The Multiversity

La réponse arrivait comme une gifle. Quelques jours ! Quelques heures, elle aurait compris, mais des jours ! Sur le coup, son visage se crispa si bien qu'elle aurait bien pu se mettre à jurer, mais cela les auraient avancer à quoi ? Ça ne soufflera pas les voiles pour aller plus vite. Luria se tut donc, inutile de faire sa diva. Elle devait avoir confiance en ses camarades pour protéger la cité et sur Adamante pour rassurer Elena comme elle pouvait... Elle espérait qu'elle n'était pas trop paniqué en tout cas ? Attendant donc, elle n'avait pas vraiment le choix, Luria prenait place sur un des escaliers en observant l'horizon. Si personne ne viens les déranger, tant mieux, mais elle ne servait à rien. Pourquoi n’existe-t-il pas un raccourci en mer pour arrivée à Lumen bien plus rapidement ? Luria restait silencieuse et immobile en observant l'horizon pendant que les marins discutaient avec Norrington de la situation. Elle n'écoutait tout cela que d'une oreille jusqu'à ce qu'on lui demande son avis ?

« La seule chose que Calypso m'a racontée concerne son passif qu'elle a avec l'Olympe, elle n'est pas une déesse après tout. Mais elle n'est pas une actrice dans cette guerre, pas même un pion. Ce n'est pas elle qui a libérer le Kraken et sans l'arrivée de Posséidon, elle aurait sûrement pu nous prêter main forte pour le sceller à nouveau ou au moins le calmer, mais... Elle m'a mise à l’abri alors que Poséidon attaquait son ile, du coup, j'ignore si elle va bien, s'ils s'affrontent toujours ou non. »

Elle espérait que oui, qu'elle allait bien, mais comment savoir ? Luria n'avait vu cette femme que peu de temps, très peu même, et elle n'avait pas échappé à son charme, mais même en laissant cela de côté, elle ne pouvait pas croire que Calypso serait vaincu si facilement. Oui, elle affrontait un dieu, mais elle aussi n'était pas n'importe qui.

« Quant à la raison qui pousse les dieux à nous voir comme des ennemis, je l'ignore. Mais je suppose que nous ne sommes que des personnes se trouvant sur leur route alors qu'ils sont dans une rage folle. Ça, ou bien quelqu'un, sûrement une autre divinité, s'ennuyait et leur a chuchoter des mensonges à notre sujet et, voilà où nous en sommes. Une mauvaise blague entre divinités qui s'abat sur nous. »

Mortel, divinité, une grande différences, pour eux, tuer des mortels, ce n'était pas grave, c'est comme écraser des fourmis, il y en a beaucoup trop pour qu'on s'inquiète de si peu de fourmis morte sous leurs pieds.

« Personnellement, je me fiche de leurs raisons ou de possibles excuses à venir. Ils ont osé s'en prendre à ma patrie, à sa majesté, pour moi, ça fait d'eux des ennemis. Ma lame ne pourra pas trancher leur gorge ou crever leur cœur, mais je trancherais les liens qui nous unis à ses divinités. »

Moins ils auront de fidèles, mieux ce sera pour Lumen. Après tout, à quoi bon les dieux pourraient se dire protecteur et demandaient à être vénéré si c'est pour subir ça ? La foie devait jouer un rôle dedans car on ne pouvait pas dire que les dieux vivaient comme des rois à leurs côtés, ils ne les voyaient jamais, jamais une demande, jamais une menace, il n'y avait que dans des situations pareils ou tout d'un coup, ils sortent de leur grotte pour dire qu'ils sont pas content et après, ils doivent subir ? Non, pas avec Luria en guise d'adversaire.

« Ne soyez pas si prompts à vouloir vous en prendre aux Dieux… Ce sont eux qui risquent de nous tuer.
-  Il n’empêche… Il n’y a pas que les Olympiens. Que font les autres panthéons ? Les Anges ? »

Norrington resta silencieux pendant quelques secondes. Cultivé, il savait que Terra était née d’une opposition initiale entre les Anges et les Démons. Après la Guerre contre les Grands Anciens, les Démons, qui obéissaient jusqu’à présent aux Dieux, avaient choisi de se révolter. Sous la bannière de Satan, ils avaient marché sur Terra, et les autres messagers divins, les Anges, s’étaient interposés. La bataille qui avait suivi, le « Grand Conflit », s’était terminée par un pacte mutuel prévoyant la non-intervention future des deux espèces. Les peuples de Terra avaient pu s’épanouir sous la protection des Dieux.

Se remémorant ses cours de religion et de catéchisme, Norrington leur répondit donc :

« Si les Anges interviennent, les Démons déploieront leurs Légions. Je ne crois pas qu’une nouvelle guerre sainte soit ce dont nous ayons besoin.
-  Ce sont des circonstances exceptionnelles !
-  Alors, Capitaine, je vous suggère de demander aux Princes Infernaux et aux Archanges de se réunir à nouveau, et de prévoir une cause d’exception ! Quant aux autres Dieux… Vous voulez vraiment revivre les évènements décrits dans la Cosmogonie ? Que croyez-vous qu’il adviendra de Lumen si Zeus et Odin s’affrontent en plein milieu ?
-  Alors, nous devons compter sur nous-mêmes ?
-  Nous sommes des Luméens, Capitaine, nous avons repoussé les Mijakiens. J’ai traqué le Megalodon, ce n’est pas une pieuvre géante qui me fera peur ! »

Le « Laguerta » continuait sa progression entre les îles, et le vent commençait à se lever. Norrington se tut en entendant une cloche carillonner. Des cumulus commençaient à se former. Les magiciens n’avaient pas le pouvoir de contrôler la météo, et il regarda un fanion. Ce dernier remua fortement, et il fronça lentement les sourcils.

Norrington resta silencieux.

« Je n’aime pas ça… »

Des vagues se fracassèrent contre le Laguerta. Toute une flotte venait progressivement de la rejoindre, et ils s’éloignaient d’un archipel, rejoignant une grande mer menant à d’autres îles… Lorsque, brusquement, l’une des petites corvettes accompagnant le navire explosa sur place. Une sorte de bombe aquatique sembla la frapper depuis la coque, ouvrant le navire en deux. Les marins hurlèrent en tombant à l’eau, et des cloches d’alarme retentirent.

« Bordel ! Il est revenu ! Mettez-vous en position, le Kraken est là ! »

Norrington crispa ses mains sur la barre de navigation.

« Capitaine Luria ! Vous savez manipuler une baliste ? »

Le navire disposait de balistes sur le pont principal, accompagnant les mangonneaux et les trébuchets.

« Nous avons passé la nuit à entretenir et à enduire les flèches en fer des balistes. Elles représentent nos meilleures armes contre le Kraken, et ont été enduites d’une huile magique destinées à faciliter leur pénétration dans l’eau, ainsi que des toxines. Bref, grimpez dessus, et tirez sur cette saloperie ou sur ses saloperies de tentacules dès que vous les verrez ! »

L’esprit combatif de Norrington était en train de revenir. Le match retour contre le Kraken allait commencer, et il comptait bien le remporter !

Luria n'était pas la mieux placer pour parler de théologie, des divinités et tout ce qui s'en suivait. Elle était forte sur un champs de bataille, donner des ordres, proposer des stratégie et accessoirement, plutôt calée sur l'histoire de Lumen si ce n'était pas trop vieux, alors des histoires sur la création des mondes, des villes, ect, ce n'était pas sa tasse de thé. Elle avait passé le plus clair de sa vie à suivre les ordres de Langley, étant son élève, maniant ses lames avec de plus en plus de vigueur mais cela ne suffisait pas pour le moment. Le capitaine attendait simplement, que le bateau arrive à bon port le plus rapidement possible. Et sans encombre si possible mais bon, ça, elle ne pouvait pas vraiment le décider. Elle laissait les marins parler de leurs cours de religions, elle observait juste l'horizon en se demandant quelle était encore la distance qui la séparait de Lumen ?

Ce fut bien plus tard qu'au loin, une cloche résonnait. Pas le genre qui se trouvait à Lumen mais plutôt sur le bateau voisin avant que ce dernier n'explose, laissant leur puissant adversaire marin faire surface et continuer cette bataille qu'ils avaient déjà entamer il n'y a pas si longtemps. Merde... Comment affronter une telle créature ? C'était l'enfant de Calypso, maintenant qu'elle connaissait ce détail, ça changeait tout. Admettons que par un concours de circonstance, elle puisse le tuer... le ferait-elle ? Calypso voyait ce monstre comme son enfant qu'elle aimait malgré tout ou bien elle n'avait de mère que le nom ? Elles n'ont pas eu vraiment le temps de parler de cela, Poséidon était arrivé bien trop vite et sa présence ici voulait aussi dire que le dieu des océans avait fini de « parler » avec son amante. Ou bien il était encore sur place et le Kraken le remplaçait dans le fait de surveiller les océans ? Mais pas le temps de se torturer les méninges, elle devait déjà le vaincre ou le contourner avant de se poser ce genre de question.

« Je suis pas la meilleure mais je me défend ! »

Il n'y avait qu'avec ses épées qu'elle excellait, le reste, elle avait des notions, Langley l'avait formé de façon à pouvoir rebondir si jamais elle n'avait pas d'épée près d'elle mais c'était bien avec cette arme qu'elle était la plus redoutable. Évidement, face à un tel adversaire, pour que ses lames soient redoutable, il faudrait que ce monstre soit échouée sur la terre ferme et que Luria trône sur sa tête pour le trancher dans tout les sens. Là, la baliste fera l'affaire... si elle ne rate pas son coup. Luria prit donc place sur la machine comme elle pouvait avant d'entamer de bien viser mais c'était difficile de bien s'ajuster pour le viser, entre ses mouvements à lui, puis le bateau, une chance que l'océan n'était pas en pleine tempête. Quand elle pensait sa cible bien en ligne de mire, elle tira une première fois, mais avec les remouds, cela échoua, en partie. Elle n'avait pas viser le corps principal du Kraken mais ça avait au moins toucher une de ses tentacules. Reste à savoir si en terme de dégât, c'était immédiat ou si ce genre d'attaque ne faisait pas grand chose, devant compter plutôt sur le poison ? Pas le temps de dire ouf, elle devait faire en sorte de recharger la baliste pour recommencer. Mais entre temps, un de ses tentacules éclaboussa le bateau, il avait frapper à côté, mauvais calcul de sa part ou les toxines faisaient effets ? Il ne fallait pas attendre un deuxième miracle, elle se remit en position et elle tira ! Cette fois, ça visait à côté, pas même l'avait-elle frôler !

Mais la troisième fut la bonne, cette fois, son tir avait bien toucher le Kraken, pas de quoi le tuer mais ça devrait sûrement faire son effet mine de rien ! Il fallait continuer, jusqu'à le vaincre ou le fuir, soit l'un, soit l'autre...

Poséidon était manifestement occupé ailleurs, mais avait laissé son immonde bête à la sortie des îles. Norrington devait reconnaître que c’était un choix sage, car les côtes étaient le principal obstacle du Kraken. Ici, dans les eaux profondes, il était à l’abri, et les navires ne pouvaient pas espérer se replier à nouveau. Mais Norrington en avait eu assez de fuir ! Manœuvrant son navire, il voyait l’eau éclater, le Kraken creusant des sillons. D’autres navires se brisèrent également, tandis que des flottes olympiennes se rapprochaient également.

« Ordonnez aux navires de s’écarter ! Attirez ce monstre !
-  Vous êtes devenu fou ?
-  Seul ce navire a la puissance de feu nécessaire pour tuer ce monstre ! Forcez-le à nous attaquer ! Il faut le tuer avant que le temps change, et que Poséidon ne revienne ! »

Le Laguerta pivota lentement, afin de ne pas s’exposer face au Kraken. Depuis le pont, les mages luméens se concentraient, et envoyaient des boules aqueuses, provoquant de violentes explosions en allant dans l’eau, soulevant les écumes sur plusieurs mètres. Luria eut ainsi une ouverture quand un tentacule s’élança, et tira une flèche qui transperça un tentacule, faisant se replier le monstre.

« Ouais ! Ouais, comme ça ! »

Se sentant comme transcendé, Norrington continuait à hurler ses ordres, tandis que le Kraken se rapprochait encore. Une immense masse noire se rapprochait, et suréleva la mer, faisant venir une série d’énormes vagues.

« Accrochez-vous, il va nous percuter !! »

Malgré plusieurs tirs magiques, la vague scélérate les frappa violemment. Le choc souffla même Norrington, qui lâcha la barre, et rebondit sur le pont, avant de heurter douloureusement le bastingage. Il vit plusieurs marins basculer par-dessus bord, tandis que le bateau émit un terrible craquement. La coque du Laguerta était solidement renforcée, mais, même en sachant cela, l’amiral espérait bien que le Kraken ne l’avait pas brisé.

Reprenant peu à peu ses esprits, il récupéra son tricorne, et se releva, l’épaule endolorie.

« Où est-il passé ?! »

Norrington regarda nerveusement autour de lui. Il n’y avait plus de monstre à l’horizon, mais une grosse masse sombre qui s’étalait sous le navire, s’étirant progressivement en déployant de part et d’autre ses nombreux tentacules…

En pleine mer, on ne pouvait pas dire que Luria était dans son élément et pourtant elle se devait de défendre ses compagnons et tout vaincre pour vaincre ou fuir la créature. Rejoindre Lumen n'était pas son unique but, les autres aussi. Chacun voulait revoir sa maison, sa famille, entre autres. Donc tout le monde comptait vivre, survivre et rentrer. Chacun devait se donner à fond pour pourfendre la créature des mers. Luria faisait tout son possible pour manier cette arme au mieux afin de pourfendre la créature. Mais comme prévue, c'était plus facile à dire qu'à faire. Le capitaine de la garde royale manipulait la baliste comme elle pouvait pour viser la créature, la faire reculer, l'éloigner de là mais rien à faire, c'était compliqué ! Même si elle avait réussi à percer l'un de ses tentacules, il s'était caché sous l'eau, ignorant donc ce qu'allait faire la créature ensuite ? Il avait bousculer le bateau, surprenant un peu tout l'équipage mais Luria était toujours sur le pont, c'était ça de pris.

« Chier ! »

La mer retrouvait doucement son calme mais rien n'indiquait que c'était fini, oh que non ! Luria l'avait peut-être blesser mais il serait étonnant qu'elle ai touché son talon d'Achille si facilement, elle refusait presque d'y croire ! Même si la surface de la mer était absente de la présence de ce monstre, les tentacules de ce dernier sortaient de l'eau tout autour du bateau ! Là, ça craint ! Elle avait blesser l'un d'eux en visant le Kraken, pas spécifiquement un tentacule donc devoir viser précisément ça, ça va pas être de la tarte. Trop éloignée pour espérer le trancher à l'épée, surtout qu'en plus, elle n'était pas sûr d'y arrivée. C'était un mollusque, rien de compliqué en théorie mais peut-être sa peau était trop glissante ou sa chair assez renforcer pour ne pas rendre cela si simple ? Le seul avantage c'est qu'il ne verrait pas leur mouvement, il va frapper à l'aveugle mais même comme ça, il risque de faire des dégâts.

« Norrington ! Placer certains aux canons dans les cales, s'ils sont alignée à l'un de ses trucs, qu'ils tirent ! Ils seront plus en sécurité pour tirer ! »

Elle donnait certes des ordres sur son navires mais elle avait la décence de passer par lui au moins et non d'imposer cela. Ils risquaient de prendre l'eau et ça va secouer mais à moins de défoncer la coque du navire, ils pourront tirer en toute sécurité. Pour ce qui se passe sur le pont, il va falloir jouer avec les balistes de disponible ou attendre que l'un de ses longues trucs se rapproche pour voir si son talent à l'épée sera utile ici ou non ? En tout cas, plutôt que d'attendre l'attaque, elle va au moins préparer une baliste, ne sait-on jamais, elle peux peut-être réussir son coup ?

Norrington acquiesça à la suggestion de Luria.

« Timoniers ! Vite ! Abandonnez les trébuchets et les mangonneaux, filez dans les cales, armez des pièces d’artillerie supplémentaires ! Dépêchez-vous, cette saloperie est en-dessous !
-  À vos ordres, Amiral ! »

Le Laguerta tanguait dangereusement. Le Kraken était dessous, mais même lui ne pouvait pas avaler d’un seul coup un bateau de cette taille. Il était néanmoins à craindre qu’il tente d’attaquer la côte… Ce qui se passa d’ailleurs. Des coups sourds résonnèrent brusquement, faisant trembler le navire. Norrington cracha furieusement sur le sol.

« Remontez les tonneaux de brai ! »

Un capitaine se rapprocha de lui.

« Si nous faisons flamber l’eau…
-  Capitaine Davis, me prenez-vous pour un marin d’eau douce ? Le Kraken va attaquer par en-dessous ! Mais la coque ne craint rien, elle est renforcée. »

Des plaques métalliques et des poutrelles en acier avaient été installées. Le Man o’war était le fleuron de la flotte luméenne, mais le Laguerta avait aussi navigué dans les eaux polaires, où il s’était heurté à des eaux glaciales, à la banquise. Avec le savoir-faire des nains, Norrington avait pu renforcer le navire pour qu’il agisse comme un véritable brise-glaces. L’idée était aussi d’affronter les crocs du Mégalodon, et, même si les dents du requin avaient pu défoncer la coque, les dommages avaient été superficiels, car, là-dessous, il existait aussi plusieurs fonds de sécurité, permettant d’éviter l’inondation au cas où la coque se remplirait.

Les tentacules du Kraken étaient moins tranchants que les dents du Mégalodon, mais firent trembler le navire. Une trappe s’ouvrit en plein milieu, et Norrington ordonna qu’on élève un filet comprenant les stocks de brai. Le brai était une matière inflammable hautement explosive, qui pouvait s’enflammer sur l’eau. Un produit extrêmement dangereux, qui, fort miraculeusement, n’avait pas explosé hier. La moindre flammèche suffisait à l’incendier.

« Levez bien le stock !
-  Mais à quoi vous jouez, Amiral ? »

Norrington grogna encore.

« Quand il aura tenté de percer la coque, il essaiera au-dessus. Nous allons déchiqueter les tentacules de cette saloperie ! »

L’Amiral s’avança vers Luria. Il avait retrouvé son souffle, cet esprit combatif et aiguisé qui l’amenait à réfléchir très rapidement, et, surtout, à anticiper sur les mouvements son adversaire. C’était cette même logique qui lui avait jadis permis de triompher du Megalodon, cette logique qu’il utilisait en ce moment pour piéger le Kraken.

« Capitaine Flowashield, descendez dans les cales ! Prenez le contrôle d’une baliste, vous y serez plus utile ! »

Les pièces d’artillerie comprenaient des balistes alignées sur plusieurs étages, sans siège de pilotage. Il fallait au moins deux servants pour mettre une baliste devant l’ouverture, puis un qui tirait en visant derrière, et un autre qui rechargeait. Contrairement aux balistes montées du pont, elles étaient donc moins pratiques, mais tout aussi mortelles ! D’une manière ou d’une autre, Norrington était décidé à en finir avec ce monstre des temps anciens.

Et il ne comptait pas mourir ici !

La mer avait beau ne pas être son terrain, Luria faisait tout pour pourfendre ses adversaires, c'est-à-dire ce maudit Kraken qui ne cessait de les suivre depuis leur rencontre. Cela aurait été bien plus simple si Calypso aurait pu l’enfermer à nouveau mais la femme était – ou n'était peut-être plus à présent – aux côtés de Poséidon à l'affronter, autant choisir ce qui était dure mais possible et non l'impossible. Au moins son plan semblait suffire à Norrington qui manœuvrait le navire de façon à l'avoir même si c'était compliqué d'avoir un ennemi qui se cachait sous l'eau. Aucun navire ne pouvait voguer sous l'eau sans couler. Bien que ses tentacules restaient pointer vers le ciel, ils restaient menaçants, risquant à tout moment de s'écraser sur le navire et cela ne fera du bien à personne ici. Ni même au bateau. L'amiral avait quand même son petit plan en tête, mais il préférait confier à Luria le soin d'user des balistes dans la cale afin de profiter activement à ce combat avec les moyens du bord.

Sans se faire attendre, elle passait sous le pont, se tenant comme elle pouvait quand le bateau tanguait d'un côté ou de l'autre, mais elle arrivait aux balistes qu'elle utilisait comme elle pouvait. La première était presque chargée, elle fit le nécessaire pour se débrouiller seule, depuis qu'elle usait de cette machine de guerre sur ce navire, elle n'était pas devenue soudainement excellente, mais elle savait mieux la maîtriser, un peu mieux. La fenêtre de tir était plus réduite ici, mais ce n'était pas un handicap ici, au contraire, ainsi Luria voyait mieux le champ des possibilités. Si bien que le premier coup avait réussi à se planter chez ce monstre qui ne devait pas apprécier le coup vu la façon dont ce tentacule s'agitait comme s'il faisait une crise d'épilepsie.

« Eh toi, viens m'aider, on y arrivera mieux à deux ! »

Dit-elle en réquisitionnant un des matelots qui passait par ici, si ce dernier n'avait rien d'urgent autant qu'il l'aide, ça ira plus vite. Le capitaine changeait d'abord de Baliste, que le coup ne parte pas toujours du même endroit afin qu'il ne se doute pas de leur position. Déjà, elle prit le côté opposé avant de voir à travers la petite fenêtre ce qu'elle pouvait faire. L'une d'elles restait très accessible, Luria s'aidait du matelot pour charger la machine et là, presque sans aucun besoin de viser, elle fit mouche une seconde fois. Venant rester du même côté, elle continua une baliste plus loin. Bien qu'un peu plus agiter, la visée restait assez simple et jamais deux sans trois ! Mais après avoir reçu trois flèches en lui, la bête s'agitait et c'était plus compliqué de viser maintenant, ses tentacules étaient bien plus remuant.

« On changer de côté. »

Même si c'était pareil à côté, fallait bien varier les plaisirs. Le coup fut esquivé pour cette fois, mais le suivant, à la même place, avait réussi. Espérons que sur le pont, le plan fonctionne lui aussi ?

Face au Kraken de Poséidon, l’Amiral ne comptait pas se laisser marcher dessus éternellement ! Il avait son plan, sa stratégie, et semblait convaincu qu’ils avaient une chance de le vaincre. Lors du premier affrontement, les conditions n’étaient pas les mêmes. Il faisait un temps abominable, et, pour ne rien arranger, ils étaient en plein milieu d’une bataille. Et, là, Poséidon n’était pas là non plus. Peut-être était-il retenu avec cette Calypso ? Norrington n’en savait trop rien, mais il comptait bien profiter de l’absence du Dieu océanique pour combattre le Kraken ! Après les premières passes d’armes, le monstre se trouvait sous le navire. Norrington avait également ordonné aux matelots de ramener les ancres. Il s’agissait de lourdes ancres en fer forgé, pensées pour résister à des courants très violents… Mais, le cas échéant, elles pouvaient aussi devenir des armes redoutables.

« Tenez-vous prêts, Messieurs ! Nous ne perdrons pas contre ce poulpe géant ! »

Pour l’heure, la bataille se déplaçait surtout aux niveaux inférieurs. Les marins du Laguerta étaient des hommes aguerris, des soldats qui avaient affronté bien des menaces. Mais, tandis qu’ils se positionnaient, on pouvait entendre les craquements du navire, et le bruit spongieux des tentacules qui remontaient le long du navire. Le Kraken avait essayé en vain de percer la coque, et cherchait des ouvertures supplémentaires. Dangereusement, les tentacules partaient à l’assaut, et les balistes les cueillirent. Prenant presque naturellement la direction des opérations, Luria se déplaçait de baliste en baliste, faisant feu dans les deux sens. Le tout était d’atteindre que les tentacules se relèvent bien pour ne pas attaquer la partie supérieure, mais pouvoir les déchiqueter en frappant en plein milieu.

Les tirs fusèrent donc, les balistes tremblant sur place, mais chaque pointe déchira les tentacules. Avisant cela, Norrington fit sonner les cloches, et les marins restés en hauteur attaquèrent à leur tour. Ils lancèrent de simples javelots, des flèches, mais surtout les épaisses ancres du Laguerta.

« Déchargez les ancres !
-  Déchargez ! Déchargez ! »

Les ancres s’élancèrent dans des cliquètements métalliques, et les servants des balistes purent voir un tentacule se faire trancher instantanément en deux, tandis que la lourde ancre plongeait dans l’eau, et frappait durement le Kraken. D’autres ancres jaillirent également, comme autant de missiles potentiels, et tranchèrent la chair du Kraken, heurtant sa tête. Un terrible grondement sembla résonner des profondeurs de la mer.

« On a fait mal à cette sale pute ! Remontez les ancres !
-  Remontez, remontez ! Relevez ces ancres comme vous remonteriez la robe d’une nonne ! »

Les marins disposaient, pour chaque ancre, d’une manivelle s’articulant autour d’un émerillon. Ils remontèrent la verge de l’ancre. Norrington sourit en voyant une pelle couverte de sang. Le Kraken avait été blessé ! Toutefois, alors qu’une ancre remontait, la mer s’agita furieusement, et un tentacule jaillit alors, puis s’enroula autour de la verge d’une ancre, et tira rageusement dessus. Le choc fit trembler le navire, et arracha l’ancre en arrachant le support, renversant les marins alentour. L’ancre tomba dans la mer, et les tentacules s’élevèrent alors rapidement, et frappèrent le navire par les trous, soufflant les balistes sur place.

Blessé, le Kraken était furieux.

« Remontez aux ponts supérieurs, vite ! »

À côté de Luria, un matelot fut frappé de plein fouet par un tentacule qui jaillit par l’une des meurtrières du navire, et l’envoya valdinguer contre le mur en face, brisant la moitié de ses os sur le coup.

Très clairement, le Kraken n’avait pas encore dit son dernier mot !

Le combat continuait de plus bel, ce dernier se déroulait surtout à l'aveugle, car le Kraken était enfoui sous les eaux et c'était par le biais de ses longs tentacules qu'il cherchait à attaquer. Luria ignorait comment ça se passait sur le pont, mais dans la cale, elle faisait tout son possible pour blesser et qui sait, vaincre la bête. Changeant de baliste entre chaque tir pour ne pas lui signaler sa présence, le capitaine alternait sans cesse, restant parfois deux fois de suite du même côté, parfois, juste une fois, elle ne devait laisser aucun rythme, rien qui pourrait trahir sa position. Elle avait cet avantage d'être « cachée » alors elle devait en tirer profit autant que possible. Si le combat semblait plutôt bien se passer pour le moment, la chanson avait vite changé à un moment donné où le Kraken semblait se montrer plus sérieux. Ses assauts faisaient trembler le bateau et alors que Norrington hurlait de remonter, un de ses tentacules venaient de passer par une des meurtrières, repoussant le marin qui était là pour l'aider.

Face à cet « ennemi », Luria sortait ses lames et armaient ses deux bras, venant trancher directement la peau et chair molle du monstre, laissant une marque en croix sur le tentacule du Kraken. Cela ne l'avait peut-être pas tranché en deux – vu la taille de la bête – mais au moins il avait compris qu'il ne fallait pas poser ses énormes tentacules n'importe où sur ce bateau.

« Remonter, vite ! »

Luria ne venait pas se frotter à cette énorme menace juste pour se caresser elle-même dans le sens du poil, elle faisait ça pour sauver le matelot. Bien qu'elle continuait d'attaquer et esquiver comme elle le pouvait, ses attaques n'étaient plus aussi forte que la première, la créature s'attendait à une nouvelle attaque aussi chargé, il réagissait bien plus vite même si ses attaques n'étaient au final que remuer dans la cale en espérant attraper ou bousculer la personne qui s'amusait à lui tirer dessus depuis cet endroit. Avant de remonter sur le pont, la créature agissait comme si elle savait que son adversaire ne serait plus à porter et la pointe visqueuse lui fonça dessus. D'une lame, elle fit une attaque verticale qui coupa partiellement le bout de son tentacule en deux. Rien de grave si on compare cette blessure à la taille de la bête, mais la douleur lui fit reculer son assaut dans la cale, lui laissant l'occasion de fuir.

« Il a foutu un sacré bordel en bas ! Si une baliste est encore en état de fonctionner en bas, ce sera un miracle ! Qu'est-ce que vous voulez que je fasse ici ? Que je tranche ce qui passe à ma portée ? »

Cela reste possible, mais un peu dangereux quand même... Elle pourra le blesser une fois, deux fois, trois fois peut-être, mais il risquait de comprendre que sa proie avait remonter et ses attaques pourraient être plus dangereuse et concentrée ici après... La situation était donc loin d'être agréable, mais elle n'était pas perdue pour autant...

Norrington savait que la dernière partie de l’affrontement se rapprochait. Le Kraken était terriblement puissant, extrêmement dangereux, et dévasta les étages intermédiaires du Man o’war.

« Remontez ! Bordel, remontez ! »

Les marins tirèrent les cloches d’alarme sur le pont supérieur. Des tentacules supplémentaires jaillirent également sur le pont, et arrachèrent plusieurs balistes. Un mage lança un cône de glace, qui transperça un tentacule. Le tir de glace explosa contre le tentacule, libérant le malheureux marin, qui heurta violemment le sol. Deux autres mages se concentrèrent, et générèrent un bouclier, qui repoussa plusieurs tentacules, faisant trembler le sol autour d’eux. Luria, de son côté, se rapprochait rapidement, après avoir combattu les tentacules avec ses lames.

Quand elle déposa le pied sur le pont, un tentacule s’enroula alors autour de sa cheville, jaillissant depuis le pont inférieur, et la tira en arrière. Un marin jaillit alors sur le côté, et planta sa hache dans le tentacule, tranchant l’extrémité d’un coup sec.

« Allez, relevez-vous ! »

Le duo rejoignit le pont supérieur. Un nouveau chaos venait de s’abaisser, tandis que les forces de Norrington commençaient à s’affaiblir. La bataille semblait tourner en la faveur du Kraken, tandis que Norrington ordonnait à des marins de soulever un énorme sac abritant de nombreux tonneaux. La grue relevait lentement la cargaison, comprenant beaucoup de barils.

« C’est notre réserve de brai ! Il faut la faire s’élever, et nous tirerons dessus pour enflammer ses tentacules ! »

C’était son plan. Un plan hasardeux, mais qui nécessitait de protéger la grue. Le Kraken, blessé, semblait avoir gagné en fureur, déployant des tentacules supplémentaires, mais immobilisait les voiles. Un tentacule frappa violemment la vigie en hauteur, faisant tomber des échardes de bois.

« Il faut attirer les tentacules là-haut ! »

Des tentacules supplémentaires attaquèrent Luria.

« Capitaine ! Vous avez l’air doué ! Et, vu que vous avez été voir Calypso, le Kraken ressent peut-être son odeur… Grimpez vers le mât principal, attirez-le ! Nos mages vont vous couvrir ! »

Plus il y aurait de tentacules en hauteur, et plus l’explosion des barils serait dévastatrice pour le monstre ! Norrington avait conscience que c’était un plan suicidaire, mais ils étaient en train de perdre la bataille. Le pont se remplissait de projections de sang, de tripes, de corps éclatés et déchiquetés, de morceaux d’organes et de boyaux se répandant un peu partout. La situation était en train de tourner rapidement au vinaigre ! Pour soutenir Luria, un mage enflamma ses deux épées, tandis qu’un autre l’enveloppa dans un bouclier magique permettant d’amortir les éventuels coups qu’elle risquait de recevoir…

Pour Luria, l'heure était grave, car le Kraken continuait de s'en prendre au navire, mais elle n'était pas de taille à affronter ce monstre seule. Les autres sur le pont avaient beau l'aider en affaiblissant la créature, ce n'était pas encore suffisant pour ça ! Si Encore Luria aurait une taille similaire à ce monstre, ça devrait aller – en supposant qu'elle ait pied dans l'eau – mais sans cet avantage improbable, c'était difficile de lutter efficacement contre lui. Après tout, à peine avait-elle rejoint le pont qu'un des tentacules cherchait à s'emparer d'elle, mais un valeureux marin venait en trancher le bout, libérant ainsi le capitaine de Lumen. Un bref signe de tête pour remercier ce brave homme qu'elle cherchait à mettre de l'ordre dans tout ce qu'elle voyait. Un carnage pour les hommes morts ici, mais la créature n'en était pas indemne même di des deux, malgré l'avantage numérique, c'était eux qui avaient le plus souffert dans tout cela. Toute l'attention se relevait être sur d'énorme sac qu'ils cherchaient à mettre en hauteur. Pourquoi ? Elle l'ignorait, mais elle ne tardait pas à le savoir en entendant le capitaine parler de brai.

Luria continuait de se défendre, car même sans avoir un œil sur le pont, les tentacules semblaient facilement savoir où elle se cachait et ses choses redoublaient d’intensité pour venir à elle. Pourquoi ? C'est une bonne question, mais il devait la voir comme son ennemi, en soit, c'était flatteur de savoir qu'elle était la personne la plus dangereuse aux yeux du monstre. Norrington avait cependant une bonne idée... Peut-être que l'odeur de Calypso était encore sur elle ? C'était possible, mais là encore, comment il ressent l'odeur sans nez ? Enfin, elle devait donc grimper en haut...

« Vous avez intérêt à pas vous louper, je ne veux pas dire, mais s'il m'attrape, je ferais pas long feu contre lui. »

C'était gentil de la mettre sur un pied d'estale, mais ce n'était qu'une simple humaine. Ce n'était pas une déesse ou une quelconque personne bénie par une divinité. En plus en grimpant, elle ne pourra même pas se défendre... Tss, enfin, pas le choix. Luria grimpait donc en espérant que les tentacules ne viendront pas l'embêter... mais ils ne tardèrent pas à se rapprocher mais les mages qui sont censés la protéger faisaient bien leur job pour le moment, bien qu'ils se rapprochaient, ils s'éloignaient bien vite par la même occasion. Elle grimpait doucement, parfois avec quelques frayeurs quand elle sentait le contact visqueux de la créature s'enrouler autour d'une de ses jambes, heureusement, ça n'allait pas plus loin et continuait son ascension. Mais alors qu'elle se rapprochait du haut, elle se demandait ce qu'elle devait vraiment faire par la suite ?

« Amiral ! Qu'est-ce que je dois faire une fois arriver en haut?! »

Elle n'y était pas encore, mais c'était une question de seconde avant de la voir tout au bout du mat.

Norrington en était aux plans désespérés, mais il ne pouvait tout de même pas abandonner si vite ! Il proposa donc son plan à Luria, tandis que quelques mages se rapprochèrent rapidement, venant protéger Luria.

« Nous l’avons senti sur vous quand vous êtes revenue, Capitaine… Vous portez avec vous une signature magique que vous n’aviez pas avant de croiser Calypso. »

Si le Kraken était bel et bien une création de Calypso, Norrington espérait qu’il mordrait à l’hameçon. L’Amiral lui souhaita bon courage, tout en évitant un tentacule qui frappa violemment le pont, déchirant plusieurs planches de bois, formant un gros trou. Des arcs électriques jaillissaient des doigts de plusieurs mages pour frapper un tentacule, et une volée de flèches en transpercèrent un autre. Toutefois, Norrington constata vite que les tentacules se redressèrent encore. L’un d’eux s’enroula autour du mât principal, et commença à tirer dessus.

Le sang de l’Amiral ne fit qu’un tour. Si le Kraken brisait le mât, non seulement Luria risquait de mourir, mais le Laguerta serait aussi bloqué ! Plusieurs marins tentèrent de se rapprocher, mais d’autres tentacules plus petits les attaquèreent également. L’un d’eux s’enroula autour du cou d’un marin, et l’envoya se fracasser violemment contre le bastingage. Un autre réussit à planter sa hache dans un tentacule, ce qui amena le Kraken à réagir rapidement, déployant un tentacule supplémentaire qui attrapa la jambe du marin, et le tira en arrière. Le malheureux en lâcha sa hache, et sentit le tentacule le soulever, avant de le jeter par-dessus bord. Des flèches émanant de soldats elfiques montés à bord touchèrent les tentacules, offrant une ouverture. Une hache frappa le gros tentacule, qui trembla sur place.

Le mât vacilla sur place, ce qui déstabilisa Luria. La Capitaine manqua tomber dans le vide, avant de s’agripper à une corde à grimper. Une poulie volante se déplaça ensuite, et la femme l’agrippa, tandis que la corde sur laquelle elle était précédemment appuyée se déchira, et bascula dans le vide. Suspendue à sa poulie, elle se mit à tournoyer sur place, survolant l’eau, puis la masse du Kraken. Sa gueule massive était déployée sous l’eau, et les tentacules jaillissaient de cet abîme noirâtre.

« LURIA ! »

La Capitaine réussit à s’accrocher à nouveau, et l’Amiral se déplaça encore. La cargaison de tonneaux continuait encore à s’élever, et des tentacules supplémentaires jaillirent vers Luria, qui se rapprochait du sommet du mât. Les voiles avaient été rabattues pour les protéger, et elle s’agrippa à une corde. Norrington n’avait pas répondu à sa question, car elle n’avait rien à faire là-haut. Il fallait juste élever les tentacules. Le Kraken continuait à la poursuivre, et un tentacule s’enroula alors autour de son cou, puis la fit basculer.

« MAINTENANT ! » s’époumona Norrington.

Tandis que le tentacule se serrait autour de la gorge de Luria et la soulevait hors du bateau, la rapprochant de sa gueule, les archers elfiques tirèrent. Leurs flèches enflammées filèrent entre les tentacules, et atteignirent le sac de tonneaux. Le brai à l’intérieur s’enflamma rapidement, et…

*BOOOOOM !!*

Il y eut une violente explosion, très impressionnante, qui fit trembler le navire jusqu’à la coque, tandis que les tentacules éclataient également, répandant des viscères et des morceaux de tripes sur le pont. Norrington se reçut une giclée sur son costume, mais tous purent entendre le râle guttural du Kraken.

Luria sentit le tentacule la relâcher, et tomba dans l’eau, vers la masse du Kraken. Il aurait pu l’aspirer, mais les tentacules qui avaient été déchiquetés sortaient directement de son corps, de sorte qu’il se mit plutôt à vomir du sang. Les défenseurs du navire le canardèrent à nouveau, et Luria put voir, au milieu des cadavres flottant dans l’eau, des traits tournoyant autour d’elle. Néanmoins, tandis qu’elle coulait, une voix réconfortante ne tarda pas à émettre dans sa tête… La voix de Calypso lui adressant un message télépathique !

*[MT] Quand je t’ai embrassé, je n’ai pas fait qu’évaluer ton amour, Luria. Je t’ai accordé ma bénédiction. Elle ne durera pas éternellement. Je suis désolée de ne pas pouvoir venir, mais tu peux respirer dans l’eau. Malheureusement, ma belle, tu vas devoir te salir un peu. Le Kraken va se régénérer, mais il souffre énormément. Tu dois aller dans sa bouche, et déchirer son cœur. Ma magie te protègera. Laisse-le t’absorber. Il ne dévore pas ses proies au sens classique, il les enferme en lui pour les vider de leur énergie vitale, mais cela n’arrivera pas, ma toute belle, car je t’ai protégée. [/MT]*

Devait-elle faire confiance à ce conseil plutôt suicidaire ? Ou choisir par elle-même un moyen de vaincre le Kraken ? En tout cas, Calypso n’avait pas menti sur un point, car Luria pourra vite constater qu’elle était effectivement capable de respirer, mais aussi de nager bien plus vite. Calypso l’avait doté des habiletés des sirènes, et elle pouvait également entendre très distinctement les râles d’agonie du Kraken… Ce qui laissait supposer que Calypso ne lui avait pas menti…. Au moins sur cette partie-là !

Tentant donc de rejoindre le haut du mat, Luria faisait des efforts pour tenir bon et grimper là-haut malgré les mouvements du bateau. Malgré les tentacules qui se rapprochaient d'un peu trop près. Malgré les quelques chutes qui ont heureusement échoué, bref, elle faisait tout son possible pour atteindre le haut comme prévu. Ce fut compliqué, laborieux, mais elle réussie malgré tout bien qu'au dernier moment, le Kraken avait réussi à la saisir ! Mais non ! Elle ne devait pas se laisser avoir de la sorte ! Elle devait réussir ! Réussir pour rejoindre Lumen, rejoindre Elena ! Elle ne pouvait pas partir comme ça, sa reine sera si triste... Elle a déjà si souffert, elle refusait d'être la cause d'une nouvelle souffrance chez Elena !!! Saisie à la gorge, elle fut soulevée et par chance, le plan fonctionnait et cette hauteur lui permis d'être hors de porter de l'explosion qui arracha plusieurs de ses tentacules, laissant la bête souffrir ! Hélas, tout n'était pas gagné, car Luria chuta dans l'eau... et elle ne savait toujours pas nager.

Mais en arrivant dans l'eau croupie par le sang, les débris, les morceaux de chair, la voix de Calypso venait la rassurer pour lui confier une dernière tache. Indirectement, ça voulait sûrement dire qu'elle pouvait respirer dans l'eau, mais sincèrement, même en croyant Calypso, elle ne voulait pas essayer et se retenait de respirer pour le moment. En tout cas, elle devait tuer le Kraken... Nul doute, si l'ordre venait directement de sa « mère », Luria n'aurait aucun remord à y parvenir... Voyant la créature couler doucement pour s'éloigner du bateau, elle coulait avec lui pour tenter de le rejoindre et le faire tomber dans le piège. Même affaibli, il était parvenu à se redresser pour tenter de la gober et heureusement, ce genre de monstre n'avait pas de dents. Mais tous ses efforts la fit ouvrir la bouche et... respirer... Ok, ça, c'était donc vrai. Luria arriva sans plaisir dans la bouche du Kraken et ce qui devait être son estomac, plus ou moins. Mais inutile de s’attarder pour une visite, elle ne comptait pas habiter ici. Bien qu'elle soit à l'étroit, elle sortait ses lames et coupa tout ce trop-plein de chair autour d'elle, faisant quelque peu remuer la créature, mais elle finira par trouver son cœur au milieu de tout cela !

« Crève, mais crève !!! Je dois te tuer !!! Je dois retrouver Elena !!!! »

Le tuer libérait tant de marins de la peur de croiser le Kraken en pleine mer, mais pour Luria, elle avait avant tout à celle qui dirigeait Lumen. Elle avait juré de la protéger, elle comme son peuple. Elle devait tenir ses promesses. À force de mouliner dans tous les sens, elle était parvenue à trouver le cœur du Kraken où chaque coup d'épée dedans était un râle de douleur qui s'entendait à travers tous les océans. Luria s'acharnait comme si sa vie en dépendait – ce qui n'était pas faux – et ne cessa de trancher cet organe que lorsque les coups dedans ne faisait plus réagir la bête. En même temps, ce n'était plus un cœur, mais des tas de petits bouts dispersés un peu partout. Hélas, même en sortant du corps de la bête, Luria se posait une question... comment rejoindre le bateau ? Incapable de nager, aucune sirène en vue... Était-ce la fin ? Un noble sacrifice ? Non, elle devait revoir Elena, elle ne pouvait pas la faire souffrir, pas elle ! Bien que ses mouvements étaient plus lents dans l'eau, elle bondit, un bond au-delà de la normalité vu la hauteur prise, mais c'était peut-être un moyen ? À défaut de savoir nager, avec cette force, elle pourrait rejoindre le bateau, telle une grenouille ? Elle n’avait pas beaucoup de fois devant elle après tout...

Norrington constata amèrement que le Kraken était bien plus résistant que le Megalodon. Malgré tous les coups, malgré tout ce qu’ils lui avaient fait subir, la bête immonde était toujours en vie ! Elle redoublait d’attaque, et, même après l’explosion des barils, des tentacules supplémentaires jaillirent, fondant sur le pont. L’Amiral ne dut son salut qu’à un saut de justesse, évitant un gros tentacule qui arracha un filet de cordes, mais un autre le frappa, et l’envoya heurter douloureusement le rebord du bateau. Couché sur le sol, sentant du sang suinter de ses lèvres, il vit un tentacule se hérisser de pointes osseuses, et fracassa un bouclier magique à plusieurs reprises, le fissurant, puis le faisant exploser. Les trois magiciens dessous poussèrent de brefs hurlements, avant que le tentacule osseux et pointu ne les frappa violemment. Il se redressa ensuite, emmenant une carcasse déchiquetée avec lui, avant de la jeter par-dessus bord.

D’autres tentacules crachèrent des jets de poison et d’acide, des jets corrosifs qui firent fondre plusieurs marins, tandis que l’eau remua encore. Et c’est ainsi que, devant les marins effrayés, la gueule massive du Kraken apparut.

Une gueule massive et circulaire leur fit face au milieu d’un corps géant, une sorte de grosse méduse géante dont les tentacules s’étaient enroulés autour du Man o’war.

« Par l’Aîné !
-  Oh Seigneur ! »

Le Kraken aspira alors, et son souffle terrible, titanesque, renversa plusieurs marins, et arracha quelques lambeaux de bois instables. Sa gueule noirâtre était constituée d’une multitude de couches dentelées, et des tentacules jaillirent alors de ce puits sans fond, empalant d’autres marins. Norrington parvint alors à se relever, et posa sa main sur son torse, blessé.

« Nous ne perdrons pas face à toi, misérable monstre… »

Le Laguerta craquait de partout. Jamais son navire n’avait été endommagé, même lors des guerres contre les Mijakiens. C’était le fleuron de la flotte mijakienne, un engin de guerre massif, un supernavire capable de tenir tête  à une flotte entière à lui tout seul ! Et il allait perdre ce bâtiment contre ce monstre ? Norrington sortit de sa ceinture une bombe explosive, et la lança vers le Kraken. La bombe explosa, déchiquetant plusieurs tentacules, libérant plusieurs de ses marins.

« Du nerf, les gars ! On s’accroche ! »

C’était évidemment plus facile à dire qu’à faire, mais Norrington ne pouvait pas abandonner. Un tentacule le frappa alors qu’il armait une autre bombe, et un autre s’enroula autour de sa jambe, avant de la traîner vers la gueule béante du monstre.

« Amiral !
-  Sauvez l’Amiral ! »

Mais personne n’arriva à le rattraper… Et le Kraken gronda alors. Un hurlement, un déchirement lancinant. Du sang noir jaillit alors de sa gueule, et il relâcha Norrington, qui roula sur le pont. Relevant la tête, médusé, Norrington vit le sang affluer de la gueule du monstre. Les tentacules se tortillèrent sur place. Ne comprenant pas ce qui se passait, il ordonna à ses hommes de tirer encore.

« Visez sa gueule ! »

Des carreaux explosifs et des boules de feu fusèrent, et le Kraken gémit encore… Avant de glisser, et de couler dans l’eau.

« Qu’est-ce qui a bien pu se passer ? »

Claudiquant à moitié, Norrington rejoignit le bastingage, et constata qu’une épaisse mare noire se formait… Avant qu’un corps ne finisse par émerger.

« C’est… C’est le capitaine Luria ! Les gars, jetez une bouée à la mer ! »

Fort heureusement, le Kraken ne s’était pas trop éloigné, et Luria put s’agripper à une bouée, et ainsi remonter sur le pont. Elle semblait extrêmement fatiguée, le pouvoir de Calypso l’ayant quitté… Ou s’étant juste désactivé.

« Est-ce qu’elle respire toujours ?
-  Luria ? LURIA ! Revenez parmi nous, Luria ! Luria ! »

Ce fut mouvementé, c'est le moins que l'on puisse dire, Luria avait accepté de se laisser attraper et avaler par cette chose en croyant aux mots de Calypso. Une fois dedans, elle faisait tout les efforts du monde pour trancher tout ce qui trouvait autour d'elle, que ce soit des organes, juste de la chair, elle tranchait encore et encore, inlassablement. Allait-elle réussir à détruire ce monstre ? Avait-il un seul cœur ou plusieurs ? Certains ouvrages disaient que les démons en avaient plusieurs, cette chose était à moitié divine, peut-être qu'il avait ce genre d'atout dans sa manche ? Malgré le fait que la bête remuait bien – entrer la douleur interne et externe – mais Luria était parvenue à déchiqueter son cœur, lui arrachant dons ses derniers instants de vie. Par chance, le Kraken avait recraché Luria même si elle n'était pas sortie de l'auberge, étant toujours à l'eau, sans bénédiction cette fois. Par chance, elle trouva rapidement de quoi s'aggriper dessus, avant d'être remonter à bord du navire mais après un tel acharnement à l'intérieur du Kraken, puis tout ce qui s'était passé avant, elle était épuisée !

À peine consciente, elle respirait lourdement, salie par le sang et le sel de la mer, elle était consciente, mais voyait à peine ce qui se passait, idem pour l'ouïe, elle entendait à peine.

« Ça va... ça va... »

Disait-elle ça aux gens autour ou à elle ? Elle respirait toujours, mais elle restait très épuisée, et pour le coup, il ne fallait pas compter sur elle pour protéger ce qui restait du navire en cas d'une nouvelle attaque. Elle serait aussi utile qu'une méduse échouée sur le pont. Sa vision se brouillait, elle aurait pu sombrer dans la fatigue ou autre, mais avant que la faible lueur s'éteigne dans sa vision noircie, elle fit Elena, ce qui eut l'effet d'un coup de chose pour elle. Les yeux grands ouverts, elle cherchait à se redresser bien que la tâche n'était pas des plus simples.

« Elena !!!! Sa Maj-esté... je dois... voir... sa Majesté ! »

Un élan de lucidité qui l'avait sûrement empêcher de tomber de fatigue, mais fallait-elle qu'elle résiste le temps de retourner à Lumen et peut-être reprendre la partie et ainsi continuer le combat contre l'Olympe. Mais ça, elle verra bien une fois sur place, pour le moment, elle pouvait juste prier les dieux de veiller sur Elena et sur Lumen. Elle espérait que rien ne lui était arrivée, c'est tout ce qui importait pour elle.

C’était incroyable, tout simplement. Le Laguerta avait tenu bon, et le Kraken était mort. Le Kraken était mort ! L’impensable combat avait finalement tourné à l’avantage des Luméens, et, quand les marins repêchèrent Luria, Norrington comprit rapidement ce qu’elle avait fait. Son corps irradiait encore d’une douce magie protectrice, et, dans un sursaut, elle annonça qu’elle devait aller sauver Elena… Puis tomba ensuite dans les pommes, s’effondrant dans les bras de Norrington.

« Oui, Capitaine, nous allons y aller… Mais, pour l’heure, vous devez reprendre vos esprits… »

De la magie se mit alors à remonter autour de Luria, dont le corps s’illumina, brillant doucement. Surpris, Norrington vit alors une silhouette spectrale en émerger. Magnifique et sensuelle, Calypso se présenta à eux sous sa forme éthérée. Norrington aurait pu brandir son arme, mais cette apparition était étonnamment pacifique, et il ne sentait aucune menace venir d’elle.

« Je savais qu’elle le ferait… À cœur vaillant, rien n’est impossible !
-  Alors, c’est vous, Calypso ? Vous l’avez aidé à tuer ce monstre ?
-  Oui, Amiral… »

Quand Calypso avait embrassé Luria, elle avait insufflé un peu de son âme en elle. Incontestablement, sa puissance était terrifiante.

« Le Kraken était jadis un immense poulpe destiné à aider les élus pour voguer à travers les flots… Je l’avais conçu ainsi, pour être une force défensive… Mais il a été corrompu par les Grands Anciens, et relâché par Poséidon. »

Sentant qu’il tenait là sa chance, Norrington questionna Calypso :

« Mais pourquoi ? Pourquoi tout cela ? C’est insensé ! »

Calypso soupira doucement, un sourire triste et mélancolique venant se dessiner sur ses lèvres.

« Les Dieux eux-mêmes ne sont pas infaillibles, Amiral. Ce que vous voyez est la résultante d’une malédiction, une malédiction qui pèse sur la famille olympienne depuis ses débuts.
-  Une malédiction ? Mais de quoi parlez-vous ? »

La forme éthérée de Calypso commençait à se dissiper lentement.

« Rejoignez Lumen, Amiral, il n’est pas encore trop tard pour sauver la jeune Reine. Elle porte en elle le sang de l’Aîné, elle est notre dernier espoir… »

L’Aîné ? Arthur Eld ? Calypso était en train de s’évaporer, de devenir une sorte de poussière cristalline.

« Soyez... Soyez plus forts… Que les Dieux, c’est… C’est le message de la mythologie… »

Elle s’évapora ensuite. Norrington resta silencieux pendant un certain temps, puis ordonna à ses hommes d’aller mettre Luria dans une cabine. Il allait falloir un peu de temps pour que le navire soit remis sur pied, mais aucun des mâts n’avait été brisé. Il fallait juste remettre les voiles, refaire des cordes, des bastingages… Norrington fixa ensuite l’horizon, la main sur son bateau.

Au loin, il voyait des nuages noirs. La tempête était passée, et elle se déchaînait maintenant sur Lumen.

*Mais nous y serons…*

La Reine attendait son armée, et ils seraient là !