The Multiversity

Se fut un moment étrange, elle se doutait bien que cet événement avait quelques choses d’irréaliste, et qu’elle devait être bloqué quelques parts entre une transe et une hallucination mais jamais Rin n’aurait pensé que sa salive possédait le goût du sang. Se serait-elle un peu trop mordue ? Tant qu’elle ne s’étouffait pas dans ce « sommeil » elle pouvait considérer cela comme un moindre mal là où sa santé mentale venait de prendre bien plus cher. Se fut le regard fuyant qu’elle vit une partie de la scène de Rhian, qui faisait face au loin à un géant perdu dans le brouillard. Étrangement, l’elfe compara cela à une monstruosité, et craignait au fond d’elle que si elle en voyait plus, la Princesse risquait de la récupéré en petit lambeau une fois cette vision du passé terminé. Quand elle passa cette étrange porte lumineuse, elle préféra s’entêter à croire que cela n’était qu’une vision du passé, car l’ambiance qu’elle avait pu sentir aurait pu lui faire remonter quelques remonté acide si elle était restée sur place. Un phénomène qu’elle ignorait depuis bien longtemps pour avoir vu sa dose d’horreur pour avoir fréquenté suffisamment de champs de bataille.

La pièce était bien plus lumineuse et malgré la grande tristesse qu’émanait l’ambiance de cette grande pièce, elle se voulait bien plus rassurante, et reposante. Riniya savait reconnaître un sacrifice quand elle en voyait un, et au fur et à mesure que les Dieux présents faisait leurs adieux à cette Pandore, l’elfe était presque certaine que celle-ci était vivante au moment où cette boite s’apprêtait à se sceller. La légende, elle la connaissait quelques peu sans en connaître les détails. Ou plutôt ne l’avait qu’écouter qu’à une oreille lorsque les druides l’instruisaient lors de ses très jeunes années. On parle ici de religion et légende, pas de tradition ou de coutume, le genre d’histoire qui faisait plus dormir que faire rêver Riniya.

Bien plus libre de ses mouvements, et surtout bien plus à l’aise là où la ranger n’arrivait pas à supporter l’atmosphère corrompu peu avant, elle tourna autour de la pièce pour regarder le visage de chacun des Dieux, qui laissèrent une larme devant ce sacrifice de Pandore, qui semblait proche pour chacun d’eux. Pour savoir comment fonctionnait les sacrifices, cela n’avait rien à voir avec le sacrifice d’un valeureux adversaire pour choisir quelqu’un d’aussi proche. Elle s’arrêta près de la boite, alors qu’elle commença à être sceller par le Titan.

L’elfe hésita quelques instants, se reprenant de bien citer Héra sans y figuré son titre de Dieu. Cela serait mal venu, surtout quand on s’adressait à d’autres Dieux, même Demi-Dieu.

« J’ai bien compris mon rôle et je comprends mieux pourquoi Arès « enquête » à sa manière à Papua. Mais... dans ce que je vois, si la Déesse Héra s'est laissé trompé par les Grands Anciens, qu'en est-il du Titan dans cette histoire ? Il reste témoin et maître de cérémonie, et même si il semble moins proche de Pandore que les autres Dieux ici présents, il est le mieux placé pour connaître le risque que cela provoquerait d'ouvrir la boite et de réunir les éclats. »

Riniya savait les Dieux très secrets quand ils donnaient une quête, mais l’information sur le devenir du Titan pouvait être importante. Agit-il de son côté ? Même si le pouvoir d'un Titan n'avait plus rien de comparable face à Zeus, il fut un temps où ses derniers pouvaient mettre une épine dans le pied à des Dieux. Pas très utile pour sa quête puisque l'éclaireuse voyait très mal Épiméthée à Papua, mais pour d’autres au contraire car elle le voyait mal ne pas agir suite à cela.

« Épiméthée ? Il se trouve au Tartare, Riniya… Là n’est pas ta destination. »

L’Archer Noir continuait à l’aiguiller. Rhian subissait également le même traitement initiatique, flottant dans les airs. Elle suivait un vol d’oiseaux menés par un aigle royal, surplombant la capitale impériale, comme pour lui indiquer sa prochaine destination.

*Mijak… La capitale…*

Shevarash fixa encore l’horizon.

« La bataille finale aura lieu au Mont Olympe, Riniya… Il ne tient qu’à toi d’y participer, ou de rester en retrait. Zeus a déployé tous les six Olympiens, sauf Héphaïstos, qui reste dans l’Olympe. C’est lui qu’il faudra aller voir pour reconstituer le rituel, pour refermer les Maux. Mais le temps vous est compté. Les autres panthéons vont réagir, Riniya. Si les humains n’arrivent pas à refermer les Maux, les autres Dieux interviendront, mais l’humanité de Terra n’y survivra probablement pas. »

C’était un funeste sort qui s’attendait.

• Soit l’Olympe terminait son funeste projet, et les Grands Anciens reviendraient alors sur Terra pour la dévaster et en prendre le contrôle,
• Soit les panthéons divins s’opposaient à l’Olympe, et risquaient alors de dévaster Terra,
• Soit les humains arrivaient eux-mêmes à vaincre l’Olympe, et pouvaient alors espérer se remettre de ce chaos ambiant.

L’inconvénient de la deuxième option était aussi qu’une guerre divine aurait nécessairement lieu. Jadis, la Tour avait confié à Zeus le soin de surveiller Terra, mais, si l’Olympe chutait, les différents panthéons s’entredéchireraient entre eux. Une guerre interminable aurait lieu, qui ferait oublier celle de Lumen et de Mijak. Et, dans cette situation, Riniya aurait son rôle à jouer.

« Les Mijakiens et les Luméens vont contre-attaquer en attaquant l’Olympe. Voilà ce que les oracles prédisent. Mais l’issue… L’issue en elle-même est sombre. Zeus n’est plus le Roi des Dieux que nous avons connu. Tu dois te tenir prêtre, Riniya. Puisque c’est toi qui es venue à moi, c’est toi qui mérites de recevoir mon pouvoir. »

Ils se retrouvèrent au milieu d’un sanctuaire elfique, et la main de l’Archer Noir se releva. Elle se nimbait d’une intense énergie divine, qui flamboya encore.

« La flamme t’aidera à retrouver Héphaïstos… Et peut-être inversera-t-elle le cours de cette guerre. »

Les flammes enveloppèrent ensuite Riniya quand Shevarash posa sa main sur son torse. Puis une onde la traversa alors, et, dans un vertige…

…Riniya revint à elle. Rhian était également en train d’émerger, revenant au monde réel. Un frisson la traversa tandis qu’elle se redressa lentement. Il lui fallut du temps pour retrouver ses esprits.

« Je… J’imagine que nous avons dû voir à peu près les mêmes choses, pas vrai ? »

La vision de Rhian avait été assez cryptique, mais elle avait bien compris pourquoi les Dieux ne leur venaient pas encore en aide.

« Je n’aurai jamais cru devoir sauver le monde si vite… »

Si « Tant mieux ! » ne sortit pas de la bouche de l’elfe, la pensée fut si forte que n’importe qui doté d’un minimum de neurones pouvait l’entendre. L’enfer, le Tartare ou tout ce qui s’y apparente, plus elle le fréquentait de loin, mieux c’était. Alors si en plus on lui demandait de le visiter de son vivant, autant dire qu’en bonne personne intelligente, elle irait en reculant et non en courant. Après vu la situation chaotique, elle ne serait dire si le domaine de l’Olympe n’était guère mieux le jour où elle devra y mettre les pieds. Après, le « rester en retrait » ne voulait rien dire et à la fois tout dire, aussi bien du point de vue d’une mortelle telle qu’elle que pour un Dieu, avec une définition certainement différente pour les deux parties. Elle verra en temps et en heure car sa tâche, ou du moins elle le comprit sur le coup de cette manière car s’il y avait une chose que Riniya savait, quand il y avait un cadeau d’un Dieu ou Demi-Dieu quelques parts, ça pouvait sentir à plein nez l’entourloupe.

On lui laissait le choix d’aller à l’Olympe mais on lui donnait matière à retrouver Héphaïtos, qui se trouvait justement dans ce lieu. Autant dire qu’au bout du compte, on ne lui laissait pas trop le choix. Après, même Riniya qui ne s’y connaissait pas tant que ça en mythologie, peu importe laquelle, elle vous dira qu’un « cadeau » ou une « aide » aussi tordu, ce n’était pas une première dans l’histoire, le but serait que ça ne soit pas plus une dernière fois car si cela l’était, cela voudrait dire que les Grands Anciens sont de retour et que toute existence serait menacée, voir exterminée. Alors oui, Rin pouvait se sentir honorer de recevoir le pouvoir de Shevarash mais intérieurement, il y avait une petite place pour la pensée du « je crois que tu m’as bien niqué là » avant qu’elle ne s’écroule après avoir été prise de vertige !

De retour à la réalité, Riniya rampa vers l’autel pour y appuyer son dos, alors que les témoins et les acolytes qui avaient participé au rituel s’occupaient davantage de leur Princesse, un comportement qui n’offusqua pas plus que cela l’elfe. Ce qu’elle retenait au premier abord ? Cette impression de s’être pris une cuite la veille, avec les effets néfastes en moins.

« A quelques détails près ? J’imagine que oui. Au moins maintenant vous savez pourquoi les Dieux mettent à feu et à sang Terra : Apollon et Hermès se cachent sur Terra et comme les Dieux Olympiens n’ont rien de grands détectives, ils font d’une pierre deux coups en faisant une conquête en pratiquant la politique de la terre brûlées. »

Et… A-t-elle vu la scène concernant la flamme ? La mémoire de Rin était tellement floue que les détails l’étaient tout autant. Son regard se porta sur les personnes présentes mais plus particulièrement sur le temple. Il n’en restait pas moins un lieu sacré d’un autre panthéon, et si la paranoïa de l’archère restait présente concernant les devins de l’Olympe, elle savait qu’espionner un tel lieu ne serait pas si simple.

« J’ai reçu une « aide » de Shevarash après m’avoir laissé un choix, autant dire que le choix je ne l’ai pas vraiment. » Le mot « aide » avait tout l'air d'être aussi cynique que les paroles de la brune « Mais pour le moment je n’en suis pas encore là. Maintenant que l’on sait qui et quoi chercher, il serait peu être bon de savoir si Hermès ou Appolon se cachent en ville ou non, histoire de savoir si Arès ne rase pas la ville inutilement même si je doute que ça change grand-chose à ses plans... C'est un peu notre tâche de les trouver avant qu’il ne les trouve. »

Reprenant doucement ses esprits, Rhian essayait aussi de comprendre ce qu’Horus lui avait montré. Autour d’elle, les fidèles s’inquiétaient, mais elle entreprit de les rassurer, demandant juste un peu d’eau pour se désaltérer la gorge. De son côté, Riniya reprenait également ses esprits, et lui indiqua qu’elle avait reçu, elle aussi, de précieuses indications de la part de Shevarash, y compris un pouvoir magique pour l’heure méconnu. Rhian l’écouta donc, tout en se redressant lentement. Ses jambes tremblaient un peu, et elle constata ensuite que plusieurs heures avaient passé. De nombreuses bougies avaient été installées, et, par plusieurs fenêtres de la chapelle, Rhian vit les rayures rougeâtres du coucher de soleil.

*La relativité du temps…*

Des Papuans ramenèrent un plat avec une jarre d’eau et des verres. Rhian les remercia chaleureusement, puis tendit un verre à Riniya, tout en pensant à ce qu’elle disait.

« Je ne crois pas que l’Olympe recherche Hermès et Apollon. Pendant que ton Dieu te guidait, le mien m’a conduit jusqu’à l’Olympe. J’ai vu les balcons fleuris du palais divin et une femme qui se hâtait de partir. Des gardes la poursuivaient, et des éclairs zébraient le ciel… »

Elle revoyait cette scène. Des cumulus noirs se formaient dans le ciel, et la femme courut vers une ogive sur sa gauche, quand un éclair éclata devant elle, laissant apparaître la silhouette épaisse et puissante de Zeus, qui dominait sa femme de toute sa hauteur. Des gardes avaient alors jailli dans le dos d’Héra.

« C’est Héra… Héra s’est enfuie de l’Olympe, et Zeus la recherche. Je crois… Je crois que tout ça est lié à un artefact mythologique, la Boîte de Pandore. Horus m’a montré… Les Maux ont été ouverts par la négligence d’Héra, par sa jalousie. Elle a fait confiance à une mauvaise personne, au Magicien, et il l’a piégé. Il a ouvert la Boîte, et elle s’est protégée à l’aide de son Éclat, mais les autres Dieux présents dans le palais ont été infectés par les Maux. Héphaïstos, Apollon, Arès, Hermès, Poséidon, Hadès, Zeus… Ils sont tous contaminés. »

Rhian soupira encore, commençant à trembler nerveusement, sous l’effet d’une sourde angoisse, mais aussi d’une excitation grandissante.

« Nous devons effectivement retrouver Apollon et Hermès… Ils détiennent les Éclats de Pandore. Héra les recherche. Horus ne peut pas s’impliquer davantage, car, si une guerre religieuse a lieu, elle ravagera Terra… Il va falloir que nous nous débrouillions par nous-mêmes, Riniya. »

C’était une perspective assez effrayante. Des humains contre des Dieux… A priori, le rapport de force ne penchait pas vraiment en leur faveur, mais Rhian ne pouvait pas faire demi-tour. La situation était gravement préoccupante, et augurait de jours très sombres à venir. Rhian se déplaça encore, finissant son verre d’eau.

« Nous devons rejoindre mon père, et décider ensemble d’une marche à tenir. Horus souhaite que nous traquions Apollon et Hermès, mais pas que nous cherchions Héra. Je crois que d’autres personnes doivent s’en charger. »

Les Dieux n’étaient pas restés totalement inactifs même s’ils se refusaient à une action directe. Ils pouvaient guider les humains destinés à combattre Zeus et sa démence. D’une manière ou d’une autre, et pour une raison ou pour une autre, les Dieux papuans avaient choisi de désigner Rhian et les Dieux elfiques Riniya pour être leurs champions. Si ce n’était pas le cas, jamais elles n’auraient pu avoir accès à de telles visions. Du moins, c’était ce dont Rhian cherchait à s’encourager. Il était aussi possible que les différents Dieux soient totalement dépassés par les réactions épidermiques des Olympiens, et qu’Horus ait choisi la première personne qu’il ait pu contacter.

Mais, l’un dans l’autre, Rhian se sentait désormais investie de cette mission, d’une quête d’envergure. Il ne fallait pas juste sauver Papua, mais également empêcher les Dieux de ravager Terra en se lançant les uns les autres dans une guerre divine qui ravagerait le monde.

« Tu es toujours avec moi, Riniya ? » s’enquit finalement Rhian.

Riniya ne cracha aucunement sur ce simple don qu’était le verre d’eau, simplement pour faire passer ce goût de remonté acide qui la gênait… au moins lui il était réel et avec le spectacle dont elle avait été témoin, si seulement lui pouvait rester réel elle n’en serait que plus heureuse. Elle s’abstint de le recracher comme elle aurait fait d’habitude après une soirée un peu trop arrosée et se contenta de l’avaler : dans un temple devant des fidèles et encore plus devant la Princesse, un minimum de savoir-vivre était nécessaire.

Devant les dires de Rhian, elle se frotta un peu le front, quitte à s’ébouriffer quelques peu. Visiblement, elle avait quelques peu raté son jet d’interprétation des prophéties quand celle-ci lui expliqua une scène dont l’elfe n’avait pas été témoin. En même temps avec le malus qu’elle se tapait en religion, il ne fallait pas compter sur elle pour avoir des miracles…

« Ah oui quand même… Le « La Déesse Héra a été la première victime des Grands Anciens » de Shevarash n’était pas très clair pour moi. C’est malin, je vais devoir potasser sur la manière de lui expliquer que ses interprétations et les miennes sont différentes la prochaine que je le vois, ce n’est pas demain la veille que l’on sera sur la même longueur d’onde. Même ma responsable en logistique est plus claire avec ses noms de code lors des changements de fréquence… »

C’était l’une des raisons pour laquelle elle ne s’intéressait pas trop à des panthéons trop complexes, les interprétations l’était tout autant pour elle. Et entre cela et le cadeau qui lui revenait telle un effet de boomerang, au moins son monde ne risquait pas de s’écrouler sous la désillusion. Elle s’étira, récupérant l’arc olympien qu’elle avait posé sur un des murs au passage.

« Shevarash m’a offert une flamme qui me permettra de trouver Héphaïstos en Olympe, ça me semble normal que je dois m’en servir. Et venant d’une telle divinité, je doute sérieusement qu’un tel feu sacré serve seulement à me guider. »

L’envie de tester immédiatement la démangeait, sauf qu’elle se devait être discret dessus. Ce feu provenait d’une source divine, et Rin parierait sa paie que ce genre de pouvoir se sentirait par les devins et prêtres olympiens là où les Dieux de Papua avaient vu leur pouvoir bridé depuis le début de l’invasion. Rin donna sa réponse sous la rigolade pour tenter de détendre un peu l’ambiance.

« La traque est ma spécialité mais traquer des Dieux ? Sur mon CV ça pourrait faire classe. Mais comme vous l’avez dite, il faut d’abord rejoindre votre père et votre frère. Il me faut plus d’information avant de tenter quoique ce soit. »

Une flamme capable de retrouver Héphaïstos ? C’était sans aucun doute une bonne chose, mais, avant tout le reste, cela supposait à tout le moins d’entrer en Olympe…. Et donc, de quitter Papua. Rhian commençait en tout cas à voir les différentes pièces du puzzle se mettre en place. Riniya commençait aussi à le comprendre, tout en indiquant que la priorité était de retrouver son père.

« Oui, et d’agir… Car, si nous ne faisons rien, le conflit va prendre un tournant cosmique, divin… Les autres panthéons sont en train de se préparer à défier les Olympiens. Ils comptent sur nous pour éviter cela. »

Une guerre divine aurait assurément de graves conséquences. Les pouvoirs des Dieux étaient immenses, et, si ceux-ci venaient à s’affronter, c’était la réalité elle-même qui risquait de s’effondrer pour de bon. Une situation que Rhian n’avait pas particulièrement envie de découvrir. Elle était donc prête à faire tout ce qui était en son pouvoir… Mais cela commençait par retrouver l’armée, son père, et par rejoindre les autres forces locales pour envisager le plan d’action. Les Olympiens avaient mené une attaque massive, qu’ils préparaient visiblement depuis des années, ce qui en disait long sur l’état des forces magiques et divines de Terra. Des questions, Rhian avait des tonnes à en poser, mais il n’y avait personne pour y répondre.

Riniya semblait prête à l’action, et Rhian récupéra donc sa dague, tandis que les habitants du refuge les regardaient avec circonspection.

« C’est dangereux dehors, Princesse…
-  Vous ne devriez pas sortir ! »

Des inquiétudes bien légitimes, mais que Rhian ne pouvait admettre.

« Je suis la Princesse de Papua, je ne me défilerai pas. »

Les autres Papuans acquiescèrent doucement. Rhian remit sa dague dans son fourreau, et mit un léger voile sur son corps, destiné à la protéger, puis se retourna vers Riniya.

« Avec un peu de chance, nous croiserons une patrouille… Mais il y a un peu de chemin à faire avant de rejoindre l’Arsenal… »

Car il y avait fort à parier que de nouveaux monstres les attendraient dans la ville…

Rentrer en Olympe était une chose, y survivre encore une autre. Vu la réaction de Hassoun quand il l’avait vu et entendu d’utiliser une de ses armes, Riniya savait qu’il y avait quelques parts un stock d’armes confisqué prêtes à détruite ou mis sous scellé quelques parts en ville. Lumina le faisait eux aussi après tout, même si à cette époque l’elfe regardait ce genre de matériel comme une aberration. Mais tout cela, c’était avant une déclaration de guerre d’ordre divin. Acceptée sa nouvelle mission avec un certain goût amer de ne pas avoir trop le choix était une chose, mais si elle pouvait avoir le feu vert de la royauté pour mettre la main dessus pour se rééquiper, elle ne dirait pas non. En Olympe, elle ne pourrait pas seulement compter sur quelques ruses pour l’avantager alors si elle pouvait avoir tout un stock de dés pipés avant d’y mettre les pieds, elle s’en porterait gré.

Les habitants s’inquiétèrent de la sécurité de leur Princesse mais Riniya n’en rajouta pas plus. Dans une guerre d’extermination, personne n’était en sécurité nulle part, même eux. Le simple fait de se cacher dans un quartier qui ne représentait aucun intérêt stratégique les sauvait pour le moment.

« La nuit sera là d’ici quelques heures et j’aimerais atteindre l’Arsenal avant qu’elle ne tombe totalement. Arès, dans sa grande bonté à vouloir tout cramer, nous offre une partie de la fumée qui nous cachera de la lumière de la lune lorsque l’on voudra y pénétrer discrètement. »

Que la traversée se fasse de jour ou de nuit, dans une zone urbaine où la guérilla était de mise, Riniya se sentait plus à l’aise que dans les souterrains. Le seul petit soucis ici était qu’elle n’était pas seule et qu’elle ne pouvait pas prendre des passages que la Princesse ne pouvait emprunter. Dixit les toits… même si durant le trajet l’idée passa très vite à la trappe après qu’elle ait décidé de couper à l’improviste dans un bâtiment après avoir cru entendre un battement d’ailes. Coller au mur, la ranger jeta un bref regard à la fenêtre pour voir passer dans le ciel une de ses Harpies. La créature ne s’éternisa pas dans la zone, comme si elle avait trouvé quelques choses plus dignes d’intérêt pour elle.

« Je les avais oubliés ceux-là… Pour n’en voir seulement que maintenant et pas au palais, Arès ne doit pas en avoir beaucoup sous la main. »

Un cri inhumain se firent entendre un peu plus loin, à la fois comme cri d’alarme mais aussi comme arme à en juger le côté aigu insupportable pour les oreilles proches.

« Et elle a trouvé quelques choses. Et ce que j’en sais, ça chasse seulement en groupe pour appeler ses consœurs de la sorte. »

Ça ne tiendrait qu’à elle, Rin continuerait son chemin : une attaque de ce genre restait une diversion à ses yeux. Mais comme Rhian, elle non plus ne pouvait pas savoir sur quoi elles allaient attaquer. Patrouilles ? Civils ? Une chose était sûre, c’était une cible. Et pour si l’elfe n’avait aucune attache à cette ville, ce n’était pas le cas de la Princesse.

La capitale était assiégée. Rhian voyait ici et là des points d’incendie, des maisons qui s’étaient effondrés, ainsi que des cadavres, aussi bien des soldats que des civils. La journée avait dû être terrible, de quoi serrer le cœur de la Princesse. Des éboulements les empêchèrent de passer par de grandes avenues, ce qui était d’autant plus risqué que des affrontements et des escarmouches avaient encore lieu entre les soldats papuans et les monstres olympiens. Riniya suggéra de passer par les toits, et, même si Rhian n’était pas une alpiniste, elle acquiesça. Les deux femmes passèrent par une ruelle dérobée, et se rapprochèrent d’un immeuble permettant de rejoindre les toits, évitant prudemment une patrouille d’Olympiens en se dissimulant dans une alcôve.

Toutefois, Riniya aperçut une harpie, et constata que l’idée de passer par les toits n’était sans doute pas idéal :, surtout quand, suite à un hurlement, plusieurs harpies fondirent sur un toit, attaquant quelques archers papuans.

« Effectivement… Il n’y a pas forcément beaucoup d’Olympiens, mais notre armée n’est pas encore arrivée. »

Les soldats olympiens n’étaient pas là pour coloniser la capitale, mais clairement pour faire le plus de dégâts possible. Rhian était mortifiée. La Boîte de Pandore était-elle vraiment responsable de tout ça ? Papua disposait d’une mythologie bien spécifique, mais elle avait entendu parler de la Boîte, un artefact mythique ayant absorbé tous les maux du monde suite à l’attaque des Grands Anciens, offrant à l’humanité une seconde chance, si on en croyait les légendes de l’Ordre Divin.

« Nous ne sommes que deux, et tu es la seule combattante. Inutile de vouloir défier des harpies. »

Rhian connaissait fort heureusement plutôt bien Papua, et se déplaça donc. Les Olympiens ne cherchaient pas à faire de prisonniers, et Rhian avait pu le constater. Le duo s’enfonça dans une ruelle, dévalant des escaliers, et rejoignirent une assez grande maison. En la traversant, elles pourraient rejoindre un autre quartier, plus luxueux, les rapprochant ainsi de l’Arsenal. Rhian continuait à avancer, et s’arrêta brusquement en rejoignant une agréable cour. Une fontaine se trouvait au centre, et une masse brune émergea dans un coin, près d’un garde-manger.

La Princesse se pinça les lèvres en voyant les cornes du monstre. Son corps massif et hirsute se redressa lentement. Un Minotaure, qui tenait dans la main une longue hache. Le Minotaure grommela en voyant les deux femmes.

« Et merde… » pesta Rhian.

Ça, ce n’était clairement pas prévu !

Riniya serait tentée de dire qu’elle n’appréciait guère qui volait et pourtant, maintenant elle ne dirait que « ce ne sont que » des harpies. Pour avoir passer d’un monde médiéval fantastique sans aucun préliminaire, la première fois que la compagnie de mercenaires lui avait montrer ses magnifiques inventions qu’était les drones en vue de sa remise à niveau, ce jour-là elle était à la fois autant émerveillée qu’apeurée. Pour les unes faisaient fantasmer bon nombre d’hommes en leur mettant le grappin dessus avant de les relâcher à cinq ou six mètres du sol, là où les seconds révolutionnaient la perception de l’assassinat et de l’espionnage que pouvait avoir l’elfe à une époque. Au moins, elle remercia intérieurement Rhian de ne pas se mêler d’un combat qu’elle se serait bien passer.

« En même temps, je ne vois pas beaucoup de pays en dehors de Lumen capable de prévoir de se munir d’une flotte pour contrer une invasion maritime d’envergure. A moins d’être tordu et de vider inutilement les caisses du royaume, vos généraux ne pouvaient pas prévoir un tel coup. »

Parler de la flotte de Lumen revenait à parler d’un « secret défense » qui rimait plus avec « secret de polichinelle » qu’autre chose. Elle aurait pu rajouter qu’avec le protectorat actuel avec Mijak mais Riniya garda la remarque pour elle-même. Soit le sujet était brulant, soit il ne l’était pas et Rin ne connaissait pas le point de vue réel de la famille régnante. Et parler politique, l’elfe n’en avait que faire en plus de ne plus être très à jour sur le sujet sur Terra.

Pendant le trajet, l’elfe se contenta de zapper entre plusieurs vues pour éviter quelques patrouilles, mais cessa assez rapidement ce petit jeu en se concentrant davantage sur ce qui pouvait y avoir dans les airs que sur terre. Le résultat fut une baisse de vigilance pour quelques choses qui n’aurait pas dû passer inaperçu vu sa hauteur et aussi sa largeur. Là où Rhian pesta, Rin blanchit en voyant le colosse les repérer, suivit de près par un rire nerveux.

« Je n’ai vraiment pas prévu de me faire défoncer par un minotaure… Je les aime grosse mais tout de même… »

C’était purement nerveux, raconter des absurdité ça calmait l’elfe comme elle pouvait car elle ne se savait pas assez équiper pour faire face à cela. Les momies étaient une galère à éliminer, les harpies restaient des humanoïdes aux physiques et à la résistance proche d’un humanoïde classique, et de même pour les gorgones… mais un minotaure ! Sur ce qu’elle en sait, ses bestiaux étaient de véritables radars sur pattes en plus d’être de véritables machines à tuer. Elle n’avait plus qu’une flèche explosive en réserve et elle ne comptait même pas sur ce qui restait dans son pistolet automatique. Son bouclier ? Elle ne savait même pas si ça résisterait à un tel coup.

« J’ai peut-être vu large quand j’ai dit qu’un Dieu sur mon tableau de chasse, ça ferait joli sur mon CV… Parce que là, je regrette vraiment les cyclopes, avec eux on aurait pu au moins leurs passer entre les jambes. Alors on va éviter de l’énerver… du moins pas trop vite… »

Son regard se porta un peu sur son environnement, il ne fallait pas louper son coup car elle n’aurait droit qu’à un seul essai. Et pourtant son regard se porta sur la fontaine présente mais elle restait trop loin pour canaliser cet élément.

« Je vous propose deux choses : soit de fuir mais je crois que cette bête connait mieux le quartier que vous. Soit de courir le plus rapidement dans le quartier de l’arsenal pour tomber nez à nez avec des Olympiens avec tout ce boucan. »

Deux merveilleux choix, le troisième étant le combat. Le monstre commença à se diriger vers les deux femmes à grand pas sans chercher à charger, le bruit de la lourde hache trainant sur le sol, cachant ainsi ses lourds pas. Sans prévenir, Riniya leva un nuage de poussière pour gêner sa vision et espérer, en vain, de l’aveugler. Même si elle ne se déplaça que de deux mètres sur sa droite, la première flèche ne tarda pas à voler. Le projectile avait beau avoir atteint sa cible, ce ne fut qu’un bruit métallique qui se fit entendre : la flèche venait de frapper le plat de la hache là où elle aurait dû atteindre le visage du cornu. Aucune raison qu'il n'ait pas de bons réflexes et un minimum d'instinct de survie... Et cela fut suivit d'un léger beuglement, signe que même si la colère ne l'avait pas gagné, il n'en était pas moins pas très content de s'être fait tiré dessus.

Un Minotaure… C’était un sacré obstacle ! Rhian apprenait à manipuler une dague, mais, face à un monstre de ce genre, elle préféra s’abriter derrière un pilier le long des ogives entourant le hall du palais. Le Minotaure n’avait pas encore noté la présence des deux femmes, s’intéressant à un cellier.3 Le problème était qu’il se trouvait devant la sortie. Riniya proposa de le contourner prudemment, et Rhian acquiesça. Elle resta silencieuse, et les deux femmes avancèrent donc. Le Minotaure tira une énorme cuisse de poulet, et souffla dessus, avant de commencer à la dévorer. Il se retourna brusquement en entendant du bruit, et se redressa, tournant sa tête vers les deux femmes.

Jurant silencieusement, Rhian s’abrita derrière le pilier, et entendit les pas lourds du Minotaure, sa respiration puissante et pesante. Il tenait une lourde hache ensanglantée, ce qui pinça le cœur de Rhian, car cela signifiait que le Minotaure avait dû tuer quelqu’un. Rhian le laissa marcher sans rien dire, et Riniya décocha alors son arc.

*Qu’est-ce qu’elle fait ?*

Allait-elle essayer de le tuer ? Il fallait un tir bien précis, car sa fourrure était très épaisse ! Le Minotaure avait de légères pièces d’armures métalliques sur le corps, et la flèche fusa. Elle toucha alors la hache, provoquant un  écho métallique. Surpris, le Minotaure hulula, et regarda alors autour de lui, avant de gronder, et balaya l’air avec sa hache, puis renifla l’air.

« On peut le contourner, et filer par le palais, Riniya… »

Rhian avait récupéré dans sa main un verre doré avec des pierres précieuses incrustées dedans. Elle arma son bras, et le jeta alors dans une autre partie du hall. Attiré par le bruit, le Minotaure se déplaça en hurlant, et les deux femmes en profitèrent pour courir rapidement. En les entendant, le Minotaure se retourna à nouveau.

« Rrrrroooaaaaarrr !! »

Une flèche jaillit pour le retenir, et les deux femmes filèrent par une porte, évitant le Minotaure, et entrèrent dans un hall. Le couloir était trop petit pour le Minotaure, et les deux femmes s’avancèrent donc.

« Pffiouh… »

Rhian reprit son souffle, commençant à se sentir plus apaisée, presque sereine.

« Ce palais est la demeure d’un riche marchand. Il a dû s’enfuir quand les Olympiens ont commencé à envahir la ville… »

La Princesse se déplaça lentement, et le duo rejoignit le hall, avec un grand escalier intérieur menant vers une mezzanine à l’étage. Un lustre était accroché au plafond, et quelques candélabres sur des meubles permettaient d’éclairer les recoins. Rhian déglutit en voyant des édredons sur le sol, des coussins troués libérant des plumes… Et de nombreuses statues. Des visages figés, des serviteurs hurlant de peur, des soldats figés en brandissant des lames.

Rhian sentit son cœur manquer plusieurs battements en comprenant que la traversée de ce palais ne sera pas si simple, car des Gorgones avaient envahi les lieux !

Si Riniya avait la réputation de savoir plus que bien tiré, ses créatures n’en restaient pas moins pourvu d’un certain instinct de survie. Après les cyclopes, les minotaures savaient eux aussi se protéger les yeux. Quant à savoir si ses bestiaux avaient davantage autres qu’une vision nocturne, l’elfe n’avait pas le vice de connaître toutes les créatures mythologiques, ses dernières n’étant pas prévu sur son programme de chasse à l’origine. Il venait de balayer l’air, pas content et de toute manière, il n’avait pas l’intention de compter fleurette aux dames dès qu’il les avait repérées. Un peu plus, un peu moins, pour ce que ça changeait… Ah si peut être le mur qui venait de se fracasser au loin au fur et à mesure que les deux femmes s’éloignaient, aurait lui, connu un sort moins funeste pendant leur fuite.

Cette fuite, elle les mena à la demeure d’un des grands marchands de la ville. L’endroit semblait déjà avoir été visité et Rin aurait préféré de loin l’absence de la garde rapprochée, du personnel et du maître des lieux que de les voir sous leurs formes actuelles. Des gorgones… et vu ce minotaure qui s’énervait à se voir ne pas rentrer par la porte d’entrée, leurs arrivées ne devaient pas avoir passé inaperçu. Le seul bon côté de cette affaire, avoir énervé un minotaure permettait de marcher convenablement, le temps qu’il trouvait un mur pas trop épais à défoncer et rentrer, les beuglements et des dégâts atténuait les bruits de pas. Une maigre compensation au vu de la dangerosité du bestiaux.

« Lui, je ne sais pas, mais son personnel n’a pas eu cette chance… »

Les dires auraient pu s’arrêter là si la miss n’avait pas eu le vice de looter pitoyablement les quelques couches de vêtements et de se servir de la main d’un serviteur horrifié comme porte-manteau. En fait, elle s’enroulait davantage de vêtements au bras gauche pour éviter toute morsure si jamais les choses devaient finir en une mêlée qu’elle se serait bien passé, ne gardant que la cape d’un des soldats. Puis elle ramassa un des glaives au sol.

« Même mi humaines, elles me font chier. J’ai l’impression que ses foutus rampants passent à travers ma vision thermique. Mais le bon côté… »

Elle baissa de ton avant de marcher silencieusement vers l’intersection d’un couloir, se servant du reflet de la lame pour ne voir qu’un bref reflet diffus bouger. Hors de question d’y aller au pistolet, si celle là n’était pas seule, Riniya se savait incapable de toutes les gérer en même temps.

« Ça ne sait pas se déplacer sans siffler… »

Avec le souk que faisait le minotaure, rien d’étonnant qu’une d’entre elle vienne voir ce se passe dans cette endroit-là. Sans prévenir, Rin sortit de sa cachette pour lancer le glaive de toutes ses forces, toujours en profitant de l’exosquelette. Celle-ci n’aura à peine le temps de réagir qu’un cinq mètres, elle se prit le glaive dans le ventre, mais pas suffisant pour la tuer sur le coup. Mais la douleur ne s’arrêta pas puisqu’elle sentit un grappin se planter dans l’épaule. Riniya appuya l’une de ses jambes sur le mur avant le mécanisme et l’attirer vers elle. La suite fut un peu plus confuse avec une obligation de l’elfe à regarder le carrelage de la demeure que de flatter une gorgone sur la couleur de ses yeux. Cette dernière se prenant la cape précédemment récupérée sur le visage, avant de sentir la lame du cimeterre le traverser, lui traversant le crâne par la même occasion. Dans le jargon, c’était ce que l’on appelait une élimination vite fait, bien faite, même si au passage elle venait de saloper le couloir. Il n’y avait pas à dire, la pétrification, c’était quand même plus propre…

« Ne nous attardons pas trop là… Ses « sœurs » vont vite comprendre qu’elle manque à l’appel. »

Un sifflement dangereux ne tarda pas à se faire entendre, signe qu’une Gorgone s’approchait. Rhian se dépêcha de se dissimuler dans un coin, tandis que Riniya en faisait de même, tout en se préparant à agir. Mais Rhian, elle, réfléchissait surtout, tentant de se rappeler à qui appartenait cette maison. Elle connaissait quasiment tous les aristocrates, les bourgeois, et les marchands de la capitale, qui venaient très régulièrement au palais en temps normal, pour soumettre leurs doléances, transmettre leur sympathie, ou conclure des contrats. Rhian puisait donc dans sa mémoire, et le nom ne tarda pas à venir.

*Moussoul al Hassein !*

Moussoul était un marchand papuan qui avait fait fortune en commerçant sur la Mer de Papua avec les autres provinces impériales, vendant des biens papuans, et achetant ensuite des biens émanant des autres provinces pour les revendre sur les marchés papuans. Tout en réfléchissant, Rhian se rappela aussi que Moussoul avait un laboratoire d’alchimie, et achetait beaucoup d’ingrédients alchimiques, disposant de sa propre boutique d’alchimie, où il vendait des élixirs.

Pendant ce temps, une dangereuse Gorgone se rapprocha. Avec les biens retrouvés sur place, elle lui tendait un piège. Attirée par le bruit, la Gorgone siffla dangereusement, regardant autour d’elle. Le Minotaure s’agitait toujours dans la cour, poussant de grands hurlements… Des beuglements qui permirent à Riniya d’attaquer discrètement. Mortifiée, Rhian regarda le combat, saisissant sa dague, prête à intervenir. Les yeux de la Gorgone s’illuminèrent alors, comme si elle cherchait à pétrifier Riniya.

*Non, pas ça !*

Évitant le contact, Riniya devait se battre sans regarder son adversaire, ce qui n’était pas simple. Rhian était donc prête à intervenir, mais, finalement, Riniya planta son épée dans le crâne de la Gorgone. Un sifflement ténu s’échappa des lèvres de la Gorgone qui s’effondra sur le sol, avant que son corps ne soit traversé de spasmes sporadiques. Elle se tortilla sur le sol, répandant un sang verdâtre sur le sol, toxique. Toutefois, elle était bel et bien morte, grâce à un habile stratagème où Riniya l’avait aveuglé à l’aide d’une capa.

Se rapprochant, Rhian sourit doucement à Riniya.

« Bien joué ! »

Les félicitations seraient toutefois de courte durée, car d’autres grognements se faisaient entendre dans les hauteurs. Plutôt que de monter, Rhian fila par une porte au rez-de-chaussée, et s’aventura dans un couloir avec Riniya.

« Nous sommes dans le palais de Moussoul al Hassein… Je suppose qu’il a dû se réfugier dans son coffre-fort… Mais il y a aussi un laboratoire d’alchimie, nous y trouverons peut-être des élixirs pour nous aider, notamment pour se protéger contre la putréfaction des Gorgones. »

Rhian s’avança donc, longeant le couloir, la main sur la garde de sa dague. Mieux valait éviter autant que possible les Gorgones. Le couloir les amena vers l’arrière de la propriété, croisant plusieurs gardes statufiés. Continuant leur progression, elles se rapprochèrent d’une autre porte, où Rhian put entendre du bruit. C’était bien le fameux laboratoire, éclairé par plusieurs bougies, mais une Gorgone se tenait déjà à l’intérieur…

…Une Gorgone bipède qui travaillait sur plusieurs fioles.

« Il va falloir se débarrasser d’elle, glissa Rhian à voix basse derrière la porte. Tu as une idée ? »

Rin ne fit que nettoyer sa lame sur la capa déjà ensanglanter de la gorgone. Pas de récupération, elle ignorait si ses saletés pouvaient sentir le côté ferreux du sang, et l’elfe n’avait aucune envie de le vérifier dans l’immédiat. Quand la Princesse lui parla de al Hassein, l’elfe ne retint qu’une chose : son laboratoire d’alchimie avec toutes les herbes et ingrédients rares qui s’y trouvaient. Même de nom, elle ne connaissait pas ce riche marchand. Il fallait dire que même à Lumen, la pauvre ranger n’était plus l’exemple même de la gradée qui était à la page concernant l’aristocratie, avec un retard d’une bonne décennie qu’elle n’avait même pas pris la peine de rattraper en revenant sur Terra.

Le lieu était clairement un repaire à Gorgone, avec un nombre anormal de ses créatures. Rien à voir avec celles croiser auparavant, qui s’était mélangé avec les soldats Olympiens. A croire que ce lieu était au goût de ses dames et qu’elles se soient décidées d’en faire un baraquement, avec tout le confort qui allait avec. La réponse ne se fit pas attendre car même si Riniya n’y connaissait pas grand-chose en créature mythologique, la gorgone que lui montra discrètement Rhian avait tout l’air d’être supérieur aux autres. Une blessure fatale avec une arme classique suffirait à la tuer en vidant son chargeur ? Pour ramener les autres après un tel brouhaha ? Une flèche à la nuque, même enchanté grossièrement, suffirait à la tuer aussi ? Et dans le cas où elle sentirait une perturbation magique ? La seule manière où Rin était unanime qui la tuerait sans le moindre doute, serait la décapitation. Hors, si on pouvait décapiter aussi facilement que l’on épelait ce mot, ça se saurait !

« Pas sûr que je l’ai du premier coup celle-là… »

Son regard se fixa sur l’une des alambics en verre en ébullition sur le laboratoire qui apparût à plusieurs reprises dans son champs de vision. En réalité, ses lentilles faisaient une rapide analyse du contenue, pour lui apprendre qu’il s’agissait surtout en grande partie de l’eau en ébullition à haute pression avec un mélange d’herbe non identifié.

« Je peux m’occuper de sa vision pendant quelques temps… La suite il faudra-merde ! »

Si elle aurait bien aimé dire que la suite il faudrait improviser, le fait de voir un des serpents de sa chevelure commencé à regarder sur le côté fera agir une Rin qui n’avait aucune envi de vérifier si celui-ci était doté d’une conscience propre ou non, et si il était capable de communiquer avec sa propriétaire. Une flèche vola à l’improviste pour éclater l’alambic qui se brisa, laissant échapper de l’eau au visage de sa propriétaire qui se retourna à l’improviste, en partie éclabousser et brûler. A peine retourné que ses yeux s’illuminèrent, comme si elle se préparait à pétrifié le premier individu qu’elle voyait, qu’il soit ou non accompagné d’une de ses sœur. Riniya était déjà sorti de sa cachette, commençant à courir vers le milieu de la pièce, en faisant un bref signe de main, qu’elle pointa en direction de la gorgone. L’eau qu’elle avait sur le visage commença à gelotter, la fine couche de glace lui brouillant temporairement la vision. Il aurait pu y avoir contact entre elle et l’elfe, mais cette dernière préféra rouler sur le côté en voyant le crachat venimeux sortir de la bouche de son ennemi. Le bouclier énergétique n’était pas du tout adapté pour ce genre d’attaque.

Il fallait affronter la Gorgone bipède. Celle-ci était en train de confectionner des élixirs, laissant entendre chez cette créature monstrueuse une pensée rudimentaire. Rin attaqua alors rapidement, car la Gorgone commençait à se retourner, ayant perçu leur présence. Le monstre tenait dans la main une bouteille d’eau bouillante que Rin éclata d’une flèche. L’eau explosa sur le visage de la Gorgone, qui siffla furieusement. Se pressant alors, Rin utilisa sa magie pour geler l’eau, brouillant sa vision.

« Sssssalope de magicienne ! »

La Gorgone cracha furieusement autour d’elle. Rin n’eut aucune difficulté à esquiver les traits, mais les serpents sur la tête de la Gorgone sifflaient à leur tour. Récupérant une lame empoisonnée sur une table, la Gorgone attaqua. Sa lame découpa l’air en deux. Elle avait une sorte de teinte verdâtre, et laissa sur sa cible des traces toxiques. L’épée siffla encore, manquant décapiter Rin qui dut s’agenouiller. L’épée frappa encore, et la Gorgone se déplaça encore.

Rhian inspira alors, et courut à son tour, tenant sa dague à la main. Elle vit la Gorgone se retourner en notamment sa présence. Les serpents sifflèrent, mais Rhian, plutôt rapide, planta à deux mains sa dague dans le cou de la Gorgone, transperçant sa chair. Il y eut un choc sourd, un horrible bruit de craquement quand la dague atteignit l’os… Puis la Gorgoen partit à l’arrière, heurtant plusieurs flacons. Malgré l’eau qui avait partiellement gelé son visage, la surprise se lisait sur son corps et sur son visage, une incompréhension totale.

La Princesse se retira alors prudemment, et la Gorgone siffla encore. Ses mains remuèrent dans le vague, et se saisirent de la pointe de la dague, qu’elle chercha vainement à retirer. Ses serpents poussèrent des hululements moribonds, des cris suraigus qui durent résonner dans tout le manoir, vibrant auprès des autres Gorgones.

*Merde !*

La Gorgone bipède s’effondra ensuite sur le sol. Quand Rhian récupéra sa dague, le sang fusa à vive allure, et elle s’écarta précipitamment, évitant ainsi d’être touchée par le sang puant de la Gorgone.

« Malheureusement, je crois qu’elle a prévenu les autres Gorgones, il va falloir partir par l’arrière. Est-ce que vous voyez des élixirs susceptibles de vous aider ? »

Ayant quelques connaissances rudimentaires en alchimie, Rhian regardait déjà autour d’elle, cherchant des élixirs de soins dans les réserves du laboratoire, tandis que des bruits de reptation se faisaient entendre dans les tréfonds du manoir…

Salope de magicienne… Cette remarque serait insultante pour la majorité des magiciens si ceux connaissaient le niveau réel de Riniya : un niveau moyen qui se limite beaucoup à manipuler des éléments. Ce niveau faisait de l’elfe un adversaire dangereux et surtout sournois qui l’obligeait à utiliser des sorts de moindre puissance au maximum de leur efficacité. Confondre un ring avec un champs de bataille était une erreur monumentale : l’un pouvait demander une revanche là où un mort ne le pouvait pas. Le visage surpris de la Gorgone laissait comprendre sa dernière pensée : elle venait de perdre la vie face à un bête adversaire, avec des tours de passe-passe que l’on apprenait dans n’importe quelle université de magie aux premières années. Ses quelques secondes de répits, elle les devait à sa chevelure particulière et au fait que l’elfe devait forcer le corps à corps frontale de peur que sa fine pellicule de glace ne cède. Pas de chance pour elle, la mort ne venait pas de la blonde, mais de la Princesse qu’elle n’avait pas pu prêter attention à cause de son pot de colle d’adversaire.

Même à terre, Rin se douta bien de son dernier geste, ce qui provoqua chez la ranger un geste raffiné pour une action qui ne l’était moins : celui de confondre son cimeterre avec un club de golf. La lame a raflé le sol, donnant un bruit un peu strident et où le coup fini par remonté en hauteur, le cou de la Gorgone étant sur sa trajectoire. La tête finit par rouler dans la pièce. Peut-être qu’elle était morte, mais maintenant les doutes s’était envolé. Petit détail étrange et peu ragoutant, alors que les serpents agonisaient, l’elfe perdit quelques secondes à les narguer… et surtout à ce qu’ils s’acharnent sur la lame qui venait de décapiter leur maitresse. A peine un adversaire abattu qu’elle pensait déjà au suivant…

L’elfe posa un genou à terre, non pas pour regarder le corps mais plutôt pour ramasser le glaive avec un certain intérêt. Elle le sentait, l’arme était magique, et à défaut de reconnaître des runes qui lui était incompréhensible, l’enchantement devait être lié à la toxicité de l’arme. Le reste, ça ne restait qu’une arme à imprégner avec de la magie pour l’activer, et pour Riniya c’était comme le vélo, ça ne s’oubliait pas. Lorsqu’elle revint à l’atelier, se fut surtout pour ranger ladite lame dans le fourreau posé dessus et la coincé à son shorty, avant de regarder rapidement le contenue. Les frangines n’allaient pas tarder après tout !

« Le bon côté de fournir les ingrédients et de récupérer les potions toute faite, on finit par savoir quand l’alchimiste essaie de t’entuber ou non. »

En fait, elle n’était pas si pas perdu que ça l’elfette ! Alors oui, elle restait incapable de doser correctement une potion de soin et ses connaissances en alchimie se limitait beaucoup à savoir quand une potion pouvait exploser si elle devait être trop maltraité.

« Al-Hessein est surtout un spécialiste en parfum à ce que je vois. Hmm… Les fioles incolores à priori vide, ça peut être utilisé comme hallucinogène une fois brisée. Horreur ou fou rire, ça dépend du bad trip mais c’est la première étape d’un procédé plus… « intéressant » et… la vache, il a réussi à synthétiser parfaitement ça en parfum ! Je comprends mieux pourquoi la bougresse s’y intéressait de près ! »

Inutile de s’attarder sur le plus intéressant à une Princesse d’un royaume réputé pour son harem. Ce que Riniya trouva de son côté, ce fut quelques potions pour développer tous ses sens (plus trop utile avec ses appareils technologiques) et quelques élixirs de soins. En espérant que du côté de la Princesse elle fasse une meilleure pioche.

En regardant autour d’elle, Rhian vit surtout des élixirs de magie rose. Des aphrodisiaques, des potions de virilité, de puissance sexuelle… Rien qui ne la surprenait vraiment. Elle laissa les flacons ici, tandis que Riniya empruntait quelques élixirs de soins. Elle se déplaça ensuite, appréciant l’effort mis à l’étiquetage des flacons, et trouva finalement des élixirs plus utiles. Si Rhian n’était pas alchimiste, elle connaissait tout de même certaines notions, et trouva notamment du Liseron, un élixir protégeant contre l’acide et les empoisonnements.

« Tiens, ça pourrait nous être utile contre les Gorgones… »

Le temps jouait contre elles, car les Gorgones se rapprochaient dangereusement. Rhian dut finalement attraper Riniya par l’épaule pour l’inciter à sortir. Le duo fila dans le couloir, et traversa le couloir, rejoignant l’arrière-cour. Des sifflements se firent alors entendre, et, au fond du couloir, une Gorgone apparut alors.

« Ksssssss… !! »

Rhian sentit son cœur s’emballer, tandis que les yeux de la Gorgone s’illuminèrent dangereusement. Dans leur dos, une autre Gorgone les suivait, et les deux femmes filèrent par une porte latérale, rejoignant une grande salle à manger. Une longue table de banquet se trouvait là, avec une mezzanine en hauteur, et une Gorgone bondit depuis les hauteurs, atterrissant en plein milieu de la table, et siffla furieusement, bondissant vers Riniya.

La vitesse de l’attaque surprit les deux femmes, et Riniya tomba au sol. Rhian attrapa un chandelier en or à proximité, et, tandis que les serpents mordaient Riniya, elle frappa la Gorgone à l’arrière du crâne. Le Liseron allait donc prouver son utilité, car il allait protéger Riniya du venin des serpents de la Gorgone. Heurtée par le chandelier, la Gorgone relâcha Rinaya, fuyrieuse,e t attaqua Rhian. Le chandelier fut jeté sur la table, rebondissant à plusieurs reprises, et la Gorgone attrapa Rhian par la gorge, plaquant la Princesse sur la table. Ses yeux s’illuminèrent alors, et Rhian hurla, tentant de ne pas la regarder. Elle se débattit furieusement, ses jambes renversant une chaise.

Mais les yeux de la Gorgone étaient hypnotisants, comme deux phares. La Gorgone serra sa main sur sa gorge, enfonçant ses griffes dans sa peau, et siffla encore. Même avec les paupières fermées, Rhian pouvait sentir l’intensité de ce regard, qui risquait de la pétrifier. Sa main libre tâtonna autour d’elle, et attrapa in extremis un ustensile, un couteau en argent. Elle attaqua alors, et le planta dans le cou de la Gorgone. Un coup qui aurait pu tuer n’importe qui dans une œuvre fictionnelle, mais qui fit reculer la Gorgone. Celle-ci hoqueta, furieuse, tandis que Rhian aspirait de l’air libre, retombant sur le sol.

La situation se compliquait gravement, car d’autres Gorgones se rapprochaient.

« Kof ! Kof ! » éternua-t-elle, la gorge enrouée par la prise de la Gorgone.

Celle-ci ne l’avait clairement pas loupé ! L’heure n’était toutefois pas à l’affrontement, car les yeux des Gorgones continuaient à luire dangereusement, celles-ci cherchant à les pétrifier.

« Le lustre ! Tire sur le lustre pour le faire tomber ! »

Un énorme lustre surplombait la salle de banquet, un moyen idéal de ralentir les Gorgones…

Les fioles de soin restèrent une bonne trouvaille aux yeux de Riniya : ça ne cramait pas temporairement ses facultés magiques à les boire contrairement à tout ce qui était à base de nanotechnologie à vertus médical. Même si sa pioche fut moins miraculeuse que la Princesse, à ses yeux cela valait bien une Gorgone décapité. Surtout qu’elle avait l’air d’être plus évoluée que ses sœurs ! Par contre, Al-Hessein risquait de ne pas retrouver ses quelques parfums quand toute cette histoire sera terminée. Autant l’elfe ne peut pas être comparé à une salope de magicienne, autant elle n’en restait pas moins un peu salope sur les bords lorsqu’elle profitait de ses permissions…

Elle se fit d’abord trainer par Rhian avant de la suivre alors que c’était censé être elle la garde du corps. Autant dans un fort, même non Lumen, elle arriverait à trouver vite ses repères, autant la vie de palais restait une inconnue à ses yeux. La seule chose dont elle sera certaine, plus le temps passait, plus elle avait l’impression d’être encerclée. Lorsqu’elle Rhian choisit une porte latérale, se fut un bruit de verre brisée qui se fit entendre, Riniya ayant brisé le « paquet de fioles hallucinogènes » derrière elle. L’elfe l’avait dite, ça restait qu’un procédé alchimique parmi tant d’autres, avec un effet assez hasardeux pour une efficacité qui l’était tout autant, mais elle était certaine que les poursuivantes n’allaient pas être totalement saines d’esprits, même si leurs intentions resteraient les mêmes : tuer les intruses.

Dans la salle à manger, elle n’eut le temps que de voir tomber la gorgone, penser à lever la tête dans une telle situation ne faisant pas parti de ses priorités les plus absolus. Son premier réflexe fut de passer devant la princesse. Le second fut de vouloir taper avec le plat du pied sur la table pour déséquilibrer le monstre dessus. L’exosquelette lui permettait ce genre de prouesse sur une table supposée bien lourde. Mais la gorgone fut si rapide qu’elle chuta sur le dos avec la créature sur elle, le souffle coupé sur le moment. La mêlée fut très courte à un tel point que la militaire n’eut même pas le temps de mettre la main sur une de ses lames, si la méduse se retrouva l’avant-bras sous le cou pour éviter une possible morsure de celle-ci, les serpents eux s’y donnait à cœur joie.

Assez vite désarçonner, Riniya serra le poing pour ignorer la douleur des morsures. Intérieurement, l’elfe savait qu’elle venait d’éviter le pire en évitant une morsure bien plus dangereuse… mais la douleur qu’elle ressentait en ce moment n’avait rien de naturel. Ce qu’elle vit de la situation, Rhian venait finir de se battre à son tour contre cette gorgone, les deux se maintenant chacune la gorge de manière différente. La gorgone se prit en plus le 37 de Riniya en pleine figure, celle-ci se retrouvant sur la table à moitié chancelante.

En voyant d’autres gorgones arrivé, l’elfe laissa tomber son arc pour passer à une arme plus radicale telle son pistolet. Si l’idée de base fut de l’utiliser contre les gorgones, celle de tirer sur le lustre semblait une bien meilleure option. Deux coups de feu raisonnèrent dans la pièce, la chaîne maintenant le lustre cédant sous l’impact. Suivit un gros brouhaha avec ce lustre qui fracassa sur la table, avec tout de même quelques grincements de dents pour le sort de celle qui venait de se faire écraser le crâne sous le poids de celui-ci. Riniya n’eut que le temps de tirer la Princesse et la sortir de la pièce en profitant du chaos ambiant.

Les deux femmes tombèrent sur une sorte de boudoir avec un fumoir, bureau et plus divans. Un endroit parfait pour parler affaire avec des clients après un diner, avec une vue sur ce qui semblait être sur les jardins. En s’y engageant, Rin incanta rapidement un sort pour faire pousser de façon plus archaïque quelques plantes de leurs pots. Pas de quoi arrêté une meute de gorgones enragés mais de quoi les ralentir quand elles comprendront que les fuyardes sont passé par là.

Qu’on ne vienne pas dire, après toutes ses épreuves, que Rhian n’était pas courageuse ! Si son père osait encore la relayer aux broderies ou aux tapisseries, elle allait se fâcher ! Rampant sous la table, elle entendait les Gorgones siffler. Elle avait aidé autant que possible Riniya, mais, et même si elle en avait horreur, il fallait bien se rendre à l’évidence, elle n’était qu’une Princesse ! Elle n’avait pas reçu la formation militaire d’Herebos, elle ! Rampant vers la sortie, elle entendit alors de terribles détonations, semblables à des coups de tonnerre miniature, et entendit ensuite le lustre tomber, dans un énorme brouhaha. Les Gorgones sifflèrent rageusement, et Rhian, qui rejoignait la sortie de la table, sentit celle-ci s’effondrer. Une main jaillit alors devant son champ de vision, et Riniya la traîna hors de la table.

Se relevant rapidement, Rhian n’eut même pas le temps de la remercier, mais vit, avec curiosité, un petit objet noirâtre métallique que Riniya tenait dans sa main. Elle n’avait encore jamais eu l’occasion de voir un tel engin, et se demanda si les coups de tonnerre qu’elle avait entendu ne venait pas de ce truc.

*C’est ridicule !*

Elle n’eut pas le temps de poser la question à Riniya. Le duo fila par une porte latérale, qui les amena très rapidement dans un couloir, puis dans un boudoir. Des pièces classiques, attenantes aux salles à manger, où on venait digérer en fumant, avec une porte-fenêtres surplombant de quelques centimètres des jardins à l’arrière.

« La fenêtre ! » indiqua Rhian.

Celle-ci donnait directement sur les jardins extérieurs, mais Riniya n’eut même pas besoin de l’attendre qu’elle se précipitait déjà vers celle-ci. L’adrénaline battant furieusement dans son cœur, elle vi tRiniya pointer l’objet cubique, et frémit quand l’arme émit encore ses coups de tonnerre, faisant exploser la fenêtre.

« Mais quelle est cette magie ?! »

Riniya lui répondit en se dépêchant de sortir. Les Gorgones sifflaient encore, et Rhian obtempéra. Évitant les bris de verre, elle passa par la terrasse, enjamba la balustrade, et courut. Une fontaine se trouvait au centre, et, derrière elles, la végétation se mit à pousser. Rhian vit une lueur verte autour des mains de Riniya, et comprit que cette dernière faisait appel à sa précieuse magie elfique, de manière à retarder leurs poursuivants.

Au fond des jardins, il y avait une porte solide menant à la rue. Celle-ci était fermée. Rhian se pinça les lèvres, et interrompit Riniya quand celle-ci voulut faire fondre la serrure.

« Laisse-moi faire ! N’oublie pas que je suis la Princesse de Papua ! »

Elle n’était pas une spécialiste dans le crochetage, mais elle disposait avec elle d’un certain nombre de passe-partout, et, lors de leur séjour dans ce palais, elle avait trouvé des clefs dans la salle de l’alchimiste. Elle les essaya donc, tandis que Riniya repoussait les Gorgones avec son arc. Le temps pressait, et Rhian s’efforça de rester calme, tout en entendant les hurlements furibonds des Gorgones… Puis, finalement, elle sentit la bonne s’enfoncer dans la serrure, et poussa la porte.

« Allez, vite ! »

Elles refermèrent la porte derrière elles, et entendirent un choc sourd quand une Gorgone se heurta violemment à celle-ci, provoquant un choc sourd. Rhian se recula ensuite précipitamment. Elles venaient d’atterrir dans une ruelle pavée, et elle souffla lentement, heureuse de s’en être sortie.

« Bon… Je crois que je ne te remercierai jamais assez, Riniya. Continuons, l’arsenal n’est plus très loin, maintenant ! »

Le duo traversa ensuite la ruelle, se dirigeant vers une rue plus grande avec des flammes et des débuts d’incendie…

…Et une vingtaine d’hoplites qui se retournèrent brusquement vers elles.

« C’est la Princesse de Papua !
-  Hoho ! Enfin !! »

Rhian se pinça les lèvres, et allait saisir sa dague, quand d’autres soldats émergèrent encore, y compris des archers et des lanciers équipés de javelots. Difficile de fuir dans ces conditions…

« On doit vous ramener vivante auprès du polémarque, mais, en ce qui concerne votre elfe…
-  Si vous résistez, nous la tuerons ! »

Le combat était inégal, et Rhian rangea sa dague.

« C’est bon, je me rends… »

Mais qu’allait choisir Rinaya ?

Utiliser son pistolet automatique, la chose qu’elle aurait préféré éviter de faire à tout prix vu la quantité de balles qui restaient dans son chargeur. Riniya en était réduite à compter des balles là où des balles de ce calibre, il y en avait une caisse remplie dans les sous-sols de Blood Action. Et des balles combien il lui en restait ? Trois malheureuses… voilà ce qu’affichait ses lentilles puisque tout son matériel moderne était synchronisé avec le reste de son équipement. Rin aurait bien aimé que ce foutu matos se trompe pour une fois !

« Une arme à feu qui n’a rien à faire dans ce monde. » Autant dire le genre d’explication qui, disons-le franchement, n’expliquait pas grand-chose à la Princesse. Après, il fallait avouer que la situation ne s’y prêtait guère.

La fuite dans le jardin se fit moins bruyant, à coup de sifflement de flèches en direction des flèches pour les gorgones les plus rapides. Rien de bien meurtriers pour celle-ci mais suffisante à les faire ralentir et ne pas leur faire tenter une imprudence conduisant au suicide pur et simple : créature mythique ou non, une flèche dans la gorge pouvait si vite arrivée face à une bonne archère. Et à en juger le cri d’une parmi elle, la blessure infligé par une flèche infusé de magie de vent, elle avait dû la sentir passer à un tel point que la blessée, avait dû battre en retraite après reçu une flèche au niveau de la machoire.

Si le moment où Rhian crocheta la serrure ne dura pas spécialement longtemps, elle parut une éternité à Riniya qui hésita à un moment à ressortir un instant son arme dans l’espoir que ladite serrure, ne soit pas fait d’un matériau spécial. Elle n’aura pas besoin de tenter jouer cette ouverture en jouant à pile ou face. En poussant la porte, les deux femmes arrivèrent dans une grande rue, moment où l’elfe eut le vice de refermé la porte derrière elle avant de faire écrouler un empilement de caisse non loin. Au moins, elle savait à quoi servait cette porte externe, à faire rentrer diverses livraisons pour le jardinage ou la nourriture. Bonne chance pour ses véroles pour pousser une porte ou sauter un mur haut de plusieurs mètres, ils vont vite regretter de faire parti de la race des rampants !

« Je crois que ses saloperies ne me manqueront pas… Maintenant nous devrions faire gaffe, l’arsenal doit être- »

Ne jamais parler de ce qui pourrait se passer sans avoir vérifier au préalable ce qui pourrait se cacher un peu plus loin. En temps qu’éclaireuse, c’était simplement le travail de l’elfe. Sauf qu’elle n’aura pas l’occasion d’être perché à un toit avec des jumelles et marqué les cibles. Se fut nez à nez avec un régiment d’hoplites que les deux femmes croiseront, aussi étonnés l’un que l’autre devant ce genre de situation.

« C’est la Princesse de Papua !
- Hoho ! Enfin !! »
« -euh… encerclé ? »

Et encerclées, elles y seront assez rapidement puisque plusieurs autres soldats ne tarderont pas à sortir à leur tour, de façon pas toujours organisée devant la visite surprise de la Princesse, mais certainement plus que celle-ci et sa garde du corps.

Alors oui, Rin marqua une certaine hésitation, surtout après avoir compris que les droits de l’homme et du droit du prisonnier, Olympe n’en connaissait pas l’existence, mais elle restait dans une situation très délicate. Son bouclier énergétique ne serait tout géré à la fois, et même avec une arme à feu pleine à ras à bord, elle serait incapable de faire une percée. Faire sauter un groupe avec son unique flèche explosive ? Le temps qu’elle déplie son arc technologique, elle serait déjà morte. Sans parler que la sécurité de la Princesse comptait avant tout. En réalité, dans une telle situation, Riniya ne pouvait qu’espérer qu’il ne la tue pas trop rapidement, et qu’il la désarme que grossièrement avec leur méconnaissance de la technologie. Courageuse mais pas non plus téméraire l'elfette !

Même si rien ne sortit de sa bouche, elle abaissa l’arc qu’elle avait volé jusque-là, signe qu’elle allait le poser, mais n’en eut pas vraiment le temps que l’on la poussa à plat ventre contre le ventre, avant de lui mettre une main derrière le dos pour qu’elle ne puisse pas bouger. La douleur fut vive, les quelques olympiens n’y ont pas été de main morte. Et pour le matériel, on lui ôta surtout son pistolet, et ses deux couteaux, même si son arc déplié finit entre les mains d’un soldat plutôt curieux devant cet outil. Le seul bon côté ? Ils n’ont pas ôté ses bracelets et bottes, laissant ainsi ce qui formait son exosquelette. Reste à espéré que les menottes ne soit pas fait d’un matériaux spécial ou trop résistant sinon, sans élan pour forcer les liens, il ne servirait à rien.

Protésilas était un puissant polémarque. L’homme avait perdu la vie il y a des éons, lors de la redoutable guerre de Troie. L’homme était connu pour avoir été l’un des premiers attaquants à perdre la vie des mains d’Hector. Les Moires l’avaient ramené à la vie, lui avaient offert une seconde chance d’honorer les Dieux, et peut-être de revoir un jour Laodamie, son épouse. Car Laodamie s’était suicidée en se jetant dans les flammes, incapable de surmonter la mort de son mari. Pour elle, Protésilas avait été prêt à quitter les Élysées, et avait plaidé la cause de Laodamie auprès d’Hadès, qui était resté sourd à ses supplications.

Le polémarque avait établi son camp au bord de la mer, sur une falaise. Face à lui, il y avait l’Arsenal de Papua, un solide fort maritime qui était illuminé. Ses grandes tours et ses épaisses murailles avaient recueilli une grande majorité des citoyens papuans, ainsi que la famille royale. La bataille avait fait rage toute la journée, et continuait encore, autant sur terre que sur mer. Protésilas savait qu’il n’avait pas assez d’hommes pour réussir à long terme le siège de Papua. Dans le désert, ses troupes avaient pris possession d’emplacements stratégiques pour ralentir les armées papuannes, comme dans des cols ou dans des canyons, mais, tôt ou tard, ils seraient là. La bataille faisait surtout rage sur le « lac de Papua », un immense lac accessible depuis la capitale, si grand qu’il s’agissait en fait d’une mer intérieure, reliant d’autres provinces mijakiennes.

*J’ai grandi en Thessalie pour mourir loin de chez moi, à Troie… Vais-je encore mourir loin de chez moi à nouveau ? Cette fois, j’irai en Enfer, et je te retrouverai, Laodamie !*

Il se retourna lentement. Ses soldats venaient de lui ramener deux prisonnières. Il reconnut immédiatement la Princesse héritière de Papua, ainsi qu’une curieuse elfe disposant d’une technologie de pointe n’ayant rien à faire ici.

« Qui êtes-vous ? demanda Rhian.
-  Je suis Protésilas. Jadis, j’étais un Prince.
-  Pourquoi nous attaquer ? À quoi est-ce que tout cela rime ? »

Protésilas les regarda lentement.

« Je suis mort à la guerre… Mort, sans avoir pu tuer qui que ce soit. Les légendes ont fait de moi un héros, mais j’étais surtout un fou. J’ai été tué par Hector, et ramené à la vie… »

Rhian avait vu de nombreux prisonniers papuans dans des cages en se rapprochant.

« Pourquoi faire tout ça ? Cela n’a aucun sens ! Les Dieux sont supposés nous protéger !
-  Et depuis quand de simples mortels peuvent déceler les intentions des Dieux ? Le Dieu Arès m’a ordonné de capturer la famille royale de Papua. Je n’ai nul grief contre vous, nulle querelle particulière. Comme tant d’autres soldats, je me sacrifie pour une cause qui me dépasse, et donne mon sang sur un sol qui n’est pas celui de mon pays. »

La Princesse grommela. Elle était attachée à un poteau, une croix en bois, tout comme Riniya, une croix de crucifixion.

« Qu’est-ce que vous comptez faire ?
-  Je n’ai pas le savoir-faire d’Ulysse. Tout ce que mon Dieu exige, c’est la tête de votre père. Je gage que celui-ci sera prêt à se sacrifier s’il voit que sa chère fille est crucifiée sur une croix.
-  Quoi ? Je vous interdis de faire ça !
-  J’ai bien peur que vous n’ayez rien à m’interdire. Rassurez-vous, c’est douloureux, mais, tant qu’on ne vise pas les veines, ce n’est pas mortel. »

Plusieurs personnes se rapprochaient déjà. Rhian se débattit encore, mais vit un clou se rapprocher, avec un marteau.

« Non, non ! »

Le clou se planta alors dans son poignet, elle hurla de douleur, fermant les yeux. Elle versa malgré tout des larmes, tandis qu’on clouait son second bras.

« Je vous tuerai, fils de pute… »

Protésilas haussa les épaules.

« Je n’attends que ça. »

Il se retourna ensuite vers Riniya. Le quartier général de Protésilas était installé à côté d’une grande villa. Le polémarque l’observa silencieusement pendant quelques secondes, comme s’il réagissait à la suite, puis haussa les épaules. En soi, il aurait pu juste la tuer, mais cette elfe l’intriguait.

« Amenez-là dans une cave. Fouettez-là, qu’elle nous dise qui elle est, et ce qu’elle fait là. »

Protésilas regarda ensuite l’Arsenal. Il tentait encore un assaut, mais savait que ses armes de siège ne résisteraient pas aux défenses du fort. Cependant, quand il viendrait demain, à l’aube, avec la fille du Roi entre la vie et la mort, il espérait bien pouvoir faire flancher ce dernier.