The Multiversity

Continuant sa marche dans le désert sans fin, Kiriko avançait tant bien que mal, un pas après l'autre, des restes de ce rêve encore en tête. Mais elle tentait de penser à autre chose, elle avait mieux à faire, quitter cet endroit et retourner au tournoi, ce sera la preuve qu'elle avait réussi. Mais bon, même avec de la chance, ce n'était pas en ayant fait si peu de marche qu'elle allait réussir son coup et gagner si facilement. Jusque-là, aucune épreuve n'avait été remportée facilement par la sorcière. Elle ne serait pas contre, mais ce serait trop beau pour être vrai. Même s'il était intéressant d'y réfléchir, ce n'était clairement pas le moment pour ça, elle avait trois adversaires sur le dos, qui avec de la chance étaient assez éloignées d'elle, mais il ne fallait pas crier victoire trop vite.

Les paupières plissées, elle avançait en affrontant le soleil comme elle pouvait, même si sa combinaison aidait à la maintenir en bonne température, rien ne protégeait son visage contre la boule de flamme. Elle continua encore, sans devoir baisser les bras, elle faisait ça pour Sha, rien que pour cette raison, baisser les bras était impensable ! Mais ça ne faisait pas tout le mental, Kiriko trébucha à nouveau en voyant des bottes sous son nez. Et il y avait des jambes dans ses bottes, ainsi qu'une personne qui la regardait de haut avant de disparaître. Anastasia. Une nouvelle personnalité qui semblait vouloir se montrer plus présente ici, pourquoi ? Ce n'était pas le moment. Elle continua. Fin du sable, elle arriva sur un sol plus solide, lézardé de crevasse plus ou moins profonde avec des vautours volant au-dessus. Ce n'était pas le moment, mais là aussi, ils étaient vus comme une source de nourriture. Quoique des piafs se nourrissants de cadavres, ce n'était peut-être pas l'idéal...

Marchant au milieu de squelette plus ou moins gros, elle vit de nouvelles images d'Anastasia et de Sha, montrant enfin ce bébé dont il était question juste avant. Un beau bébé, il est vrai, de beaux yeux verts comme la sorcière. Mais justement, Kiriko ne fit pas attention à cette révélation, le clan Warren, comme Mélinda ? Oui. Mais que ce soit volontaire, car ce n'était pas le moment pour penser à cela, ou bien qu'elle n'y fit pas attention à cause de la fatigue, elle continua sa marche, se demandant si Sha avait en même temps accès à ses même visions ? En dehors de cette vision, rien de plus pour elle, pas de source d'eau, pas même un cactus à trancher pour quelques gouttes du précieux liquide. Elle avançait donc en tentant de fléchir le moins possible, mais c'était compliqué bien que cette nouvelle zone était déjà moins généreuse en montée et en pente glissante. Elle n'avait qu'à marcher. Mais était-ce pour autant un meilleur chemin ? Sans carte, difficile à dire...

« Chier... Continue... bordel... »

Un ennemi qu'elle ne pouvait combattre, la chaleur... pas dans un endroit pareil du moins, même une aide venant de ses précédentes incarnations serait inutile ici...

L’impitoyable désert engloutissait les impudents pensant pouvoir s’y aventurer sans risque. Il n’était pire labyrinthe qu’une zone sans mur, sans repère, sans indication, et où un soleil écrasant vous assommait. La chaleur ne cessait de croître, et le corps de Kiriko continuait à se déshydrater, sans que rien ne semble devoir lui porter secours. Elle avançait lentement, difficilement, sa vision se faisant plus floue... Lorsque des grains de sable remuèrent autour d’elle. Des voix se mirent alors à ricaner, comme si des hyènes se rapprochaient. Les vautours tournoyaient dangereusement en l’air.

« Tu aurais dû mourir à Rose Red, sorcière...
-  Il est temps d’en finir. »

Le sable remua encore, et, le temps que Kiriko réagisse, une ombre jaillit sur sa droite. Usant encore de ses réflexes, la Celkhane évita le tranchant d’une lame, et vit l’ombre disparaître encore, tandis qu’une autre jaillit sur sa droite, la renversant au sol. Une autre ombre apparut alors, tenant une épée, que la femme esquiva en roulant sur le sol. Les ombres dansaient autour d’elle, se fondant dans le sable, se téléportant pour l’attaquer sur cette plaine aride. Une ombre apparut alors devant Kiriko, ce qui lui permit de voir un mystérieux guerrier enturbanné, vêtu de blanc, avec une cape blanche. Ses yeux luisaient de jaune, tandis que d’autres ombres dansaient encore.

Le djinn ricana encore quand, en tentant de l’attaquer, Kiriko ne rencontra que du sable, du sable qui se matérialisa ensuite partiellement, formant une main qui la saisit à son cou, la clouant au sol.

« Tu meurs maintenant, Kiriko... Puis nous scellerons de nouveau Sha. »

Ces individus faisaient-ils partie de l’épreuve ? Ou étaient-ils une vision de l’esprit, un fantasme que le cerveau de Kiriko invoquait pour amener la jeune femme à survivre de nouveau ? Mais, s’il s’agissait d’une simple vision, ils étaient terriblement réalistes. Le temps que Kiriko se relève encore, une vague d’Air la frappa, déchirant partiellement sa combinaison, la vague formant comme des lames de rasoir qui entaillèrent sa peau.

La menace était réelle, et d’autant plus dangereuse que Kiriko ne pouvait pas se battre à son plein potentiel, tant elle était asséchée. Les djinns se matérialisèrent devant elle, formant une redoutable ligne, qui avançait lentement vers elle. Et, alors que l’air commençait à lui manquer, et qu’elle était en train de sombrer, des flammes jaillirent autour d’elle, ainsi qu’une voix forte, une ombre qui bondit par-dessus d’elle, et qui croisa le fer avec les apparitions monstrueuses...
« Évidemment que je t’aime, Sha !
-  Alors, il faut que tu comprennes ton rôle, Anastasia... Notre rôle à toutes les deux.
-  Ce que tu dis n’a pas de sens ! Non, pas de sens !
-  Je ne joue plus cette fois, Anastasia, et tu le sais... Ce temps n’est pas le nôtre, mais mes visions n’ont pas menti.
-  Et pourquoi serait-ce à nous de nous sacrifier ? C’est injuste ! »
« ...Debout ! »

Une sombre beauté noire se trouvait face à elle. Belle et pleine d’assurance, la femme aux beaux yeux bleus croisait les bras, tandis que Kiriko émergeait peu à peu. Elle se trouvait dans une chambre, allongée dans un lit, une carafe d’eau à côté.

« Rassure-toi, on t’a hydraté pendant ton sommeil. »

Pleine d’assurance, la femme se déplaça lentement.

« Je m’appelle Aïcha, trésor. Et sache que c’est moi qui ai sauvé ta vie et ton joli petit cul. Au passage, je comprends pourquoi Açoka jalouse ton postérieur, alors que le sien est pourtant magnifique. »

Pour la sorcière, cette épreuve était au-delà de ses capacités. Il ne s'agissait pas simplement d'un combat où son passé pourrait venir s'ajouter à sa manche comme un joker. Il ne s'agissait pas non plus d'un endroit où la magie, la encore, pourrait lui donner un coup de pouce pour la tirer d'un mauvais pas. En temps normal, la survie ne lui faisait pas peur, ça lui était déjà arrivée par moment, surtout quand elle était encore une véritable Celkhane. Mais là, dans un désert comme ça, sans rien avant comme préparation, sans aucun aide dans le coin, c'était compliqué. Reste à savoir si ses trois adversaires étaient dans le même bateau ou bien si eux, par le biais de leurs talents ou par chance, ça allait mieux ? Difficile à deviner. Les visions ne l'aidaient pas vraiment non plus, certes, une fois à ne pas baisser les bras, mais sinon, ce n'était pas spécialement une aide...

D'autant plus quand les voix se mêlaient à sa vision. Réalité ou non ? Elle hésitait, ne sachant pas trop, mais elle esquivait malgré tout et quand le coup lui parvint, là, elle savait. Réalité. Mais qui était cet adversaire ? Ses adversaires ? Cela venait d'un des trois ? Ou cela était des ennemis « naturel » de cet endroit ? Elle esquivait tant bien que mal, le peu de contre-attaque qu'elle envoyait n'était au final que du vent, ses attaques touchaient ses adversaires, mais pour quoi ? Cela ne semblait faire aucune différence. À tous les coups, cela devait se vaincre avec de la magie... Elle sombra malgré elle, laissant une courte vision de son passé montrant Anastasia et Sha dans une discussion importante apparemment, mais elle n'en savait pas plus. Le reste était flou ensuite. Elle ne savait même plus si c'était toujours entre elles ou un rêve totalement hors sujet ?

Une fois réveillée, elle était toujours en vie, plus dans le désert. Du moins, plus sous le soleil, à la merci de ses ennemis... à moins que si ? Ce fut une femme qui venait la rassurer à ce sujet, affirmant avoir hydraté la sorcière durant son sommeil. La soif était moins primordiale que dans ses souvenirs, la gorge moins sèche, ça devait être vraie. Cela dit, ses derniers souvenirs étaient encore embrumés, surtout que cette Aïcha parlait de chose qui semblait être étrange des le réveil, comme ça !

« De quoi ? Tu connais Açoka ? »

Quelle relation ? Elle avait sa vie privée, ça, elle n'allait pas le lui reprocher, mais cette fille, elle était où ? De l'armée de Mijak ? Elle avait un groupe qui traînait dans le coin, d'où ce confort ? Puis comment elle savait qui elle était ? Bon, une Celkhane en violet – avec un beau cul – ça ne devait pas courir les environs, mais quand même. Kiriko se frottait une des tempes en fermant les yeux.

« Fait chier... Depuis combien de temps, je suis là ? »

Elle observa le coin, il n'y avait pas de cet homme ou cette fille, avec sa cape blanche et ses yeux jaunes ? Apparemment non. Ni même ses espèces d'ombre, ce qui était plutôt une bonne chose en soi, mais Kiriko devait quand même réussir cette épreuve, oublier tout ce qui n'était pas important et remporter cette épreuve, coûte que coûte ! Elle se souvenait, vaguement des mots de ses ennemis... Sceller Sha à nouveau... Comment ? Qui ils étaient ? Des ennemis, très clairement, mais elle devait les arrêter !

« C'était quoi ses trucs noirs ? Mes coups étaient inutiles... »

Il faut dire que vu la situation, elle était en mauvais état pour combattre ce genre d'adversaire donc ce n'était pas si étonnant... Elle voulait se lever et quitter cet endroit pour reprendre l'épreuve, mais... ce serait sûrement commettre une erreur, il fallait qu'elle réussisse à en savoir plus et partir dans la bonne direction.

Kiriko émergea assez rapidement. Il y avait de l’eau à proximité, car elle avait été récupérée dans un état critique. Aïcha lui laissait le temps de reprendre ses esprits, tandis que la Celkhane se mit à enchaîner les questions.

« Tu as dormi et végété pendant plus d’une journée. Estime-toi heureuse, il est impressionnant que ton corps ait réussi à survivre, et que tu te sois rétablie si vite. Quant à Açoka...
-  Kiriko ne serait pas ma grande rivale si elle n’était pas si têtue... Mais, cette fois, ma chérie, on dirait que tu m’en dois une. »

Depuis un couloir latéral, la silhouette reconnaissable d’Açoka fit son entrée. Très peu vêtue contrairement à Kiriko, elle lui sourit légèrement, tandis qu’Aïcha inclina respectueusement la tête. Sa présence ici, alors que Sha avait annoncé à Kiriko qu’elle était partie à un autre endroit, était des plus surprenantes, mais le reste était à venir.

« Ces sales types sont les Moudjahidines Noirs. Des tueurs spéciaux appartenant aux autorités séculaires de Wallündrill. Tu es tombée dans un traquenard, Kiriko. Je dois attendre que tu m’as surprise, je m’attendais à ce que tu sois déjà desséchée depuis des heures quand nous t’avons finalement retrouvé... Mais tu ne serais pas aussi casse-pieds si tu ne t’effondrais pas si rapidement, non ? »

Des tueurs envoyés par les autorités de Wallündrill ? L’incompréhension devenait de plus en plus manifeste pour Kiriko. Açoka se permit donc de lui répondre :

« Tu dois savoir que, depuis que Sha a été bannie, elle lutte continuellement pour retrouver ses souvenirs. Grâce à toi, elle a découvert que son bannissement était en partie lié à des trahisons internes... C’est pour ça que, notamment grâce à mes relations à Mijak, j’ai depuis longtemps été chargée de former, parallèlement au culte des sorcières de Sha, une sorte de culte secret, de confrérie entre Mijak et Sha, afin de former des agents d’élite pour identifier les traîtres, pour protéger le culte de l’intérieur. Aïcha est l’un des membres de cette confrérie, c’est l’une de mes élèves, et c’est également une sorcière. Quand tu iras mieux, tu pourras peut-être sentir ses forces magiques.
-  La Déesse Sha a effectivement souhaité participer à ce tournoi pour améliorer ses pouvoirs, mais, au fur et à mesure que les Épreuves se sont déroulées, elle a commencé à se méfier des organisateurs eux-mêmes. Rose Red a été l’élément déclencheur, en réalité.
-  Je suis venue pour t’aider, oui, mais aussi pour enquêter. Avec le réseau mijakien présent sur place, et avec l’aide d’Aïcha, nous avons découvert que les choses ne sont pas aussi claires qu’il n’y paraît. Les organisateurs de Wallündrill... La plupart d’entre eux appartiennent à un culte redoutable, une secte dangereuse. Toutes les manifestations qui ont eu lieu autour de toi, et surtout ce Blaine, en sont l’illustration. »

Les informations affluaient des deux femmes.

« Tous les compétiteurs encore en lice servent en réalité le même Dieu, quelqu’un qui a prétendu s’appeler Blaine. Ce Dieu malfaisant t’en veut, Kiriko... »

Açoka avait mené son enquête, tant sur Wallündrill qu’auprès des autorités mijakiennes, voire d’autres Dieux. Il ne fallait pas oublier que, comme Kiriko, Açoka était profondément dévouée à sa Déesse.

« Il t’en veut, parce que ta première incarnation lui a volé l’amour de Sha. Oh, ne va pas croire que tu as un rival de cœur. Il voyait Sha comme sa chose, sa création, une sorte de fille qui l’a renié grâce à toi. Il n’aura de cesse de vouloir te traquer, de vouloir t’éradiquer. Tout ça, toutes ces Épreuves... Elles n’avaient que pour but d’amener Sha et toi ici, et de te tuer. Derrière Blaine, derrière tout ça, il y a une créature redoutable... La folie de Lictolis, la soif de pouvoir de Namoria... L’Étranger lui-même n’est qu’un héraut, quelqu’un qui a été conçu à partir de sinistres rituels donnés par ce Dieu malfaisant. »

Avec une telle description, il n’était pas difficile de deviner de qui il s’agissait. Aïsha, qui était versée dans les arts de la sorcellerie, compléta ce qu’Açoka expliquait à Kiriko :

« Il est le Maître du Changement, le véritable Dieu des Sorciers, la cause réelle et profonde, sans aucun doute, de ton aversion des hommes. »

Elle expliqua cela avec gravité, avant de lâcher le nom de ce Dieu redouté :

« Tzeentch. »

Elle était vivante, vivante dans un endroit inconnu, avec une inconnue qui semblait connaître Açoka. Mais où ? Était-elle toujours dans la course ou bien elle avait perdu ? Face à ses nombreuses questions, Aïcha venait commencer à lui répondre et elle apprenait donc avec surprise que ça faisait plus d'un jour qu'elle était là ?! Non seulement Sha devait s'inquiéter, mais elle a dû prendre un sacré retard avec cette merde ! Mais juste après, ce fut Açoka qui arriva pour lancer une légère pique. La Celkhane Jonglait entre la frustration, elles étaient d'éternelle rivale, mais aussi un certain soulagement. Sha lui avait dit qu'elle avait quitté le temple où elle s'était reposé de la précédente épreuve et elle avait peur que tout cela ne soit en rapport avec son futur mariage avec la déesse et qu'elle soit donc plus ou moins sur la touche. Kiriko restait un instant muette alors qu'elle continuait de répondre aux questions qu'elle venait de poser.

« Des tueurs rien que pour moi ? Tss, j'en serais presque touché si je serais pas dans cet état... »

Si elle les avaient réduites au silence, elle aurait pris cela à la rigolade mais la nature ambiante avait joué en sa défaveur, venir à elle une fois qu'elle crevait de soif et de fatigue, c'était un coup bas. Mais au moins, elle était en vie et avec peu de blessure. La Mijakienne en disait plus sur elle, racontant qu'elle montait un petit groupe secret au sein de l'armée pour se vouer corps et âme à Sha et ainsi retrouvé les auteurs de son bannissement, Aïcha étant une de ses élèves. Une bonne idée, elle n'en savait rien, mais pour le coup, elle remontait un poil dans son estime... Mais ça restera toujours une Mijakienne qui avouait sans mal que l'esclavagisme était une bonne chose. Elles n'étaient pas rivales qu'à cause de Sha. Ainsi, tout ce qui était louche qu'elle avait vécu durant les épreuves, ce n'était pas du hasard, ce n'était qu'une arme pointée dans sa direction ? Saloperie.

« Dieu ou simple connard, je lui réglerais son compte. »

Elle était bien consciente que si c'était un dieu, ce n'est pas en bougeant son arme et en lançant quelques sorts qu'elle allait le vaincre, encore moins le tuer. Mais elle trouvera bien un moyen, même si ça pourrait simplement être le sceller, ils ont fait vivre ça à Sha, ce ne serait que le juste retour de bâton. Au final, c'était toujours le même adversaire qui la traquait, même avant ça, elle parierait que bon nombre des femmes de Sha ont perdu la vie par sa faute.

« Raison de plus pour lui rendre la monnaie de sa pièce... Sha n'est pas à lui ! »

Elle se redressa doucement pour s'asseoir, tentant d'assembler les pièces de puzzle un par un. Une fois de plus, il revenait sur le tapis, il faut donc le supprimer au plus vite d'une façon ou d'une autre si elle veut pouvoir vivre en paix avec Sha sans risquer quoi que ce soit. Pour elles comme pour leurs enfants. Ce salaud serait bien capable de frapper quand ça fera le plus mal.

« Je sais pas comment, mais on doit le stopper... Il a déjà fait souffrir Sha, bien assez. J'ai bien conscience que ce n'est pas moi, une simple sorcière qui pourra lui faire fermer sa gueule et le vaincre... Mais je trouverais un moyen. »

Si elle avait la capacité de partager des souvenirs, des pouvoirs, avec les anciennes sorcières qui ont partager la vie de Sha, c'était pour une raison. Aucune ancienne femme de Sha n'avait ce genre de pouvoir ? Pas à sa connaissance. Ça doit vouloir dire quelque chose, ce n'était pas le hasard. La réponse pour le vaincre était dans le passé ? Connaître à l'avance quels coups bas il va employer ? Savoir quels genres de technique il va employer ? Trouver un moyen d'unir leurs forces pour le vaincre avec Sha ? Toutes les sorcières qu'elle avait déjà croisées semblaient avoir une particularité spéciale qui les mettait sur le haut du panier, du moins dans un domaine magique. Est-ce qu'elle était sur la bonne piste au moins ?

« Sha aura besoin d'aide pour ça, ce n'est donc pas le moment de nous bouffer le nez. On doit s'entraider pour ça. »

Son regard était fixé sur Açoka, elle ne lui jetait pas la pierre, elle était autant fautive qu'elle dans leurs querelles, mais face à une telle menace, ce n'était pas le moment d'en faire à sa tête. Et puis elle devait lui parler plus intimement, avec le cœur, de son départ en quête de puissance ou autre. Kiriko allait épouser Sha, mais ça n'allait pas maintenir Sha à Kiriko, la déesse pouvait toujours voir ailleurs et multiplier les conquêtes. Ce mariage était plus symbolique qu'autre chose. Puis si ses rêves ont un message une part de réalité sur un possible futur, elle avait fait un rêve où elle avait eut un bébé avec Açoka, même si elle ignorait qui avait porter ce bébé, c'était le leur. Daeneryth, elle se rappelait de cette petite fille... Autant, elle savait à présent que les rêves où elle se trouvait dans une autre peau étaient fortement possibles que ce soit un passé méconnu, autant ce genre de rêve si réel... elle ignorait si ça tenait du fantasme ou d'une vérité ?

« C'est aussi notre travail, nous la servons, nous la protégeons. »

De base Kiriko avait accepté cette place dans ce tournoi pour devenir son bras droit, c'était symboliquement à elle de trancher les ennemis de la déesse.

« N’oublie pas une chose, Sha... J’ai fait partie des premières à rejoindre Sha. Je l’aime autant que toi, tu l’aimes. Et je sais qu’elle t’aime plus qu’elle ne m’aime. »

On pouvait sentir toute la rage et la frustration dans les mots d’Açoka. Elle n’aurait jamais cru tomber amoureuse un jour. Mais, après tout, son passé n’avait rien eu de très brillant. Elle n’avait jamais eu l’occasion d’aimer qui que ce soit avant de devenir une soldate, et d’être affectée à la région sinistrée que Sha avait récupéré. Elle avait vu le pouvoir de l’Ombre, elle avait senti sa puissance, goûté à sa luxure... Et, sans renier son serment mijakien, elle avait juré de l’aider, de sacrifier sa vie pour elle. Açoka prenait cela très au sérieux. En un sens, il était encore miraculeux que sa jalousie et sa rancœur ne l’aient pas amené à laisser Kiriko mourir. Le simple fait d’avoir sauvé cette insolente femme du désert, alors qu’elle aurait pu la laisser mourir, témoignait de la vigueur de cet amour. Açoka savait qu’elle ne serait jamais la première dans le cœur de l’Ombre, et tâchait de faire avec, autant que possible.

Aïcha, bras croisés, se racla doucement la gorge.

« Écoutez, les filles, vous vous battrez plus tard... J’ignore ce que Tzeentch manifeste, mais ce n’est pas un adversaire à prendre à la légère.
-  La réponse se trouve dans ton crâne, Kiriko. Elle est liée à un antique sortilège qu’Anastasia Warren, l’une de tes anciennes incarnations, a réalisé avec l’aide de Sha. »

Anastasia Warren... Un nom qui avait brusquement jailli dans la vie de Kiriko, mais Açoka avait fait ses recherches. Elle se déplaça lentement, tout en récapitulant ce qu’elle savait sur cette femme.

« Anastasia Warren était une femme aussi belle que cruelle, aussi arrogante que perverse. Elle se montrait impitoyable envers ses ennemis, et était... Réputée pour sa beauté. Elle pratiquait de fastes orgies chez elle, mais était aussi une sorcière impitoyable, réputée pour être l’une des plus puissantes de Mijak. Les académies magiques abritent beaucoup de livres à son sujet. Anastasia s’était spécialisée dans un domaine où tu es naturellement douée... La métempsycose.
-  Nous pensons qu’Anastasia a légué son pouvoir à l’une de ses futures incarnations, et que c’est toi qu’elle a choisi... Elle avait aussi des pouvoirs de divination, et a pressenti que tu jouerais un rôle dans cette histoire.
-  Bref... Les souvenirs de tes anciennes incarnations te reviennent progressivement, ça, je le sais. Je pense que la réponse à la colère de Tzeentch se trouve dans ta toute première incarnation...
-  Celle qui a permis de repousser Blaine... Ou Tzeentch. »

Tzeentch n’était pas une menace à sous-estimer. Il était l’un des Dieux Noirs primordiaux, le Dieu des sorcières, de la magie. Un être à la puissance infinie.

« La priorité est de retourner à Wallündrill pour aider la Déesse. Nous connaissons des routes permettant de quitter ce maudit désert, mais il faut que tu sois bien reposée, Kiriko.
-  Fais confiance à sa fierté et à son esprit de rivalité. Si elle sait que je suis en forme et pas elle, Kiriko va se dresser pour être prête le plus tôt possible !
-  Nous n’avons pas vaincu les mercenaires, ils nous traquent encore. Mais, si tu es rétablie, Kiriko, tu pourras les affronter bien plus facilement. »

Impossible de contacter Sha. C’était comme si un bouclier recouvrait Wallündrill, ce qui semblait confirmer que, là-bas, quelque chose de terrible était en train de se produire...

Tout était encore un peu flou dans la tête de Kiriko, sa courte épopée dans la Fournaise, ses adversaires rencontrées là-bas et les quelques images qu'elle a eut de son passé, découvrant ainsi une nouvelle facette de son passé, Anastasia Warren. Pour le moment, Kiriko avait mieux à penser qu'un possible lien de famille entre elle et cette vampire de Mijak. Après tout, cette Anastasia était peut-être simplement un homonyme ? Ce qui la surprenait, c'est qu'Açoka semblait en savoir autant qu'elle, si ce n'est plus alors que Kiriko venait tout juste d'apprendre cela. C'était assez surprenant pour l'arracher à ses pensées.

« Comment tu peux savoir tout ça ? Je viens tout juste de la voir dans le désert toi, tu en connais un rayon sur elle ? »

Assez frustrant, oui, encore une raison de l'avoir comme rivale, mais elle n'était pas là pour s'en prendre encore à elle. Mais elle écouta quand même ce qu'elle avait à lui dire à ce sujet, car c'était important tout de même. Outre le fait d'apprendre que son possible don soit liée à Anastasia, il était possible qu'une réponse à leur future victoire ait un lien avec sa première incarnation ? Celle par qui tout cela à débuter, une simple mortelle dont Sha était tombée amoureuse ? Cette femme avait au moins un quelconque pouvoir magique ? Kiriko l'avait brièvement vue en apprenant un peu plus du passé de Sha, de la naissance de cette bataille entre lui et Sha. Sha était tombée amoureuse d'une femme, Kiriko ne se souvenait pas avoir entendu le mot sorcière ou magie ? Ou alors elle ne s'en souvenait plus ? Elle avait du mal à se remémorer l'apparence de cette femme déjà...

« Chier... Je m'en souviens à peine... »

Une raison pour mieux maîtriser ce pouvoir et tirer ce souvenir du fin fond de sa mémoire pour en tirer de plus amples informations ? Açoka la titillait légèrement, vantant sa rivalité avec elle, que si elle était hors du lit, elle ferait tout pour guérir plus vite afin de se mettre sur un pied d'égalité avec elle. Ce qui n'était pas faux, mais là, ce n'était pas une simple rivalité.

« Crois-moi que si je pouvais déjà quitter ce lit, je serais déjà débout. Mais il faut que je me tienne préparer, ne pas me surestimer, ça pourrait m'être fatale. »

Vu les adversaires encore en jeu, il ne fallait en aucun cas les sous-estimer, ce serait débile de sa part donc, pas question d'aller trop vite. Si ça ne tenait qu'à elle, elle serait déjà dehors à aller courir vers la fin de cette épreuve, mais il fallait écouter son corps qui avait besoin de repos. La Celkhane s'allongea donc, jugeant son corps, était-ce suffisant ? Sûrement pas, pas avec de tels ennemis à ses trousses. Elle devait se reposer, mais ne rien faire la hantait ! Autant mettre ce temps à contribution...

« Et dans tes recherches, qu'est-ce que tu as pu apprendre ? Que ce soit sur Anastasia ou une autre femme ayant côtoyé Sha ? »

Qui sait, cela pourrait agir comme un déclic en elle qui lui montrerait de nouvelles choses ?

« Tu as l’air d’oublier que, parmi mes fonctions au sein du culte, je suis à la tête du service de renseignements. Notre Déesse m’a demandé depuis des semaines de faire une étude sur toi, et sur tes anciennes incarnations. Mais tout ça n’est pas comme tomber sur un arbre généalogique, petit cœur. »

Açoka et Kiriko étaient deux éternelles rivales, chacune cherchant à surpasser l’autre pour pouvoir briller aux yeux de Sha. Une rivalité qui était en soi absurde, car Sha leur avait dit qu’elle les aimait toutes les deux... Mais que serait l’amour sans une dose de jalousie ? À terme, il semblait évident que Sha allait prendre ce sujet très au sérieux, car leur rivalité ne cessait de croître, et, en remportant la compétition interne pour rejoindre le Tournoi, et avec ses anciennes incarnations, Kiriko avait pris une sérieuse avance dans leur défi.

La Mijakienne poursuivit ses explications :

« J’ai utilisé ton sang, et je me suis rapprochée des mages mijakiens, notamment l’Archimage Samara. Parallèlement, notre Déesse m’informait par télépathie de chacune de tes incarnations. Anastasia Warren est peu à peu apparue dans mes recherches comme une probabilité très évidente... Ainsi que beaucoup d’autres sorcières. Les critères étaient relativement simples, tu sais ; trouver une sorcière puissante, et très amoureuse. En ce qui concerne Anastasia, celle-ci était trop narcissique pour aimer quelqu’un d’autre, à l’exception de son propre sang. Elle aimait fortement sa fille. »

Açoka n’était donc pas surprise d’apprendre qu’Anastasia était une ancienne incarnation de Kiriko. En revanche, en ce qui concernait sa toute-première incarnation, elle n’avait aucun indice. Ceci remontait manifestement à des temps ancestraux, avant même la création de Mijak, soit à une époque préhistorique, celle des elfes.

« Je me suis rapprochée des quelques sociétés elfiques qui existent encore, comme au Bosquet de Lumen, mais... Pour l’heure, je n’ai rien trouvé. J’ignore donc totalement ce que tu étais jadis. Tout ce qui est sûr, c’est que sous cette forme que tu as réussi à arracher Sha de l’influence de Khorne. En attendant... »

Açoka avait récupéré un parchemin, comprenant une liste de noms. Il s’agissait de toutes les incarnations possibles de Kiriko, et elle demanda à celle-ci qu’elle lui donne la liste de toutes les incarnations qu’elle avait eu, en profitant pour cocher certains noms. Elle pourrait ensuite rayer ceux qui correspondaient à une période voisine. Pendant ce temps, Aïcha avait préparé une mixture apaisante, destinée à faciliter la régénération de Kiriko, et la lui apporta.

Kiriko allait aussi devoir beaucoup boire, car elle s’était desséchée, déshydratée lors de sa traversée dans la Fournaise. La manière dont Açoka veillait sur elle avait de quoi troubler, elles qui étaient de rudes rivales, et qui n’hésitaient pas à se provoquer. La belle Celkhane ne tarda pas à sombrer, car elle avait besoin de repos.

« Nous n’arrivons toujours pas à contacter Wallündrill, je n’aime pas ça...
-  La Déesse est puissante, Aïcha, et nous le saurions si elle était morte. Kiriko le sentirait. Le lien qui l’unit à la Déesse surclasse tout bouclier magique.
-  Mais je ne pense pas que Khorne cherche à la tuer. Sha était l’une de ses plus puissantes filles. S’il a conspué pour la bannir, c’était dans la perspective de la ramener sous son autorité.
-  Ne sous-estime pas si facilement notre Déesse. »

Pendant que Kiriko se reposait, Aïcha et Açoka préparaient l’expédition vers Wallündrill. Elles étaient réfugiées dans une ancienne forteresse, à moitié construite dans la roche, au fond d’une gorge. Le risque était que les tueurs de la ville les retrouvent, mais cela restait peu probable. La Fournaise était un vaste désert, et Aïcha et les siennes avaient choisi un refuge très bien isolé.

Il ne restait plus qu’à attendre le réveil de Kiriko...

Kiriko ignorait à quel point Açoka savait des choses. Au mieux, vu sa récente venue au tournoi, elle pensait que Sha lui avait touché deux mots concernant certaines choses pour mettre en lumière certaines zones d'ombre dans tout cela. Mais qu'elle en sache tant, ça la surprenait et pas qu'un peu. Elle avait beau être spécialisée dans la récolte d'information – tout comme Kiriko quand elle était à Caelestis – son travail était assez impressionnant, vu le peu d'information que Kiriko avait pu récolter ici et là. Ou bien les femmes qu'elle a pu être par le passé ont laissé de belles empruntes dans l'histoire. C'était aussi une possibilité, mais toute ? Trouver des sorcières puissantes et très amoureuses, ça ne devait pas être si rare que ça ? Puis, toutes les sorcières très amoureuses n'étaient tout de même pas toutes amoureuses de Sha ? Elle n'avait rien contre ça, Sha était d'une grande beauté donc dans un sens, ce serait logique. Mais tout de même, quelle célébrité si c'était le cas.

« Sa propre fille ? »

Elle devait y comprendre quoi ? Qu'elle était très proche de sa fille ou bien que cet amour était incestueux ? Cela ne la choquerait pas tant que ça, mais un peu quand même. C'était une chose d'embrasser sa propre fille quand elle embrassait Nausicaa, mais Misha restait sa vraie mère, Kiriko était sa mère, mais dans un autre sens. Alors que là, ce serait très proche effectivement. Concernant la première « elle », la Celkhane ne se souvenait pas assez d'elle, vaguement de son apparence, mais son nom... Tout était idyllique dans ses visions, cette femme et Sha ensemble au milieu des fleurs, Sha heureuse et loin d'être cette femme fatale qui pouvait vous tuer d'un regard, à croire que c'était la première fois qu'elle avait découvert le mot bonheur. De même, avait-elle des pouvoirs ? Dans sa vision, rien n'en faisait mention dans ses souvenirs.

La sorcière venait à énumérer un à un les sorcières dont elle se souvenait, du plus récent au plus ancien... Anastasia, évidemment. Mercy, cette sorcière des rêves. Aloe, cette sorcière adepte de magie rose à haut niveau, il y avait aussi cette petite – en apparence – elfe qui l'avait bien aidée... Syl'vathe-zlorth ? Pas un nom des plus simple à retenir... Tharja, douée en malédiction comme le but premier de Sha, mais aussi très jalouse. Il y avait cette sorcière liée au poison... mais elle n'avait pas eu le temps de savoir son nom, son apparition fut brève pendant le combat... Catherine, sorcière douée dans la manipulation des flammes. Marild aussi, pas envers le feu, mais c'était une des apparitions qu'elle avait eue récemment. Mais en remontant plus loin... Misha, évidemment, mais aussi... le reste restait vague... La première, évidemment et il y avait des fois où elle ignorait si c’était de simples rêves ou une partie de son passé. Car si tout est vrai, Kiriko a déjà été une kitsune mariée à Sha elle aussi. Cela dit, une kitsune douée en magie, ça ne doit pas courir les rues. Là encore, si elle maîtrisait la magie, rien ne dit que Sha n'ait eut Que des sorcières en guise de femme. Buvant le remède, la sorcière ne tarda pas à sombrer dans le sommeil pour mieux se reposer et ainsi se réveillé plus tard au meilleur de sa forme, espérons le.

Son rêve ne montrait pas de nouvelle sorcière, c'était Syl'vathe, se reposant dans les bras de Sha, passant d'une forme plus adulte et pulpeuse à la forme dont Kiriko l'avait vue, gardant les yeux fermée pour le moment. Sûrement qu'elles venaient de s'amuser et qu'il s'agissait là d'un repos bien mérité. Ses longs cheveux servaient pratiquement de couverture pour camoufler son propre corps, enlacée dans les bras de Sha. Alors que tout annonçait une scène apaisante où le repos serait là, des paroles furent prononcé dans ce silence apaisant.

« As-tu avancé pour cette rune ? »
« Juste un peu... il est compliqué d'inventer une rune pouvant supportée un tel poids magique. De plus... l'inventé est une chose... réussir à le mettre en place est compliqué... »
« Je m'en doute... Mais c'est important, pour notre futur. »
« Je le sais très bien... »

La conversation continua un peu, il était question d'une rune pouvant protéger d'une menace – sans évoquer le nom, il était évident de l'identité de l'ennemi – mais au fil de la conversation, voyant qu'une telle chose semblait impossible, car après tout, une simple rune créer par une sorcière ne pouvait pas éternellement empêcher une divinité d'agir, il était cette fois question de fécondité... Une rune permettant à une femme de plus facilement donnée la vie. Non pas dans l'acte, hélas peu de chose pouvait empêcher le miracle de la vie d’être douloureux, mais plutôt à facilité le fait de tomber enceinte. Et ça, ça pouvait être simple. Sylvathe étant celle ayant donné vie aux symboles magiques, là où de simples marques pouvaient être des verrous, des pièges, des attaques, des portes bonheurs, des malédictions, bref. Un symbole pour facilité la création... Cela semblait bien parti vu le ton des phrases, mais Kiriko se réveilla peu de temps après, Açoka et Aïcha déjà prête. Elle se redressa, quitta le lit, ça semblait aller. Bon, il y avait la légère fatigue du réveil, mais ça semblait être une bonne chose...

« Ok, allons-y ! »

Reste à savoir si cette rune existait, si Sha le savait. Qui sait, Kiriko portait peut-être cette marque sur son corps, sans le savoir ? Une zone on l'on pose rarement les yeux et souvent caché... l'arrière du crâne par exemple ? Et Açoka avait peut-être cette marque ? C'était comme un héritage créé par Sylvathe, demandé par Sha. Il serait logique que ses amantes disposent de cela.

Après sa nuit, Kiriko semblait enfin rétablie. Elle était suffisamment apte pour se tenir debout. Elle put ainsi constater que le refuge d’Aïcha était assez petit. Il s’agissait d’une antique forteresse à moitié effondrée. Si Kiriko avait passé une nuit chaste, il était permis de se demander ce qu’Açoka et Aïcha avaient fait de leur nuit, mais Açoka était suffisamment adroite pour ne rien montrer. Soldate dans l’âme, elle avait consciencieusement noté les noms donnés par Kiriko. Il lui faudrait ensuite se renseigner sur chacune de ces sorcières, trouver leurs dates et lieux de naissance et de décès, et faire du recoupage. Son idée était d’essayer de trouver le cycle des réincarnations de Kiriko. Une tâche qui était en soi un peu vaine, car Sha lui avait maintes fois répété que les réincarnations n’obéissaient pas à des règles scientifiques précises. Il fallait donc raisonner autrement pour les appréhender. Mais Açoka continuerait, car telle était la mission fixée par sa Déesse.

Le hall du refuge abritait les autres soldats d’Aïcha. Il y avait des femmes, mais aussi des hommes. Et, visiblement, tous avaient entendu parler de Kiriko et de ses exploits. Une grande table avait été installée au centre avec une carte de la région. Il y avait également des caisses remplies d’armes et de boucliers. Kiriko comprit ainsi assez vite qu’il y avait assez peu de sorciers ou de sorcières ici.

« Mange un coup, ma belle » lui glissa Açoka en lui balançant un sandwich.

Elle la rejoignit ensuite.

« Ce sont des résistants. Je leur ai apporté de l’équipement militaire venant de l’Empire en échange de leur aide. »

Difficile de dire si ces gens étaient vraiment fiables, mais, parfois, il fallait juste se dire que l’ennemi de ton ennemi était ton ami. C’était en tout cas la doctrine de l’Empire. Açoka se rapprocha du chef des lieux, et indiqua à Kiriko qu’il s’appelait Pacha Kamaq. Kamaq se retourna vers les deux femmes, et observa brièvement Kiriko.

« On m’a parlé de vos exploits lors du Tournoi. J’espère que vous serez à la hauteur de votre réputation.
-  Pacha Kamaq est le père d’Aïcha, lui expliqua Açoka en aparté. Il appartient à l’une des grandes familles de Wallündrill, mais a été évincé du pouvoir dans des conditions assez tragiques. »

Açoka lui expliqua que la maison familiale de Pacha Kamaq avait été attaquée par des tueurs envoyés par les autres membres du Conseil. Les deux femmes se rendirent ensuite près de la carte.

« Nous sommes ici, mon cœur, indiqua-t-elle en pointant du doigt une zone de la carte au sud. Wallündrill est au centre, là. Il faut traverser le désert, ce qui sera difficile.
-  Les grandes familles de Wallündrill ont envoyé leurs tueurs du désert pour nous traquer et pour te tuer, Kiriko, comme tu as pu constater cela. C’est une route difficile, exigeante. Nous devrons rester serrées.
-  Kiriko grimpera avec moi, nous avancerons sur le même dromadaire. »

C’était le meilleur plan, car Kiriko n’avait pas eu le temps de se familiariser avec la région. Et puis, elle sortait d’une période de déshydratation. Açoka se déplaça encore, et continua à expliquer le reste du plan. Rejoindre Wallündrill par la grande porte était suicidaire, mais il y avait aussi d’autres entrées… Des entrées qui rappelleraient à Kiriko certaines des épreuves qu’elle avait faites.

« Il existe des passages souterrains qui permettent de rejoindre Wallündrill. La mine d’Ellëndrill, Kiriko, fut le lieu de ta première Épreuve. Bien que cette mine ait été condamnée, il existe à l’intérieur des passages qui permettent de rejoindre les égouts de la ville. Pour accéder à la mine, il existe des cavernes antiques dont le point d’entrée se situe ici… »

Son doigt désigna une sorte de cercle. Le nom sur la carte devrait être familier à Kiriko.

C’était l’antre des terribles koshcheys.

« Il n’y a pas de mystères. Ellëndrill était un nain riche, qui a créé le koshchey pour protéger son trésor. La bête s’est évidemment rebellée, et a donné naissance à d’autres petits. Il nous faudra donc passer par là.
-  Et, vu que toi et ton petit cul avez déjà traversé ces lieux, tu seras un guide idéal, Kiriko. »

Qui sait ce qu'elles avaient fait pendant qu'elle se reposait et sincèrement, elle s'en fichait. Qu'elles aient mangé des pommes en comptant les nuages ou fait l'amour comme des chiennes, ça lui passait au-dessus, du moment que cela ne la concernait pas. Elle s'était reposé, on ne lui avait rien fait, très bien. Suivant Açoka, elle se retenait de la corriger au moindre surnom ou autres, si dans le temple, elle s'en fichait un peu, ici, c'était bourré d'inconnus. D'autant plus quand elle vit qu'il y avait aussi des hommes, loin de lui plaire toute cette histoire. Mais soit, elle n'allait pas faire sa capricieuse, elle était là pour gagner ce foutu tournoi, pas le temps de chipoter. Elle salua tout de même Kamaq qui était le chef ici en plus d'être le père d'Aïcha. Elle écouta son histoire en se disant bien que cette histoire restait étrange mais soit, ceux qui organisaient ce tournoi avaient des raisons d'agir ainsi, et elle devait savoir pourquoi pour les en empêcher.

Au final, le plan consistait, une fois le désert passé, de passer par les mines qu'elle avait déjà traversé lors de la première épreuve. Sauf qu'elle prendrait cette fois un autre passage pour rejoindre la ville. Mouais... le plan pouvait fonctionner, c'est juste qu'il y a toujours cette créature à l'intérieur, du genre dangereuse. Même si ce n'était plus la même sorcière que lors de la première épreuve, elle n'irait pas jusqu'à dire que cette fois-ci, elle va l'avoir aisément. L'excès de confiance pourrait être fatal. Enfin, vu la taille de la mine, elle pouvait espérer ne plus croiser cette créature bien que d'autres créatures rodaient en ces lieux.

« Encore ses foutues araignées... »

Elle va devoir en trancher de ses saletés, même avec de la chance, elle se doutait bien qu'elle allait en croiser un minimum. Elle ne pouvait pas s'en tirer si facilement, ce serait trop beau que de passer la mine sans croiser de difficulté. N'y avait-il pas une sorcière dans son passé qui savait jouer avec la chance pour ainsi faire en sorte que tout se passe bien ? Qu'elles traversent les mines quand les monstres dort ? Ou à défaut se jettent sur d'autres personnes actuellement dans la mine ? Non ? Peu de chance que cela arrive.

« Préparons-nous et ne perdons pas plus de temps. »

Non pas que tout cela ne servait à rien, mais Kiriko venait de passer une nuit ici, plus une seconde quand elle a été retrouvée dans le désert donc cela fait déjà deux jours depuis le début de l'épreuve. Sha savait peut-être que tout se passait plutôt bien, ou alors elle avait zéro nouvelle, et ça, ça craint. Sans parler du fait qu'elle ne devait pas perdre ce tournoi donc, pas question que les autres aient de l'avance sur elle. Gourde, repas et autres priorités à emporté, elle grimpa comme convenue avec Açoka, ravalant une fois de plus sa fierté. Elle n'était pas à l'avant, elle ne menait pas la danse, mais soit, elle devait avant tout réussir ce tournoi pour Sha, pas pour montrer à cette foutue Mijakienne qu'elle était plus douée. Elle profita d'ailleurs de cette proximité pour parler avec elle, à voix basse. De choses qui devaient être dites et qui devraient rassurer la jeune femme, malgré tout.

« Tu sais... je comprend que... que tu te sentes un peu... en dehors de ce qui se passe en ce moment... » sa liaison avec Sha et ce rapprochement qui était aller très vite. Kiriko était passé d'amante de la déesse, comme bien des sorcières à future femme... « Mais Sha a de nombreux projets pour toi, comme pour nous dans un sens... Je ne sais pas si elle t'en a parlé ou si c'est une surprise, mais, elle a quelque chose de spécial pour toi... que je préfère ne pas dire, pour éviter de vendre la mèche. Mais ce sera la preuve que tu comptes pour elle, autant que moi. »

Un bébé. Une envie de Sha pour lui faire comprendre qu'elle comptait ou un projet secret entre elles ? Pas question de vendre la mèche d'un si beau projet. Contrairement à d’habitude, Kiriko parlait calmement, presque comme une mère parlerait d'un sujet sensible avec sa fille, comme le sexe par exemple. Il faut dire que la sorcière avait elle aussi bien changé depuis le début des épreuves. Elle s'était adoucie sur bien des points et avait évolué sur d'autres aussi. Elle ne voulait pas jeter d'huile sur le feu, juste faire ce qui fallait pour éviter des bêtises. Après la dernière épreuve, Sha lui avait tout de même dit qu'Açoka comptait allez vers Rose Red ou d'autres endroits dangereux donc il fallait éviter cela.

Le périple put donc commencer. La dernière partie de la longue aventure de Kiriko à Wallündrill approchait. En compagnie d’Açoka, d’Aïcha, et de résistants, elle allait donc tenter de retrouver sa Déesse, de traverser le désert, et d’affronter un avatar de Khorne qui n’avait eu de cesse de leur gâcher l’existence depuis des éons. Tenant les rênes du chameau, Açoka avançait lentement, calmement. Elle connaissait les lieux, elle avait déjà fait du repérage, et elle sentait contre elle la présence réconfortante et chaude de Kiriko. Les deux éternelles rivales étaient contraintes de faire cause commune, et, profitant de ce moment d’intimité, Kiriko entreprit d’enterrer un peu la hache de guerre.

Elles avançaient le long d’un grand canyon nébuleux, et Açoka sourit brièvement, avant de lui répondre :

« Quand tu m’as vaincu… Quand tu m’as vaincu et que tu as gagné le droit de représenter notre Déesse à ce tournoi, j’étais furieuse contre moi-même. Furieuse, et aussi viscéralement jalouse de toi. Tu n’imagines pas à quel point j’ai pu te haïr. Toi, la petite sorcière au cul parfait qui venait juste de débarquer, tu me raflais l’amour de ma Déesse, et tu gagnais même le droit de participer à ma place au Tournoi. J’étais convaincue que notre Déesse m’abandonnerait, que je lui ferai honte… Alors, j’ai décidé de me lancer dans une quête folle, suicidaire… Un périple vers un château reculé, situé à Tonnefoudre, Cair Viscri. C’est sur place que la Déesse m’a retrouvé. »

Maintenant qu’Açoka avait commencé son récit, elle ne pouvait pas s’arrêter. Il n’y avait aucun danger, et, même si des ennemis devaient attaquer le convoi, les éclaireurs le verraient. Contrôlant le chameau, Açoka reprit, après une légère pause.

« Elle était furieuse contre moi, et j’ai bien cru qu’elle me tuerait elle-même. Elle m’a expliqué qu’elle n’était pas une simple humaine, et que je ne devais pas l’aimer comme telle, mais comme une Déesse. Et l’amour d’une Déesse ne se limite pas qu’à une seule personne. La Déesse t’aime, Kiriko, à un point que tu ne peux l’envisager… Mais son cœur divin lui permet d’en aimer d’autres. Sha m’aime, Kiriko, je le sais. Mais notre jalousie mutuelle l’insupporte. Pour elle, que nous soyons réciproquement jalouses signifie que nous la considérons comme un objet de conquête, alors que nous nous devons de la vénérer. C’est pour ça que je t’ai sauvé… Et que j’ai décidé de mûrir. Tes pouvoirs nouveaux me surclassent totalement, maintenant, mais la Déesse s’en moque. Elle tient à ce que nous formions une famille, Kiriko, que nous soyons un exemple pour nos futurs enfants. Et c’est là quelque chose que j’entends accomplir, un souhait que j’entends respecter. »

Ils avaient quitté le canyon, s’engageant désormais dans cet immense désert que Kiriko avait vainement tenté de traverser à pied. Les guides avançaient d’un point à un autre, s’aidant de repères ancestraux pour pouvoir avancer plus facilement. Açoka observa les cieux, avisant quelques vautours qui voletaient laborieusement dans les cieux, et tourna la tête vers Kiriko. Sa main caressa alors sa joue, et elle l’embrassa tendrement sur les lèves. Un baiser qu’elle voulait le plus sincère possible.

« J’ai renoncé à une brillante carrière d’officier mijakien pour l’amour de Sha, Kiriko… Et, ce que j’ai compris, c’est que l’amour est avant tout un sacrifice. Un sacrifice pour la personne aimée. Je ferai tout ce que notre Déesse me dira, même si cela implique de devoir t’aimer toi aussi. »

Et, sur ce point, elle était sincère.

Profitant de ce voyage qui semblait tout de même assez long, Kiriko se décida de parler de certaines choses avec Açoka, des choses dont Sha l'avait mise au parfum juste après la précédente épreuve. Sans tout raconter ce que leur déesse lui avait dit, elle évoqua quand même être au courant de ce qu'elle avait eut en tête. Mais Açoka lui raconta plus en détail ce qui s'était passé juste après la victoire de la Celkhane sur la Mijakienne pour représenter Sha au tournoi actuel. C'est vrai que depuis leur début, elles se bouffaient le nez telles deux chiens sauvage, de base, avant même de la jalouser vis-à-vis de Sha, c'était le fait qu'elle soit une Mijakienne comme on en ferait la caricature au final. Fière, avouant sans mal que les esclaves étaient bien ainsi, bref, avec Kiriko qui était une fière Celkhane, elles ne pouvaient que se détester.

« C'est pas tant tes liens avec Sha qui faisait que je ne te supporte pas, et tu le sais... Sans te détester toi, c'est ta patrie que je déteste. Ta façon d'être cette Mijakienne parfaite... »

Kiriko habitait certes à Mijak dans le temple de Sha, mais elle gardait ses racines de Celkhane, ne voulant pas faire d'esclave, libérant ces derniers quand elle en trouvait en chemin, venant, certes, les amener à Sha pour leur offrir le gite et le couvert mais elle ne voulait pas les abandonnée à leur sort dans la nature mais si c'était ce qu'ils désiraient, soit. Rem en était l'exemple, c'était une des premières esclave qu'elle avait libérer au cours de ses missions, affaibli, malade, elle avait pris soin d'elle en voyage, même une fois au temple et depuis, elle servait gratuitement l'ordre de Sha, étant la domestique de Kiriko avant tout mais servant Sha par la même occasion. Elle était libre de partir, depuis le temps, elle avait remboursé sa dette pour l'avoir soigné, mais elle restait. Un peu par amour, mais c'est une autre histoire. Açoka se retourna quelque peu, embrassant la Celkhane doucement. Une chose inhabituelle, lorsqu'elles s'embrassaient généralement, c'était entre deux hurlements de plaisir, sans oublier de mordre sa partenaire pour montrer qui commandait.

« Moi, je ferais tout mon possible, pour rendre Sha heureuse. »

Même si cela devait dire bien s'entendre avec Açoka, mais cela se fera petit à petit, un claquement de doigt n'allait pas changer leur rivalité en grand amour. Il fallait bien un petit temps d'adaptation. Kiriko avait bien en tête ce rêve où ensemble, elles avaient cette ravissante petite Daenerys, une mignonne petite fille qui avait l'air si gentille et si douce, bien que dans ce rêve, les deux se crêpaient le chignon sur son éducation et une fois n'était pas coutume, c'était Sha qui venait les remettre dans le droit chemin, leur faisant les gros yeux. Tenant toujours Açoka durant ce voyage, elle aussi, s'ouvrait un peu sur de potentiels futurs projets. Sha ne lui avait pas caché qu'elle portera ou enfantera Açoka pour offrir aussi des petites sœurs à Arya et Abbigail.

« Je pense que la façon de montrer à Sha que nous nous entendons bien à présent, ce serait... d'avoir un enfant ensemble ? »

Pas dans l'immédiat, de toute façon, son premier bébé, sera de Sha, forcément, ça, c'était déjà graver dans le marbre, mais dans un futur plus ou moins proche après l'accouchement d'Arya, elle pourrait envisager d'avoir un bébé avec Açoka ? Cette petite Dany dans sa vision était aussi destinée à ça, à faire en sorte que ses deux-là s'entendent bien à présent ?

« Je ne te demande pas de me répondre maintenant, mais pense y. Sha ne pourra qu'être heureuse que nous nous entendions assez pour avoir un enfant ensemble, qui grandira auprès de nos enfants avec Sha. »

Kiriko serait même prête à porter ce bébé... bon, ce détail était encore à confirmer mais pourquoi pas ? Il ne faudrait pas que cette petite se sente à part au milieu de ses grandes sœurs semi-divine mais l'amour d'une mère n'a pas de limite envers ses enfants, qu'importe que son enfant soit semi-divin, qu'elle n'ait pas la même mère génitrice, ça restait son enfant. Contrairement à d'habitude, Kiriko aussi parlait plus doucement, sans ce petit ton au-dessus d'elle, elle était sincère, à cœur ouvert.

« Tu sais, à mon arrivée, j'avais peur de toi. De toi et de liaison avec Sha... Je débarquais en territoire ennemi avec pour seule ambition de recevoir un peu d'amour de cette déesse qui m'a sauvé et tendue la main. Toi, tu étais déjà bien installé ici, tu connaissais bien notre déesse, tu partageais son lit sans hésitation, tu... m'impressionnais. »

Si ça, ce n'était pas parler à cœur ouvert. Dire tout haut à Açoka qu'elle l'impressionnait ?! Même dans un lit, soumise à elle, jamais elle ne dirait une telle chose ! Si Sha savait ça, elle applaudirait sûrement l'effort. Avouer ça d'une autre personne, la Celkhane en était capable, mais d'Açoka ? Il fallait être chanceux pour voir un tel exploit.

Qui aurait cru que les deux éternelles rivales puissent finir par discuter franchement sur le dos d’un chameau ? La scène semblait surréaliste, mais, à bien y réfléchir, Açoka et Kiriko avaient bien plus de points communs que de différences. Outre leurs nations respectives différentes, elles étaient deux femmes fortes. Deux fortes têtes, des guerrières aussi belles que redoutables, qui faisaient tout leur possible pour plaire à leur Déesse. Et, même si Açoka ne venait pas de Caelestis, elle avait aussi sa propre opinion sur l’esclavage. Elle était contre certaines pratiques liées à l’esclavage, contre les maltraitances inutiles, contre l’exploitation sauvage. Elle était favorable à un esclavage plus doux, à un véritable contrat aux concessions réciproques, où l’esclavagiste, en échange de la liberté de son esclave, lui offrait protection et sérénité. C’était une discussion qu’elle n’avait encore jamais véritablement pu avoir avec la tête brûlée qui était dans son dos.

La surprise vint toutefois d’apprendre que Kiriko était prête à ce qu’elles aient un enfant. Açoka ne répondit pas immédiatement, devant s’accorder le temps de la réflexion.

« Nous sommes destinées à nous marier, Kiriko. Nous serons toutes les deux les femmes de Sha, ses épouses. Faire un enfant avec toi… La seule vraie question, ce sera de savoir quand on pourra le concevoir, et qui le portera. Figure-toi que j’ai dans l’idée que notre Déesse souhaite avoir une famille très nombreuse. »

Les rares fois où la Déesse évoquait cela, elle affirmait qu’elle ne se contenterait jamais d’un seul enfant. Elle avait après tout construit un immense palais, et c’était bien dans le but d’avoir de nombreux enfants. L’idée d’engrosser Kiriko déclenchait des sentiments paradoxaux chez Açoka, mais… À première vue, elle pouvait dire qu’elle apprécierait beaucoup ça… Oui, vraiment beaucoup.

Tenant les rênes du chameau, Açoka suivait le groupe. Le ciel était très bleu, avec quelques pointes de nuages. La caravane longeait les dunes, le guide suivant d’obscurs points de repères, disposant d’une carte pour se repérer. La Fournaise était un désert excessivement dangereux, et, tandis qu’ils avançaient, une immense ombre vint les survoler. Kiriko avait vu le crâne d’une de ces créatures, et, là, elle put voir un immense Zu. C’était une sorte de rapace géant, un oiseau faisant bien une bonne dizaine de mètres. Il survola la caravane, filant ensuite au loin.

Açoka le laissa passer, et continua à suivre le groupe. Kiriko se confia alors davantage, et Açoka sourit brièvement.

« Et que suis-je supposée dire, moi ? Avant que tu n’arrives, j’aimais déjà notre Déesse, et je m’efforçais d’être à la hauteur. Comme j’étais une garde et une guerrière, j’étais sa parfaite garde du corps. Et je sentais qu’elle m’aimait aussi, qu’elle appréciait ma présence. J’avais renoncé à ma carrière pour elle… Avant que tu ne débarques. J’ai su qu’elle t’aimait avant qu’elle-même le sache, je l’ai vu dans son regard. Le regard qu’elle te faisait… J’étais la seule à l’avoir avant toi. Toi et ton petit cul, ta motivation, ton endurance, tes talents martiaux. Tu as été d’emblée destinée à être ma rivale. La Déesse m’avait chargé de t’entraîner, et je me montrais dure avec toi, dans l’espoir que tu renonces. Mais, plus j’étais dure avec toi, et plus tu te surpassais. »

La Mijakienne haussa les épaules en repensant à cela, à ces souvenirs lointains, avant de secouer la tête.

« Évidemment, maintenant que je sais tout ce qu’il y a sur toi… Je n’avais aucune chance de lutter. »

Elle resta encore silencieuse, et secoua de nouveau la tête, comme pour signaler à quel point elle avait été idiote.

« Qui sait ? Peut-être qu’on serait devenues les meilleures copines au monde si on avait pas été aussi connes… Mais, indépendamment du reste, sois sûre d’une chose, ma cocotte… »

Açoka restait fidèle à elle-même, et se lança dans une dernière bravade à son attention :

« Sans la magie, je te fous toujours la dérouillée de ta vie. »

Elles étaient donc en chemin pour trouver ce passage vers les mines pour rejoindre la ville, évidemment qu'elles ne trouveront pas cela au bout de deux cents mètres donc pour passer le temps, autant mettre un maximum de chose au clair. Même si Açoka ne semblait pas fermé à cet avenir où elle et Kiriko renforçaient leurs liens, il restait deux grandes questions. Quand, et qui portera l'enfant ? Quand, pas avant une année minimum, elle était destinée à avoir le bébé de Sha en elle, sentir Arya grandir en elle. Après, quand ce bébé arrivera ? Elle ne savait pas. Cela pourrait être après la naissance d'Arya, la suivante ou même dans dix ans, elle ne savait pas. Et qui ? Kiriko était prête à accepter ce rôle, non pas pour se faire bien voir par Sha ou se dire « tu vois, je suis prête à faire plus d'effort que toi » mais, elle sentait qu'elle avait la fibre maternelle, porter Arya en elle, et des tas et des tas de bébé après sa première-née. Elle verra cela à l'avenir, mais pour le moment, elle ne le partageait pas avec elle. Ça ne leur avancerait à rien, d'abord Arya, après, le futur en décidera autrement.

Retrouvant un certain calme, elle observa le paysage, cela n'était pas beaucoup différent autour d'elles, mais que faire de plus ici ? Rien n'allait changer en un claquement de doigts. Mis à part l'ombre d'un Zu qui lui rappelait plus ou moins ce qu'elle avait vu lors de sa traversée en solitaire, il faut croire que ce genre de bête, ça courrait la région. Cette bête allait leur tomer dessus où il ne faisait que passer son chemin ? Il faut se méfier. Brisant la glace, Kiriko se confia un peu plus, parlant de ce qu'elle avait ressenti en arrivant ici, vis-à-vis d'Açoka notamment. Kiriko se sentait un peu coupable à vrai dire. À l'entendre, elle lui avait volé sa place mais c'est vrai que derrière Kiriko, il y avait ce lien qui faisait qu'elle était destinée à partagée sa vie avec elle, à aimer Sha autant qu'elle l'aime. Bon, certes, Sha avait beaucoup d'amour à donnée à côté, mais Kiriko ne lui en voulait pas. Elle aimait sa déesse et elle portera ses enfants et elle sera sa femme. Elle allait vivre un amour, celui dont elle rêvait depuis qu'elle était toute petite. Sauf que ce sera un peu différent.

Mais malgré tout ça, la situation retrouva un semblant de normalité quand Açoka avoua qu'elle la maîtrisait facilement sans sa magie.

« Ha bon ? Je dois te rappeler que ce n'est que depuis le début du tournoi que j’apprends doucement à maîtrisé ma magie ? Avant ce tournoi, aucune once de magie n'a été utilisée pour enfoncer mon talon dans ton cul. »

Oui, Kiriko était une Celkhane qui n'a jamais brillé en magie, même depuis son arrivée, si elle arrivait à faire une flammèche dans sa paume, c'était déjà un gros effort ! Mais lors de son affrontement contre la Mijakienne, ce n'était que son talent d'épéiste qui avait parlé, rien d'autres. La sorcière retrouvait un peu son sourire habituel, toujours à progresser doucement dans ce désert, suivant leur guide aveuglement, car aucune d'elles ne savait se repérer ici. Elle se pressait un peu plus dans son dos, venant susurrer quelque chose à son oreille.

« N'oublie que dans notre combat sexuel, c'est moi qui te domine. »

Quelques points de plus, mais le score restaient serrer. Quoi qu'il en soit, elle se détachait en observant un peu plus le décor, toujours le même à quelques rares détails, reprenant quand même une question plus banale concernant ce petit voyage.

« Il y en a pour combien de temps de voyage encore ? »

Plus ou moins, quoi qu'il en soit, la Celkhane restait aux aguets, car qui sait quand ses ennemis vont frapper ? Ici ? Dans la mine ? Ou une prochaine fois ? Ce serait étonnant, mais pourquoi pas...

Un léger sourire traversa les lèvres d’Açoka face aux répliques de Kiriko.

« Tu crois ça ? Peut-être aussi que je t’ai volontairement laissé gagner… »

À chaque fois qu’elles s’affrontaient, c’était plutôt Açoka qui avait tendance à remporter la victoire. Elle était une épéiste redoutable, à n’en pas douter. Elle s’entraînait au combat depuis qu’elle était petite, elle avait fait ses classes militaires. Les Mijakiens ne s’entraînaient pas comme les Celkhans, et Açoka avait, dans le domaine militaire, un véritable talent, que ce soit sur le plan purement physique ou sur le plan tactique. Mais, lors des épreuves de sélection, les deux femmes s’étaient affrontées comme jamais auparavant. Et, si Sha n’avait nullement influencé la bataille, Açoka avait senti, en son for intérieur, que sa place ne serait pas d’être la championne du culte au sein des Épreuves, et que Kiriko avait toujours été le choix de la Déesse. Est-ce qu’elle avait instinctivement, inconsciemment, laissé Kiriko gagner ? Ou est-ce que celle-ci s’était tout simplement surpassée ? De telles questions n’auraient sans doute jamais de réponses.

En revanche, Açoka revint sur les performances sexuelles de Kiriko, avec un léger sourire :

« Et on reparlera de tes exploits au lit quand je te baiserai sérieusement, ma chérie. »

Les relations entre elles seraient, semble-t-il, toujours teintées de provocation. Mais, à ce stade, elles avaient, pour ainsi dire, fait chacune d’immenses progrès, parvenant à se rapprocher, et à se confier à un stade jamais atteint auparavant. Cependant, elles n’étaient pas sur le dos du chameau pour échanger des mondanités entre elles, mais pour retourner à Wallündrill. Et le groupe continuait à avancer, formant une lente procession.

« On approche de la première étape… »

Peu à peu, une structure monolithique apparaissait. Des ruines gigantesques se découpaient dans l’horizon, ressemblant à d’antiques remparts. Une sorte d’ancestrale superstructure, dont la construction dans un endroit aussi sauvage semblait tout simplement surnaturelle.

« Pour rejoindre les koshcheys, il faut passer par là. Cette ville immense a existé il y a des siècles, si ce n’est des millénaires. D’après ce que je sais, c’est l’ancienne Wallündrill, une cité légendaire. Le climat local devait être un peu moins rugueux à l’époque. »

Les questions pouvaient se multiplier autour de cet endroit gargantuesque. D’immenses murs se trouvaient là, mais il était permis de s’interroger sur l’histoire de ce fort. Qu’est-ce qui avait bien pu pousser les ancêtres à construire des murs aussi immenses ? La tanière des koshcheys était accessible par ici, et le groupe remonta le long des ruines. Le vent sifflait un peu plus lentement, et ils aperçurent ensuite la structure centrale des ruines, une sorte de tour massive profondément plantée dans la roche, accessible depuis un grand pont. Une série de marches conduisait ensuite à l’intérieur de la tour, et, de l’autre côté, on accédait au fond de cette grande ville. Contre la paroi, un temple ancestral, semblant encore relativement en bon état, se dressait là.

Beaucoup de questions émergeaient autour de cet endroit. Mais Açoka nota surtout le croassement des corbeaux et le vol des rapaces, de plus en plus nombreux. Elle fronça lentement les sourcils, serrant la bride de sa monture, sentant cette menace indicible remuer dans l’air.

« Ils sont là… Les hommes qui t’ont attaqué… Ils nous ont retrouvé. »

Et des silhouettes noires émergèrent alors sur les remparts entourant le groupe…

Quand bien même les deux s'entendaient mieux, leur relation n'allait pas être le total en opposé en un claquement de doigt. Cealestis ne s'est pas construit en un jour après tout. Donc même si le temps était moins nuageux entre elles, ça restait tout de même dangereux de s'y aventurer, mais bon, voyons le bon côté des choses, c'était quand même plus détendue que d'habitude. Bien entendus, Kiriko comme Açoka n'avouerait jamais avoir perdu face à l'autre, toujours en cas de défaite, c'était volontaire ou la faute à pas de chance. Açoka pouvait donc se défendre, Kiriko savait qu'elle avait gagné. Autant qu'elle savait que les victoires d'Açoka étaient dues, neuf fois sur dix, à un facteur extérieur qui faisait que la Celkhane n'était pas à fond. Elle pouvait bien lui laisser une petite chance, parfois de la vaincre afin de se surpasser en entraînement quand même, afin de justement, la vaincre à nouveau.

Arrivant dans ce qui semblait être les reste d'une ancienne cité, Kiriko observait simplement tout ce qui se trouvait face à elle, ça changeait des dunes à perte de vue, certaines parois rocheuses étaient apparemment habitée avant, vu les trous, les morceaux de tissu en lambeaux qui traînait devant pour masquer ce qui était derrière. Elle se demandait rapidement quelle d'histoire avait cette ville avant qu'elle ne soit abandonnée, mais cette envie la quittait aussitôt. Elle était là pour réussir cette épreuve, pas suivre un cours d'histoire. Ce qui s'apparentait à une tour intégré à la roche, semblait être leur destination, évidemment, accessible via un grand pont. Mmh, elle avait peur que ce dernier soit piégé d'une façon ou d'une autre, mais il va bien falloir passer par-là. Mais les oiseaux du coin semblaient agités, non pas par leur visite, mais autre chose de plus négatif qui commençaient à sortir de son trou. Plusieurs ombres étaient autour, prête à bondir sur elles. L'occasion pour Kiriko de se venger. Elle n'était pas déshydratée, ni fatiguée, on va voir si ce serait la même mélodie.

« Eh bien, ce sera leur erreur de la journée, même de leur vie. »

La sorcière descendait de sa monture, faisant sortir la lame de son fourreau en se tenant prête à agir, qu'importe d'où venait l'attaque en premier. Vu leur apparence, ils semblaient assez humains, mais elle savait qu'ils étaient aussi un tant soit peu, magique. L'adversaire parfait pour elle, alliant magie et physique. Un peu trop confiant de sa précédente victoire, l'un d'eux fonçait sur elle, dans un angle mort, mais la sorcière trancha ses avant-bras avant que la lame ne s'abaisse sur elle. Le hurlement de ce dernier averti les autres de la situation, leur adversaire n'était pas la même que lors de leur précédent affrontement. 

« Amenez-vous, saloperies, j'ai une vengeance personnelle à vous donner. »

Confiante, la Celkhane agissait sans fausse note, contrant les coups, surveillant ses arrières, l'aide d'Açoka était la bienvenue, mais ni l'une, ni l'autre ne semblait être en difficulté pour le moment. Ainsi, quelques-uns de ses adversaires avaient la chance de seulement être blessée plus ou moins gravement, quant aux autres, la mort frappait, souvent d'un seul coup. Mais voyant ses soldats tombés, ils comprenaient qu'ils devaient passer au stade suivant. Certains se changeaient en sable, se dispernant selon le sens du vent pour devenir insivible, comme s'ils avaient fui, mais ils rodaient, autour d'elles. Voir cela provoqua en elle une véritable colère, qu'elle ne saurait expliqué, mais elle ne tarderait pas à avertir tous ceux autour d'elle.

« MAUDITS !!!! SOYEZ TOUS MAUDIIITS !!!! JAMAIS VOUS NE COMPRENDREZ QUE VOUS NE POURREZ PAS BRISER NOTRE AMOUR!!! »

Le visage de Kiriko était en soit une véritable menace. La colère et la haine la rendaient terrifiante et pour de bonnes raisons. La sorcière Papuène semblait être active, Tharja, et la sorcière jalouse semblait avoir une dent contre ce genre de créature magique. Les Djiins ou du moins, les être magiques du coin semblaient avoir énervée la sorcière durant sa vie ? Peut-être, mais Kiriko ne se contrôlait pas et il serait idiot de l'approcher, surtout Açoka qui était pour ainsi dire sa rivale. Et Tharja avait été connue pour être la plus jalouse des femmes de Sha alors voir sa rivale un peu trop proche... Kiriko venait s'entailler la main volontaire, laissant une belle plaie sanglante dans sa paume, le sang venant rougeoyé sur le sable à ses pieds avant de doucement disparaître. Non, elle ne manipulait pas le sang, disons plutôt que c'était un moyen de contrer cette disparition de ses adversaires, venant faire naître quelques gémissements ici et là, puis de petites douleurs à des hurlement plus sauvage et primaire autour d'elles. Le sourire de Kiriko/Tharja était toujours là, toujours aussi sadique, mais elle était là, savourant la douleur chez eux.

« Venez... Plus vous serez cachée... plus j'entendrais vos douleurs me calmer... »

En gros, se cacher leur causerait bien des douleurs, et se montrer sous forme physique... peut-être que non, peut-être que oui. Le sang de Kiriko/Tharja avait fusionné avec le sable, venant abîmé le corps de ceux qui se cachait dedans. Un poumon se trouait, un os se fissurait, des nerfs étaient rongés, le sable pouvait faire de grandes choses. Alors du sable, sanglant, mélangée à une sorcière particulièrement sadique et rancunière... c'était un mauvais choix.

Les Moudjahidines de Wallündrill étaient des guerriers redoutables, manipulant la magie. Ils se téléportaient dans le désert, et on disait d’eux qu’ils étaient à la base des humains à qui on avait injecté des gènes de Djinn. Une manipulation hors normes, unique en son genre, mais qui rendait ces tueurs redoutables. Les Moudjahidines savaient que les sorcières passeraient par là, et attaquèrent donc. Tandis qu’Açoka se déplaçait, et se rapprochait des soldats de Pacha Kamaq et d’Aïcha, Kiriko sauta au sol, et partit sur le devant.

« KIRIKO ! hurla vainement Açoka. Reviens !
-  Je sens une terrible magie en elle… »

En la voyant, plusieurs Moudjahidines se dirigèrent vers elle. Des flèches jaillirent vers eux, et ils se transformèrent à nouveau en poussières de sables. Cependant, cette fois, Kiriko se trancha la paume, et jeta son sang sur le sable, provoquant un sortilège magique… Qui fit exploser les Moudjahidines ayant commis l’erreur de se transformer près d’elle. Des jets de sang jaillirent autour de Kiriko, qui parlait d’une voix sombre, grave, malicieuse. Elle rappelait à tous qu’elle n’était pas juste l’amante de Sha, et que, si elle se montrait douce et soumise envers elle, face aux autres, elle leur rappelait sa puissance, sa dangerosité… Et même sa cruauté. Elle tua plusieurs Moudjahidines, et les nargua ensuite, tandis que des bancs de sables s’envolaient autour d’elle.

Açoka savait que Kiriko était en train de maîtriser la métempsycose, la magie de l’âme, et qu’elle était en train de maîtriser « l’Éveil », un sort qui lui permettait de se rattacher à ses anciennes incarnations, récupérant leurs pouvoirs, mais aussi leur âme. Et c’était visiblement ce que Kiriko faisait en ce moment. Deux guerriers de sables atterrirent alors devant Kiriko.

« Nous sommes là pour toi, sorcière…
-  Le Maître veut ta mort ! »

Ils n’étaient pas uniquement capables de se transformer en poussières, et lancèrent alors des jets de flammes avec leurs mains. Les hommes d’Aïcha se battaient également contre d’autres, et Açoka se jeta à terre, croisant le fer avec un Moudjahidine. Il était rapide, svelte, et elle croisa donc le fer, tournoyant également sur place, et évita son attaque, avant de planter sa lame dans son torse, la faisant ressortir de l’autre côté. Un sang noirâtre s’échappa des lèvres du Moudjahidine, mais d’autres tueurs les attaquaient encore. Aïcha se concentra à son tour, et généra une sphère magique entre ses doigts, avant que celle-ci ne se divise. Deux boules magiques se formèrent dans ses paumes, et elle projeta les attaques élémentaires, provoquant plusieurs explosions de Feu et de Terre.

La bataille faisait rage, mais, en étant privés de leur capacité à se téléporter dans le sable, les Moudjahidines étaient bien moins dangereux. Pour autant, les hommes d’Aïcha restaient très prudents. Ils affrontaient des tueurs d’élite, et Kiriko représentait une menace terrifiante, puisant encore dans la colère de Tharja, dans ses pouvoirs. Car, pour créer les Moudjahidines, les alchimistes de Wallündrill avaient utilisé des fragments d’essence de Djinns Noirs, les ennemis héréditaires de Papua. Ils avaient commis un terrible sacrilège, et, devant ce blasphème, la colère de Tharja explosait pleinement, jusqu’à recouvrir Kiriko d’une aura enflammée ! Une véritable ange de colère et de vengeance était en train de s’abattre sur les tueurs de Wallündrill !

Et, plus que jamais, Kiriko prouvait à quiconque oserait encore en douter qu’elle était bien la Championne de Sha…

Leur erreur avait été d'affronter Kiriko. Elle pouvait affronter n'importe quel type d'ennemi, mais montrer là une capacité de Djiin noir, c'était une autre erreur. En effet, cela réveilla la colère de Tharja qui semblait avoir une dent contre eux, assez pour avoir une magie capable de les vaincre aisément. Certes, elle devait user de son sang pour ça, mais ce n'était qu'un maigre sacrifice vu comment ses adversaires terminaient en flaque de sang. De leur côté, les autres semblaient bien s'en tenir, espérons le du moins, car dans sa rage, Kiriko/Tharja ne voyait que ses ennemis, ceux qui ne sont pas encore réduits en morceaux. Comprenant que se cacher ne causera que leur mort, ses adversaires décidaient de lui faire face, avec un message bien spécial.

« Et moi, la mort de votre Maître !!! »

Même si ses derniers venaient rapidement attaquer magiquement, la sorcière profita de Tharja pour créer un bouclier, bloquant les attaques adverse avant que Kiriko ne reprenne le dessus et jaillisse du bouclier, arme à la main pour les trancher. Le premier n'y échappait pas. La blessure étant grave, elle profita d'avoir toute sa tête pour saisir son corps, le lançant avec force vers Açoka, du moins, son adversaire. Qu'il lui tombe dessus ou que le corps de son camarade le distrait un instant, ça pourrait toujours aider Açoka. Si le second était plus chanceux d'avoir esquivé l'assaut de la sorcière, elle avait un autre sort prévue pour lui. Elle souhaitait le tuer, mais elle souhaitait surtout obtenir des informations, son maître lui en voulait... Mais qui était-il ? Elle devait avoir un nom, peut-être même un visage ? Il était malin en s'éloignant d'elle, mais la sorcière était un véritable fauve, cherchant à rejoindre sa proie, elle avança vers lui, sans le lâcher d'une semelle.

« Cours... tu ne fait que ralentir l'inévitable ! »

La sorcière était en équilibre avec Tharja, sa haine envers cet être, son envie de le torturer et de lui arracher des informations. Ce fut un véritable jeu du chat et de la souris, voyant parfois d'autres adversaires sur sa route. Les plus chanceux étaient éjectés de son trajet, les moins, souffraient plus ou moins de son envie de les virer de sa route. Avant que ce dernier ne cherche à nouveau à se changer en sable, la lame de son katana venait s'enfoncer dans son corps, sans le tuer. Ça avait couper sa fuite, la lame était dans son corps, pas encore sortie, mais bien là.

« Bouge pas si tu ne veux pas souffrir plus !!! Parle et ta mort pourra être rapide... Cache moi des choses... je me ferais une joie de faire résonné ta voix en ces lieux ! Qui est ton maître !!! »

Avant même qu'il se décide à parler ou non, la lame planter dans son dos se dirigeait vers sa colonne vertébrale, coupant sa peau comme une paire de ciseaux couperait une feuille en papier. Tharja laissait parler sa cruauté, Kiriko l'empêchait d'en finir trop vite. Elle devait obtenir des réponses. Le sang de sa paume coula le long de sa lame, se mêlant dans le corps de son adversaire, commençant là, un petit rituel de malédiction, digne de ce que Sha avait pu lui apprendre de son vivant... La douleur allait s'inviter en lui, de bien des façons.

« PARLE !!!! »

L'aura de Tharja était toujours aussi noire et effroyable, il faudrait être fou ou suicidaire pour se rapprocher d'elle...

Kiriko était méconnaissable. Toute bonté avait disparu en elle, au profit d’une rage sourde, l’amenant à affronter seule les redoutables Moudjahidines. Ils ne pouvaient rien faire contre elle, et Açoka la vit marcher vers leur chef, véritable Ange de chaos et de dévastation, une aura sombre l’entourant. Sans difficulté, elle repoussait les autres Moudjahidines, et planta le bout de son katana dans le torse du chef, le plantant contre un pilier au sommet des marches. Ce dernier cracha du sang en faisant tomber son cimeterre, ses yeux rougeâtres fixant la sorcière. Comme possédée, Kiriko était furieuse, et une puissante aura magique l’entourait.

« Mon… Mon Maître, haaa… »

Le guerrier infernal grogna encore quand la lame tournoya doucement. Du sang s’échappait de ses lèvres, et il se mit à ricaner.

« Vous allez mourir ici, oui, vous tous, vous allez mourir !
-  KIRIKO ! »

Le Moudjahidine ricana encore, tenant dans son autre main une fiole rouge, et la brisa. Le sang rouge glissa sur son corps, remuant le long de sa peau, et le Moudjahidine hurla encore. Ses yeux devinrent vitreux, ses veines jaillirent sur son visage, des veines rougeâtres qui gonflaient exagérément, tandis que des convulsions le traversaient. Açoka, elle, se dépêchait de rejoindre la femme, grimpant les escaliers à toute allure, quand une onde de choc explosa, repoussant Kiriko en la faisant rouler au sol. Une langue de feu jaillit vers elle, et Açoka bondit brusquement devant elle, parant les flammes en brandissant une rune de protection. Le feu les enveloppa toutes les deux, et elle se retourna vers Kiriko, tenant toujours la rune dans la main.

« Absoluteum ! » hurla-t-elle.

La rune s’illumina alors, et frappa Kiriko. Une onde magique en jaillit, et, dans son corps, Kiriko sentit Tharja hurler, avant de refluer, permettant à Kiriko de reprendre le contrôle. Difficile, toutefois, d’obtenir des explications de la part de Kiriko, car le Moudjahidine venait de se transformer. Il avait utilisé une fiole corruptive de sang démoniaque, et poussa un ricanement maléfique en se dressant devant les deux femmes.

Méconnaissable, l’homme était devenu l’un des démons de Tzeentch, un Flamer qui voletait en l’air. Une créature hideuse et indescriptible, disposant de plusieurs visages en forme de gueules édentées. Son corps noueux et tentaculaire prenait la forme d’une robe de sorcier, tandis que ce qui faisait office de bras n’était qu’un amas veineux de tentacules se terminant par d’autres gueules crachant des flammes.

« Tu vas te faire tuer, Kiriko, si tu fonces comme ça dans la mêlée ! »

Le Flamer cracha depuis son corps un amas de tentacules violets. Açoka les esquiva en bondissant sur le côté, et frappa avec sa lame, arrachant plusieurs morceaux de tentacules. En retour, des flammes jaillirent, fonçant vers elle. Sa rune s’était malheureusement déchargée, et elle les esquiva en s’abritant derrière l’une des colonnes à proximité. De l’autre côté, il y avait une immense cour, probablement le hall d’entrée de l’antique château qui se trouvait là.

Ceci étant dit, Kiriko restait la cible principale du Flamer, qui se retourna vers elle. Malheureusement, quand le guerrier s’était transformé en démon, il avait repoussé Kiriko, et celle-ci n’avait plus son katana, qui était à côté du monstre, celui-ci déployant tout autour de lui des tentacules.

« Tu vas mourir, Kiriko ! Le Grand Instigateur se languit de récupérer sa fille, et tu le seul obstacle à cela ! »

Le démon l’attaqua encore, fonçant vers elle…