The Multiversity

Se languissant, maintenant qu’elle était rassasiée, du réveil de Scott, Emmeline ne s’attendait pas à être manipulée ainsi, soudainement et fortement ; Bien sûr, elle aurait pu l’empêcher, mais ne voyait aucune raison, préférant garder ses mains sur son corps, le pétrissant doucement, tout en répondant à son baiser avec entrain. Chez un vampire, la pulsion sexuelle était puissante ; N’ayant pour ainsi dire plus que des désirs et appétits, avec pour seul besoin réel le sang, ces créatures de la nuit étaient par nature hédonistes. Même si elle tentait de satisfaire sa soif « éthiquement », la Reine ne faisait pas exception, appréciatrice des bonnes choses que mettaient à disposition son rang, et elle devait avouer que Cyclope faisait partie de celles-ci.

Perdue dans cette ivresse, emportée par l’élan de Scott dont elle espiait toujours les pensées, elle fut à nouveau surprise – impossible de lire dans son esprit ce que lui-même ne prévoyait pas – lorsqu’il écarta sa culotte satinée pour venir se mettre en elle. L’acte lui arracha un gémissement de plaisir aussi intense que soudain, qu’elle cria en même temps que lui, en même temps que ses ongles se plantèrent dans sa peau quand ses doigts se crispèrent ; La Reine n’avait pas ce que l’on pourrait qualifier de griffes, mais la surprise l’empêcha un instant de sentir sa force vampirique. Lorsqu’elle rouvrit les yeux qu’elle avait fermé pour son râle, elle les déposa dans ceux de son amant de la nuit, en même temps que ses doigts coupables malaxaient délicatement les plaies peu profondes qu’ils venaient de créer.

« Quel entrain, Monsieur Summers... Emmeline ricana doucement, à la fois amusée, surprise, et surtout satisfaite qu’un X-Man soit si peu dérangé par sa nature qu’aussitôt remis de sa morsure, il la dévore, cette fois métaphoriquement. Mais vous avez si raison... »

La vampire ramena ses mains aux côtés du visage de Scott pour sceller un baiser, en même temps qu’elle noua ses jambes autour de la taille du mutant et arqua son dos pour mieux se presser contre lui, sa chaleur, et ses muscles qui reprenaient de leur puissance. Son bassin ondulait doucement, profitant du moelleux du lit, pour continuer et surtout encourager ce qu’il avait commencé tout en profitant de sa chaleur – de la même manière qu’elle lui offrait le froid caractéristique d’une vampire, une expérience unique et qu’elle imaginait agréable passé la surprise. Son esprit aussi était affairé à amplifier son plaisir, unifiant leurs sensations et émotions pour les décupler tout en rapprochant leurs corps et pensées.

Le sang ponctionné par Emmeline n’était plus dans son corps, il n’irriguait plus son cerveau aussi normalement qu’il devait le faire… Et son excitation sexuelle pompait aussi son sang ailleurs, vers d’autres parties de son corps que son cerveau. Scott ne fonctionnait donc plus vraiment de façon consciente ou civilisée, mais bien plus reptilienne. Il l’entendit parler, mais ne lui répondit pas. Les idées venaient, mais tout ce qui l’envahissait, c’était ce qu’il avait entre les jambes… C’était cette chaleur qui pulsait en lui, cette énergie qui l’envahissait. Scott l’embrassa alors, répondant au baiser de la Reine. Il sentit sa main sur ses cheveux, et ses magnifiques cuisses qui s’enroulaient autour de sa taille. Le mutant frémit. Il avait à la fois chaud et froid. Le manque de sang se couplait à l’adrénaline et au désir, le plaçant dans un état second, fiévreux, névralgique. Il l’embrassa donc longuement, remuant en elle, son membre s’enfonçant en elle, son corps s’unissant au sien. Scott la prenait. Plus tard, quand il émergerait, il se dirait qu’il venait de faire l’amour avec la Reine d’Angleterre. Une vampire, certes, mais une Reine quand même !

« Hmmm… »

Elle et lui, ensemble… Ses lèvres étaient magnifiques, et, dans l’obscurité de la pièce, elle semblait angélique. Qui aurait cru cela un jour ? Qu’une vampire puisse être si belle, si lumineuse ? On aurait dit un ange ! Sa peau douce, ses soupirs, son corps parfait aux formes anguleuses, sa cascade de cheveux dorés filant dans son dos… Le nouveau baiser qu’il lui fit fut plus sensuel, car il n’hésita pas à fourrer sa langue, tout en continuant à s’immiscer en elle, se fourrant un passage dans son corps. Il sentit la présence d’Emmeline en lui, et trembla doucement, ce qui eut pour effet qu’il lui mordilla la lèvre. Cela sembla aussi le ramener un peu à la raison, car il se mit à grogner, et réussit l’exploit, dans son état, de parler :

« Emmeline… »

La Reine pouvait le sentir. Elle pouvait sentir son manque. Il n’avait plus couché avec une femme depuis que Jean était devenue une vampire, et n’avait jamais couché avec une autre femme que Jean. Il soupirait doucement face à elle, s’unissant, accélérant le rythme, la sentant contre lui, en lui… Ces sensations étaient intenses, exquises, l’absorbant pleinement. Elle, lui… En ce moment, ils ne formaient plus qu’un !

Emmeline, sous les coups de rein de son amant, pensait avoir trouvé une solution à une autre de ses soifs, même si, dans son état, Scott était loin d’avoir une allure régale. Quand il la mordit, elle souffla de l’air par son nez, d’amusement, avant de faire mine de lui rendre la pareille, pressant deux de ses crocs contre les lèvres de Summers, lui rappelant mesquinement que la morsure gagnait un sens plus grave ici. Bien sûr, cependant, elle ne mordit pas ; Pas l’envie, et après tout, il devait être présentable à son retour chez les X-Men.

« Scott..? Entre deux bouffées d’air, la Reine demanda l’attention de son sujet, une main de chaque côté de son visage, et apposa son front au sien les yeux fermés pour pénétrer plus en profondeur dans son esprit, les liant au delà de la surface qui les unissait déjà. Vous aimez ça, n’est-ce pas..? Vous y êtes accro... Summers put sentir son sang non pas dans son corps, mais celui d’Emmeline, pulsant à travers ses veines et lui donnant la vitalité qu’une morte-vivante ne pourrait autrement avoir ; Il put aussi sentir leur pensées s’entrechoquer, ou plutôt s’entremêler, concentrées après tout sur la même chose : Le plaisir qu’ils partageaient. Elle l’embrassa et continua leur discussion dans son esprit. Savoir que nous sommes plus que deux êtres...ou moins que deux êtres ? Partageant nos corps et âmes comme s’ils n’étaient plus tout à fait qu’à nous, plus justes errants, seuls...Est-ce que c’est pour ça que vous aviez envie que je boive votre sang ? Que vous auriez voulu que je fasse de vous un vampire..? Que nous soyons à jamais liés ? »

Habituée à ces jeux d’esprit, la Reine continua à doucement onduler contre son amant, se pressant contre lui comme pour boire sa chaleur, ce sentiment presque obnubilant aux vampires, leur rappelant la présence de sang et les plaisirs de la chair. Bien entendu, le froid – métaphorique et littéral – contrôle de la monarque lui permettait de faire comme si de rien n’était, habituée à projeter l’impression d’un calme olympien et d’une passivité de pierre, mais elle ne daignait pas cacher ses pensées et émotions à Scott, lui assurant qu’elle aussi approchait de l’orgasme.

Il s’unissait à elle… Physiquement, bien sûr, mais pas uniquement. Il croisa son regard, car elle le lui demanda, et, même si sa vision ne lui permettait pas de la voir clairement… Il la vit. Différemment de tout ce qu’il aurait jamais pu imaginer. Une union exceptionnelle, une symbiose des corps et de leurs esprits. Il sentait le pouls de la Reine battre. Cette symbiose, il ne l’avait ressentie qu’avec Jean, la première fois, quand ils avaient découvert les joies de l’orgasme. Mais ce qu’il ressentait ici était encore plus intense, une sensation féroce et palpitante. Quelque chose d’inexplicable, comme s’il était à la fois lui… Et elle. Il sentait ses battements cardiaques, il sentait son énergie, son engouement. Ce n’était pas qu’une union, c’était une fusion. Il n’était plus uniquement Scott, mais un mélange entre les deux. Plus que jamais, il pouvait sentir Emmeline, ses pensées, ce désir, cette vague. Il la regardait, mais il ne voyait plus vraiment. Il était en elle, avec elle… Scott n’aurait su décrire autrement cette situation que comme une union totale, une véritable fusion émotionnelle. Son plaisir se mélangeait au sien.

Ils s’embrassèrent, et il l’entendait parler… S’unir à elle, s’unir éternellement. Est-ce qu’elle parlait ? Ou est-ce qu’elle pensait ? Scott comprit qu’elle parlait en lui, car ils s’embrassaient. Il était donc impossible qu’elle puisse parler !

*Oui… J’ai cette sensation depuis que je t’ai vu, Emmeline… Mais tu dois l’avoir perçu, non ? Devenir un vampire… L’idée me semble complètement folle, mais, avec toi… Je ne sais plus…*

Oh, il le savait, bien sûr… Mais il était après tout de base un chasseur de vampires. Vouloir changer à ce point… Une partie de son être s’y opposait encore. Il ne pouvait pas devenir l’ennemi qu’il avait toujours combattu. Non, il ne le pouvait pas ! Mais, pourtant, avec Emmeline… Avec elle, il se sentait basculer, vaciller. Faire qu’un avec elle, rester avec elle… Oui, pour elle, il serait prêt à renoncer à sa mortalité !

Les choses que l’on fait par amour…

Ses mains agrippées à Scott pour le garder contre elle et ses jambes le maintenant tout autant en elle, la Reine buvait ses idées comme elle avait bu son sang. Les télépathes y étaient certes plus habitués et en étaient plus conscients, mais ils étaient tout aussi sensibles aux divers biais de l’esprit humain, et en l’occurrence, elle était tout particulièrement attirée par cette idée d’éternité ensemble, et semblait aveugle à toutes les raisons pour lesquelles elle devrait la rejeter ; Lui, le Messie Mutant, et elle, la Vampire qui s’est retournée contre Dracula...il y avait un air de destin à cette union, une nécessité de chacun pour l’autre, et peut-être pourraient-ils sauver la Mutanté et l’Humanité comme ils étaient, mais ne le pourraient-ils pas aussi tous deux vampires, sans doute mieux, même ? Et quand bien même ils ne le pouvaient pas, viendrait bien un jour où le mal enfin vaincu, Summers vieillirait sans Emmeline, la privant du seul homme que, à y réfléchir, elle considérait digne d’elle, qui lui avait tendu son cou et offert son sang...

Ces pensées filaient vite à travers l’esprit de Frost, si vite que le temps de les avoir, son corps lui perdu dans leurs ébat, que l’apogée de celui-ci approchait, et sans réfléchir, perdue dans son élan, la Reine rompit à regret leur baiser pour amener ses crocs au cou de Scott, caressant doucement la plaie qu’elle avait causé quelques minutes auparavant de leurs pointes, et finalement, elle mordit, causant leurs orgasmes respectifs. Son corps entier se crispant à cet instant autour de Scott, elle ne suça pas encore son sang, mais lorsqu’elle revint à ses esprits, elle n’en fit pas plus, réalisant l’acte qu’elle était sur le point de commettre ; Confuse, choquée qu’elle ait pu être emportée aussi loin par sa soif et son lien avec Summers, elle le repoussa, pas assez pour qu’il ne soit plus au dessus elle, juste de quoi mettre de la distance entre ses lèvres et la blessure sanglante qu’elle venait de causer.

« Non, Scott, je... Goutte à goutte, son sang commença à tomber sur ses seins, en plus d’un filet qui avait coulé le long de son menton pendant leur extase ...je n’aurais pas dû – jamais je ne devrais... Elle ramena ses mains sur les flancs de son visage après les avoir plaqué contre son torse pour rompre leur étreinte, et évidemment, surtout celle de ses crocs sur sa chair ...C’est une malédiction, Scott...Un fardeau que certes vous m’aidez à porter... Sa main descendit doucement pour couvrir sa plaie qui continuait à saigner sur elle ; Le sang ne la dérangeait évidemment pas, vampire qu’elle était, mais qu’il le perde, continue de s’affaiblir, oui ...mais que je ne vous souhaite pas... »

Se relevant pour l’embrasser à nouveau et le rassurer qu’il avait toujours son affection et pas son dégoût, accroupie face à lui sur son lit, elle le renversa ensuite sur son dos pour à nouveau prendre soin de sa blessure ; Même si elle n’était pas très sévère, et qu’il n’avait perdu que quelques gouttes de sang, il devait tout de même être présentable aux X-Men le matin venu. Peu de temps après, au dessus de lui, appliquant délicatement un bandage légèrement humide sur sa blessure pour en laver le sang qui avait coulé après avoir paré au plus urgent, elle continua leur conversation, pour le distraire de la vue qui, sans contexte expliquant la femme pâle et aux lèvres et menton ensanglantés penchée sur lui, aurait pu être la dernière d’un chasseur de vampire.

« Je vous ai juré que je vous transformerais si ça vous sauvait de la mort, et je ne compte pas revenir sur ce serment...Mais le faire sur un coup de tête comme cette nuit serait...inconsidéré...Bien entendu, si vous le souhaitiez vraiment, en pleine conscience de tout ce à quoi vous vous condamneriez... Son travail fait, elle reposa les bandages sur sa table de chevet et y éteint la dernière bougie encore allumée avant de se pencher sur lui et l’embrasser sans faute, bien évidemment capable de voir dans cette soudaine obscurité, avant de s’allonger contre son flanc ...Je serais honorée de faire face à cette éternité avec vous, Scott. »

Un vampire… Devenir un vampire… Lui, qui était sans doute le chasseur de vampires ayant tué le plus de vampires de toute l’Histoire ! Scott Summers, élevé et formé par Xavier pour tuer les vampires… Scott Summers, dont les rayons énergétiques que ses yeux émettaient permettaient de calciner les vampires. Il se disait parfois que, si Dracula ne se risquait pas à les achever, c’était parce qu’il le craignait, lui… Lui et ses rayons capables de désintégrer Dracula. Lui qui n’avait jamais connu l’amour de ses parents, élevé par son mentor… Scott avait toutes les raisons du monde de haïr les vampires sur commande, il avait été formé pour ça, entraîné et éduqué dans ce seul but. D’autres que lui le soutenaient et le suivaient, mais Scott restait leur leader. Lui, devenir vampire, cela semblait… Tellement improbable. Presque autant impensable que de faire l’amour avec la Reine d’Angleterre ! Pourtant, ils venaient de le faire, et elle l’avait à nouveau mordu. Il savait ce qu’elle avait eu en tête, et, pendant un bref moment, il avait effectivement envisagé qu’elle aille jusqu’au bout, qu’elle boive suffisamment de son sang pour qu’il doive ensuite boire le sien, et devienne ainsi un vampire.

Emmeline bandait lentement son épaule. Ils venaient de s’unir ensemble, il avait pu voir les gouttes de son sang sur ses seins, et avait caressé l’idée de la nettoyer, de la sucer ici… Scott semblait maintenant reprendre ses esprits. L’ivresse du désir était passée, mais l’idée le caressait toujours. Elle parlait pour essayer de le convaincre de renoncer à cette idée, mais il y pensait encore… Ce qui l’amena à se relever. Scott était nu, mais il s’en moquait. Emmeline pouvait ainsi mieux voir les quelques cicatrices situées sur son dos ou ses jambes, les griffures et les morsures qu’il avait reçu.

« Je suis déjà maudit, Emmeline… »

Scott pointa du doigt ses yeux.

« Mes yeux provoquent la mort. Donc, j’y connais déjà quelque chose en matière de malédiction. Et ne va pas croire que c’est une idée irréfléchie. Tu es télépathe, non ? Je suis sûr que tu peux le sentir… »

Les réflexions qu’il avait enfouis… Il fallait voir ses blessures pour le comprendre. Scott avait étudié les vampires, et il savait leurs points forts. Si les vampires étaient maudits, alors les mutants l’étaient tout autant. Ils avaient des faiblesses, mais aussi des points forts. Leur régénération cellulaire accrue permettait de guérir les blessures physiques. Scott avait étudié cela, il avait réfléchi, sans jamais le dire, à la potentialité des vampires. Oh, ce n’était qu’une simple réflexion intellectuelle, Scott n’avait jamais vraiment songé à devenir un vampire… Mais maintenant… Les choses semblaient bien différentes.

« Nous parlons de moi, mais pas de toi, Emmeline… »

Cette fois, il la tutoyait. Ils venaient de faire l’amour, après tout. Cela rapprochait les gens, a fortiori dans une société victorienne.

« Pourquoi moi ? Tu pourrais mordre tellement de gens pour assouvir ta soif… Et pourtant, ton choix se porte sur ton pire ennemi… Celui qui pourrait te tuer d’un simple regard… Et nous nous retrouvons ensemble, dans ce lit, avec mon sang qui bat dans ton cœur. Quel effet est-ce que ça fait ? »

Emmeline regarda les cicatrices de Scott et écouta sa complainte avec tristesse, une émotion plutôt rare, chez les vampires, comprenant que son combat, aussi noble soit-il, ne lui avait pas apporté grand bonheur. Elle imaginait et ressentait sa peine, mais toujours, il lui était difficile d’être pleinement d’accord avec sa solution, mais avant qu’elle ne puisse essayer d’une dernière fois s’y opposer, il retourna la situation contre elle, ce qui la força à une certaine réflexion avant de répondre, la tête tournée par réflexe vers son cœur lorsqu’il le mentionna.

« Vous êtes le seul mortel qui me le permette, Scott... Malgré tout ce qui les avait lié, elle le vouvoyait toujours, par éducation – on lui avait toujours expliqué, au sein de sa famille d’ancienne noblesse, qu’elle le devrait même son futur mari ...Je suis une mutante et une vampire ; Ça ne se voit pas, mais dès lors que l’on parle de pouvoir fusionner mon esprit avec celui d’un autre, de pouvoir me nourrir...Je deviens moi aussi un monstre ...Il n’y a qu’avec vous que je puisse être qui je suis, ni obligée de prétendre être une serviteur de Dracula, ni de cacher que je suis une mutante à tous ces nobles obsédés par la pureté du sang... Elle ramena ses yeux qui étaient, ce soir où elle s’était nourrie en grande quantité, résolument plus rouges que bleus ...Les vôtres sont...plus nobles...et vous êtes prêt à me confier votre vie alors que je devrais être votre ennemie simplement parce que j’en ai besoin...Ce que ça me fait ? J’ai l’impression que c’est le destin qui nous a rassemblés, que vous êtes le Messie de la Mutanté, mais surtout, le miens. »

Sur ces mots, la Reine Blanche embrassa Cyclope, ses doigts pressés dans ses cheveux pour le garder contre elle, et sa peau dardée de cicatrices contre celle immaculée d’une vampire, comme pour faire oublier sa confession tout en confirmant sa signification.

« Retournez voir vos compagnons, Scott – au moins une dernière fois, pour pouvoir faire vos adieux, ou si seulement vous le pouvez, trouver un moyen de rester en contact avec eux. Si, dans deux jours, quand nous nous reverrons, vous souhaitez toujours que je vous transforme, je le ferai. »

Cette nuit ne manqua pas de perturber Scott. Il retourna à l’hôtel, et tint pour lui cette relation particulière avec la Reine, assurant les X-Men de son soutien. Il constata vite que les X-Men étaient divisés. Logan étant sauvé, plusieurs voulaient retourner à Westchester, mais Logan souhaitait au contraire rester à Londres.

« Nous n’allons pas nous planquer éternellement à Westchester ! Cet endroit est de toute façon trop dangereux, trop exposé…
-  Parce que Londres est sûre, peut-être ? Dois-je vous rappeler que la Reine a servi le Club ?!
-  La Reine est fiable, nuança Scott. Nous n’avons rien à craindre d’elle. »

Deux jours… Elle lui laissait deux jours pour réfléchir. À l’idée de devenir un vampire, la première pensée de Scott était de la rejeter en bloc. Mais des voix discordantes s’élevaient dans sa tête. Emmeline ne le manipulait pas, il le sentait. Elle avait vraiment réussi à s’opposer à Dracula, mais Scott en serait-il capable ? Est-ce que cela venait de la télépathie de la Reine ? Mais, dans ce cas, Jean aurait également pu lui échapper. Scott ne savait donc trop quoi en penser, mais rejoignait l’avis de Logan sur ce point.

« Se cacher, c’est mourir à petit feu. Dis-nous ce que tu as découvert, Logan. »

Appréciant cet élan de confiance, Logan leur présenta son carnet de notes. On oubliait parfois que, à la base, Logan était un détective. Il était très vieux, et avait, dit-on, passé des années en étant enfermé. Charlmes leur avait affirmé qu’il avait été le célèbre « prisonnier au masque de fer », un prisonnier qui avait reçu un casque de fer sur le visage et qui avait été enfermé par les Français à la Bastille. Logan en avait développé une sorte d’aspect sauvage, bourru, et solitaire. Il avait aussi des pertes de mémoire du fait des années de torture que les Français lui avaient infligé. Scott savait, grâce à Xavier, que Logan avait perdu toute sa famille sous l’effet d’un vampire français, qui avait cherché à cette époque à vampiriser Louis XIV, afin d’offrir la France à Dracula. Logan aurait tué ce vampire, un vampire haut placé, proche du Roi, et, face à ce crime, avait été condamné à porter ce masque ignoble, et à être emmuré à La Bastille, non sans être régulièrement torturé.

Logan ramena Scott à la réalité ne leur expliquant que le Club des Damnés existait toujours.

« Le Club des Damnés s’empare progressivement de Londres. Shaw est certes mort, mais il a un héritier… Crawford Starrick.
-  Je n’en ai jamais entendu parler. »

Logan haussa les épaules.

« Starrick est un industriel qui a fait fortune avec l’essor des usines. La richesse de sa fortune est fondée sur le commerce d’esclaves. C’est un homme influent, qui dispose de députés dans la Chambre des communes qui sont sous son autorité. Quand Shaw est mort, Dracula a fait de Starrick son vampire, et son bras droit. »

Bien forcée malgré elle de s’intéresser à cet homme, Ororo interrogea Logan :

« Cet homme, ce serait Jack l’Éventreur ?
-  C’est ce que je soupçonne. Starrick a mis la main sur la ville à travers toute une organisation. Il a repris le contrôle du Club des Damnés, et est un proche de Dracula en personne.
-  Mais la Reine…
-  La Reine a beau avoir été mordue par Dracula, elle ne semble pas lui être totalement dévouée. Dracula a dû le sentir, et c’est pour ça que Starrick est là. Il est autant une menace pour nous que pour ta Reine adorée. »

Scott soupira doucement. Cela se voyait tant que ça ? Si oui, c’était assurément un problème…
Le lendemain matin
Palais Blanc

« J’aime beaucoup ce que vous avez fait de la décoration, Majesté… Et je vous remercie de me recevoir. »

Il était des hommes qui venaient à l’improviste et qu’on ne pouvait pas refuser. On se débrouillait pour les caler entre deux rendez-vous, et pour les recevoir, car on savait qu’ils étaient puissants. Et, sous son chapeau et son lourd manteau, l’homme qui s’était présenté à l’improviste faisait partie de ces gens-là. Emmeline dut le sentir dès qu’il entra, et le ressentir encore mieux si elle tentait de s’immiscer dans son esprit. Crawford Starrick était un vampire puissant, et sa signature le faisait ressembler à Sebastian Shaw, l’ancien maître d’Emmeline.

Se servant un verre de vin, Crawford marchait lentement dans le salon où Emmeline avait envisagé de le recevoir.

« Votre divin fessier a beau être sur le trône, Majesté, il n’y a qu’un seul souverain véritable en Angleterre… Et le Maître trouve que vous manquez de conviction. »

Crawford avait été un membre du Club des Damnés quand Shaw en était le maître. Il savait donc qu’Emmeline était une personne influente, qui aurait pu épouser Sebastian, s’il n’avait pas été tué avant.

« Ces agaçants mutants sont toujours en vie… Pire, ils ont même récupéré leur insupportable Wolverine avant que je ne puisse le récupérer, et l’interroger moi-même. Je ne peux donc que m’interroger sur la facilité avec laquelle cette bande de mutants, désormais dépourvue de télépathes, arrive à vous humilier en vous volant vos prisonniers sous votre nez. Comment puis-je expliquer ça au Maître, Majesté ? » demanda-t-il, insistant volontairement sur le dernier mot pour s’en gausser.

Sous ses grands airs, Crawford n’était en réalité pas un vampire très puissant, ce qui en faisait justement le parfait caniche pour Dracula. Il était la preuve qu’il fallait toujours se méfier des gens faibles lorsqu’ils arrivaient au pouvoir.

Emmeline n’aimait que très peu la présence de Starrick, d’une part parce que l’homme l’insupportait, d’une autre parce qu’elle signifiait que Dracula posait son regard sur elle, et qu’il était suspicieux. Cependant, la Reine Blanche n’était pas arrivée où elle était par simple opportunisme, et même parmi les vampires et selon leurs standards, elle était fine politicienne.

« Vous avez raison, Crawford, j’ai pris du retard dans mes devoirs, mais, à ma défense, j’ai un royaume à gérer, et en l’occurrence, il est en proie à une hystérie collective due à un certain « Jack l’Éventreur » - c’est d’ailleurs cette traque acharnée qui avait permis de capturer le Wolverine... Marchant lentement autour de l’envoyé de Dracula, la télépathe gardait son regard plongé dans le sien, chacun de ces deux actes se voulant aussi prédateur que possible ...Plutôt que d’essayer de jongler entre lui et les restes des X-Men qui n’ont certes plus de télépathe, mais ont été formés par deux des plus puissants pour éviter mes scans, je devrais sans doute parer au plus simple puis me concentrer sur ces mutants... Les yeux encore rouge d’Emmeline, engorgée du sang de Summers, se resserrèrent en même temps qu’elle pencha sa tête de côté ...auriez vous une idée d’où je devrais commencer mes recherches pour trouver ce bon Jack ?

- Allons, Majesté, Crawford avait soudain plus de révérence pour la position qu’il prononça sans sarcasme, il est compréhensible que tout cela vous donne du mal...mais ça ne le restera pas éternellement. »

Même s’il se donnait des airs et même de larges droits grâce à sa position, Starrick était très au fait du rapport de force plus physique qui existait entre lui et beaucoup de ses supposés subalternes, raison pour laquelle ses pulsions pourtant souvent très agressives disparaissaient aisément face à certains. Emmeline et ses pouvoirs mutants qui lui avaient offert cet as contre l'envoyé de Dracula, tout particulièrement, étaient hors d’atteinte, et sans eux, elle aurait sans doute été au moins frappée en réponse à son accusation, mais à la place, Crawford tentait de la calmer ; Il y avait aussi que même Dracula ne saurait pardonner à son sous-fifre la révélation qu’il risquait ainsi d’exposer l’existence des vampires au monde de manière aussi dramatique.

« Je ferai part à notre Maître de la raison de vos difficultés, et je ne doute pas qu’il fera preuve de clémence au vu de ces circonstances – mais il espérera aussi des résultats, une fois que « Jack l’Éventreur » aura été arrêté, ou arrêtera d’agir. Ne contrôlant ses pulsions que jusqu’à un certain point, même Starrick n’était pas certain qu’il arriverait à dompter cette part de lui, mais il pourrait au moins changer d’endroit ou cesser de provoquer la presse ; Il le devait s’il ne voulait pas lui-même finir dans les mauvaises grâces de Dracula. Gardez votre troisième œil ouvert, Majesté, ce sujet préoccupe grandement notre Seigneur, surtout ce « Cyclope » et ses rayons vengeurs ; Le reste pourrait sans doute attendre, mais lui est une menace constante... »

Ne finissant pas son verre de vin rouge, Crawford partit sans vraiment demander son reste, trop lâche pour risquer cette destruction mutuelle offerte par la Reine. Bien sûr, Emmeline ne se faisait pas d’illusion quant au fait qu’il tenterait désormais de la saboter à tous les tournants, tentant d’éroder sa position jusqu’à ce qu’elle devienne intenable, mais au moins pour le moment, elle était assez utile à Dracula pour qu’il ne se défasse d’elle sans qu’elle ait l’opportunité d’exposer Starrick comme l’Éventreur.

Cela laissa donc la Monarque libre de penser à comment protéger les X-Men la prochaine fois qu’on lui demanderait des comptes ; Elle se dit que, peut-être, transformer Scott et le présenter à Dracula comme « conquis » serait assez...

« Starrick s’est entouré d’un certain nombre de sbires pour contrôler Londres, des humains qui aspirent à devenir des vampires. Quand nous avons défait le Club, nous l’avons offert à Starrick. La destruction du Club est avant tout le fait des dissensions existantes entre Shaw et les autres vampires. En plaçant de simples humains, Starrick s’assure plus facilement de leur contrôle.
-  Donc, il faut déstabiliser l’organisation en s’attaquant aux lieutenants de Starrick ? »

Logan avait établi une liste de noms, qu’il présenta aux X-Men :

• Rupert Ferris, le partenaire d’affaires de Starrick. Un homme d’affaires cruel et arriviste qui s’occupait des usines de Starrick,
• Philip Twopenny, le gouverneur de la Banque Royale d’Angleterre, un banquier véreux et cupide,
• John Elliotson, un médecin qui officiait dans un sanatorium de Londres, et qui était l’un des poids lourds de l’organisation, car il menait des recherches sur le vampirisme,
• Lucy Thorne, une meurtrière au service de Starrick. Une femme très dangereuse selon Logan, qui estimait qu’elle était visiblement une sorcière,
• Maxwell Roth, une brute épaisse qui contrôlait le puissant gang des Blighters, un gang de rues, et avait mis main basse sur la majeure partie du crime organisé de Londres,
• James Brudenell, un général qui s’était fait connaître lors de la guerre des Boers, et qui était désormais un député.

Le mutant avait établi toute une liste, une organisation pyramidale dont Starrick était le centre. Il s’appuyait principalement sur Twopenny, Ferris, et Roth. Brudenell servait enfin à couvrir leurs activités, et était au sein du parti un whip. Ellioston et Thorne étaient des lieutenants un peu atypiques. Wolverine n’avait aucune idée d’où se trouvait Thorne, et c’était ça qui l’inquiétait le plus. Les trois lieutenants de Starrick étaient plutôt faciles à identifier.

« Twopenny est de toute évidence le plus influent… S’en prendre à lui risque de déclencher une crise majeure.
-  Il en est de même pour Brudenell. Pour l’heure, ils sont intouchables, mais tu pourrais voir avec la Reine… »

Il fallait croire que le destin de Scott était lié à elle.

Le reste de la journée n’appela aucune action spéciale, mais simplement de l’observation. Logan avait enquêté sur les Blighters, car Roth restait sa principale cible. Une cible de choix, car il était recherché par la police. Starrick se servait des Blighters pour assurer l’autorité dans ses usines et ses entrepôts. Scott se rendit sur l’un des ponts surplombant la Tamise, observant la succession sans fin de bateaux. Ici, il n’était qu’une minuscule fourmi, et il se retourna vers le Palais Blanc.

Ce soir, il reverrait Emmeline, et cette perspective l’emballait chaudement, bien plus qu’il n’aurait osé l’admettre…

À nouveau, la garde d’Emmeline était prête à accueillir Scott, le menant dans ses quartiers, mais cette fois, l’accueil fut différent. D’abord, parce que leur relation était désormais un peu plus de sang chaud que froid, et aussi parce que la Reine s’attendait à potentiellement devoir le transformer en vampire, ce qui requérait une certaine formalité.

En conséquence, elle portait une robe bien plus classique même si toute aussi sublime voire lascive – notamment, soulignant sa taille et par extension hanches et buste comme seul le corset d’une femme qui n’avait littéralement pas besoin de respirer le pouvait – et cette fois, les lumières des appartements royaux étaient allumées, même si le repas était toujours froid, devant s’accommoder d’un rendez-vous peu précis.

« Bonsoir, Scott. Elle alla à sa rencontre et l’enlaça, mais avant de l’embrasser, ses mains déjà derrière sa tête, elle se figea. Vous hésitez..? Elle poussa sur le bout de ses pieds pour venir apposer ses lèvres aux siennes, un plaisir qu’elle s’octroya quelques secondes en même temps de s'immiscer dans l'esprit de son invité, avant de rompre cette première étreinte. C’est pour le mieux – la décision est irrévocable, pas son absence. »

Implicitant des droits rares dans le palais de Buckingham, Emmeline ne prit pas la peine d’inviter Summers à la suivre lorsqu’elle retourna elle-même dans ses quartiers, considérant l’offre évidente et lui plus qu’un invité – son sang, après tout, vivait ici, et il y était un hôte de marque. À nouveau, une table l’attendait avec la plus organisée et complète des argenteries devant une confortable chaise où la Reine lui suggéra de s’asseoir en passant brièvement sa main sur son dossier lors de son chemin vers sa jumelle qui lui faisait face.

« Est-ce que tout s’est bien passé ? Votre retour chez les X-Men, votre rétablissement ? »

Assise légèrement de biais pour mieux se présenter à Scott, la Reine lui offrait dans sa richissime robe une vue digne d’un portrait royal ; Même si elle se devait de rester digne et respecter la bienséance, elle était une jeune femme de son temps et pas encore mariée, ce qui lui laissait quelques libertés. Laissant ses épaules nues même si elle couvrait son décolleté d’une pointe vers son couvre-gorge pour ainsi dire rituel, la robe de la monarque était intégralement recouverte de fine dentelle, et quelques de ses lignes agrémentées de pierres précieuse évidemment blanche – même si pas des diamants, bien trop ostentatoires, même pour la Reine Blanche. Penchant sa tête sur le côté, pensive alors qu’elle plongeait ses yeux là où elle imaginait être ceux de Summers, elle mit son poids en avant et son menton sur un de ses poings gantés.

« De mon côté, Dracula s’impatiente...Il vous craint toujours – vous, Scott, tout spécifiquement – et sait aussi que je ne devrais pas avoir tant de problèmes à vous trouver... Ne voulant faire peser dans la balance son esquisse de plan, Emmeline ne mentionna pas que le transformer en vampire serait l’occasion de faire croire à son Maître qu’il avait ce qu’il voulait, les rayons vengeurs du grand Cyclope « neutralisés », sans vraiment le lui donner. J’ai réussi à prétexter que le royaume était en ébullition – et il l’est, mais il ne le sera pas éternellement... »

Revoir Emmeline était toujours aussi perturbant… Et agréable. À sa proximité, Scott frémissait lentement, cherchant autant que possible à conserver son calme. Une tâche difficile face à une télépathe, qui pouvait lire sans difficulté dans ses pensées. Aussi somptueuse que soit sa robe, Scott n’était pas sûr qu’elle soit tolérée dans une société victorienne, où les femmes devaient montrer le moins possible de leurs corps. Scott se retrouva assis dans un petit salon, avec elle, et vérifia fugacement le col de sa cravate, ayant brusquement chaud sous sa cravate. Elle lui demanda où ils en étaient, et Scott lui expliqua donc sommairement les conclusions de Logan, tout en choisissant de ne pas parler, pour le moment, de ses hésitations quant à devenir un vampire. Cela ne devrait toutefois pas surprendre outre mesure Emmeline, puisque c’était ce qu’elle avait dit la dernière fois.

« De base, Logan est un enquêteur. Il a mené une enquête, et a découvert que le Club des Damnés existe toujours, mais de manière plus discrète. Crawford Starrick a réussi à reconstruire le Club à travers plusieurs lieutenants qui cherchent sans doute à devenir ses vampires. »

Il lui présenta un carnet, une reproduction synthétique des recherches de Logan. En le donnant à Emmeline, leurs doigts se frôlèrent, il sentit les ongles fins et tranchants de la Reine, un contact qui le fit doucement frémir. Il la laissa consulter les noms.

« Je pense que certains d’entre eux soutenaient déjà le Club à l’époque de Shaw. Twopenny et Brudenell, notamment, sont des individus très puissants. Nous ne pourrons rien faire contre eux sans votre aide, Majesté. Pour l’heure, Logan propose de se concentrer sur Roth, un bandit notoire. »

Emmeline lui expliqua ensuite que Dracula était nerveux, et qu’il commençait à suspecter qu’Emmeline ne lui obéissait peut-être pas totalement. Son regard perdu derrière ses lunettes, Scott se mura dans ses pensées… Ce qui permettrait sans problème à Emmeline de les sonder, et de comprendre ce qu’il envisageait. Était-ce à cause de sa télépathie qu’elle parvenait à échapper ainsi à l’emprise de Dracula ? Et est-ce que celui-ci s’en rendait compte, car il était justement en compagnie de Jean ? Est-ce que Jean pouvait finalement échapper à l’emprise de Dracula ? Il savait qu’Emmeline avait nié que sa télépathie soit le facteur décisif lui permettant de conserver son libre arbitre, mais Scott conservait toujours l’espoir de sauver Jean.

« Et qu’est-ce que vous suggérez, Majesté ? »

Pendant que Scott expliquait la situation, Emmeline la confirmait en survolant le petit carnet qu’il lui avait confié, le balayant de ses yeux bleus – à cause du manque de sang qui affaiblissait ses pouvoirs vampiriques – et arrivant somme toute à la même conclusion que lui : Se débarrasser de ce néo-Club des Damnés serait difficile sans quelques manœuvres politiques. Heureusement, la Reine n’était pas étrangère à ces jeux.

« Brudenell est populaire, et a des amis bien placés ; Faire quoi que ce soit contre lui ne sera pas aisé, même pour moi, en tout cas pas rapidement, mais je peux m’y atteler...Par contre, Twopenny agace autant ceux qui n’ont pas ses faveurs qu’il satisfait ceux qui les ont, et un banquier comme lui n’est jamais qu’à une enquête bien menée près d’avoir du fer aux poignets... Évidemment, la télépathie de la Reine aidait à trouver de quoi accuser qui elle voulait ...Quant à Roth, il serait aisé de le faire arrêter dans une vague de fermeté contre le crime ; Jack l’Éventreur, pour tous ses défauts, se prête au moins à ça… »

Malgré les raison évidentes pour lesquelles Dracula avait placé un de ses pions sur le trône d’Angleterre, elle était la monarque du royaume et lui devait bon service, ce qui passait par une réduction du crime. Évidemment, ces deux buts s’entrechoquaient parfois, mais les sbires de Starrick n’étaient pas si importants que l’évincement d’un ou deux par la Reine, bien justifié, serait réellement suspicieux...en tout cas, ça ne le serait s’il n’avait pas déjà ses soupçons quant à la loyauté de la mutante.

« ...Mais mettre des bâtons dans les jambes de Crawford ne fera que plus m’attirer les foudres de Dracula... Frost hésitait encore un peu à parler de son idée à Summers, ne voulant pas le pousser vers le vampirisme, mais elle devait avouer que volontairement ou non, tout cela ne faisait que prêter raison à son idée ...Il n’est certain de rien, encore confiant que je lui dois obéissance par sa morsure, mais il n’est pas idiot non plus ; Chaque fois que je semble aller contre ses intérêts, l’idée qu’une mutante puisse par malheur avoir l’exacte mutation permettant d’échapper à son emprise fait son chemin... Emmeline n’était pas sûre si la question de Scott était à propos de leur plan contre le Club des Damnés ou la guerre intestine que menait la vampire contre son Maître, mais décida d’être honnête avec celui qui mettait sa vie entre ses mains ...En fait, j’ai pensé – sans que ça ne soit une nécessité...que si je vous transformais en vampire, je calmerais ses doutes, non seulement vous neutralisant à ses yeux, mais lui donnant dominion sur vos rayons vengeurs...tout en gardant votre volonté intacte, au moins en théorie, puisque c’est à moi, qui vous aurait transformé, que vous devriez obéissance du sang, pas à Dracula. »

Emmeline avait déjà des idées pour s’en prendre aux soutiens de Starrick. Si l’influence de la Reine pouvait permettre de déstabiliser le banquier Twopenny et le député Brudenell, Emmeline craignait que de telles actions n’amènent Dracula à se méfier d’elle, et à comprendre qu’elle ne lui obéissait pas. Cette perspective était effectivement la pire, et la petite visite de Starrick au Palais était la preuve que le Maître des Vampires commençait à avoir des soupçons. La Reione avait donc eu une idée pour obtenir la sympathie de Dracula… Transformer Scott en vampire. Cette idée que le mutant avait proposé sous l’effet de l’excitation (mais à laquelle une partie de lui s’accrochait toujours) avait visiblement stimulé la Reine. Si les yeux de Scott étaient encore visibles, la surprise aurait pu se lire sur ceux-ci, mais on put voir ses sourcils se hausser et sa bouche s’entrouvrir.

« Majesté… »

Il cessa de la regarder, perdu dans ses pensées, et se releva. Scott marcha vers la fenêtre. Le soleil était en train de se coucher, et, dehors, on pouvait voir les rives de la Tamise, et le ballet incessant des navires qui remontaient le fleuve.

« Dracula est puissant, mais il n’est pas le seul vampire. Je sais qu’il est en guerre contre d’autres clans puissants, notamment en Asie du sud-est. Mes pouvoirs l’intéresseraient sûrement, mais… S’il a déjà des soupçons sur vous, il se méfiera de moi. Surtout que je peux le tuer… »

Ce qui était fascinant, c’était que Scott semblait avoir naturellement admis l’idée d’être un vampire.

« Et on ne pourra pas le duper si facilement… Il a avec lui Jean, qui est une télépathe d’exception. Elle saura si nous tentons de le piéger. Il faudra donc… Trouver un moyen de le convaincre. »

Scott réfléchissait à voix haute, mais il avait toujours eu des capacités dans ce domaine, ce qui en faisait le leader des X-Men. Il pouvait faire preuve de détachement émotionnel, ce qu’il faisait en ce moment.

« Il va falloir que je trahisse mes amis… Que je lui offre les X-Men. Cela… Cela devrait le convaincre… Surtout si, dans la foulée, tu modifies ma personnalité. Créer une personnalité hypnotique, celle d’un vrai vampire… Une illusion suffisamment convaincante pour tromper mes camarades, pour tromper Jean, et pour que je puisse m’approcher de Dracula. »

On pouvait commencer à ressentir une certaine fébrilité dans le timbre de sa voix, au fur et à mesure qu’il établissait son plan d’action.

Écoutant avec attention et tristesse Scott parler de trahir ses camarades et fracturer son esprit en deux personnalités pour pouvoir approcher Dracula, Emmeline ne put que se lever et se glisser dans son dos pour passer une main sur son épaule, la pressant doucement dans la même chair qu’elle avait mordu et mordrait à nouveau.

« S’il vous plaît, Scott...vous sacrifieriez déjà tant, épargnez au moins vos amis – et s’il faudra à la place jouer le jeu de Dracula et combattre ses ennemis vampires en son nom pour gagner sa confiance, je vous aiderai. Laissant sa main retomber contre le buste de Summers, la Reine s’avança jusqu’à ce que le sien rencontre son dos, l’enlaçant délicatement mais sans hésitation, consciente que leurs destins déjà liés le seraient irrémédiablement et lourdement si ce plan venait à être exécuté. Votre dessein – si vraiment nous venions à le réaliser – vous condamnerait à vivre pour une éternité avec vos fautes, alors réfléchissez bien à celles que vous voulez vraiment commettre... »

Doucement, les doigts de la vampire vinrent caresser le menton du mutant pour le tourner et parvenir à l’embrasser par dessus son épaule. Si proche, son sang si appétissant, et son esprit en ébullition, la télépathie d’Emma n’avait aucun mal à happer l’esprit de Cyclope et partager avec lui ses propres pensées et émotions. Évidemment, il pouvait y sentir la faim qu’il risquait, mais aussi l’espoir qu’il représentait, celui de voir sa propre morsure prendre un sens et mener à la défaite de Dracula, mais la peur que ça ne soit au prix de la damnation d’un autre.

Emmeline était prête à beaucoup pour Scott, en fait, presque tout, sauf le voir sombrer pour son, ou plutôt leur but ; Même l’idée de le transformer avait fait son chemin, son discours quant à sa mutation aidant, et il fallait avouer que l’idée de vaincre Dracula sans ce subterfuge semblait optimiste, surtout si bientôt il pouvait déclencher sa guerre.

« ...Mais une éternité est aussi tout le temps qu’il faut pour combattre un ennemi immortel – arrêtez de penser en semaines, mois...pensez en années, décennies, s’il le faut : Elles vaudraient bien les vies de vos amies, non..? La Reine déposa à nouveau quelques courts baisers sur les lèvres de Summers ...Je serai là pour chacune, pour m’assurer que Dracula n’ait jamais véritable dominion sur votre âme, vous aider à gagner ses faveurs, et enfin le vaincre – et quand ce sera fait, passer l’éternité à vos côtés. »

Scott commençait peu à peu à voir un plan se dessiner, une stratégie… Une stratégie folle, mais ils jouaient contre un adversaire redoutable… Non seulement Dracula, mais aussi Jean, la télépathe la plus puissante que Scott eût jamais rencontré avant de voir Emmeline. Une télépathe dont les crises psychiques avaient même effrayé Xavier. Emmeline avait également ders réticences à ce plan, mais Scott était sûr de tenir une fenêtre. Elle lui demanda de songer en décennies, de réfléchir sur le très long terme, avec elle… Mais Scott était têtu, et même obstiné. Et, maintenant que cette idée était en lui, il ne comptait pas la repousser.

« Je ne compte pas les tuer, Majesté ! nuança-t-il après leur baiser. Mais ils devront le croire… Car, s’ils le croient, Dracula le croira aussi. Et nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre des années… Le pouvoir de Dracula ne cessera de se renforcer, et je vous rappelle qu’il vous soupçonne déjà. Que fera-t-il quand il reviendra ici en compagnie de Jean, et que Jean saura que nous sommes toujours en vie ? »

Scott pouvait d’ailleurs se demander pourquoi il ne l’avait pas encore fait… Même s’il avait une petite idée. Il était convaincu qu’une partie de Jean devait encore résister. Cela était peut-être lié aux télépathes ? Emmeline avait réussi à surmonter l’influence de Dracula, mais, si Dracula se tenait face à elle, y arriverait-elle toujours ? Alors, il devait rester près de Jean, pour s’assurer qu’elle lui soit fidèle, et qu’elle pourrait s’en prendre à ses anciens amis. L’un dans l’autre, Scott était convaincu qu’il fallait agir vite, qu’il fallait agir avant que le pouvoir de Dracula ne soit trop élevé… Ou avant que lui-même ne puisse revenir.

« Dracula se méfie de vous, Majesté… S’il apprend que vous m’avez, moi, un homme dont les rayons peuvent tuer n’importe quel vampire, cela renforcera sa paranoïa. Il viendra… Il viendra pour s’assurer que vous lui êtes toujours fidèle. Et c’est cela que nous devons faire. Plus nous attendons, plus son emprise sur Jean se renforce. Si nous attendons trop longtemps, nous perdrons, quoi que nous tentions. Vous… Je ne sais pas ce que Charles vous a dit, mais il y a chez Jean… Il y a chez elle une partie d’elle-même dont Dracula ne soupçonne pas l’existence. Charles avait scellé les pouvoirs de Jean, Majesté. Si Dracula fait sauter ce blocage, nous aurons une menace bien plus importante à repousser. »

Comme possédé, Scott retourna sur le lit, et saisit les poignets de la Reine.

« Ne voyez-vous pas que nous disposons d’une ouverture, Majesté ? Tout ce que cela demande, c’est que nous nous fassions réciproquement confiance. Sans doute suis-je un fou, mais je vous aime, Majesté ! Nous ne nous connaissons que depuis peu, il est vrai, mais je sais déjà que je peux vous confier ma vie… Car je l’ai déjà fait. Et c’est cela que je vous demande. Me transformer en vampire… Mais aussi modifier mon esprit. Remodeler ma personnalité en créant un levier, un point de sauvetage qui me permettra de revenir quand vous le ferez. Ainsi, je serai en apparence l’allié de Dracula, je réunirai les X-Men en un seul point… Et, au sommet de son triomphe, alors qu’il pensera enfin nous avoir vaincu, nous pourrons le vaincre ! »

Scott se releva encore, et se rapprocha d’une bibliothèque abritant les livres qu’Emmeline lisait.

« J’ai vu que vous aviez plusieurs livres sur ce neurologue autrichien qui fait scandale… Sigmund Freud. Xavier m’en avait parlé. J’ignore comment, mais lui et Xavier s’étaient déjà rencontrés. Freud a développé toute une théorie, une étude de la structure mentale, une… Une topique. Un schéma comme quoi notre cerveau aurait une partie consciente et une partie inconsciente, et que cet inconscient expliquerait les maladies mentales. Je pense que nous pouvons le faire… Que vous pouvez implanter en moi une fausse personnalité, une personnalité qui se substituera à la mienne, et qui donnera à tous l’illusion que j’ai rejoint le camp de l’ennemi. »

Après cette longue logorrhée verbale, Scott se tut pendant quelques secondes, regardant encore la Reine, tout en se demandant s’il avait l’air d’un génie ou d’un fou… Tout en se disant que, en fin de compte, la différence entre les deux pouvait parfois être très ténue.

« Qu’en pensez-vous ? »

Laissant Scott la mener, tant physiquement, se mouvant dans ses quartiers au gré de ses explications, que dans celles-ci, Emmeline ne l’interrompit pas ; Son plan avait du sens, quand bien même sa victoire n’était pas garantie, mais il l’avait dit : leur ennemi était puissant. Quand enfin il eut fini et sembla demander son approbation, la Reine s’avança vers lui et prit son visage dans ses mains, leurs paumes froide contre le bas de ses joues et leurs doigts de part et d’autre de ses oreilles, sondant son esprit pour atteindre la seule certitude qui pouvait exister pour une télépathe.

« Que vous avez pris votre décision, et que j’ai promis de m’y plier... Évidemment, c’était en vérité un avis qu’il voulait, pas une simple constatation de fait, mais Cyclope était le chef et tacticien des X-Men pour une raison, et la Reine Blanche ne pouvait la nier, encore moins après l’avoir vu exposer un plan qui, après tout, n’était pas fou. Dois-je, donc..? »

L’objet exact de la question, la transformation de Scott, était évident, et il répondit par l’affirmative après une brève pause pour s’assurer lui-même qu’il était sûr, un fait confirmé par Emmeline et sa télépathie. Son regard plongé dans la visière du mutant, elle prit une longue inspiration, inutile à un vampire mais pleine de sens, avant d’abaisser les yeux et le mener à son lit où se passerait le « rituel », si l’on pouvait l’appeler ainsi, et où l’humain mourrait pour donner naissance au vampire.

Assis l’un en face de l’autre sur le matelas et les draps rebondis, les deux mutants prirent un instant pour boire la solennité du moment avant qu’Emmeline ne fasse de même avec le sang de Scott. Mais d’abord, elle plaça à nouveau ses mains sur les flancs de son visage, et l’amena doucement au sien de manière à ce que leurs fronts se touchent, et par extension, métaphoriquement, leurs esprits, au plus près qu’ils puissent l’être via leurs corps. Elle expliqua alors à Summers les détails de sa transformation – pas en ce qui concernait le vampirisme, il était trop bien informé pour l’ignorer, mais plutôt les spécificités de la sienne.

« Je ne pourrai pas amenuiser la douleur – ça me distrairait de cette tâche ô combien plus importante, mais croyez bien que j’essaierai de le faire avec...miséricorde Les yeux fermés, se concentrant sur l’âme de Scott, venant à la connaître, l’arpenter, même doucement la manipuler, ses mots manquaient subtilement du charisme usuel de la Reine, comme complètement séparés de sa conscience – et en quelques sortes, ils l’étaient, la télépathe pour ainsi dire à peine présente dans son corps, lui envoyant seulement de simples bribes d’instruction, bien plus présente dans l’esprit de Scott. En fait, au milieu de son discours, ce ne furent plus ses lèvres qui le donnèrent, mais ses pensées, directement dans celles de son hôte. Je scinderai votre esprit seulement à l’instant où je vous mordrai, pour lier cette nouvelle personnalité de surface à votre nouvelle nature – ce sera elle qui se réveillera assoiffée de sang pour votre premier repas, et vous devrez la vaincre pour regagner votre contrôle. Vous n’y arriverez sans doute qu’après qu’elle ait commencé le dit repas et que votre soif se soit amenuisée – je serai votre victime, mais ne vous en faites pas, j’aurai tout votre sang en moi, vous aurez de quoi vous nourrir. »

Il y avait une certaine symétrie à ce que tout cela commence avec Summers buvant d’Emmeline, et même si elle avait une certaine appréhension pour ce moment, elle était aussi impatiente que le seul vampire qui l’ait jamais mordue ne soit plus Dracula ; Le geste était hautement symbolique parmi les buveurs de sang, et faisait même parti de leur simulacre du mariage – comme le X-Man l’avait noté lors de leur première « séance », le nom d’étreinte n’était pas tendancieux par simple accident.

« Je vous aime, Scott. »

La déclaration semblait sortir de nul-part, mais Emmeline la gardait en elle depuis la déclaration réciproque de son destinataire ; À l’approche de ce moment si crucial et intense, elle décida de ne plus laisser sa pudeur royale et, elle le savait, personnelle, l’empêcher de le dire, même seulement en pensées – pour une télépathe, évidemment, cela avait autant si ce n’est plus de valeur – et même si rapidement, elle passa à la suite comme pour faire oublier l’aveu, du moins, après un bref baiser volé. la Reine Blanche fit alors doucement tomber ses mains sur son torse avant de les passer sous ses bras ; L’une revint pas dessus son épaule pour le garder contre elle, et l’autre remonta sa nuque pour délicatement écarter sa tête alors que celle d’Emmeline plongea dans son cou.

Simultanément, elle plongea ses crocs dans la chair de Scott et une pique mentale dans son esprit pour en même temps qu’elle le transformait en vampire, créer une seconde personnalité en lui, qui prit ses racines dans la morsure et tout prochainement, la mort et naissance d’un nouveau buveur de sang. Laissant le liquide écarlate affluer entre ses lèvres, la Reine réajusta son emprise, sa force grandissant alors qu’elle se nourrissait pour la première fois depuis la dernière visite de Cyclope, et même si elle aurait pu se laisser aller à sa soif, elle préféra garder le contrôle et donc une certaine tendresse dans sa morsure, ne cherchant pas à sucer le sang plus que nécessaire.

En même temps, elle manipulait son esprit, le repoussant dans son inconscient pour laisser la personnalité naissante prendre le rôle de façade, et finalement, ils s’évanouirent ensembles et la vampire acheva de leur voler la moindre goutte avant de se mordre le poignet et laisser tomber entre leurs lèvres entrouvertes un peu de son propre sang, promettant leur retour en tant que créature de la nuit.

En attendant ce moment, Emmeline resta auprès de Scott, attendant son réveil – ou plutôt, celui de son alter-ego – penchée au dessus de son corps inconscient, en vérité, même mort, un bras de chaque côté de lui, un fin filet de sang tombant de sa bouche jusqu’à son gorget qui se tacha doucement écarlate. La Reine respirait nerveusement, comme une humaine, espérant avoir réussi cette double mission, et attendant avec impatience qu’il se réveille et la morde seulement pour confirmer leur succès.

« Je sais » dit-il simplement, quand elle lui annonça qu’elle l’aimait.

Elle lui offrit ensuite le baiser vampirique. Scott en était sûr, et, même si elle lui avait dit qu’elle ne pourrait atténuer la douleur, il s’en moquait. C’était la seule solution… Devenir l’ennemi, pour finalement vaincre l’ennemi. Elle l’avait prévenu, avant qu’elle allait le transformer. Pas d’atténuation de douleur, donc, et elle allait également devoir dissocier son esprit en deux, implanter cette fausse personnalité vampirique, tandis que sa vraie personnalité resterait endormie, enfouie en lui. C’était un plan délirant, à vrai dire, mais Scott avait foi en Emmeline. Il n’aurait pas su dire en quoi, mais il avait confiance, tout simplement. Néanmoins, il ne put empêcher son rythme cardiaque de s’emballer frénétiquement, et gémit quand elle le mordit. Elle avala son sang en soupirant, et Scott déglutit, claquant nerveusement des dents. Peu à peu, il sentit une certaine torpeur l’envahir, ses paupières devenaient plus lourdes… Le manque de sang en lui se faisait sentir, et il saisit nerveusement les hanches d’Emmeline, cherchant à la repousser, mû par un réflexe de survie, un instinct de survie automatique.

« E-Emm… »

Scott bascula alors, et vit le poignet d’Emmeline se rapprocher, une liqueur rougeoyante brillant devant ses yeux, et il sombra ensuite…

Il aurait voulu se reposer, mais la douleur ne tarda pas à le déchirer, à briser son esprit, tandis que la voix sensuelle d’Emmeline résonnait en lui, rebondissant comme une balle.
Beaucoup plus tard…

« Huaaargh !! »

Dans un hurlement de rage, Logan se réveilla, et constata vite que quelque chose n’allait pas.

Pour commencer, il n’était pas dans la chambre de son auberge.

Ensuite, il était couvert de sang.

Enfin, et surtout, il était entouré de cadavres posés dans une fontaine rouge. Logan, horrifié, se releva brusquement, et heurta un corps, ce qui le fit tomber sur le sol. Il bascula à l’envers, et tomba en contrebas. Logan grogna en heurtant un pavé froid et dur, et vit autour de lui les entrepôts sinistres des docks de Sainte-Catherine. Logan se releva laborieusement, et tituba encore un peu. Ses souvenirs étaient encore flous, et il se rappelait d’une immense douleur à hauteur du torse. Le mutant toucha alors son torse, et sentit encore des poils calcinés. Peu de choses pouvaient aussi précisément blesser quelqu’un. Le mutant grommela alors. En levant la tête, il vit un pont en hauteur, et se rappela alors…

Une calèche. Il avait planté ses griffes à l’intérieur, furieux, et, en tentant de rentrer, un tir de laser l’avait frappé violemment au torse. Il régnait alors une pluie battante.

En ce début de matinée, une pluie fine tombait encore sur la ville, et les nuages avaient une teinte rougeâtre, surréaliste. Logan entendit alors des bruits forts, et vit des silhouettes qui se rapprochaient.

« Oh non… »

Un ricanement sinistre émana du haut d’un entrepôt. Logan vit une figure grimaçante, monstrueuse.

« Hihi… Te revoilà à ta place, Logan, avec mes garçons… »

Maxwell Roth. Jadis petite frappe au service du Club des Damnés, Roth était devenu un nosferatu, et les Blighters un gang beaucoup plus dangereux. Ils étaient maintenant des vampires ressemblant à des goules, agissant dans les bas-fonds de la ville. S’aventurer dans les quartiers dangereux de Londres était désormais très dangereux, trop dangereux. Les vampires étaient multiples, traquaient les humains. Les quartiers pauvres n’avaient pas été isolés pour rien. Logan était tombé dans la fosse, et déploya ses griffes.

« Tu as voulu tuer notre Roi… Ce n’était pas très gentil. »

Logan se mit à courir, filant à travers les ruelles, tandis que les nosferatus s’élancèrent à sa poursuite, poussant des ricanements sinistres. Il passa devant une affiche qu’il ne prit pas la peine de lire, mais qui était pourtant claire :

HALTE AUX VAMPIRES !

NE SORTEZ PAS LA NUIT !

PRIEZ !

Loin de là, dans les hauteurs de Londres, le Palais Blanc royal était bien plus sécurisé. Ici, dans les beaux-quartiers de Londres, les nosferatus ne venaient pas. Au-delà des frontières de l’Angleterre, la guerre tant redoutée avait fini par commencer. On l’appelait déjà « guerre mondiale », et, si l’Angleterre était pour l’heure neutre, elle signerait visiblement la fin de l’humanité. Dracula avait pris possession de plusieurs grandes nations européennes, l’Autriche-Hongrie, la Bulgarie et la Russie, et avait fondé le premier Empire Vampirique. Son Empire s’était heurté aux forces de la Coalition, mené par l’Empire d’Allemagne et par la France. Toutefois, l’Allemagne était dévastée, et les vampires avaient commencé à assiéger la France. L’Angleterre allait avoir un rôle clef à jouer, déterminant…

Mais, pour l’heure, le Roi d’Angleterre était très occupé. Dans leur chambre à coucher, il forniquait avec sa Reine et Maîtresse depuis qu’ils étaient rentrés hier soir. Alors qu’ils inspectaient l’un des hôpitaux de John Ellioston, ils avaient été attaqués par l’un des derniers résistants en activité… Wolverine. Scott lui avait porté un coup fatal, et avait ensuite convoqué Roth. Il avait ordonné au nosferatu de retrouver Logan, et de le convertir. Logan était à ce jour la dernière étape dont les vampires avaient besoin pour devenir immortels. Plus que jamais, la perspective d’une victoire définitive avait saisi Scott. Bientôt, l’Angleterre pourrait officiellement annoncer son allégeance à l’Empereur Dracula.

Cette idée avait excité Scott, et lui et Emmeline avaient fait l’amour toute la nuit. Et là, ce matin, un éclair illumina le corps merveilleux de sa femme. Du sang coulait encore de son corps, sous les griffures de Scott. Il était rare qu’ils fassent l’amour sans laisser derrière eux d’épaisses traînées de sang. Le sang les exaltait, les stimulait, et sa verge épaisse s’enfonçait dans le corps de sa dulcinée.

« E-Emmeline, hmmm… Tu es magnifique… ! »

Les choses s’étaient violemment accélérées depuis la transformation de Scott, et pas vraiment en bien. Avec Cyclope supposément converti à la cause vampirique et donc plus l’immense menace qu’il était, Dracula décida de passer à l’action en Europe après l’avoir nommé Roi d’Angleterre, respectant ses capacités de tacticien qu’il avait évidemment conservées pour appuyer la Reine Blanche qui s’était à peine rattrapée de ses manquements en l’offrant au seigneur des vampires.

Emmeline, pour sa part, devait maintenant conjuguer à la fois avec Dracula et la seconde personnalité de Scott qui, même si elle comptait bien se rebeller contre son seigneur, ne voulait que le remplacer, la forçant à un triple jeu dangereux. Cependant, cette nuit, après une tentative d’assassinat par l’insaisissable et pourtant très précieux Wolverine, Frost avait pu profiter de son véritable époux, peut-être motivés à ainsi apprécier la vie par la mort qui aurait pu les saisir quelques heures auparavant.

« Vous êtes...infatigable...Scott... »

Les avant-bras plaqués contre ceux de son Roi, Emmeline agrippait ses muscles bandés alors qu’il continuait de lui faire l’amour mais qu’elle se sentait faillir ; Même si la douleur ne signifiait pas grand-chose pour une vampire, les nombreuses griffures de Summers la privaient de sang, et il était encore un vampire relativement jeune, enhardi par sa transformation et bien plus capable de maintenir l’effort. Plutôt que de lui demander d’arrêter, cependant, la Reine laissait son esprit littéralement dériver, les yeux mi-clos et sans emprise véritable sur sa télépathie, pas assez capable de se concentrer pour les discipliner, et en vérité, sans grande envie.

Sans ce contrôle, elle laissait ses émotions et sensations se décupler et se mélanger avant d’à nouveau les déverser dans son propre esprit et celui de Cyclope, un assaut qu’il pouvait supporter – et apprécier – dans sa frénésie, mais auquel la Reine succombait doucement, plantant ses ongles dans ses avant-bras, se sentant perdre l’équilibre et tomber, et se rattrapant tout naturellement à son Roi.

Tous les quelques coups de rein de Scott, un gémissement lui échappait, et une vague de plaisir la traversait – elle, son esprit, puis son lien télépathique avec son amant. Au détour d’une de ces rafales d’émotions, qui allaient crescendo et menaçaient d’amener la Reine à un orgasme, Frost griffa la peau de Summers en amenant ses mains contre les draps dans un spasme, les saisissant vite à leur tour avant de gémir de plus belle.

A nouveau un éclair illumina son corps et le darda de reflets dont il était difficile de savoir s’ils étaient dus à son sang ou à sa sueur, mais qui décrivaient tout aussi bien chacune de ses courbes, de ses muscles bandés par la tension, et de ses blessures, même sa chevelure dont les pointes s’étaient doucement trempées d’écarlate. La pique dans l’esprit de Scott que cette vision causa, emporté par la vue à la fois du corps de sa maîtresse et de son sang ainsi exposé, suffit à arracher à celle-ci un nouvel orgasme lorsqu’elle traversa leur rapport psychique ; Son corps se crispa, ses jambes contre les flancs de son Roi et ses bras contre les draps que ses mains menaçaient presque de déchirer, ses poumons se vidèrent de cet air qui ne lui servait qu’à crier à son amant son plaisir, et son esprit se vida presque complètement pour un instant de ce qui n’était pas plaisir.

La Reine resta ainsi, incapable de réfléchir ou bouger autrement que par stimulation presque animale, se contorsionnant sans grand sens contre les draps humides de sang, pendant un court moment avant que ses sens ne lui reviennent partiellement. Ouvrant ses yeux qu’elle avait fermé avec force lors de cette apothéose, ils cherchèrent immédiatement Scott dont elle réclama la présence.

« Scott, votre...votre cou... »

Sentant enfin la fatigue la prendre sans son amant faisant de même pour le lui faire oublier voire apprécier, Emmeline voulu un peu de son sang que lui avait gardé – la Reine était bien moins enclin à le répandre chez son partenaire – même si elle devait admettre être partiellement motivée par l’acte lui-même.

Sa transformation en vampire avait été pour Scott comme une libération. Oh, bien sûr, il se rappelait de celui qu’il avait été avant… Un X-Men. Un guerrier qui combattait les vampires. Scott n’avait toutefois pas compris qu’il se battait pour des causes passées. Son ancien mentor, Charles Xavier, leur assurait que le christianisme les sauverait, que les vampires étaient les maudits de Dieu… Quelle folie ! Scott n’avait jamais vraiment cru à ces sornettes. Dieu n’était qu’un mensonge, une illusion inventée pour soumettre les humains, pour leur faire croire à des chimères. Les vampires ne croyaient pas en Dieu. Devenu vampire, Scott avait décidé d’accélérer les choses. Dracula était son Maître, mais c’était un Maître que Scott méprisait. Sans doute avait-il hérité ça d’Emmeline ? Toujours est-il que Scott l’aimait. Un amour sincère et intense. Les deux prévoyaient à terme de remplacer Dracula, de le renverser. Le Maître des Vampires n’avait pas encore osé venir, car il savait que les rayons dévastateurs de Scott pouvaient le tuer.

Ce soir, Scott faisait passionnément l’amour à sa femme. Il la prenait avec vigueur, sans relâche, faisant grincer furieusement le lit. Sa vigueur exceptionnelle était liée à tout ce sang en lui. Ce sang furieux qui bouillonnait dans ses veines, le gonflant d’une énergie à tout rompre. Le mutant la prenait avec passion, et, quand elle réclama son sang, il acquiesça. Il était sur elle, alors, il pivota, l’emmenant ainsi sur lui. Emmeline le dominait désormais, son membre toujours niché en elle, dans sa chaude et intime cavité, humide et accueillante. Pour rien au monde, il ne se voyait sortir de là. Il la laissa ainsi se ruer sur son cou, et soupira. Lui qui venait déjà de s’abandonner en elle, il sentit son érection revenir au contact des dents d’Emmeline sur sa peau. Sa main devint plus griffue, et lacéra les fesses de la Reine, puis il glissa sur son dos, et la fit saigner.

« Emma… »

Il avait tendance à l’appeler ainsi, par un diminutif… Vampire, la douleur le dérangeait moins que quand il était humain, et le sang… Oh, l’odeur de ce délicieux nectar ! Il ressentait désormais des sensations inexplicables. Vampire, une malédiction ? Ah ! C’était même tout l’inverse ! Il savourait cela avec délectation, sentant comme à chaque fois ses sens s’exalter alors que l’or rouge circulait entre eux, les liant plus intimement que ce que n’importe quel coup de reins aurait jamais pu faire…
En contrebas, les nosferatus s’élançaient avec rage, sifflant et grognant. Ils tournaient autour de Logan avec fureur, qui s’élançait à travers les ruelles d’une Londres agonisante. L’un d’eux bondit depuis le toit d’un entrepôt, et le renversa. Logan tomba sur le sol, et, quand le nosferatu voulut encore lui sauter dessus, les griffes osseuses de Logan lui transpercèrent le crâne, l’interrompant net dans son saut. Logan rugit alors, et deux autres nosferatus sifflèrent près de lui. L’un bondit depuis les hauteurs, et Logan l’intercepta en plantant ses griffes dans son corps, puis le repoussa. Le sang du nosferatu vint salir sa tenue, et le troisième lui sauta également dessus. Logan tomba au sol, le vampire sur lui, et, alors qu’il aurait pu craindre une morsure, une détonation rugit dans la ruelle. Une balle en argent transperça le crâne du nosferatu, qui poussa un couinement, avant de s’effondrer sur Logan.

Dans un grognement, l’intéressé repoussa le cadavre du monstre, et se retourna. Une silhouette encapuchonnée tenant une carabine se rapprocha lentement.

« Bordel…
-  Erik t’avait déconseillé de faire ça, Logan. C’était stupide et irrationnel, tu nous as tous mis en danger.
-  Ouais… Moi aussi, je suis content de te voir. »

Des grognements et ricanements supplémentaires les amenèrent à cesser de discuter. Sous son manteau, Psylocke était une femme redoutable, mais, aussi talentueux soient-ils, ils savaient qu’ils n’étaient pas de taille contre les Blighters, qui cherchaient à les encercler…