The Multiversity

« Affronter le Phénix ? répéta Scott. Vous considérez le Phénix comme une menace ?
-  Du peu que je sais de cette chose, oui… Pas vous ? »

Scott resta silencieux pendant quelques instants, avant de répondre :

« Les X-Men ont déjà eu affaire au Phénix à plusieurs reprises, oui… Mais ses objectifs ou ses intentions ne nous ont jamais été communiquées. Jean était son hôte… Mais cela ne la rendait pas forcément mauvaise pour autant. Et puis… »

Le mutant regarda brièvement Emma.

« Emma et moi avons récemment mené une mission sur la base d’informations fournies par le SHIELD. Nous avons obtenu des éléments assez confus sur le Phénix, mais qui éloignent l’idée que le Phénix soit néfaste. Je ne pense pas que nous dussions l’affronter. »

Rudolfo grinça des dents, visiblement agacé par cette idée.

« Alors quoi ? Vous souhaitez soutenir l’usurpateur ?
-  Non, contesta Scott. Nous ne prévoyons pas de le laisser utiliser le Phénix, mais le Phénix est revenu ici pour une raison bien précise. Cela, j’en suis convaincu. »

Widow restait silencieuse, n’ayant pas grand-chose à dire.

« Quel est votre plan, alors ?
-  Attaquer le Palais, tout simplement. Nous profiterons du fait que l’usurpateur est parti en Enfer pour détruire cet artefact infernal. »

Un plan simple et efficace. Il existait sans doute une résistance en Latvérie, mais Scott estimait qu’elle devait être assez faible, surtout depuis que Fatalis avait décidé de convertir le régime en démocratie.

« Et avec quelles troupes ?
-  Aucune en particulier. »

Rudolfo se déplaça, et se rapprocha d’une porte. Il appuya sur un bouton, et la porte s’ouvrit en deux, menant à un laboratoire. Scott vit plusieurs scientifiques, et grommela en reconnaissant les uniformes de l’AIM. Ils travaillaient sur des robots de Fatalis.

« Vous vous êtes alliée avec l’AIM ? s’étonna Black Widow.
-  Eux seuls disposent des compétences technologiques nécessaires pour parasiter le fonctionnement des robots de Fatalis, et les retourner contre lui. Vous vouliez mon plan ? Il est simple… Déployer un virus informatique qui amènera les robots de combat de Fatalis à se combattre entre eux, nous offrant ainsi le temps de pouvoir détruire le cristal. »

Découvrir un laboratoire futuriste caché sous cette cathédrale gothique était une certaine surprise, mais après tout, le mélange de l’ancien et du nouveau semblait une spécialité Latvérienne. Cependant, Emma se targuait d’être une réaliste, et une pragmatique, et s’allier à A.I.M. n’était pas fondamentalement en dessous d’elle, mais ça ne voulait pas dire qu’elle était naïve, ou même optimiste quant à ce genre de pacte avec le diable - même si l’image perdait de son pouvoir face au pacte littéral de Fatalis avec celui-ci.

“Et qu’est-ce qu’ils y gagnent, eux ? Frost tenta de s’immiscer dans les pensées des hommes en tenues jaunes peu flatteuses, mais ils étaient soit de simples suiveurs d’ordres, soit protégés par des brouilleurs télépathiques. Si l’A.I.M. était une organisation de charité, je pense que ça se saurait, et Fatalis semble bien plus leur type que vous, si vous me permettez la comparaison.

- Je ne suis pas non plus un idiot, “Emma”. Le prince héritier ne semblait pas tout à fait croire que c’était son véritable nom, pas sans raison, puisque des autres, il ne connaissait que les pseudonymes. L’A.I.M. ne poursuit que ses propres intérêts, mais je suis ses intérêts; Fatalis pourrait effectivement être leur scientifique suprême, mais comme pour tout, il veut tout diriger sans déléguer ni respecter ceux qui étaient là avant lui, alors, dans les faits, il est leur ennemi.

- Et en quoi seriez-vous leur allié ? La Reine Blanche continua sa conversation à voix basse, de sorte qu’elle et ses doutes ne soient pas entendus, mais Rudolfo refusa ces messes basses, répondant presque d’autant plus fort.

- Quand la Latvérie sera légalement mienne, d’une manière que personne au monde ne saurait nier, par les droits du sang le plus ancien, j’en ferai un de leurs rares alliés. Et je leur donnerai droit de regard sur la technologie laissée par Fatalis, ce que l’O.N.U., un quelconque chef de guerre, ou Dieu sait quoi, ne ferait pas.

Gagnant-gagnant.”

Emma balaya le laboratoire du regard, peu rassurée par ce qu’elle estimait être la naïveté du prince, mais devait avouer que ce plan ne semblait pas vraiment avoir besoin d’eux, et donc que la seule chose pire que d’y participer et être capable de réagir à toute éventualité était de s’en aller, aussi amère était une alliance avec ce genre de personnages. Télépathiquement, elle lia son esprit à celui de Scott et Natasha.

“Personne n’y croit, n’est-ce pas ? Dites moi que personne n’y croit à part notre sang-bleu ici présent.

- C’est riche venant de ta part, Emma.

- Réfléchie à ce que je dis, pas à mon hypocrisie, chérie, on n'a vraiment pas les trois heures qu'il faudrait. On a donc maintenant deux plans à saboter en même temps, d'abord celui de Fatalis, puis celui de A.I.M. quand inévitablement ils tentent de s'emparer de tout ce pouvoir réuni en un endroit ?”

*[MT] C’est ce qu’on appelle la realpolitik, Emma. Les Américains qui s’alliaient aux talibans pour combattre les Soviétiques. L’ennemi de mon ennemie est mon ami. [/b][/MT][/b]
[MT] Des propos dignes d’un leader politique, Cyclope. [/MT]
[MT] Je ne dis pas que nous devons faire confiance à l’AIM, loin s’en faut. Ils nous considèrent comme des cobayes… Mais, pour être honnête, je ne pense pas que Rudolfo arrivera à faire quoi que ce soit contre le régime latvérien. En revanche, s’il peut nous aider à contrecarrer les plans de Fatalis avec le Phénix… [/MT]
[MT] Puisque tu évoques les plans de Fatalis vis-à-vis du Phénix, quels sont les vôtres, exactement ? [/MT]*

Scott ne répondit pas immédiatement, regardant silencieusement Natalia. Rudolfo parlait avec les agents de l’AIM, et l’un d’entre eux se rapprocha. Ernst Kowalski les observa brièvement, avant d’ajouter :

« L’AIM est une organisation tout à fait respectable.
-  Vraiment ?
-  Vous ne devriez pas croire la propagande religieuse à notre sujet. Nous sommes un conglomérat scientifique, et nous n’(avons conçu aucune des armes de destruction massive fabriquées par ceux qui se proclament les protecteurs de cette planète. Nous n’avons pas créé Ultron, ni la technologie Stark qui fut utilisée par des criminels. »

Scott n’avait rien à dire à cela, n’étant pas l’avocat des Vengeurs, ni débiteurs de leurs erreurs stratégiques. Il savait en revanche que l’AIM disposait d’un nouveau siège social, offert par les Chinois, la « AIM Island ». Une île très spéciale qui leur servait de zone franche, construite sur les ruines d’une ancienne station militaire, et qui offrait à la Chine des technologies de pointe pour moderniser leurs troupes.

« Nous ne sommes intéressés que par les technologies que Fatalis met à la disposition de son peuple. Voyez cela comme de l’espionnage industriel, toutes les compagnies font cela.
-  Je ne vous aime pas, Docteur Kowalski. Les choses qui se disent sur votre compte font froid dans le dos.
-  Autant que celles qui circulent à votre sujet, Monsieur Summers. J’ai même cru comprendre que c’était là la raison de votre dispute avec un autre de vos éminents membres. »

Derrière la visière de Scott, il était difficile de savoir ce que celui-ci pensait. Tout ce qu’on pouvait dire, c’est qu’il parvenait à conserver son calme.

« Tant que nos intérêts coïncident, je ne chercherai pas à vous arrêter. De toute façon, vous ne renverserez jamais Fatalis.
-  Tant mieux, car ce n’est pas notre intention. Nous ne faisons que soutenir le Prince Rudolfo sans prendre part dans ce conflit.
-  Bien sûr… Le Phénix ne vous intéresse pas ?
-  Nous nous intéressons à la technologie, pas à de vieilles légendes. »

Scott acquiesça, puis s’éloigna un peu. Il avait sciemment profité de cette conversation pour éviter de répondre à Natalia. Son intention initiale était certes d’appréhender Wanda et de la juger pour ses crimes, mais pouvait-il négliger le retour du Phénix ? Après ce que Scott avait vu sur Rook Island, il avait tendance à voir dans le Phénix un signe d’espoir, plutôt qu’une menace potentielle… Une vision qu’Emma partageait avec lui, et qui le rassurait. Ensemble… Ils feraient ça ensemble !

”Je me rends bien compte qu’on n’a pas le luxe de faire la fine bouche, chéri, je dis juste qu’il ne faut pas se faire l’illusion qu’il n’y aura pas un arrière-goût amer, peut-être même ferreux. Sa référence à la sensation sur le palet du sang passée, et n’ayant pas plus répondu que Cyclope à la question de Natasha, celle-ci la répéta à Emma, espérant avoir une réponse cette fois-ci.

- Qu’est-ce que vous comptez faire du Phoenix ? Ne crois pas qu’on a oublié cette histoire de porte noire ou je ne sais quoi.”

Profitant de l’interruption de ce “Kowalski”, la Reine Blanche prit un moment pour réfléchir, sentant bien évidemment non seulement le regard mais, par sa télépathie, l’attention de la Veuve Noire sur elle. Heureusement, Scott occupait le scientifique, et quand enfin elle eut pris sa décision, Frost adressa discrètement un regard à Romanova, comme si confirmant simplement sa position, pour continuer leur conversation secrète. Ne pas répondre ne serait que confirmer les pires pensées de l’espionne, alors autant essayer de les adoucir.

”Nous sommes du même côté, Natasha - nous voulons que le Phoenix ne vienne pas ici pour détruire la Terre, et stopper Fatalis.

- Pas à moi, la vipère blonde, vous voulez l’utiliser pour vos histoires de Mutanté !

- Crois bien que je ne reconnais jamais mon impuissance sans que ça soit plus que justifié, et même quand ça l’est, pas souvent. Alors, quand j’ai dit que même moi ne serais pas capable de contrôler le Phoenix, pour une fois, je ne mentais pas, ne t’en fais pas.

- Mais votre petite prophétie n’a jamais parlé de contrôler, si ?

- Tu crois aux prophéties, maintenant ?

- Non, mais vous oui, apparemment.

Au même moment, Kowalski s’intéressa, malgré n’avoir rien entendu de cette conversation, plus ou moins au même sujet, rappelant l’attention des deux femmes à l’instant présent, ou plutôt, au physique.

“Nous nous intéressons à la technologie, pas à de vieilles légendes. Votre télépathie, par exemple, madame..? Votre télépathie. L’oubli de son nom fit séparer ses lèvres encore impeccablement peintes à une Emma outrée. Rien de plus qu’un détecteur de producteur électromagnétique que vous utilisez pour sonder et influencer le cerveau humain.

Impressionnant, ne vous méprenez pas… La remarque semblait voulue pour calmer le courroux de la Reine Blanche qu’il avait insultée …mais rien de magique…j’ai même entendu dire que certains d’entre vous pouvaient manifester une véritable “foudre télépathique”, si ça n’est pas la preuve de la véritable origine de ces pouvoirs. Et le comprendre vous aidera à utiliser ces capacités à leur plein potentiel.

- Et vous arrivez à tout expliquer, avec vos petites théories scientifiques ? Frost haussa les épaules, prenant un ton volontairement naïf. Nos mutations, je veux bien, mais admettez qu’à moins que notre cher Fatalis n’ait complètement perdu l’esprit - ce qui ne serait pas un compliment pour ceux qui doivent lui voler le fruit d’un cerveau donc si illogique - j’ai du mal à voir une explication à cent-pour-cent scientifique de son pacte avec Méphisto.”

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme, disait Rabelais. Un adage qui collait très bien à l’AIM, qui était un apôtre du scientisme. Scott restait toujours assez mystérieux concernant ses intentions avec le Phénix. Black Widow le savait très bien, mais, avant qu’elle ne puisse aborder de nouveau la chose, Emma et Kowalski discutèrent entre eux, Emma contestant cette vision très (trop) cartésienne des choses du docteur Kowalski.

« Je ne suis pas sûr qu’on puisse parler de ‘‘pacte’’ entre Méphisto et Fatalis. Mais je comprends ce que tu dis.
-  Des superstitions stupides… Il n’est rien que la science ne puisse expliquer.
-  La Troisième Loi de Clark ?
-  Hum ?
-  Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie… Isaac C. Clark. »

Le docteur grommela sur place, sans doute agacé qu’on puisse lui citer un auteur de science-fiction. Natalia se racla la gorge.

« Et le Phénix, donc ? »

Scott tourna la tête vers elle, puis vers les installations de l’AIM. Il se retourna alors, et retourna dans l’enceinte de la cathédrale, délaissant les superordinateurs de l’AIM, jusqu’à rejoindre l’intérieur de la cathédrale.

« Parfois, je me dis que notre histoire ressemble à celle du Christ…
-  Comment ça ? »

Scott avait rejoint le chœur, observant les statues des Saints, et la Croix du Christ, massive et dorée.

« L’histoire d’un individu honni par son propre peuple, persécuté et haï… Puis torturé, supplicié, et qui se sacrifie pour sauver l’humanité de ses péchés.
-  Je ne vous savais pas si spiritualiste… Ce qui est arrivé aux mutants est terrible, mais en quoi le Phénix va-t-il sauver l’humanité ? »

Le mutant observait encore la croix, perdu dans ses pensées, puis regarda Natalia.

« Récemment, le SHIELD nous a envoyé, Emma et moi, mener une opération de sauvetage sur une île détenue par des criminels… Rook Island. Des prisonniers, nous en avons trouvé, mais aussi… Autre chose.
-  J’ai entendu parler de votre opération, mais en quoi est-elle liée au Phénix ?
-  Je commence à voir les pans d’un large puzzle qui se dessine, Natalia… Plutôt ironique, de la part de quelqu’un qui ne peut voir. Vous voulez connaître ma théorie, Natalia ? Vous voulez savoir ce que je pense du retour du Phénix ? »

Il se déplaça lentement, essayant de réunir ses pensées, et enchaîna ensuite :

« Je pense que la Terre est un organisme vivant, qui, face à une menace, se défend lui-même… Comme un organisme qui produit ses anticorps pour se défendre d’un virus. Et je pense que la Terre a développé cette capacité grâce au passage du Phénix, il y a des millions d’années, quand notre planète a été attaquée par des entités cosmiques très anciennes. Ces entités ont affronté les anciennes civilisations, dont la civilisation la plus avancée de la planète de l’époque, la première civilisation originaire de l’humanité… L’Atlantide. »

Natalia l’observa pendant quelques instants, avant de renchérir :

« Il y a cette archéologue richissime anglaise qui développe une théorie là-dessus…
-  Lara Croft… Je connais cette théorie, oui, et j’en connais d’autres. Une théorie qui se fonde sur l’existence de mythes universels à toutes les civilisations humaines… Le Déluge. J’ai étudié les théories de ces archéologues. Ces théories considèrent que le Déluge fut un évènement cataclysmique qui a marqué l’aube de l’humanité, et qui manqua de détruire la Terre.
-  Le Déluge serait donc un mythe retraçant la chute de l’Atlantide ?
-  C’est une théorie confirmée par des géologues. Voilà ce que j’ai vu à Rook Island…  L’Atlantide, Mu, la Lémurie… Les géologues lui ont trouvé un nom : la Zaelandia.
-  Mais quel est le lien avec le Phénix, Summers ?
-  Une grande catastrophe est arrivée il y a des millions d’années, Natalia… À une période où les continents étaient encore serrés… Ce cataclysme pourrait même avoir provoqué la dislocation de la Pangée… Et, si vous vous souvenez bien du Déluge, toutes les itérations de ce mythe expliquent que le Déluge aurait été provoqué par des entités cosmiques, des divinités décidées à punir les hommes. J’ai vu un souvenir de ces choses à Rook Island, Natalia. Ces créatures cosmiques sont venues sur Terre jadis, et elles ont détruit ce monde. Pour les repousser, le Phénix a insufflé son énergie dans l’âme de guerriers, de héros qui se sont retrouvés investis de pouvoirs surnaturels… Des mutants. Et ce phénomène, ce phénomène qui a eu lieu il y a des millions d’années, est en train de se reproduire. Voilà pourquoi les super-héros se multiplient. La Terre se protège, Natalia. »

Scott regarda encore la croix du Christ.

« Le Phénix ne revient pas en ennemi… Il est la force qui revient restituer les mutants, et il nous appartiendra de défendre les humains qui nous ont méprisé… Peut-être comprenez-vous mieux mon parallèle, maintenant ? »

La Reine Blanche observait l’explication de Scott depuis derrière Natasha, qui était évidemment la première concernée par l’exposé. Emma était loin d’être religieuse ou du genre à croire aux miracles, mais elle avait vu les mêmes choses que lui, et même si elle avait souvent retourné la théorie de Cyclope dans tous les sens, n’aimant guère ses conclusions, elle devait avouer ne pas avoir réussi à y trouver une faille - sans pour autant admettre qu’elle était une certitude.

Finalement, la Veuve Noire se retourna vers Frost qui avait été silencieuse depuis un peu trop longtemps pour ses habitudes, et la trouva bas croisée, les sourcils subtilement froissés. Il n’en fallait pas beaucoup plus à l’espionne pour comprendre que la télépathe n’était pas entièrement conquise par cette perspective, mais comme elle, elle avait du mal à voir une véritable erreur logique dans l’idée. Elle tenta de la faire répondre plutôt que Scott, tournée vers elle pendant sa question.

“Et qu’est-ce que vous comptez faire pour compléter cette prophétie, donc ?”

Romanova fut cependant peut-être trop inquisitrice, et la Reine Blanche resta silencieuse un moment, n’ayant même pas vraiment de réponse pour elle-même, encore moins pour l’Avenger. Cependant, il semblait pressant d’en avoir une, ne serait-ce que par défaut, et sentant une pointe d’inquiétude émerger de l’esprit de Natasha, ayant toujours un doigt figuratif sur le poul de son esprit puisque le liant à ceux des mutants pour la communication télépathique, elle s’empressa de répondre avant que ça ne tourne au doute.

“Ne t’en fais pas, on n’essaie pas de nous-même récolter et contrôler le Phoenix pour nos propres desseins…On aimerait juste le laisser faire ce qu’il est venu faire, au moins tant qu’il ne semble pas faire de mal…

- Ça reste…peu rassurant. La Veuve Noir se mit de profil pour pouvoir s’adresser aux deux X-Men en même temps. Qui dit qu’on pourra arrêter le Phoenix une fois qu’il sera sur sa lancée ?

- Personne, mais Scott croit qu’il n’y en aura pas besoin. La Reine Blanche le regarda, ne pouvant lui promettre la même foi sur ce point qu’elle avait généralement en lui, mais cela ne voulait pas dire qu’il n’y avait aucun mérite à sa certitude. Et je suis au moins prête à mettre cette théorie à l’épreuve - personne ne peut non plus garantir qu’il faudra l’arrêter, ni qu’essayer de le faire ne demandera pas qu’un prix soit payé, sachant la puissance de cet oiseau…”

Natasha soupira, tiraillée entre la Mutanté qui tentait de renaître, et avait des raisons fondées de croire qu’une opportunité était sur le point de se présenter, et une pensée plus militaire qui visait à supprimer le danger avant même qu’il ne se confirme. Relevant la tête après un moment de réflexion, d’abord vers Emma, puis Scott, elle avoua finalement :

“Le plan n'est pas de laisser le Phoenix faire quoi que ce soit - Stark a construit une sorte de laser qui devrait le détruire dès qu’il apparaît…Désolée, mais…Même en admettant qu’on croit à cette prophétie - et ça n’est pas vraiment le cas des cerveaux du genre à pouvoir construire ce genre d’engin - l’enjeu est juste trop grand, et la probabilité d’avoir une deuxième chance avec ce canon aux capacités déjà plutôt théoriques beaucoup trop basse…”

Le devoir d'honnêteté d'un tel aveu passé, Natasha baissa à nouveau les yeux, et légèrement la tête, consciente que ce plan tentait, dans les faits, d’enterrer cette renaissance possible de la Mutanté, un but en soi louable, et avec lequel elle sympathisait même sincèrement, mais qu’il était difficile de mettre sur un pied d’égalité avec les risques encourus.

Cyclope regarda Natalia quand celle-ci leur avoua le plan de Stark.

« Je ne devrais pas être surpris, Tony Stark a toujours aimé fabriquer de grosses armes, non ? »

Savoir que les Vengeurs préparaient un plan pour détruire le Phénix ne surprenait pas Scott outre mesure. C’était prévisible, à vrai dire.

« Scott, le Phénix… Je ne veux pas évoquer Jean, mais…
-  Que savons-nous vraiment du Phénix, Natalia ? Au-delà de toutes les circonvolutions… Je suis sans doute l’une des personnes les mieux placées sur Terre pour répondre à cette question. Après tout, j’ai été en couple avec deux femmes qui ont été les hôtes du Phénix.
-  Le SHIELD a mené des recherches sur le Phénix… C’est une force qui détruit des planètes !
-  Je le sais. Mais je sais aussi que le Phénix a vu le jour à une autre époque, une époque où l’univers tout entier était menacé par ces forces anciennes. »

Natalia soupira lentement.

« Et de quoi est-ce que tu parles, exactement ?
-  Des Grands Anciens. »

La révélation de Scott instaura un léger flottement, un moment de silence.

« Les… Les Grands Anciens ? » répéta Natalia, comme si elle n’était pas sûre d’avoir bien entendu.

Scott hocha la tête.

« Nous les avons vus, Natalia. À Rook Island. Comme dans les livres de Lovecraft.
-  Tu…
-  Les mêmes que Chthon, celui qui se trouve dans le corps de Wanda. »

Une association commençait à se faire dans l’esprit de Natalia.

« Alors, tu penses que, si Wanda a fait ce qu’elle a fait, c’est…
-  Je n’en sais rien, et c’est le motif initial de notre venue en Latvérie. Il semble néanmoins que nous ne soyons pas les seuls à avoir tissés un lien entre le Phénix, Wanda, et les Grands Anciens. Fatalis a également fait ce lien. Mais, pour en revenir aux planètes que tu mentionnais, je me suis renseigné, moi aussi. Les mondes détruits par le Phénix étaient des mondes condamnés, corrompus… Alors, ne me fais pas dire ce que je n’ai pas dit. Je n’ai pas dit que ces mondes méritaient d’être détruits, simplement que le Phénix a fait un choix. Il a estimé que ces mondes ne pouvaient être sauvés, et que leur présence était susceptible de permettre aux Grands Anciens de se manifester dans notre réalité. Si on regarde les choses sous ce prisme, ce raisonnement tient la route.
-  Sauf que, si on suit ce raisonnement, qu’est-ce qui ne garantit pas que le Phénix soit venu ici pour détruire également La Terre ?
-  C’est une question qu’on peut légitimement se poser… Mais le Phénix ne le fera pas.
-  Pour quelle raison ?
-  Deux raisons. »

Scott avait levé deux doigts, et il abaissa le premier.

« Pour commencer, j’ai vu moi-même un nouveau mutant naître… Et il est né dans la ville qui correspond d’ailleurs à la deuxième raison… Atarashï Yoake, au Japon. »

Scott vit les yeux de Natalia se rembrunir à la mention de cette ville.

« Je constate que cette ville ne t’est pas inconnue, Natalia.
-  Il y a des rapports officieux de l’armée…
-  Et du SHIELD aussi ?
-  Tout ça est classifié, Scott… Seuls les agents ayant un Niveau 10 y ont accès.
-  Ce qui confirme donc ce que je dis… Le Phénix ne vient pas nous détruire.
-  Tu joues avec le feu.
-  Je n’ai pas de leçons à recevoir des Vengeurs… Ni de Tony Stark. Je me rappelle très bien de son aide, quand lui et ses amis sont venus nous demander de nous recenser auprès d’un gouvernement qui nous méprise, sous peine de nous enfermer dans son Guantanamo high tech. »

Natalia soupira lentement.

« Je ne suis l’avocate de Stark, je tenais juste à te le dire. Mais tu as raison sur un point, c’est que Fatalis magouille quelque chose. Il a ramené Wanda, il a fabriqué ce cristal pour je ne sais quel usage… Et les données du SHIELD confirment en outre que, avant de faire sa crise, Wanda avait rencontré Fatalis à plusieurs reprises. »

Scott, comme toujours, fit preuve de son stoïcisme légendaire.

« C’est pour ça que nous sommes là, pour comprendre tout ce qui s’est passé. »

Emma, qui était restée en retrait pendant que Cyclope expliquait ses théories quasi-mystiques à Natalia, avec un aplomb dont elle ne savait toujours pas si elle l’admirait ou le redoutait, remarqua pendant le silence qui fit suite à la conclusion de Summers que Fortunov revenait. À son air un peu gêné, et au fait qu’il toussa un peu pour annoncer son arrivée, il était relativement facile à deviner qu’il avait surprise la conversation, mais pas osé l’interrompre, jusqu’ici en tout cas.

« Nos confrères de l’A.I.M. ont ajusté leurs prédictions quant à l’arrivée du Phoenix, il semble avoir pris un peu de retard, rapprochant à l’approche de la Terre – ce qui n’est pas plus mal, vous pourriez sans doute apprécier une petite pause. Il détourna brièvement le regard vers Frost et sa robe dont l’existence était devenue beaucoup plus théorique depuis qu’elle avait été prise entre sa forme de diamant et les balles, avant de le relever et commenter la tenue. J’ai aussi réussi à...collecter quelques vêtements, ça ne vous sierra pas aussi bien qu’une robe de gala, mais...bref. Nous avons au moins une vingtaine de minute que nous n’avions pas auparavant, voire plus si le Phoenix ralentit à nouveau – je vous tiendrai au courant. »

Pas vraiment prude, mais très consciente de son apparence, Emma poussa contre la colonne sur laquelle elle s’était adossée pour s’en éloigner et aller collecter sa nouvelle tenue qu’elle priait de ne pas être une de ces combinaisons de l’A.I.M..

Dieu merci, non, même si ça n’était pas énormément mieux ; Un pantalon et une chemise d’un des hommes de l’A.I.M., avec la ceinture nécessaire à porter le premier objet, en plus d’un débardeur lui au moins d’une femme qui, elle imaginait, lui prêtait après avoir eu pitié de l’état de sa robe. Trouvant un recoin privé de la cathédrale pour se changer, la Reine Blanche fit de son mieux pour agencer tout cela ; Elle porta le pantalon haut sur les hanches avant de le couvrir du débardeur, lui donnant plus ou moins l’apparence d’une femme du début du siècle dernier, avant de recouvrir le tout de la chemise, ouverte et aux manches repliées – sans couture, mais ç’aurait sans doute été trop demandé.

Elle retourna alors auprès de Scott, faisant discrètement étalage de sa nouvelle tenue en l’approchant, bras légèrement ouvertes et cheveux recoiffés, pour profiter du temps qu’il leur restait encore. Arrivée à lui, elle passa une main dans le creux de son dos, le sentant, et c'était plus que compréhensible, tendu; Elle tenta d'un peu remédier à ça télépathiquement, mais pas trop, car après tout, le pousser à la désinvolture n'était pas le but, mais surtout, caressant doucement la surface de sa combinaison de son pouce, en lui donnant autre chose à quoi penser.

« J’ai entendu dire par ces gentlemen de l’A.I.M. ... Elle ne le considérait pas vraiment ainsi, mais force était d’admettre qu’ils l’avaient sortie d’un certain embarrât. « Dire » était aussi un euphémisme puisqu’en vérité, elle avait été cherché cette information dans les esprits non-protégés de leurs petites mains ...que le Phoenix commençait à ressembler à une étoile filante dans le ciel...Toute petite et à peine mouvante puisqu’elle se dirige à peu de choses près droit vers nous, pour l’instant, et j’imagine qu’on devra se mettre en marche avant le grand spectacle, mais...envie d’aller voir ça ? Mes connaissances profondes du catéchisme me font dire qu’il doit y avoir un chemin vers le toit, ou au moins les tours. »

Scott savait que Wolverine avait déjà participé à une tentative de putsch en Latvérie. Un acte qui avait valu à Nick Fury de perdre son poste de Directeur du SHIELD, et d’être décrété terroriste international, puisqu’il avait mené cette opération sans aucune autorisation des autorités gouvernementales.

*Il faut croire que je lui ressemble plus que je ne voudrais l’admettre…*

Cette alliance avec l’AIM ou avec Fortunov n’était qu’une alliance de circonstances. Scott ne partageait aucune des convictions de ces deux alliés improbables. L’AIM convoitait le Phénix pour en faire une batterie solaire, et Fortunov cherchait uniquement à restaurer la monarchie en Latvérie, sans aucune considération pour son peuple. Scott ne s’intéressait qu’au Phénix, et n’avait pas non plus envie que Fatalis le piège dans son foutu cristal. Tandis que Emma se changeait, lui se rendit dans la nef de la cathédrale. Elle était vide à cette heure. Il observa les vitraux, et la croix sacrée sur l’autel, restant silencieux. Son éducation n’avait jamais vraiment porté sur le catéchisme. Les principaux rapports qu’il avait avec la religion venaient de fanatiques religieux qui avaient attaqué les X-Men en les comparant à des démons.

Il songeait à tout cela quand Emma arriva. Elle avait troqué sa robe de gala pour une tenue plus urbaine : pantalon et débardeur, le tout en blanc. Il sourit doucement, et elle lui parla ensuite du toit.

« Hum… Je pense qu’il doit y avoir un accès par cette tourelle… »

La cathédrale était d’époque, elle datait du Moyen-Age, quand les moines devaient aller dans les combles pour faire sonner les cloches. Scott rejoignit la porte en bois, puis aperçut un long escalier en colimaçon, étroit.

« Désolé, ma chérie, mais il y a trop de marches pour que je fasse preuve de galanterie en te portant… »

Plusieurs minutes après, ils rejoignirent les combles en bois. Une forêt de pannes, de chevrons. Des poutres énormes et épaisses. Scott et elle avancèrent jusqu’à une petite porte qui les amena dehors, le long d’un chemin faisant le tour de la cathédrale. L’air étant étouffant à l’intérieur des combles, le vent frais lui fit un bien fou. Il attrapa la main de Scott, et, en levant la tête dans le ciel, bien au-dessus des lumières de la ville, il pouvait la voir.

« Ici… »

Perçant l’obscurité, une grosse sphère lumineuse brillait plus forte que n’importe quelle étoile. Le Phénix…

« Tout cela ne peut pas être un hasard, Emma… Madelyne qui revient à la vie, Hope… Et le Phénix. Je n’ai jamais cru que le Phénix était une force négative ou corruptrice. »

Ayant passé du temps avec Jean Grey, il était sans doute le plus grand spécialiste du sujet sur Terre.

« Elle arrivait à le contrôler… »

Tenant la main d’Emma, Scott se retourna vers elle.

« Toi aussi, tu peux le faire, Emma. J’en suis convaincu. »

Après quelques minutes à naviguer les méandres de la cathédrale Latvérienne, Scott et Emma arrivèrent sur son toit ; Au beau milieu de la nuit, la vue était magnifique, et l’air rafraichissant, et au milieu d’une mission, c’était plus que bienvenu. Les X-Men avaient l’habitude du danger, des responsabilités, mais ça ne devenait jamais véritablement facile à affronter, encore moins pour Cyclope qui avait été à la barre depuis maintenant des années alors que la Mutanté vivait ses heures les plus difficiles.

Malgré tout, ou peut-être justement, il n’arrivait pas à détacher ses pensées du Phoenix, et de comment son destin était entremêlé à celui des mutants. Elle garda ses doigts autour de son pouce pendant qu’il lui tenait la main, mais n’affronta pas sa déclaration immédiatement, détournant un regard inquiet.

La Reine Blanche était une puissante télépathe, peut-être même la plus puissante sur Terre depuis la perte de pouvoirs de Xavier, mais ça n’était pas tout, et quand bien même ça l’aurait été, Grey avait été dans sa propre catégorie.

« Difficile de refuser le vote de confiance, chéri, mais... Elle soupira, lasse d’être rappelée à ce rapport de force ...Je n’ai ni la puissance ni le rapport avec le Phoenix qu’elle avait... »

Admettre défaite totale n’était cependant pas dans les habitudes de Frost, et plus profondément, ne pas voir une possibilité évidente et ne pas se préparer pour elle non plus – et encore moins dans celles de Summers, raison pour laquelle, sans doute, il avait émis l’hypothèse.

Ses yeux retournèrent au rouge légèrement brillant, dans l’obscurité de la nuit, de la visière de Scott, avec une rare expression appréhensive, presque suppliante sur le visage ; Emma avait l’habitude des tribulations, et elle avait même déjà vécu une oblitération psychique par le Phoenix, et ça ne lui donnait aucune envie de recommencer. Plus fondamentalement, elle avait peur que sa possession par l’entité ne soit pas une confrontation, mais une sublimation de ses pires pensées.

« Si ça arrive – Si...J’aurai besoin de toi...Quand je suis encore la simple milliardaire bimbo mutante que je suis, j’ai déjà besoin de toi pour savoir quand m’arrêter, pour avoir un repère – un idéal – à suivre. Elle soupira et ses lèvres se pressèrent discrètement l’une contre l’autre. Si le Phoenix me possède, je ne sais pas si je saurai résister à mes pires pulsions s’il me tente avec... »

Elle ramena son autre main pour entourer celle de Summers qui entourait déjà l’autre, d’une part par manque de chaleur, d’une autre parce qu’elle savait, au delà des super-héroïsmes, au delà du Phoenix, qu’elle avait besoin de lui.

« Ne le laisse pas me posséder, Scott, ça serait le dernier des replis, et...si ça arrive, reste avec moi et protège moi de ce dont aucun pouvoir cosmique ne peut me protéger, mais toi peux. J’en aurai besoin... »

De tous les amants de la planète, Scott savait qu'il était loin d'être le meilleur. Sa froideur n'était pas que liée à sa visière, elle était le fruit d'une existence passée à souffrir. Il avait été abandonné par ses parents, éduqué dans un orphelinat dirigé par Nathaniel Essex qui avait surtout voulu le torturer et exploiter son pouvoir. Il était le leader d'une race endeuillée, mais Scott avait toujours été un leader aux choix discutables. Sa froideur avait amené Wolverine, qu'il considérait paradoxalement comme son meilleur ami et son pire rival, à le repousser. Jadis, Ororo avait aussi contesté son leadership en estimant qu'il n'était pas digne d'être le capitaine des X-Men. Scott encaissait, comme il avait toujours su le faire. Mais il avait fait des choix dont il n'arrivait pas à se pardonner. Revoir Madelyne, c'était aussi le confronter avec ce qui, selon lui, était une erreur plus grave encore que celle d'avoir à la fois entrepris une relation avec deux télépathes surpuissantes : avoir négligé sa propre femme. Un blocage qui le poursuivait encore aujourd'hui. Il n'avait pas été là quand sa femme avait sombré dans la folie, quand sa dépression paranoïaque avait été exploitée par des démons, et, quand il avait enfin réagi, il était trop tard. Madelyne avait sombré. La revoir, c'était douloureux, mais cela l'amenait aussi à réfléchir, et à se poser les bonnes questions.

*Si j'avais accepté d'aller plus loin avec Jean, si je lui avais montré qu'elle pouvait vraiment me faire confiance, l'aurais-je perdu ?*

Pouvait-il aussi perdre Emma ? L'histoire lui semblait trop répétitive. Le Phénix revenait, et Scott était profondément convaincu qu'il ne venait pas les menacer. Mais Emma parviendrait-elle à surmonter ça ? Et lui, arriverait-il enfin à être à la hauteur ? Il sentait la nervosité d'Emma. Comme lui, elle portait un masque, elle dissimulait ses fragilités et ses fissures derrière un masque hautain, derrière sa beauté glaciale et ses réparties saillantes. Mais il savait que les choses avaient changé pour elle quand Jean, en furie, avait décidé de s'immiscer dans la tête d'Emma, et de lui faire revivre ses pauvres traumatismes. Emma, la si puissante Emma, celle qu'on disait infaillible, celle qu'on qualifiait de "Reine", s'était effondrée, pliée comme un deux face à un flush royal.

Scott l'écouta donc parler, et lui sourit alors, sentant sa nervosité. C'était le genre de choses qu'ils ne pouvaient montrer qu'entre eux.

« Je te protègerai, Emma. Mais nous n’irons pas jusque-là. S’il y a une seule personne au monde capable de contrôler le Phénix, c’est toi. »

Xavier était un télépathe plus puissant, mais pour contrôler le Phénix, il ne suffisait pas d’être télépathiquement fort. Le Phénix amplifiait vos émotions. Quand Shaw avait manipulé Jean Grey, au point qu’elle confonde la réalité, le Phénix avait évolué en elle pour prendre une mauvaise forme, celle du Phénix Noir.

« Les gens disent de toi que tu es une personne froide, hautaine, qui ne s’intéresse à personne d’autre qu’à elle… Mais je sais qu’ils se trompent. C’est pour ça qu’on se ressemble… Toi et moi, on cache nos vrais sentiments, mais, au fond, Emma, tu n’aspires qu’au mieux pour tout le monde. Voilà pourquoi je suis convaincu que tout ira bien. Car il ne peut en être autrement. »

Et Scott ponctua cette étrange déclaration d’un tendre baiser sur les lèvres d’Emma…

Ce qui terrifiait Emma était exactement qu’elle aspirait au mieux pour tout le monde ; Elle n’était pas dénuée d’humanité, de bonté, elle était simplement capable de les ignorer, et l’avait fait pendant longtemps au sein du Club des Damnés. Qui pouvait dire que le Phoenix ne serait pas capable de raviver cette flamme ?

Mais les remarques de Scott étaient assez douces et touchantes pour que l’espace d’un instant, elle y croit ; qu’elle et lui avaient trébuché, mais ensemble, seraient meilleurs que leurs passés. Elle l’embrassa sur le toit de la cathédrale, se laissant aller à son espoir fou pour la Mutanté : « Tout ira bien », ponctuant ces mots d’un vague écho dans ses pensées à elle et donc à lui, leur rapport psychique à son apex comme à chaque fois qu’ils partageaient un de ces rares moment d’intimité où leurs gardes, celles-là mêmes que Cyclope avait mentionnées, s’abaissaient. Leur baiser rompu après de longues et délicieuses secondes, elle abaissa son front pour toucher le sien, yeux fermés, puis soupira.

« C’est grâce à toi qu’on a cette opportunité, Scott – c’est grâce à toi que j’ai cette opportunité...qu’elle soit assurée ou sur un million, je te suivrai toujours. »

Même si Emma avait poursuivi de plus nobles aspirations depuis déjà quelques années, Summers était en bien des aspects synonyme de son combat pour la Mutanté, lui ayant permis d’être à nouveau directrice d’une école, de porter le nom des X-Men, et maintenant, de peut-être aider à la ressusciter. La perspective donnait le vertige même à une femme avec tant d’ambition que Frost ; Si elle avait été dans ses bottes, elle n’aurait jamais cru en la cruelle Reine Blanche, encore moins pour des affaires aussi précieuses et cruciales, et pourtant...

La pensée la ramena ironiquement loin de tout ça, même au recoin le plus opposé de ces aventures dans son esprit, diamétralement. Elle se remit parallèle à Scott, reprenant un ton de conversation plus léger pendant que le Phoenix n’était désormais plus du tout confondable avec une étoile, épaule-contre-épaule.

« À y réfléchir, je ne sais pas ce qu’on fera le jour où tout ça sera fini...Où ce pour quoi on s’est battus si longtemps sera enfin une réalité... Elle l’aurait volontiers appelé « le rêve de Xavier », mais ces jours-ci, la formulation aurait été maladroite ...qu’on sera finalement vieux et qu’on n’aura plus de plans de domination mondiales pour occuper nos journées... Elle tourna la tête légèrement vers Scott. Des idées, à part regarder le ciel sur le toit d’une cathédrale ? »

Il y avait en fait un rapport ténu avec la conversation précédente : La question avait autrefois hanté la Reine Blanche, qui se rendait compte que sans la confiance parfois absurde de Xavier et des X-Men, elle ne saurait quoi faire de sa vie de plus qu’être une milliardaire. Pour beaucoup, c’était sans doute assez, mais pas pour elle, et un jour, elle espérait, et croyait, la question se poserait à nouveau, mais sous une lumière bien meilleure.

« Je crains que cela ne se termine jamais. Il y aura toujours de la discrimination, et de la peur. Le rêve de Xavier d’une coexistence pacifique me semble si loin, maintenant… »

Scott avait cessé de croire à cet objectif, à cet idéal. C’était sans doute ce qui avait véritablement provoqué la fracture avec Logan. Ironique, dans le fond, de se dire qu’un vieil âne bourru et mal défraîchi comme Logan puisse croire davantage que lui en des mythes et en de douces fariboles. Mais comment le penser autrement ? Scott avait toujours été lucide et pragmatique, avec cette capacité naturelle à faire preuve d’un sang-froid glacial. Quand il avait reformé X-Force et avait déployé l’escouade pour mener des assauts préventifs contre les ennemis de la mutanté, c’est parce qu’il savait que c’était la bonne chose à faire. C’était cela qui faisait de lui un leader né… Mais aussi un très mauvais amant. Un mauvais mari. Un mauvais père. Cela, il ne saurait le nier. Mais, avec Emma… Scott se permettait à croire qu’une autre voie était possible pour lui, qu’il n’était pas condamné à être cet être sans cœur et détaché de toutes émotions, se refusant à ressentir quoi que ce soit par peur d’être à nouveau blessé.

« Mon objectif est de rétablir les choses comme elles doivent l’être… Rétablir les mutants, venir à bout de la malédiction de Wanda. Quand cela sera fait… »

Il avait regardé le ciel, observant le Phénix qui descendait lentement vers eux. Scott y pensait.

« J’ai longtemps cru que mon futur serait avec Jean… Cela me semblait logique, puisque j’avais croisé l’enfant issu de notre union. »

Rachel Summers.

« Mais nous avons également entendu parler de Ruby. C’est là que j’ai compris que rien n’est jamais écrit à l’avance, Emma, que je n’étais pas destiné à être avec Jean. Je ne cherche pas à avoir une grande destinée. Je suis devenu le leader d’Utopia parce qu’il fallait quelqu’un pour se sacrifier, pour diriger une race aux abois. Mais, quand le Phénix va venir et qu’il rétablira les choses, je pourrais faire la seule chose qui compte vraiment. »

Scott se rapprocha alors d’elle, et sourit doucement en lui caressant la joue.

« La chose la plus folle qui soit, en réalité… Plus folle encore que de voyager dans le futur, d’affronter des Broods, ou même de participer à une mission terroriste avec un mégalomane comme Fortunov en plein cœur de la Latvérie… »

Quelques secondes passèrent, puis Scott enchaîna ensuite :

« …Être assez fou pour demander à la Reine Blanche si elle accepte de donner sa main à un jeune fou plein d’insolence… »

Emma comprenait et avait de la peine pour Scott. Pour tout son pessimisme, elle était aussi combative, et n’aimait pas admettre défaite ; Lorsque lui et elle avaient reconstruit l’institut, avant Utopia, il avait déjà donné vie à l’idée de ne pas continuer, de se concentrer sur sa vie pour la première fois depuis longtemps, si ce n’est toujours. Frost ne l’avait pas accepté, et avait finalement réussi à le convaincre, une réussite qu’elle louait chaque jour pour ce qu’il avait depuis fait pour la Mutanté, mais peut-être avait-il raison, peut-être que le mieux qu’ils pouvaient faire était de lui donner sa chance en la débarrassant de la malédiction de la sorcière.

Emma y réfléchit, mais ne pensait pas être prête à complètement tirer un trait sur la coexistence, elle avait encore à l’âme d’essayer, au moins un peu. D’un autre côté, Scott avait amplement mérité une vie plus normale, une qu’il n’avait jamais eue, et la mutante se laissait aller à imaginer qu’elle pourrait la partager avec lui. Leurs mains et pensées entrelacées, il prononça finalement le nom de Ruby, leur fille d’un futur désormais évité qu’avaient rencontré X-Factor ; La nouvelle n’avait évidemment pas été ignorée par le couple, mais Emma, même si elle devait s’avouer tentée, avait peur d’amener une mutante au monde dans un monde qui la haïrait. Mais peut-être que s’ils se concentraient sur cette fille hypothétique au lieu de la quête des X-Men, ils pourraient lui offrir une vie agréable...

Cette douce idée aussi en causa d’autres chez Emma, mais plus Scott s’amenait à sa conclusion, plus elle sentait une certaine tension monter en lui, et son attention requise. Quand son doigt effleura sa joue, ses yeux retournèrent à la visière de Cyclope pour finalement l’entendre, à sa manière, demander sa main.

Son cœur sauta un battement, puis coula dans sa poitrine qui se rétrécit d’abord d’une expiration nerveuse. L’espace d’un instant, elle considéra, ou plutôt, son inconscient lui souffla, de se transformer en diamant, d’éviter cette vague d’émotions qui lui serrait le cœur et l’esprit, mais elle repoussa l’idée, affrontant la question. Elle prit une inspiration, lèvres entrouvertes, et réfléchit à sa réponse ; Elle n’avait jamais aimé l’idée du mariage, mais c’était Scott qui lui demandait, et elle n’avait pas le cœur de lui refuser ce geste.

Elle chercha les mots, mais finit par simplement l’embrasser en passant ses bras autour de son cou, espérant qu’il était assez clair qu’elle acceptait avec joie. Après un instant, elle appuya cet espoir en amenant une main dans ses cheveux depuis sa nuque, et laissant redescendre l’autre sur son épaule, puis son torse, et enfin, elle interrompit leur baiser qui, avec l’émotion, lui avait laissé très peu d’air.

La respiration haletante, et l’impression que son cœur battait assez fort pour qu’il puisse le sentir à leurs poitrines pressées l’une contre l’autre, elle se sentit enfin de répondre le plus simplement du monde.

« Oui. »

Après quelques secondes à reprendre son souffle, elle l’embrassa à nouveau, ne sachant quoi faire, dire, penser de plus – et le tumulte de leurs émotions était assez fort pour aisément passer à travers leur rapport. Finalement, elle trouva enfin quelque chose de passablement intelligent pour les sortir de cet embarrât.

« Plutôt à mon amour qui parfois est insolent, parfois fou, et régulièrement les deux, mais « Oui » – mille fois « Oui ». »

Elle aurait pu ajouter une remarque comme « la main et le reste », quelque chose de narquois, mais était simplement heureuse de recevoir ce qu’il considérait si précieux, et lui donner ce qu’il voulait en retour. Malgré qu'elle ne croyait que peu au mariage, elle concevait son futur, au moins son meilleur futur, avec Scott, qu'il soit écrit ou non, c'est d'avec lui qu'elle en rêvait, avec lui qu'elle s'imaginait ; Elle n'avait jamais eu besoin de croire au destin pour l'aimer et vouloir une vie avec lui. Un immense sourire tinté de timidité aux lèvres, elle savait que celle-ci ne serait pas simple, et sans doute pas facile, et peut-être se finirait-elle cette nuit, mais elle serait avec lui.

Toutes ces pensées et espoirs, il pouvait les lire en son esprit qu'elle partageait sans même trop le réaliser, mais sans non plus s'y opposer, loin de là. Et ouvert ainsi, Ruby lui revint à l'esprit, alors même qu'elle n'avait jamais su à quoi elle ressemblait, ni vraiment qui elle était, de même que l'idée d'avoir une vie presque banale avec lui ; Toutes deux la tentaient, et la perspective lui faisait peur, mais avec lui, elle se sentait presque à l'affronter.

Elle accepta. Aussi folle que lui. Tous les deux avaient beaucoup encaissé au cours de leurs vies. La folie de Madelyne, son enfance déchirée entre les mains de Mister Sinistre… Emma, elle, avait vécu aux services de Sebastian Shaw, elle avait vécu la mort des Hellions émanant de sa propre sœur, Adrienne Frost… Oui, ils avaient souffert, tous les deux, et cette souffrance, si elle les avait rapprochés, les avait toujours aussi amenés à un blocage, à un refus d’aller plus loin, de finir leur reconstruction mutuelle. Mais, maintenant… Dans le fond, le fait de revoir Madelyne avait peut-être l’ultime déclic dont Scott avait eu besoin pour réaliser qu’il ne pouvait pas se permettre de perdre Emma. Cela pouvait sembler naïf, mais il aimait à croire que l’amour pouvait reconstruire tout ce qui arrive. Il répondit donc à son baiser. Elle avait dit « Oui », et il n’avait pas besoin de plus. Il se retrouva dans son dos, et posa alors sa main sur le ventre d’Emma.

« Une dernière mission, alors… Et nous pourrons vivre heureux. »

C’était tout ce qu’il pouvait faire de mieux : ressusciter le gène-X, que les mutants reviennent. En soi, il n’oubliait pas non plus ce qu’il avait vu à Rook Island, cette cité effroyable, ainsi que ces expériences génétiques. Mais il était convaincu que d’autres X-Men y arriveraient, et que tout s’améliorerait dès que le Phénix reviendrait. Une croyance un peu absurde, irrationnelle, mais en laquelle il croyait fermement. Tout cela ne pouvait pas être lié au hasard. Quoi que voulait faire Fatalis, Scott comptait l’en empêcher. Dans le ciel, le Phénix brûlait fortement, annonciateur d’une nouvelle ère.

« Il nous faudra une belle maison pour Ruby… Tu as pensé aux Alpes ? Grandir dans la nature, à l’abri, au calme… »

Il l’embrassa dans le creux du cou, tout en l’enlaçant.

« Tu crois que Logan restera sobre combien de temps lors de notre mariage ? »

Emma frémit et sentit une pointe froide sur son front lorsqu’elle sentit la main de Scott sur son ventre ; Le geste était presque anodin, et n’était pas la première fois, mais celle-ci, il avait un sens tout particulier. Elle baissa la tête pour suivre la présence sur sa peau, et avec une poignée de secondes pour véritablement en comprendre le sens, se projeter dans ce qu’elle signifiait vraiment, le futur qu’elle annonçait, ce froid sur son front et dans son dos se transforma en une chaude sensation sous la main de Summers. Avec un sourire doux et une expiration amusée, elle apposa ses doigts sur ceux de son amant, affirmant implicitement que ses doutes passés étaient enfin dissipés.

À vrai dire, elle n’en était pas sûre ; Elle ne l’était pas non plus qu’on pourrait jamais avoir un bébé, encore moins un mutant, sans doutes. Mais comme pour sa main, et comme pour tout, si Scott le lui demandait et assurait qu’il serait avec elle durant chaque pas, elle était prête à le suivre, malgré ces doutes. Alors la décision était prise, et quand il commença à s’imaginer à quoi ressemblerait cette vie qu’ils venaient de se promettre, elle se surprit à la voir aussi.

Un chalet dans les Alpes, à l’apparence simple mais assez grand et subtilement luxueux pour convenir à la Reine Blanche et à son Roi en même temps. Que des prairies vertes et piques enneigés à perte de vue, et une jeune fille qui courrait dans les champs. Emma du presque rattraper ses pensées de peur qu’elles ne l’emportent.

« Et tu lui apprendrais à pêcher dans un petit ruisseau de montagne, c’est ça..? Frost n’avait jamais été du genre à pleinement embrasser les envies de dehors de Scott, mais elle avait une certaine appréciation – lointaine – pour elles malgré tout. Son sourire se renforça avec une bref pouffée de rire. Mais...j’avoue ne pas trouver de faille à ce plan... Il était difficile de dire si c’était une volonté de convaincre sa future épouse ou simplement une convergence de leurs envies, mais que eux et leur enfant soient en sécurité, loin de la violence et de l’influence d’un monde qui les haïssait...Il y avait de quoi plaire à la Reine Blanche. Et puis ils pouvaient se le permettre, sa fortune, même amenuisée par Utopia, était assez pour vivre confortablement pour quelques vies. En fait, c’est à se laisser tenter... »

Quand il vint l’embrasser dans le cou, elle ferma par réflexe les yeux et pencha son visage vers le sien, caressant sa joue de la sienne, puis amena une main dans son cou à lui, comme pour répliquer l’attention. Immédiatement, il poursuivit avec une remarque quant à leur mariage, comme s’il était sur le point d’arriver ; Emma savait que Scott avait toujours quelque part souhaiter tout ça, une vie à la fois normale et parfaite, sans les complications des X-Men, et qu’il s’emporte aussi vite était sans doute signe qu’il la voulait intensément, et depuis longtemps.

Mais elle avait envie de le laisser s’emporter, il avait bien le droit ; Il avait passé la moitié de sa vie en tant qu’X-Man, sacrifiant son temps et risquant sa vie sur l’autel d’une cause qui ne l’avait que rarement servi. Même si leur combat pour celle-ci n’était pas totalement fini, Emma se laissa aller au jeu ; Après tout, quel danger dans un peu d’imagination ?

« Négatif une heure après que je l’ai mis à la table de mes « amis » d’affaires pour rire un peu ? La mutante inspira, toujours souriante, et releva la tête avant d’ouvrir les yeux vers le ciel étoilé, mais surtout le Phoenix, plus brillant et massif encore qu’avant. Ses yeux d’un bleu profond plongés dans les flammes ardentes, elle posa sa propre question comme si elles ne comptaient pas. Et où sera notre lune de miel ? Les Terres Sauvages ? Difficile de trouver un endroit où on n'a jamais été... »

« Oh, je pensais à une petite croisière le long du Nil, comme tous ces gens riches… »

Il dit cela en l’embrassant dans le creux du cou, tout en caressant ses hanches. Scott s’était déplacé dans son dos, ce qui lui permit ensuite de l’enlacer. Un mariage, un enfant… Après l’échec de son premier mariage, Scott était prêt à franchir le pas. Peut-être que le fait de revoir Madelyne en vie, et a priori saine d’esprit, avait débloqué chez lui cette envie ? Scott s’était refermé sur lui-même au cours des années (ce qui n’était pas peu dire, car il n’avait jamais été quelqu’un de forcément très ouvert). Mais, maintenant, il sentait renaître en lui une flamme nouvelle. C’était aussi la vision du Phénix. En un sens, il était convaincu que le Phénix serait une bénédiction. Cela venait peut-être du fait qu’il continuait à associer dans son esprit le Phénix à Jean Grey, et qu’il savait que Jean ne lui voudrait jamais le moindre mal. Il était désormais convaincu de vouloir amplifier sa vie avec Emma, de s’unir à elle.

Scott se lova contre elle quand il entendit des raclements de gorge dans son dos. En se retournant, il put voir que Natalia était là, s’appuyant contre un mur, bras croisés.

« Désolée de perturber votre rendez-vous romantique, les tourtereaux, mais les mercenaires de Fortunov sont arrivés. Sa Majesté le Prince Rudolfo nous attend ! »

Scott acquiesça. Il est vrai qu’avant de mettre son plan à exécution, et de mener cette vie paisible à laquelle il aspirait, il avait encore une dernière bataille à mener… Une ultime mission, qui résumait finalement sa vie : le Phénix. Tout cela restait empreint d’une certaine forme de poésie, comme si la boucle était bouclée.

« Très bien, on te suit, Natalia. »

Celle-ci leur sourit doucement, puis se retourna. Ils redescendirent dans les tréfonds de la cathédrale, où, effectivement, Rudolfo avait réuni autour de lui une douzaine de mercenaires. Il s’agissait pour l’essentiel d’anciens soldats latvériens, limogés par Fatalis pour être trop proches des Fortunov, ou pour avoir commis des atrocités sur les Gitans. Cela, Emma aurait pu le sentir en les sondant. D’autres étaient en revanche des mercenaires pur jus, d’anciens Spetsnaz démobilisés lors de la chute de l’URSS, reconvertis ensuite dans le mercenariat. Dans les anciens pays d’Europe de l’Est ravagés par la chute du communisme, et qui se heurtaient aux velléités russes, ils faisaient fortune, participant aux différentes milices mises en place, tant par les anciens régimes sous diktat soviétique que par les milices russes mêmes. Scott avait bien conscience que leur partenariat ne se faisait pas avec des personnes innocentes, que ce n’était pas un combat manichéen. Coopérer avec de telles personnes lui répugnait, mais c’était pour l’heure le seul moyen d’empêcher Fatalis de raffiner le Phénix.

Le plan de Rudolfo était de passer par les égouts pour rejoindre le château.

« Nous disposons d’une opportunité unique ! Les forces de sécurité se regroupent autour de la Place des Rois. »

La place centrale de la capitale, renommée par Fatalis « Place de l’Unité », était encore appelée sous son ancienne appellation par le Prince déchu.

« L’usurpateur va y énoncer un discours en compagnie de la Sorcière-Rouge. Son attention sera focalisée sur cette place, et il y aura moins de gardes au sein du château. Le château est sécurisé, mais nous disposons de plans précis. En passant par les anciennes geôles royales, nous parviendrons à rejoindre le cœur du château. Je dispose des codes de sécurité qui nous permettront d’avancer jusqu’au Cristal M’kraan, et de le détruire. »

Emma se laissait aller à rêver pendant que Scott l’enveloppait de ses bras et lèvres; Désormais sans ses talons autrement quasi-permanents, leur différence de taille se faisait plus sentir, et il fallait qu’il penche assez sensiblement sa tête sur son épaule pour atteindre le creux de son cou pour un baiser. Elle commençait à doucement presser le côté de sa tête contre le sien, tournant lentement la tête pour venir embrasser sa joue, quand Natasha les interrompit avec plus ou moins de tact. Mais après tout, ils étaient en mission.

Avant qu’ils ne redescendent du toit, alors que Black Widow leur faisait dos, elle gracia enfin Scott du baiser sur le flanc du visage qu’elle avait compté lui adresser.

“Juste une mission, mon amour.”

Évidemment, l’ambiance changea lorsqu’ils eurent rejoint les mercenaires de Fortunov. Pour la majorité, des Latvériens plus ou moins ici par conviction, mais une partie peu négligeable venait de l’ex-bloc soviétique, ici par pur appât du gain. La Reine Blanche ne se priva pas de discrètement les sonder télépathiquement, n’ayant, par expérience, que peu confiance en des gens dont la seule raison de combattre est un calcul financier, et ce qu’elle trouva lui arracha une brève expression de dégoût.

Au delà du mercenariat, plusieurs d’entre eux avaient des opinions moins que savoureuses sur les mutants, et regardaient Cyclope du coin de l’œil, puis Frost, forcément, se doutant qu’elle était associée. Elle le lui signala télépathiquement, pour qu’il sache se méfier d’eux – elle n’imaginait pas qu’ils se retourneraient vraiment contre les X-Men, mais n’attendait pas d’acte d’héroïsme au bénéfice des mutants de leur part non plus – et considéra une démonstration de force, qu’ils sachent que dut quelque chose éclater entre eux, ils n’avaient aucune chance, mais préféra parier sur une coopération tendue.

Heureusement, Rudolfo vint distraire de tout cela en annonçant son plan, qui n’était pas aussi moyenâgeux que ses convictions ; Attaquer par les égouts pendant que Fatalis et Wanda paradaient en centre-ville. Emma nota d’ailleurs un détail lors de son explication, et dit bas, pour que seulement Natalia et Scott entendent.

“Peut-être que Wolverine sera dans les geôles ? Libérer leur adversaire politique, tout ça pour qu’il retourne les accuser de faire de la jeunesse mutante des soldats, n’amusait pas la Reine Blanche au-delà de l’ironie, mais c’était la bonne chose à faire ; Et puis, elle avait promis. Avec un peu de chance, il se montrera même reconnaissant.”

N’ayant que peu de temps, ils se mettent alors rapidement en route à travers les égouts, ce qui n’était pas pour plaire à Emma, mais certains sacrifices devaient être faits. Jusqu’au château, tout se passa sans encombre, et le groupe put émerger d’une grille pré-coupée au sol d’une des cellules. La mutante frémit immédiatement à la sortie, dégoûtée par l’expérience, mais sonda immédiatement les environs ; Presque comme attendu, elle ne trouva que des prisonniers, la garde étant sans doute automatisée, et parmi eux, par chance, Logan.

Ils s’enfoncèrent donc dans les égouts de la capitale. Comme on pouvait s’y attendre, même ici, Fatalis n’avait rien laissé au hasard. C’était un tyran, mais Scott ne pouvait qu’être, en un sens, admiratif. Les égouts étaient relativement propres, avec de nombreux tuyaux, des câbles, des drones, d’énormes barrières qui s’abaissaient, tandis que l’eau usée s’évacuait sur le sol, sous une paroi vitrée. Pas de mauvaises odeurs, en somme, mais de nombreux postes de sécurité automatisés.  Cela ne semblait pas inquiéter outre mesure Rudolfo et ses hommes, les scientifiques de l’Aim perturbaient les caméras de sécurité, et le groupe s’aventura donc. Aucun tag non plus, aucun graffiti, ni camps de sans-abris ou de clandestins. La Latvérie était un pays où Fatalis se flattait de n’avoir aucun sans-abri.

*Si seulement son génie n’avait pas été corrompu par sa mégalomanie…*

Ils arrivèrent finalement sous le château. Ici aussi, la sécurité était renforcée, avec des barrières lasers très nombreuses. Fort heureusement, le système avait parfois des surtensions provoquant des coupures subites des barrières. Les scientifiques de l’AIM avaient sagement étudié cela, et déclenchèrent une surtension, qui ne devrait pas alerter les algorithmes de sécurité du château. Le groupe se faufila ainsi à l’intérieur, et ils s’aventurèrent dans d’étroits conduits, jusqu’à rejoindre la prison souterraine, les geôles du château. Scott et Emma envisageaient de libérer Wolverine, mais Rudolfo, qui menait la charge, se retourna vers eux.

« Mais qu’est-ce que vous foutez, putain ?
-  L’un des nôtres est piégé à l’intérieur.
-  Vous allez vous faire repérer ! »

Black Widow intervint alors :

« Wolverine est l’un des nôtres. De plus, vos agents de l’AIM n’arriveront pas sans diversion à vous permettre de rejoindre le cristal. »

Rudolfo s’agaça.

« Arrêtez vos conneries ! La diversion, ce sont les bombes que nous allons placer.
-  Et si vos explosifs touchent la prison ? »

Rudolfo repoussa Scott, le plaquant d’une main sur le mur.

« Qu’on soit clairs : si Fatalis sait qu’on est là, c’est foutu ! »

Emma expliqua alors, en sondant la prison, qu’il n’y avait que des esprits de prisonniers à l’intérieur, laissant ainsi entendre que les gardes étaient des automates. Black Widow soupira, puis déverrouilla alors la porte. Elle activa ensuite son camouflage optique, et s’aventura la première. Il y avait des caméras, tandis que les couloirs étaient assez sombres, éclairés par des néons rouges. Les portes étaient épaisses, blindées, et elle se déplaça la première. Scott et Emma la suivirent donc, évitant soigneusement les caméras. Les gardes étaient en effet des automates. En en voyant un approcher, Natalia le cibla avec une fléchette, et tira dessus. Des éclairs zébrèrent sur lui, et il se déplaça sans noter leur présence.

« Et tu tiens ça d’où ?
-  Allons, Scott, nous ne sommes pas suffisamment familiers pour que je te révèle tous mes secrets. »

Elle n’avait pas dit à l’AIM qu’elle détenait elle aussi ses propres technologies, probablement estampillées SHIELD… Ou Nick Fury en personne. Scott n’insista pas davantage, et le trio se déplaça jusqu’à rejoindre une énorme porte blindée. Emma avait pu sentir la trace de Wolverine. Natalia examina la serrure, extrêmement sophistiquée, et mit plusieurs minutes à l’ouvrir. Quand la porte coulissa, ils purent voir Logan, torse nu, bras et jambes disparaissant dans d’énormes harnais en métal. Il était endormi, sous sédatifs. Natalia se rapprocha d’une console, et désactiva les sédatifs, puis déverrouilla les liens retenant Logan. Scott l’attrapa, et l’aida à s’asseoir sur le sol.

« Mmmhmm…
-  Ils lui ont mis assez de sédatifs pour endormir n’importe qui…
-  Son facteur autoguérisseur devrait faire le nécessaire. »

Scott était bien placé pour savoir que Logan était plutôt du genre coriace…

Alors qu’il semblait presque évident pour Natasha et les X-Men de libérer Logan, Rudolfo semblait agacé par l’idée – ce qu’Emma était au fond aussi en partie, mais au moins, elle ne laissait pas ça se mettre sur la route de sa bonne action annuelle. Cela lui attirait déjà un regard suspicieux de la part de la Reine Blanche, mais lorsqu’il mit la main sur Scott, ses yeux s’illuminèrent subtilement alors qu’elle faisait abaisser les armes des mercenaires, calmant leurs nerfs agités par l’affrontement intestin, et s’apprêtait à les retourner contre leur maître durent les choses déraper.

Mais heureusement, Rudolfo laissa aux super-héros l’opportunité de tenter de libérer leur collègue – enfin, surtout pour la Veuve Noire. Celle-ci s’occupa d’ailleurs de la sécurité à elle seule, tant des automates-gardiens que des portes blindées verrouillées, ce qui forçait le respect et l’admiration, même si elle refusait de partager son secret, ce qui, ça aussi, requérait une forme d’approbation de Frost.

Logan, cependant, n’inspirait que peu ces émotions, seulement descriptible par « en sale état », quand bien même ça ne lui ferait pas grand-chose sur le long terme, comme à peu près tout, étant donné sa mutation. Évidemment, les X-Men n’avaient pas le luxe d’attendre ce long terme.

« Et sinon, on peut toujours accélérer un peu les choses... »

Plaçant une main sur la tête du Wolverine, un pouce contre son front et les autres doigts répartis sur le sommet de son crâne, ses yeux s’illuminèrent brièvement en un flash qui sembla se répliquer au bout de ses phalanges, comme un choc électrique, mais en réalité télépathique. Logan – ou plus précisément, son système nerveux, sans son aval – frémit immédiatement, et sa tête se tourna soudainement sur le côté, prise par un spasme, avant que sa mâchoire ne se débloque et il en laisse sortir un râle.

« C-Aaargh ! C’est toi qui a fait ça, Blondie ?

- Qui d’autre, Logan ? »

Il grommela, mais après que Natasha lui ait expliqué la situation, notamment qu’il avait été sauvé en même pas quelques heures, il sembla accepter les méthodes de réveil de la Reine Blanche. En se relevant, il offrit sa main à Cyclope.

« Ça veut dire ni plus ni moins, Summers, mais merci, et content de t’avoir derrière moi quand ça compte. »

Enterrant donc très temporairement la hache de guerre, le Wolverine et le trio qui était venu le récupérer entendirent soudain des explosions, ils espéraient, la distraction de Rudolfo. La prison vibra, et au fur des explosions, les tremblements s’amplifièrent dangereusement, mais retombèrent finalement après que quelques fissures et nuages de fumée se soient fait remarquer, poussant les super-héros à se mettre en route pendant que, l’attaque à priori découverte, Natasha utilisa simplement sa radio pour contacter le sang royal et ses mercenaires.

« Qu'est-ce qui s'est passé ?

- On a été découverts à l’approche du cristal, mais les explosions devraient nous donner ce dont on a besoin pour arriver au but.

- Ça valait bien la peine de nous donner des leçons... »

Ironisa Emma pendant que le groupe rejoignit le palais royal où les tirs se faisaient entendre ; Ils n’eurent qu’à suivre les traces de combat pour retrouver les mercenaires de Rudolfo tentant de parcourir les quelques derniers couloirs jusqu’à l’ascenseur et le cristal M’Kraan.