son sang-froid, afin de faire son métier. C’était un professionnel.

Re: A Machine For Pigs [Shad]

Posté : 06 sept. 2024 18:01
par Shad
Shad savait pertinemment qu’en attaquant le garde comme elle venait de le faire qu’elle risquait gros. Mais, elle refusait également de se laisser accuser sans preuves tangible. Après les faits accomplis, la Louve aida le garde à se relever qui manifesta une certaine méfiance. Bien sûr, la Lycane avait senti les armes se pointaient sur elles, mais elle n’en avait que très peu tenu compte. La raison ? Elle savait qu’elles ne seraient pas utilisées et si tel était le cas, le bain de sang aurait été envisageable. Après tout, n’avait-elle pas tenu tête à un mercenaire renommé ? Tandis qu’elle serrait une dernière fois le heaume, la  Louve avait identifié la situation et réfléchis à plusieurs moyens de se défendre.

En premier lieu, désarmer les gardes. Les flammes pourraient être ici utile, bondir sur l’un d’eux, le mordre à la jugulaire, éviter un coup de revers ou d’estoc d’un autre garde, bondir en arrière, reprendre forme humaine et utiliser ses armes pour passer entre les interstices des côtes de mailles. Deux à trois gardes peut-être avant d’être mis à terre. Mais, de toute manière, elle n’avait pas besoin de vérifier cette hypothèse.  Observant le garde partir du coin de l’œil, la Okami écouta d’une oreille attentive la discussion  entre le garde et l’avocat et ne put réprimer un léger grognement en entendant le mot « bête ».

Face à la réflexion de Declan, l’Okami haussa les épaules, passant son regard sur les gardes puis sur l’avocat avant de déclarer à voix basse :

« Peut-être que si vous étiez à ma place vous aurez réagis de la même façon. »

Le médecin légiste commençait à s’impatienter et tout comme l’avocat, la Louve approuva d’un hochement de tête, indiquant qu’il était temps d’aller voir le macchabé. Une fois à la morgue, la découverte du corps  fut tout sauf une expérience amusante. Le faciès du mort était figé dans une expression de peur et de terreur intense, le corps était rachitique. On pouvait discerner facilement les os sous la peau et à certains endroits, ces derniers la perçaient.  Quelques traces de morsures étaient présentes ici et là sur le corps mais ce qui marqua le plus l’intérêt était ces marques de piqûre présentes dans le dos du malheureux.

« Laissez-moi réfléchir… »


La Okami se remémora où et comment elle avait découvert le cadavre et en fit part au médecin légiste. Elle lui  décrivit l’emplacement exact où le corps était à moitié immergé, la présence du sang autours de lui, ainsi que sur les barreaux formant la grille de l’égout.  Mais, elle dût avouer qu’elle n’avait rien vu de véritablement marquant pouvant expliquer la raison de la mort du concerné. Tant de possibilités étaient envisageables. Etait-il mort de ces piqûres ?  De ces morsures lui ayant arraché des lambeaux de peau ?  La lycane souffla, observant le cadavre.  Elle aurait préféré avoir plus d’informations à donner à celui qui allait l’ausculter. Il semblerait donc que la plupart de leurs interrogations obtiennent une réponse sous peu.
Shad cligna subitement des yeux, semblant avoir découvert un fait. Maintenant que le corps n’était plus immergé dans cette eau crasseuse, elle pouvait mieux sentir les effluves qui en émanaient.

La première odeur persistante que la Louve humait était celle de la mort, de la décomposition. Mais derrière celle-ci elle pouvait sentir d’autres flagrances. Fronçant un instant ses sourcils, elle tenta de les discerner et de mettre un nom dessus. Ce n’était jamais évident d’expliquer des ressentis olfactif à ceux qui ne possédaient pas un odorat développé.  Pourtant, c’était peut-être peu de chose, mais ces informations pouvaient tout aussi bien être utiles. Finalement, la Lycane reprit la parole.

« Hum c’est un peu dur à expliquer mais il semblerait que cet homme fut enfermé un long moment et qu’autour de lui il y’avait de…la viande ?  Enfin de la viande sanguinolente. » Elle soupira «  désolé mais décrire ce que je sens n’est pas chose aisée, je pense qu’on aura plus d’information avec votre autopsie. »

L’odeur de la peur était également fortement ancrée autours du cadavre mais elle ne prit pas la peine d’en faire part. Après tout, ne pas voir qu’il était effrayé était un fait impossible.