The Multiversity

Le spectacle était à la fois puant et sinistre. Depuis le cadavre décapité de l’Arachniste, une réaction chimique et magique incroyable se produisait. Dans l’estomac de l’homme, une araignée était en train d’éclore, et, comme un Xénomorphe, commença à planter ses griffes et ses dents dans la chair du cadavre, déchiquetant la peau de l’intérieur, s’en servant aussi pour grossir. Si Aoife regardait le spectacle, elle verrait ainsi une déchirure se former à hauteur du nombril, remontant jusqu’à la poitrine, créant une ligne sombre et écarlate, d’où des pattes émergèrent rapidement, remuant furieusement, se tortillant dans les airs, recouvertes de sang, de morceaux d’organes, de bouts de veines, et même de sucs intestinaux. La créature piaillait furieusement, mais Aoife n’eut guère l’occasion d’admirer ce macabre spectacle longtemps, car elle avait fort à faire avec le second Arachniste.

La créature bondit vers Aoife, et l’une de ses pattes la fouetta au visage, l’envoyant heurter le mur. Aoife réagit ensuite, envoyant son coude en arrière, et frappa le monstre à la tempe, faisant reculer l’Arachniste. Son épée siffla ensuite, et trancha l’extrémité de sa patte, répandant un sang verdâtre sur le sol. Maintenant qu’elle pouvait voir l’Arachniste de près, elle réalisait combien, sous sa capuche, l’homme était laid.

*Je crois n’avoir jamais vu vision si repoussante, en réalité...*

Son visage n’était plus qu’un amas de yeux noirs globuleux se dressant au-dessus d’une bouche semblant minuscule, et d’un nez qui disparaissait au milieu de ces yeux noirs. Une araignée avait classiquement quatre paires d’yeux, exactement comme l’Arachniste. Les études uatéennes sur la vision des araignées avait permis de démontrer que ces paires d’yeux remplissaient des fonctions différentes. La paire centrale disposait d’une vision très précise, permettant même à certaines araignées de distinguer les ultraviolets, ou, pour les Arachnistes, sans aucun doute de voir dans la nuit, en discernant les mouvements.

L’Arachniste, malgré sa patte coupée, cracha furieusement, envoyant son venin vers la Luméenne, qui bondit sur le côté, évitant la charge... Et aperçut alors une araignée sortir du cadavre, près de Shad.

« Merde... SHAD, at... ! »

Trop tard ! L’araignée, faisant la taille d’un petit enfant, cracha de multiples filaments de toile, à hauteur des jambes de Shad, la renversant sur le sol, et en cracha immédiatement d’autres, venant former autour de son corps un épais sac de toiles.

*Shad, merde !*

Hélas, Aoife était bien en peine de venir l’aider. L’Arachniste l’attaqua encore, et elle envoya son pied dans son ventre, le poussant dans l’eau, où il s’étala dans un grand *SPLATCH* ! Elle reporta ensuite son attention sur l’araignée, et vit que cette dernière filait le long du couloir, traînant Shad derrière elle, après avoir répandu un venin anesthésiant en la mordant. Aoife tenta alors de les rattraper, mais, depuis l’eau, un filament de toile la saisit à la cheville, et l’envoya s’étaler sur le sol, puis elle tomba dans l’eau, et sentit les mains griffues de l’Arachniste s’agripper à sa nuque, serrant fortement son cou, sa gueule sinistre approchant ensuite d’elle pour la mordre.

Concentrant alors sa magie, Aoife le repoussa à l’aide d’une décharge d’Air, puis se releva, en réalisant que, pour poursuivre Shad, elle allait d’abord devoir se débarrasser de ce monstre...
Quand le cocon se brisa, Shad se retrouva la tête suspendue en bas, les toiles arrivant à hauteur de son ventre. Elle était dans une grande pièce sombre, et, peu à peu, le temps qu’elle reprenne ses esprits, elle put constater qu’il s’agissait... D’une grande salle à manger. Elle, ,et les autres cocons, étaient suspendus au-dessus d’une grande table de réception, le tout plongé dans la pénombre, les volets recouvrant les épaisses fenêtres. Au bout de quelques instants, une porte s’ouvrit sur la gauche, libérant un rai de lumière, une silhouette féminine faisant claquer ses talons sur le sol, en répandant un puissant parfum sensuel et sauvage.

« Je suppose que tu dois te poser un certain nombre de questions... Où suis-je ? Qui te parle ? Pourquoi ne suis-je pas morte ? Qu’est-ce qu’on me veut ? »

La femme avait une épaisse chevelure blonde, et, soudain, le cocon de Shad s’abaissa, l’amenant peu à peu à hauteur de la mystérieuse femme, qui tendit sa main, partiellement gantée de vert, et avec de longs ongles griffus, qui caressa son visage, glissant sur les lèvres et les yeux de Shad.

« Je m’appelle Charlotte Witter, et, pour le dire simplement, je suis actuellement la Maîtresse des Arachnistes, dont tu vois, autour de toi, les futurs novices prêts à rejoindre ma secte... Et à me servir aussi de garde-manger. Maintenant, sois une gentille petite Okami, comme toutes les autres, et dis-moi... Où. Est. Élise ?! »

Le venin avait cessé de faire effet et la Lycane put retrouver ses esprits pour noter qu’elle était entoile dans un cocon de soie. Les fils de soie l’enserrant l’empêchaient de respirer à pleins poumon, paralysant le moindre de ses mouvements. Un essai de magie. Rien, pas la moindre petite étincelle pour se libérer de cette entrave plus que collante. Mieux valait ne pas être claustrophobes dans un tel moment. Dressant les oreilles du mieux qu’elle pouvait, la Louve tenta d’écouter les sons alentours. Elle nota la présence de multitudes de bruits de pattes, des murmures incompréhensibles et des gémissements sourds de personnes agonisantes. Rien qui n’envisageait une suite heureuse. Elle perçut par la suite des bruits de pattes qui se rapprochait, toujours plus prêt, s’attendant à sentir une paire de mandibules perçait le cocon et sa peau pour lui injecter un venin couplé à une enzyme qui aurait tôt fait de la digérer vivante afin de servir de repas à l’un de ces monstres. Oui,  Shad s’attendait à cet instant à mourir, ne voyant pas ce qui pourrait se passer d’autres. Quelle ne fut pas stupeur quand une partie du cocon fut brisé, lui permettant ainsi de mieux respirer et d’observer les lieux, une fois qu’elle avait entièrement retrouvé ses esprits.

Au plafond, des toiles d’araignées, des fils gluants partant dans tous les sens et disposés sur toute la surface des cocons. Certains remuaient tandis que d’autres étaient inertes. Ici un cocon qui était délaissé, là un autre qui servait actuellement de repas à une araignée de la taille d’un chien.  Voilà d’où avait dû provenir les gémissements plaintifs qu’elle avait pu entendre plus tôt. Le spectacle était…des plus macabres. En humant l’air, l’Okami put constater que la salle était en réalité remplit de cadavre encore sous vide. Une odeur pestilentielle se dégageait de certains cocons. Vers le bas se trouvait une table à manger, bien poussiéreuse où était posés quelques candélabres. Des petites araignées filaient sur la table avant de remonter le long des fils de soie. Les épais volets fermés au niveau des fenêtres, bien qu’imposante, empêchaient la lumière de pénétrer dans la pièce la laissant dans une  obscurité totale. Sans sa vision qui pouvait voir un peu dans la nuit, la  Okami n’aurait pu deviner le lieu dans lequel elle se trouvait actuellement.

La porte  s’ouvrit, grinçante, laissant entrer une silhouette à l’apparence féminine.  Un rai de lumière emplit la pièce et permis surtout à la Lycane de voir son interlocutrice. Elle nota rapidement la présence de ces deux autres paires de…pattes d’araignées tout comme celles que possédait Elise. La femme se mis à parler résumant parfaitement bien les questions  qui tourbillonnaient dans l’esprit de sa prisonnière. Soudain, sans crier gare, le cocon qui la retenait s’abaissa violemment pour l’amener à hauteur de l’inconnue, qui ne tarda justement pas à se présenter.  En entendant ses paroles, la Lycane écarquilla les yeux de surprise. Elle ? La maîtresse des Arachnistes ? C’était bien étonnant, elle qui s’attendait à ce que ce soit…l’autre Elise ?

« Maintenant, sois une gentille petite Okami, comme toutes les autres, et dis-moi... Où. Est. Élise ?! »

Elise ?  De quelle Elise parlait-elle ? Il y’en avait deux désormais. Il aurait été plus sage d’être un peu plus précis….Dardant son regard azuré dans celui masqué de cette étrange femme, la Okami répondit de but en blanc :

« L’une devrait arriver…peut être dans quelques jours avec son armée mais cela….tu devrais déjà le savoir quant à l’autre. Je. N’en. Sais. Rien. »

Elle accentua bien sur chacune de ses dernières paroles, après tout c’était la pure vérité, elle était également à la recherche d’Elise.

« J’ai comme l’impression que tu ne  la cherche pas pour signer un quelconque traité de paix je me trompe ? Toi qui es la maîtresse des Arachnistes, je présume que devenir leur reine serait bien plus…attrayant ? »

En réalité, la Okami savait très bien que pour l’heure, elle n’était nullement en position de force et que sa vie reposait entre les mains de Charlotte Witter. Et qu’ainsi oser poser une telle question pouvait lui être fatale mais hé, qu’est ce qu’on ne fera pas pour glaner un peu de temps et si possible des informations.  Elle songea aussi à Aoife, espérant que tout allait bien de son côté et qu’elle n’avait pas périt entre les griffes de son hideux adversaire.

Charlotte n’allait pas prendre de risques inutiles avec cette Okami. Les apparences étaient parfois trompeuses, et elle savait de quoi la jeunette était capable. Elle avait beau avoir des oreilles poilues, elle avait défié Brahmin, Oswald Mandus, et même Hastur, un Grand Ancien. Certes, on pouvait arguer qu’elle avait eu, à chaque fois, une chance insolente, mais il aurait fallu être la plus grande des aveugles pour n’y voir que de la chance. La petite-fille de Madame Web avait jadis été une simple femme, une fasion designer qui s’était rapprochée du Docteur Octopus, et lui avait donné des pouvoirs arachnéens, l’utilisant comme cobaye. Elle avait désormais des pouvoirs impressionnants, et poussa un grognement quand Shad lui répondit qu’elle n’en savait rien.

« Tu voudrais me faire croire ça, alors que tu portes son emblème ?! »

Shad put alors réaliser, si elle ne l’avait pas déjà ait auparavant, que le talisman d’Élise n’était plus autour de son cou. Charlotte le brandit sous son nez.

« Tu es revenue ici parce qu’elle t’a appelé, je le sais ! Elle t’a envoyé retrouver cette petite pute de Médonée, hein ? C’est pour ça que tu me colles aux fesses... »

Charlotte avait, visiblement, sa source d’informations, mais cette dernière n’était pas totalement fiable. Néanmoins, involontairement, elle venait de confirmer les doutes de Shad. C’était bien les Arachnistes qui avaient Médonée. Restait maintenant à savoir qu’elle était entre les liens entre cette secte et l’Élise magnifique qui était apparue, la « White Élise ». Charlotte grogna encore, et se redressa, puis le cocon retenant Shad se relâcha, et elle tomba au sol. Les filaments se retirèrent, et elle put enfin reprendre le contrôle de son corps... Plus ou moins. Ses membres étaient en effet engourdis, ankylosés, et il fallait attendre que le sang circule à nouveau.

La redoutable Witter croisa les bras devant sa proie.

« Ne crois pas que j’agis par pitié. Je t’ai inoculé un venin spécial, qui annule tes pouvoirs magiques. Si tu tentes de te rebeller, je te mettrais au pas. Mais attends... Le temps que tes muscles se réveillent, je vais aller me nourrir. J’ai faim. »

Charlotte s’écarta alors, et grimpa sur l’un des cocons, se tournant vers un homme endormi. Elle planta ses crocs dans son cou, et commença à sucer, drainant son énergie. Déjà blafard, le teint de l’homme vira au grisâtre. Il émit un inaudible gémissement, ses yeux venant brièvement s’écarquiller, puis sombra ensuite dans l’inconscience, après une bonne minute de succion. La redoutable Charlotte tourna ensuite vers Shad un regard malveillant, nettoyant de sa main le sang imbibant ses pulpeuses lèvres vertes, puis sauta au sol.

Shad devait maintenant pouvoir se redresser, mais, dans le doute, Charlotte l’agrippa par la nuque, et la balança sans ménagement en avant, l’envoyant rouler dans le grand salon d’où elle venait. Impossible, pour Shad, d’appeler Alastar à la rescousse, puisque le venin circulant dans ses veines l’empêchait de recourir à la magie.

« Les Arachnistes et White Élise ne sont que les deux facettes d’une même pièce. Quand j’ai perdu mes pouvoirs, j’ai prêté allégeance à des gens qui pouvaient restituer par magie ce que la science m’avait offerte. Et tu ennuies beaucoup ces gens, Shad. Quand ils ont appris que tu retournais voir Élise, et que tu risquais de contrecarrer leurs plans, ils m’ont chargé de te surveiller. Dès que tu es entrée dans Koldoue, j’ai décidé de m’occuper de toi. »

Shad était dans le hall d’entrée d’un sinistre manoir abandonné. Il était très poussiéreux , et toutes les portes et fenêtres étaient closes. Toutefois, il n’y avait pas qu’elle et Charlotte, car des Arachnistes étaient également là, leurs corps hideux dissimulés derrière leurs bures et leurs capuches.

« Ta copine Médonée se trouve à l’étage. Elle a refusé de cracher le morceau, mais, si elle me voit te torturer, peut-être que ça déliera enfin sa langue... »

Un sourire cruel émergea sur les lèvres de Charlotte, et un sifflement se fit entendre au-dessus de Shad, qui fut soudain hissée au plafond par un filament de toile qui se planta sur les épaules, et l’amena ainsi très rapidement à l’étage, le long d’une grande et élégante mezzanine. Charlotte grimpa à son tour, retrouvant Shad près d’une ancestrale table posée là, à l’entrée d’un couloir. Là, deux Arachnistes firent irruption, tenant chacun les bras d’une femme à la peau blanche, très affaiblie, recouverte d’un châle blanc froissé, et qui fut balancée au sol sans ménagement.

Médonée.

Et elle avait visiblement bien changé, physiquement parlant, depuis la dernière fois que Shad l’avait vu...

« Attends. Quoi ?! »

L’Okami cligna des yeux, quelque peu surprise, observant le médaillon qui se balançait devant elle.  Cette femme venait elle de l’accuser qu’elle mentait et que c’était Elise qui l’avait envoyé retrouvé Médonée ? Niveau information, Charlotte avait des progrès à faire. Dans tous les cas, la Lycane eut à présent deux confirmations. Cette femme araignée détenait entre ses griffes Médonée et était effectivement à la recherche de l’Elise qui dirigeait la Forêt des Toiles. Quant à en savoir la véritable raison, la Louve ne se faisait pas d’illusion. Puis, les fils de soie qui l’enserraient la libérèrent, la faisant choir sur le sol. Les muscles endolories, la Okami ne put se rattraper et chuta face en avant sur le sol, émettant un grognement sous l’impact. Elle releva la tête, du sang coulant un peu de ses narines, regardant Charlotte.

« Merde. »

Pas de magie, un corps faible et face à un ennemi  qui avait toute ses capacités…La Okami avait l’amer impression de n’être qu’un louveteau sans défense. Elle suivit Charlotte du regard pendant qu’elle tentait tant bien que mal de se relever. Ses muscles étaient lourds, pesant et à chaque mouvement, la Lycane avait l’impression d’avoir d’énormes poids sur elle. La vision que lui offrait sa geôlière n’était également pas des plus plaisantes car la Okami assista en direct à un funeste repas. D’un côté…Elle n’allait pas la blâmer sur le fait de manger, mais c’était sa façon de faire….manger ses proies vivantes était un acte odieux. Son regard azuré croisa celui de Charlotte qu’elle interpréta aisément comme une sourde menace. Même si elle était en partie libre de ses mouvements, l’Okami était belle et bien prise dans sa toile et était sur le coup vulnérable.

Charlotte Witter redescendit rapidement après son repas, ne manquant pas d’attraper la Okami par la nuque et de la renvoyer violemment au sol. Ses membres ne réagissant pas comme elle le voudraient, elle ne put amortir sa chute et sa respiration fut coupée lorsque que son corps percuta de nouveau le sol. Toussant, elle cracha du sang avant d’être soulevée apr des filaments de soie.  Et de nouveau, elle eut quelques informations. La première était que la white Elise et que les Arachnistes étaient intimement liées, mais cela, la Louve s’en doutait en réalité. La seconde était que cette Charlotte n’était plus aussi puissante qu’auparavant si elle avait perdu ses pouvoirs et que ces..gens devaient avoir une certaine main mise sur elle. Et pour finir, elle lui confirma la présence de Médonée dans ces lieux non sans lui promettre une gentille petite séance de torture.

Médonée…Voilà que la Okami avait enfin réussi à trouver où elle éait mais…à quoi bon à présent ? Sans pouvoir, sans armes, avec une mobilité réduite que pouvait-elle donc bien faire ? Des fils de soies la hissèrent vers l’étage et la fit suspendre au plafond, bientôt rejoint par Charlotte Witter Quelques secondes plus tard, deux ignobles Arachistes qui lancèrent un corps sur le sol. Les premières secondes, la Okami ne reconnut par Médonnée. Elle avait…grandement changé. Mais son odeur restait la même et c’est cela qui lui permit de confirmer son identité. La suivante d’Elise était en piteux état et avait déjà dû subir pas mal de séances de tortures  dans l’objectif de lui faire cracher le morceau. Et au vue du caractère de Charlotte, la Lycane se doutait bien que ces séances n’avaient  rien de plaisant. Elle se doutait parfaitement bien qu’elle allait passer un mauvais quart d’heures. Par «  chance » ce n’était pas la première fois qu’elle allait se faire torturer et avait donc acquis une certaine résistance à cela….Restait juste à voir combien de temps cette endurance allait durer.

Dardant son regard dans celui  maléfique de Charlotte, la Lycane ne put qu’attendre la suite des évènements. Oui elle ne risquait pas de rester de marbres et allait même peut être crier mais pouvait-elle seulement donner une information qu’elle ne possédait pas ? Son regard se posa par la suite sur Médonnée. Si elle savait où était Elise et qu’elle avait réussi à garder le secret jusqu’ ici, elle ne devait pas craquer à présent. Son secret devait rester scellé, malgré ce qu’elle allait voir. Le seul positif à tout ce qui arrivait ? Rien ne semblait montrer qu’Aoife avait été vaincu mais rien aussi ne confirmait qu’elle était encore en vie.

Et entre les griffes de Charlotte, les yeux de l’araignée ornant le médaillon d’Elise se mirent à luire légèrement, presque imperceptiblement d’une couleur cramoisie.

« S-Shad ?
-  Shad, oui, Shad ! Ne feins pas de croire que tu ignoires sa présence, je sais que tu l’as appelé, sûrement greâce à ce médaillon ! »

Sonnée, fatiguée, Médonée avait des traces de blessures sur le visage, et releva la tête. La délicate prêtresse qu’elle était jadis, et qui marchait pieds nus dans la Forêt des Toiles, en sentant les araignées glisser sur son corps, avait subi une étonnante mutation. Elle semblait particulièrement plus puissante, avec des yeux luminescents, et quatre paires de pattes arachnéennes élégantes, mais dont plusieurs avaient été tordues.

Médonée clignait des yeux, hébétée, et Charlotte la fouetta au visage avec l’une de ses pattes, lui faisant cracher du sang, l’étalant sur le sol.

« Maintenant, ça suffit ! Où est Élise ?!
-  Je... Je ne la trahirai jamais ! »

Charlotte grogna, furieuse, puis se retourna vers Shad, et, soudain, les toiles qui la restreignaient se crispèrent encore plus fortement sur elle, la faisant hurler de douleur. Chaque toile devenait aussi coupante qu’une lame de rasoir, entaillant presque l’intégralité de la chair de Shad, et, plus cette dernière se tortillait sous l’effet de la douleur, qui entraînait d’irrémédiables crispations musculaires, et plus la douleur semblait grande.

En voyant ça, Médonée se redressa brusquement, ses pattes se crispant, mais un Arachniste la saisit au visage.

« A-Arrête ça !!
-  HAHA ! La grande et pure Médonée... Tu es entrée dans une chrysalide pour devenir celle que tu es maintenant afin de transformer ta pureté en un art martial, mais tout ça n’a rien changé... Au fond de toi, tu restes toujours cette jeune femme qui se bat pour son prochain, sans considération pour les dangers et les risques qu’elle-même prend, mais incapable de supporter le fait de faire souffrir d’autres personnes !
-  Arrête, Shad n’a rien à voir avec ça !
-  Alors qu’elle porte votre blason ?! Ne te fous pas de moi ! Et puis, quand bien même... Ce n’est pas moi qui suis responsable de sa souffrance, c’est TOI ! Alors, pour la dernière fois... OÙ. EST. ÉLISE ?! »

Et la douleur reprit, et Médonée serra les dents, furieuse, furieuse contre Charlotte, mais aussi furieuse contre son impuissance. Shad... Elle ne l’avait évidemment pas oublié. L’Okami avait sauvé la Forêt de Brahmin, et était une proche amie. Mais Élised était sa Reine, sa Déesse. Médonée se mit à pleurer, incapable de soutenir les hurlements de douleur de Shad. Même le talisman, qui brillait, ne servait à rien. Charlotte ricanait, souriant.

« Tu crois que je vais arrêter de la torturer parce qu’elle t’est précieuse, hum ? Tu te trompes... N’oublie pas tous les villageois que j’ai tué, et auxquels tu tenais énormément...
-  Je... Sale monstre, arrête ça !! »

Charlotte éclata encore de rire, et Médonée pleura encore, crispant ses mains sur le sol. Elle secoua finalement la tête, et la releva.

« OKAY ! Je t’y conduirai, mais... Pitié, arrête, arrête ça ! »

Un sourire ravi éclaira les lèvres de Charlotte... Qui maintint encore le cocon en place pendant quelques secondes, avant de le relâcher. Médonée se précipita alors vers elle, et l’agrippa entre ses bras, déposant un baiser sur son front.

« Oh, oh ma petite Shad, je... Je suis désolée, ma chérie, je... J’aurais espéré te revoir en de meilleures conditions... »

Lorsque le cocon se resserra autours de son corps, la Lycane tient bon, serrant les crocs, ne voulant offrir à Charlotte le plaisir de l’entendre crier. Les fils de soies se resserraient toujours de plus en plus, rendant tout mouvement difficile à réaliser. Une simple étreinte aurait pu être une mauvaise expérience à passer mais c’était sans compter que la constriction n’était que le début. Les fils de soies au début souple mais rigide se virent  munir de multitudes de lames qui entaillèrent la peau de la Okami. Sous l’effet des premières coupures, la Lycane écarquilla les yeux, sentant ses multiples lames lui entaillaient la peau. Tentant de faire fit de la douleur elle hurla à l’attention de Médonnée :

« Ne dis rien ! Elle ne doit pas savoir ! »

Mauvaise idée. Car  la Okami eut la sensation que les fils de soies entamèrent un mouvement de gauche à droite ce qui eut pour effet d’accroître l’ampleur des taillades.  Du sang se mirent à tâcher et à chaque mouvement convulsif de la Lycane, un mouvement instinctif pour se libérer de cet étau de malheur, la soie dentelée ne manquait pas de lui offrir une nouvelle tournée de douleur. Et bien qu’ayant tenté de résister le plus longtemps, l’endurance de l’Okami atteignit ses limites et des cris de douleurs emplirent la salle. Des cris qu’elle ne pouvait retenir et que son corps lançait pour résister au mieux à cette taillade.  Le sang qui tâchait le cocon se mit également à tomber vers le sol, proche de Médonnée.

Etait-ce ce dernier point qui l’avait forcé à capituler ? Dans tous  les cas, Charlotte Witter avait obtenu ce qu’elle voulait et après quelques secondes, le cocon qui emprisonnait la Lycane s’ouvrit la laissant choir sur le sol. Son corps enfin à l’air libre, on pouvait noter de nombreuses entailles situées sur toute la surface de son corps, seul le visage qui avait été à l’air libre était épargné. Par ailleurs, même si le sang était présent en bonne quantité, la vie de l’Okami n’était pas menacée. Levant les yeux vers Médonnée, elle détourna son regard, honteuse. A cause de sa faiblesse, son amie avait dû capituler et offrir à Charlotte Witter ce qu’elle désirait.

Et pour cela, la Okami s’en voulait énormément. Tournant de nouveau son regard vers Médonnée, elle plongea ses iris azuré dans ceux d’un éclat magique de son amie.  Ses oreilles lupines dirigeaient vers l’arrière, elle prit une inspiration et posa l’une de ses mains sur son épaule afin de l’utiliser comme d’un appui et se relever. Mais son corps était actuellement bien faible et tenir debout était source de tremblement et d’effort. Et ce n’était sans compter la poigne d’un Arachniste qui n’hésita pas à la  saisir par la nuque et l’envoyer fortement vers le sol.

Les griffes de la Okamis  créèrent un sillon sur le sol. Quelle plaie d’être autant à la merci d’un adversaire !  Elle n’avait pour l’heure ni pouvoir, ni arme et son corps refusait de lui obéir correctement. Dans une telle situation, la Louve aurait préféré mourir que d’être ainsi autant humiliée. Et à présent, cette Charlotte Witter allait atteindre son objectif : Etre conduite auprès d’Elise et tout cela par sa faute. La Lycane ferma les yeux, restant cependant toujours consciente, mais étant trop affaiblie pour maintenir ses yeux éveillés. Quelle plaie….

Charlotte ne pouvait pas quitter son repaire si facilement, car elle et ses Arachnistes n’étaient pas vraiment discrètes. Shad et Médonée furent enfermées toutes les deux dans une chambre à l’étage. Impossible de s’échapper par les volets, qui étaient bien verrouillés, et deux Arachnistes montaient la garde. De plus, Shad était grièvement blessée, parcourue de contusions et d’ecchymoses. Dès que les deux femmes furent seules, Médonée entreprit de poser ses mains sur les épaules de Shad, et commença à user de sa magie blanche pour la soigner.

« Reste avec moi, Shad, je t’en prie... »

Médonée usait de ses sortilèges, non pas pour altérer le venin en elle (ce qu’elle ne pouvait d’ailleurs pas faire), mais pour aider ses plaies à cicatriser. Le corps de Shad se mit à faiblement remuer. Elle gisait dans un état proche de l’inconscience, mais revient peu à peu à elle... Et se mit à toussoter bruyamment, signe qu’elle allait bien. Médonée se permit alors de soupirer de joie, et se recula un peu, pour lui laisser le temps de respirer, et de reprendre des souffles.

Et, quand Shad se redressa un peu, Médonée ne put, malgré l’urgence du moment, refréner un antique sentiment de joie, et s’empressa de saisir fermement Shad dans le creux de ses bras.

« Oh, Shad, ma petite Shad, je suis si heureuse de te revoir ! »

Elle déposa un baiser sur ses cheveux, tout en plaquant la tête de Shad contre ses cheveux, puis lui adressa ensuite un nouveau sourire. Les yeux de Médonée avaient cessé de luire, signe qu’elle n’utilisait plus sa magie, offrant à Shad de superbes yeux bleus. Assez rapidement, l’heure des questions se posa. Qu’était-il arrivée à Élise ? Pourquoi les araignées avaient-elles décidé d’attaquer les humains ? Et comment Médonée était-elle devenue... Ce qu’elle était ?

Cette dernière lui sourit, et s’adossa contre le mur, prenant néanmoins Shad pour la blottir contre elle, et la câliner, prétextant qu’elle faisait ça pour soigner encore un peu l’okami des dernières blessures qu’elle pouvait encore être susceptible de ressentir.

« Tu te souviens du combat contre Brahmin, n’est-ce pas ? Eh bien... C’est peu après la chute de son attaque et sa mort que les choses ont commencé à dégénérer. Nous avions acquis la conviction que Brahmin avait été soutenu par les Hamleigh pour se débarrasser de nous, mais nous ignorions l’ampleur de la machination. Les Hamleigh ne veulent pas juste renverser Élise, mais conquérir le pouvoir, et dominer le royaume. Nous avons découvert que Brahmin et eux s’étaient alliés avec les mêmes personnes... La Monarchie de la Rose. »

Un nom qui ne devrait pas signifier grand-chose pour Shad. Pourtant, elle s’était déjà heurtée, sans le savoir, par trois reprises aux séides et aux conspirations de la Monarchie : dans la Forêt des Toiles tout d’abord, contre Brahmin ; ensuite, contre Oswald Mandus à Lumen ; et, enfin, au réveil d’Hastur en Enfer.

« La Monarchie est dirigée par l’être le plus abominable qui soit, Shad, une créature aussi malveillante que puissante, aussi terrible que cruelle. Un monstre qui ne connaît aucune limite, aucune restriction... Et nous avons appris que l’araignée qui avait jadis mordu Élise était l’une des siennes. Ma Reine avait toujours pensé que l’araignée l’ayant transformé venait de la Fourmilière, mais il s’est avéré que ses origines sont encore plus sinistres. En la mordant, cette araignée a transmis l’ADN de cet être, faisant d’elle sa fille, mais, quand il a constaté que nous nous refuserions à le suivre, il a créé une deuxième Élise. »

White Élise, autrement dit.

« Je ne sais pas si tu as entendu parler de lui... C’est le Roi Cramoisi. J’ai cru comprendre que tu avais rencontré l’un de ses agents à Lumen... Oswald Mandus. C’est exact ? J’ai entendu parler de cette histoire, de sa tentative de putsch, et certains disaient qu’une Okami-louve était impliquée. Et, comme Élise avait senti son talisman se déclencher du côté de Lumen... Je me dis que tu as dû vivre de terribles aventures, toi aussi ! »

La magie blanche…La Lycane était en train de la bénir intérieurement, sentant les soins curatifs réparés les séquelles de son corps. Ses plaies se mirent à cicatriser et ses muscles ankylosés devinrent moins rigides. Pourtant, l’Okami était encore loin de pouvoir danser la polka. Le poison était toujours présent dans ses veines et la rendait aussi inoffensive qu’un agneau. Elle ne protesta ainsi pas quand  Médonée la serre contre elle et se mis à la câliner prétextant le fait de lui fournir encore quelques soins. Pourtant, la Lycane sentait parfaitement que la magie blanche n’était plus diffusée mais elle n’en offusqua pas, son appendice caudal battant faiblement de gauche à droite. Elle écouta tranquillement Médonée  frissonnant à l’énonciation du Roi Cramoisi.

« Pour sûr que j’en ai entendu parler…Et oui j’ai rencontré Oswald Mandus et son odieux abattoir à Lumen…Mais ce n’est pas le seul séide du  Roi Cramoisi que j’ai rencontré…Il y’a aussi eu ce champion et ce…Flagg…. »

Avec Brahmin ça montait le nombre de personnes  liés au Roi Cramoisi que la Lycane avait rencontré à quatre. Six si on comptait désormais Charlotte et White Elise.  Ne disant rien pendant quelques secondes, la Louve tourna quelques secondes son attention vers la porte. Est-ce que les murs avaient des oreilles ici ? C’était fortement probable  mais après ? Elles ne pouvaient pas rester muettes, d’autant plus qu’avec tout ce qui se passait et les risques qui pesaient sur le Royaume pouvaient-elles seulement se permettre de rester aussi muettes qu’une tombe ? Techniquement non.  L’Okami reporta donc son attention vers son interlocutrice, plongeant son regard dans le sien, un bleu  apaisant à regarder.

« Elise….Plus qu’être la «  fille » du Roi Cramoisi,  est encore plus importante que tu pourrais l’imaginer….A vrai dire après mon aventure aux Enfers avec le champion, Flagg et l’incantation d’Hastur, je devais retourner dans la Forêt des Toiles pour vous retrouver et…-elle marqua un petit temps d’arrêt, cherchant ses mots avant de finalement dire simplement – et convaincre Elise de rencontrer la Reine de Lumen… »

Elle eut un petit  rire nerveux :

« Ca a l’air un  peu insensé n’est-ce pas ? Demander à Elise de…quitter sa forêt et juste sur des paroles….Pourtant si on veut vaincre le Roi Cramoisi c’est ce qui devra être fait…Du moins, c’est ce que Lucifer m’a fait comprendre mais quant à savoir si c’est vrai ou faux…-elle soupira – je ne saurais le dire mais avec tous les récents évènements qui  se sont déroulés j’aurais tendance à croire que …c’est le cas. »

Abaissant ses oreilles, la Louve continua :

« Tu n’aurais pas dû lui offrir ce qu’elle voulait… cette maitresse des Arachnistes ….Elle ne doit pas trouver Elise, tu aurais mieux fait de me laisser mourir, ma vie comparée à celle de ta Reine, à celle d’une personne pouvant arrêter tout cela n’est….rien. »

Et c’était là la sensation qu’elle avait. Bien sûr toute vie était importante mais à choisir entre celle d’une Immortelle pouvant mettre fin au règne du Roi Cramoisi et donc au Premier Né  et celle d’une simple Okami….le choix était vite fait. Pourtant, elle esquissa un petit sourire, grimaçant un peu de douleur quand elle bougea légèrement le haut de son corps.


« Mais…merci…Dans mon état je ne pourrais pas vraiment t’être utile, et je ne possède même pas de sort de soin….Ce venin est une véritable plaie….. »

Et pas qu’un peu ! La Okami savait également qu’elles n’auraient que peu de temps avant le retour de Charlotte Witter et de ses sbires. Un éclat lumineux attira subitement l’attention de la Lycane qui indiqua la source à Médonée : Le médaillon. Jeté dans la pièce où se trouvaient les deux femmes car ne présentant strictement aucun risque. Le saisissant entre ses doigts, la Lycane effleura l’araignée stylisée :

« Il …m’a beaucoup aidé dans le passé. A présent, il est vide de toute magie…-elle le remit autour de son cou- si au moins nous avions un moyen de la prévenir du danger imminent qui la guette même si je pense qu’elle doit déjà être au courant…. »

Elise ne pouvaient pas rester là où elle était les bras croisés à attendre, surtout si sa protégée avait été faite captive et torturée ! Mais dans ce cas…Où était-elle ? Entendant des bruits de pas qui se rapprochaient, la Louve souriait une dernière fois à Médonée :

« En tout cas…Même si ce n’est pas dans de bonnes conditions, je suis bien heureuse de te revoir aussi Médonée ..».

Même si elle avait bien changé depuis la dernière fois. Pour finir, elle alla se blottir tout contre elle, le regard dirigé vers cette porte close. Ne pouvant plus qu’attendre la suite.

« Shad ! Comment peux-tu dire ça, ma chérie ?! »

Médonée semblait sincèrement scandalisée par ce que la Okami venait de dire, et, pour éviter toute répartie, posa un doigt sur ses lèvres, avant de lui préciser ce qu’elle pensait :

« Toute vie est sacrée ! Tu ne peux pas te sacrifier pour une autre ! Élise n’accepterait jamais un tel troc, et je refuse que tu te mésestimes ainsi, Shad ! »

Bien qu’elle ait changé d’apparence, Médonée restait toujours, fondamentalement, la même, une prêtresse bienveillante et aimante, contrecarrant ainsi les aspects sombres de la personnalité d’Élise. Médonée la complétait donc, et ne pouvait pas tolérer le raisonnement de Shad. De plus, l’Okami avait accompli d’incroyables exploits. Elle avait vaincu Oswald Mandus, Brahmin, et rencontré Lucifer. Impressionnée, Médonée lui en demanda plus, notamment sur la Reine de Lumen, et Shad lui résuma plus en détail son séjour en Enfer. Lucifer, jadis l’Archange céleste, le Porteur de Lumière, s’était historiquement battu contre les Grands Anciens, et estimait que le Roi Cramoisi était lié à eux. Or, le Roi Cramoisi avait jadis été un Grand-Prince infernal, et, dans les tréfonds de son ancien fort, sommeillait une ville, une cité qui avait été utilisée pour réveiller Hastur.

Le Grand Ancien était sorti de sa prison, mais avait été renvoyé grâce au talisman d’Élise, ce qui surprit Médonée. Ce talisman était-il donc à ce point puissant ? Elle se fit rapidement la réflexion que, si le talisman avait pu bloquer Hastur, c’était parce que le sortilège ayant permis d’invoquer le Grand Ancien fonctionnait sur la même base magique que la magie arachnéenne d’Élise.

« Ma Reine dispose du sang du Roi Cramoisi, et son talisman aussi... C’est une très puissante magie, mais il est peut-être mieux que ce talisman ne fonctionne plus. C’est grâce à cette magie qu’Élise contrôlait ses araignées, mais, quand White Élise est apparue, nos araignées se sont retournées contre nous. »

Ce qui expliquait pourquoi Médonée avait été capturée. Elle avait aidé Élise à s’enfuir, et avait retenu les araignées dans une grotte, pendant que la Reine fuyait... Et, comme Shad, Élise avait refusé de partir. Il avait fallu que Médonée la pousse, et condamne le passage derrière elle.

Médonée sourit alors à Shad, caressant tendrement son visage, et déposa alors un baiser sur la commissure de ses lèvres.

« Ton histoire est fascinante, en tout cas... Je regrette de ne pas pouvoir t’aider à enlever ce venin, il est très particulier. Et je ne sais pas non plus ce que la Reine peut bien vouloir à Élise, mais... Au vu de notre situation, je pense que ma Reine ne pourra qu’accepter. Nous avons été trop confiantes après la chute de Brahmin, nous avons sous-estimé les Hamleigh, et, surtout, cru qu’il n’y avait que lui qui en avait après nous. Notre erreur a coûté la vie à bon nombre des habitants du Village des Toiles... »

La mine de Médonée s’assombrit un peu en repensant à tous ces morts. Elle soupira encore, et ferma les yeux, ne pouvant empêcher quelques larmes de rouler le long de ses joues. Shad lui avait parlé de la Prophétie des Immortels, une étonnante légende visant à réunir treize personnes pour venir à bout du Roi Cramoisi, Elena étant celle supposée les guider et les réunir. D’après Lucifer, Élise serait l’une des Treize. Était-ce possible ? Médonée, honnêtement, n’en savait rien, et en était au stade où elle ne pouvait qu’émettre des hypothèses.

Médonée soupira encore, et posa sa tête contre le mur.

« Élise... Je ne sais pas vraiment où elle est, mais... Tu dois savoir que tu n’es pas notre seule alliée, ma chère. Tu sais comment Élise a fait pour me transformer ? Après ton départ, après Brahmin, nous avons reçu une visite inattendue, une femme qui a pu déjouer sans encombre les multiples sortilèges d’Élise, et à obtenir une audience de sa part. C’est elle qui nous a expliqué que la magie d’Élise ne venait pas d’un quelconque gène formien, comme ma Reine l’avait toujours pensé, mais qu’elle venait du sang du Roi Cramoisi. Cette femme a décelé en moi un puissant potentiel magique, et a aidé Élise à réaliser un rituel, consistant à me mettre dans un cocon, pour me faire évoluer. »

Pour la jeune femme, il ne faisait aucun doute qu’Élise était allée se rapprocher de cette personne.

« Elle a un contact à Koldoue. Une sorcière... Car cette femme, vois-tu, est la Déesse des Sorcières. C’est elle qui est venue nous voir, pour nous dire que nous étions en danger... Sha. »

La Lycane écouta calmement Médonée, ne semblant pas réellement s’offusquer quand elle l’embrassa au niveau de la commissure des lèvres, elle se contentait simplement de ne pas interrompre la jeune femme, finissant cependant par avoir un petit rictus nerveux lors de sa dernière déclaration.

«  Tu oublies un léger petit détail Médonée…Nous sommes coincées ici. Je ne peux presque pas bouger et je ne parle pas du fait que mes pouvoirs sont inhibés pour le moment quant à toi….Et bien si cette Charlotte a réussi à te maintenir captive aussi longtemps c’est bien que tu ne dois pas également être au maximum de ta forme….Cette sorcière dont tu parles, ce contact qui pourrait nous faire parvenir à Sha et par déduction à Elise…Je pense qu’il faudra attendre avant de pouvoir y songer… »

Un soupir lui échappa, voilà qui était bien contraignant, pourtant, un mince sourire s’afficha sur son visage et ses oreilles lupine se mirent à s’agiter doucement, comme pris d’une certaine euphorie.

« En tout cas, je suis bien contente de savoir Elise en sûreté. Si cette Sha est réellement la déesse des sorcières comme tu l’a si bien dis, dans ce cas, nous n’avons pas réellement grand-chose à craindre pour ta reine.- elle l’observa quelques instants avant de déclarer – au moins tu n’es pas immonde comme les arachnistes…J’aurais dû mal à t’imaginer avec des  mandibules d’araignée au milieu du visage ! »

Médonée serait loin d’être aussi ravissante qu’à présent….Tournant son regard vers la porte faisant  à la fois  office d’entrée et de sortie, la Lycane émis un léger grognement. Il fallait qu’elles sortent d’ici mais…comment ? Elle lui fit part de la bague permettant d’invoquer le Diablotin mais mis rapidement le holà dessus. Car premièrement elle ne s’activait qu’avec  la magie présent dans son propre sang, magie qui était pour l’heure inexistante et qu’elle préférait éviter d’en faire usage à chaque fois au risque de s’attirer l’ire du dit démon à être traité comme un chien qu’on appellerait à sa guise.

« Mais…Il y’a peut être quelqu’un….Je ne suis pas venue seule à votre recherche…J’étais accompagné par un chevalier de Lumen. Malheureusement, je ne saurais dire si à cette heure-ci elle est encore vivante ou non…La dernière fois que je l’ai vu, elle se battait contre l’un de ces arachnistes dans les égouts… »

Aoife….la Louve était presque certaine qu’elle était encore bien vivante, qu’un de ces montres n’avait pas pu lui faire passer de vie à trépas mais et si elle se trompait ? Si son corps gisait à présent dans l’eau croupie et sale des égouts ? Non, elle ne préférait ne pas y passer. Pourtant, elle n’avait aucun moyen de savoir le statut actuel d’Aoife…Et malheureusement dans le doute, mieux valait la compter comme morte pour ne pas compter dessus et se faire de fausses illusions. Tendant une de ses mains, la  Louve effleura doucement l’une des pattes d’araignées de Médonée.

« …Quand tu as eu cette nouvelle apparence avec tous les pouvoirs qui en découlaient n’en as-tu pas eu qui te permettait de regagner de l’énergie ? Que je sois un peu plus faible ne changera rien pour moi mais si je pouvais t’aider à retrouver un peu de force pas n’importes quels moyens…..je doute que l’autre Elise et la maîtresse des Arachnistes nous laissent en paix encore longtemps.. »

En d’autres termes, le temps leur été compté.

Élise avait de puissants alliés, mais encore fallait-il pouvoir les contacter... Et, sur ce point, le pessimisme était plutôt de rigueur. Médonée et Shad étaient toutes les deux prisonnières dans ces lieux, et Shad ne pouvait pas utiliser sa magie, à cause du poison que Charlotte avait distillé en elle. C’était cela qu’il ne fallait pas oublier ; Médonée avait certes des alliés puissants, mais ses ennemis l’étaient tout autant. Pour autant, elle savait, en son for intérieur, qu’Élise était encore en vie. Il fallait mettre fin à cette force d’invasion, et reprendre le contrôle de la Forêt des Toiles. En ce moment, c’était sûrement à cela qu’Élise s’échinait, car il n’y avait aucun autre moyen pour mettre fin à cette guerre. Les forces du royaume ne pourraient jamais repousser celles de White Élise, divisées et affaiblies comme elles l’étaient. La situation était très largement critique, et Shad lui demanda si elle n’avait pas un moyen de récupérer son énergie.

« Pas ici, non... Tu n’es pas la seule à avoir été empoisonnée par Charlotte, ma chérie. Néanmoins, je te confirme une chose... Je n’aurais pas aimé avoir des mandibules sur la tête. »

Fort heureusement, Sha avait aussi veillé à lui donner une meilleure apparence esthétique. Il se dégageait de Médonée une impressionnante beauté bestiale. Elle sourit à l’intention de Shad.

« Ne désespère pas, je suis sûre que ton amie est encore en vie. Un chevalier de Lumen ne peut pas se faire arrêter par ces créatures hideuses, n’est-ce pas ? Et puis... Comme je t’ai dit, j’ai, moi aussi, mes soutiens... »

Médonée savait que Charlotte ne les écoutait pas. L’arrogance de cette femme, c’était ce qui causerait sa perte. Sûre de sa victoire, et sûre de pouvoir maintenant retrouver Élise, elle avait dû s’empresser de partir prévenir ses maîtres, les informer de l’évolution de la situation. C’était donc l’occasion de révéler à Shad quelques informations supplémentaires.

« Il existe une chambre de sorcières dans le royaume... Un culte voué à Sha, et, avec la guerre, elles se sont regroupées à Koldoue. C’est elles qui protègent Élise. Mais ça, tu vois, c’est une information que Charlotte ignore, car elle pense qu’Élise est affaiblie et recroquevillée, seule et isolée. »

Est-ce que Shad verrait où Médonée voulait en venir ? Blessée, torturée, la prêtresse n’avait jamais cessé de perdre la foi, et avait visiblement développé, dans sa tête, une stratégie plutôt efficace.

« C’est elle qui va nous amener à Élise, Shad... Depuis le début, c’est ce que je veux, mais je ne pouvais pas parler trop rapidement, ou Charlotte aurait eu des soupçons. Je regrette que tu aies dû te faire torturer, mais... Crois-moi, nous allons pouvoir prendre notre vengeance sur Charlotte ! »

Depuis le début, Médonée n’avait eu qu’une envie : satisfaire les envies de sa tortionnaire. Elle voulait retrouver Élise ? Eh bien, Médonée n’en demandait pas mieux ! Que Charlotte la suive dans la gueule de la louve, et, toute aussi pacifiste qu’elle fut jadis, Médonée serait ravie de la briser sur place !

« Mais, pour l’heure, tu vas devoir faire sans ta magie, seule Élise, ou les sorcières de Koldoue, pourraient te soigner... Comme moi. »

Elle reprit ensuite sa respiration, et changea de sujet, en souriant légèrement :

« Tu as été en Enfer... Pour toi, ça, ça doit être une promenade de santé... »

Autant essayer, dans la mesure du possible, de détendre l’atmosphère...

« Tu es….incroyable Médonée, fais-moi penser à ne pas  être ton ennemie »

Et pour cause, malgré tout ce qu’elle avait pu endurer, la loyale servante d’Elise n’avait cessé de mettre en marche un terrible plan pour prendre Charlotte à son propre piège. Elle voulait la Reine des Araignées ? Elle allait l’avoir, mais loin de la femme recroquevillée et seule comme elle se plaisait à se l’imaginer. Non, si ce que Médonée disait était vrai, la maîtresse des Arachnistes risqueraient d’avoir une fameuse surprise.  La lycane eut un  petit sourire moqueur face à la dernière phrase dictée.

« J’ai vu bien pire que l’Enfer sur Terra si tu veux mon avis….Ne t’en fais pas pour ma magie, j’ai déjà connu pire avec moins de capacité qu’à présent, mais désarmée et affaibli je ne risque pas d’être fort utile…d’un côté pour ce que tu comptes faire, cela risque d’être un avantage. Je ne pense pas que le poison que Charlotte m’a distillé dans les veines durent éternellement et je devrais, je l’espère, retrouver plus de tonus dans les heures à venir. Mais je vais faire en sorte qu’elle pense que le poison est toujours actif afin qu’elle ne pense pas à m’en inculquer. Je peux me tromper et elle peut très bien le faire à sa guise mais dans le doute…mieux vaut essayer non ? Et puis, on n’y perd rien… »

C’était un pari risqué. Est-ce que le venin avait une durée limitée ? Est-ce que Charlotte allait lui en remettre dans les veines pour s’assurer de sa « docilité » ou  n’allait-elle prendre ne considération que ce dont qu’elle voyait ?  La Okami misait sur le fait que cette femme était imbue et trop fière d’elle-même pour aller au-delà des apparences.  Si elle était aussi confiante que Médonée le disait, ces points allaient également participer à sa chute.

« Ne t’en fais pas, je sais très bien jouer la comédie si besoin…C’est même le fait de me faire passer pour plus bas que terre qui m’avait permis de m’échapper d’un esclavagiste – un frisson lui parcouru l’échine lorsqu’elle y repensa – un lieu bien pire que l’Enfer…- elle regarda Médonée et lui sourit tendrement - une simple arme blanche pourrait déjà m’aider à faire pas mal de dégâts si mes suppositions sont exactes….maintenant….Nous n’avons plus qu’à attendre… »

Et elles attendirent, partageant quelques mots pour passer le temps jusqu’à cet instant fatidique, cet instant où Charlotte pensait enfin avoir la victoire au creux de ses mains. Comme elle l’avait supposé, l’état de l’Okami s’était nettement améliorée et même si sa magie n’était pas encore présente et qu’il lui faudrait l’aide des sorcières du culte de Sha pour la retrouver, elle était en mesure de bouger normalement. Et de ce fait, de se défendre si besoin avec les moyens du bord. Mais pour l’heure, la Okami jouait le rôle de l’affaiblie, s’aidant de Médonée pour marcher, montrant les signes de faiblesses liés au poison que Charlotte voudrait voir. Un point qui fut aussi discutée entre les deux femmes.

La maîtresse des Arachnistes s’était entourée d’une petite dizaine de fidèles, prêts à tuer Elise. Sa sœur jumelle, White Elise, continuait ses attaques contre les forts des différentes cités, mettant les régions à feu et à sang. La nouvelle de la capture d’Elise lui était parvenue et elle était parfaitement sûre que la victoire était sienne, que ce n’était maintenant plus qu’une question du temps. Plus qu’une question de temps avant que le piège de Médonée ne se referme sournoisement contre Charlotte et ses sbires.  En pleins milieu de la nuit,  le groupe incongru parcourait les rues de Koldoue.  Grommelant intérieurement, la Lycane n’avait pas songé que ses  mains seraient liées derrière son dos par d’épais fil de soie gluante. Bha peu importe ! Une surprise de taille les attendait de toute manière.  Puis, le groupe se stoppa devant une massive dans une impasse. Une simple maisonnette qui de base n’était pas vouée à attirer l’attention.  L’endroit où se terrait seule et apeurée Elise. Prise d’une confiance sans borne, la maîtresse des Arachniste ordonna à un de ses fidèles de défoncer la porte avant de pénétrer dans la gueule du loup.

Elles durent attendre jusqu’à la tombée de la nuit. Impossible pour Charlotte de se déplacer en plein jour, et, même de nuit, les rues étaient étroitement surveillées. Un parfum de révolte soufflait à Koldoue. La ville était au bord de l’implosion sociale, devant faire face à un afflux considérable de réfugiés, avec toutes les conséquences négatives qu’on pouvait imaginer. Difficile d’accueillir un tel flux de population, de gens désespérés, désœuvrés, affamés et ruinés, qu’on parquait dans des dortoirs, ou dans des camps de fortune aménagées dans de grandes places. La garde était au bord de la rupture, et Charlotte voulait en finir avec Élise.

Ce soir, elle était donc particulièrement enjouée, mais n’avait pas remisé sa vigilance au vestiaire, avançant prudemment le long des ruelles, évitant autant que possible les grandes rues, tout en maintenant Shad et Médonée prisonnières. La priorité était de ne prendre aucun risque, et c’était bien à ce titre que Charlotte avançait prudemment. Médonée, quant à elle, n’était pas idiote. Tenter de prévenir la garde, ce serait aller de Charybde en Scylla, car, avec ses pattes arachnéennes, la jeune femme aurait rapidement été accusée d’être une Arachniste.

Elle guida ainsi le petit groupe jusqu’à un quartier populaire, près du port. Koldoue était bâtie le long d’un fleuve, et son port se composait donc de deux rives, longeant le fleuve, avec une série de ponts permettant de rejoindre les rives. Le groupe se rapprocha donc du port, évitant soigneusement les quelques auberges où des bruits se faisaient entendre, filant le long d’entrepôts silencieux, plongés dans la pénombre.

« On approche ?
-  Tu le verras par toi-même...
-  Tâche de ne pas me faire perdre mon temps, petite sotte, ou tu sais ce qu’il en coûtera à Shad ! »

Médonée n’ajouta rien, devant toujours donner le rôle d’une femme forcée. Elle avança entre deux entrepôts, remontant une ruelle étroite, qui conduisit à une impasse, avec plusieurs portes fermées. Médonée désigna de la tête une porte, et Charlotte sourit, puis fit signe à un homme de l’ouvrir. Ce dernier obtempéra, et, assez rapidement, fractura la porte, donnant sur une petite cour d’entrée avec un seul arbre, et une porte derrière, menant sur un immeuble de trois étages. L’Arachniste s’avança en premier, tandis que Médonée attendait.

Le temps sembla se suspendre, et, quand l’Arachniste força la porte, il déclencha un mécanisme de défense, somme toute, assez classique. La poignée de la porte était reliée à un fil suspendu qui se détacha, déclenchant l’ouverture d’une trappe piégée, qui se redressa au milieu du salon, crachant une série de pieux acérés, qui transpercèrent la monstrueuse bête, l’envoyant s’écrouler sur le sol dans un hurlement de douleur.

« Quoi ?! »

Des rideaux de feu jaillirent alors à l’entrée de l’impasse, bloquant cette dernière, pendant qu’une silhouette se téléporta juste devant Charlotte, et la repoussa à l’aide d’un sort d’Air, envoyant valdinguer la femme dans un grognement de colère. Cette dernière se fracassa sur le sol, et, devant les yeux de Shad et de Médonée, une nouvelle protagoniste venait d’apparaître : Scybilla, la sorcière de Sha à Koldoue.

« Allez, dépêchez-vous, rentrez !! »

Elle tendit ses mains, et envoya des arcs électriques qui contournèrent efficacement Shad pour frapper ses geôliers, lui laissant ainsi le temps de se réfugier dans la maison...

Le piège s’était refermé comme convenu sur Charlotte et ses sbires.  Profitant de la distraction lancée par la sorcière de Koldoue, la Okami  bouscula d’un coup d’épaule l’un de ses geôliers, courant en compagnie de Médonée vers la maison. Les mains attachées dans son dos, elle trébucha un peu en avant, manquant de se vautrer sur le sol, mais utilisa sa queue lupine pour garder son équilibre et continuer de plus belle. Il ne leur fallut guère longtemps pour atteindre leur objectifs, des cris d’agonis se faisant dès lors entendre au dehors. Mais cela, l’Okami ne se préoccupa pas, elle se rendit auprès de Médonée et lui tourna le dos, lui présentant ses mains liées.

« Tu pourrais avec tes pattes d’araignées ? »

Une fois libérée, l’Okami détacha également les liens de son amie, frottant par la suite ses poignets, portant son regard vers la porte et donc vers l’extérieur. Quid de Charlotte ? Etait-elle entrain de combattre ? Avait-elle pris la fuite,  bouillante de rage d’avoir été ainsi dupée ?  Impossible de savoir pour l’instant. De plus cette sorcière qui était venue, avait-elle était  reçu quelques renforts ? Ou s’occuper t’elle toute seule de ces quelques importuns ?  Haussant les épaules, la Lycane se mis à observer l’intérieur de la maison, qui n’affichait en réalité  rien de spécial.  L’intérieur semblait tout à fait banal, avec ici et là quelques ustensiles de cuisines, deux trois livres, quelques bougies brûlant au fond d’une pièce….Rien qui pourrait faire penser aux premiers abords à un antre de sorcière.

« A moins qu’il y’ait un sort d’illusion, je ne pense pas que ce soit là où elle se trouve réellement, n’est-ce pas ? »

Non, pour la Okami, Elise et le reste des sorcières étaient autre part dans Koldoue, mais où exactement ?  Tendant l’oreille, elle nota que les bruits de combat au dehors s’était tut et peu de temps après, Scybilla fit son entrée.  Instinctivement, la Lycane sut qu’il ne valait mieux pas l’énerver au risque de recevoir son ire destructeur en guise de réponse.  Cependant, l’Okami savait que Médonée était connue pour être la suivante d’Elise, sa prêtresse mais qu’en était-il de sa personne ? il était vrai que Scybilla n’avait nullement dirigé ses arcs électriques vers elle, ce qui laissait supposer qu’Elise avait pu les prévenir de qui elle était et….Elle chassa bien vite ses pensées de sa tête.

Pour l’heure, Médonée et elle n’était plus entre les griffes de Charlotte et elles pourraient bientôt être soignées. Et ça, c’était le plus important. De plus, une fois que la Okami serait remis en forme, elle comptait bien partir à la recherche d’Aoife..et récupérer ses affaires par la même occasion. Un sort de rappel….Voilà ce qu’elle devrait demander dans l’urgence, cela lui éviterait ces inconvénients, pénibles à la longue…Préférant garder le silence pour l’instant, elle n’attendait pas moins une indication sur la suite à venir, étant prête à répondre à toute éventuelle question.

Médonée et Shad se retrouvèrent dans l’entrée de la maison, comprenant un couloir menant à un escalier, et un salon sur la gauche. C’était une simple maison de banlieue, qui semblait apparemment vide. Libérant Médonée à l’aide de ses pattes d’araignées, Médonée se déplaça un peu, allant dans le salon. Les bibliothèques étaient vides, poussiéreuses. En réalité, la maison semblait totalement abandonnée. Quand on savait que la ville connaissait une crise de réfugiés, Médonée se doutait que, tôt ou tard, la municipalité viendrait réquisitionner cette maison, mais, pour l’heure, elle servait visiblement de repaire aux sorcières. Dehors, on entendait des hurlements et des coups sourds. Les sorts magiques faisaient vibrer les murs, et de la poussière tomba à plusieurs reprises du plafond. Il fallut encore attendre quelques secondes, avant que la situation, dehors, ne se calme, et que la puissante sorcière ne débarque dans le salon.

« Vous avez réussi à les repousser ?
-  Oui... Provisoirement. Mais le temps nous est compté. Mes pièges magiques ne fonctionneront pas une seconde fois, et elle va revenir. Il nous faut partir.
-  Élise n’est pas ici, alors ?
-  Non... Mais elle a hâte de vous revoir, toutes les deux. C’est ma maison, ici, précisa-t-elle. Mais, avant de vous amener dans notre refuge, il va falloir que je purge votre organisme du poison de Charlotte. Autrement, elle pourra vous pister. »

Médonée ne pouvait qu’acquiescer. De toutes les manières, plus vite elles se débarrasseraient du venin dans leurs veines, et mieux ce serait. Difficile de dire quelles pouvaient être les conséquences de cette toxine, mais elles n’étaient sûrement pas bénéfiques.  Se débarrasser de ce poison était donc une chose primordiale pour Médonée, qui suivit donc la jeune femme à l’étage. Elle leur expliqua en chemin s’appeler Scybilla, et être la sorcière supérieure du sabbat de Koldoue.

Elles arrivèrent à l’étage, où Scybilla avait un petit laboratoire alchimique, qu’elle alluma rapidement, à l’aide de la magie, faisant chauffer les becs Bunsen, et préparant ensuite l’ensemble. À l’aide de la télékinésie, elle faisait flotter les éprouvettes, mélangeant des substances avec d’autres.

« Est-ce que ça va prendre longtemps ? s’enquit Médonée.
-  Non... Mais Charlotte ne va pas tarder à revenir. Elle n’a pas que les Arachnistes à sa botte, mais aussi de multiples bandes et autres gangs locaux. »

Scybilla était visiblement aussi belle que rigide, parlant peu, et ne cherchant pas spécialement à rassurer le duo. Médonée, pourtant, mourait d’inquiétude pour Élise, et avait une envie furieuse de demander à Scybilla où elle se trouvait, et si elle allait bien. Des bruits se firent alors entendre venant du jardin, et Médonée s’approcha d’une fenêtre, pour froncer les sourcils. Dans la cour d’entrée, comme Scybilla l’avait supposé, elle vit une dizaine d’hommes portant des torches et des armes blanches approcher, les deux tiers portant des capuches recouvrant leurs visages.

« Ils n’ont pas traîné...
-  La maison dispose de runes de protection, mais elles ne tiendront pas éternellement. Le cas échéant, il vous faudra défendre les lieux. »

Scybilla tendit sa main vers un placard dans un coin, qui s’ouvrit instantanément, révélant une série d’armes entreposées dedans. Il y avait quelques coutelas, des haches, des marteaux...

« Choisissez. »

Médonée resta silencieuse pendant quelques secondes, avant d’entendre des coups sourds en contrebas. Les bandits étaient en train d’attaquer la porte d’entrée avec de lourdes haches, faisant flamboyer le bouclier défensif. Néanmoins, à chaque coup, ce dernier s’amenuisait. Médonée, quant à elle, après avoir brièvement observé les armes, se retourna vers Shad.

« Je ne sais pas manier ce genre d’objets. Je vais me battre avec mes pattes arachnéennes pour ma part. »

Après tout ce qu’elle avait subi dans le manoir de Charlotte, et bien que n’étant toujours pas remise des sévices qu’elle avait subi, Médonée était néanmoins prête à se battre... Et ce parce que, de toute manière, elle n’avait pas spécialement le choix.

En effet, Charlotte n’avait pas perdu de temps et voilà qu’elle avait déjà envoyé quelques sbires attaquer la maison de Scybilla. Une bonne dizaine d’hommes, pour la plupart encapuchonnés, pénètrent dans l’enceinte et se mirent à attaquer immédiatement le bouclier qui empêchait, pour l’instant, toute intrusion. Mais le bouclier n’allait guère tenir bien longtemps face à temps de hargne et ce fut plus par nécessité que par choix que Médonée et Shad furent invités à protéger les lieux, le temps que la sorcière termine son remède à l’aide de sa table d’alchimie. Peu de temps, cela lui prendrait peu de temps qu’elle disait….La Louve souffla, après tout, avait –elle seulement le choix ? Elle porta son attention vers les différentes armes proposées, prenant simplement deux épées à une main et une dague de bonne facture pour le combat rapproché.

« Je crois qu’on est loin d’être au mieux de notre forme….Autant faire gagner le plus de temps possible sans risquer nos vies pour rien… »

En d’autres termes, la Louve allait être plus sur la défensif, économisant le plus ses ressources. Mais, elle se doutait bien que leurs adversaires ne risquaient pas d’êtres que de simples humains et, voir des arachnistes tirant des fils de soies pour les engluer ne l’étonnerait absolument pas. D’autres secousses dans la pièce….Les runes de protections commençaient grandement à faiblir, mais chaque seconde gagnée était précieuse. Une autre secousse, plus violente cette fois, les runes étaient sur le point de céder. La Lycane se tourna vers Médonée :

« Allons y…. »

De la lassitude était palpable dans le timbre de sa voix.  En effet, l’Okami n’avait nullement l’envie de se battre.  C’est sans réelle motivation qu’elle rejoignit la porte d’entrée afin de défendre la bâtisse. Au même instant, la dite porte céda, laissant apparaître un homme au crâne rasé et tatoué d’étranges symboles. L’une des lames de la Okamis accueillit l’importun, tranchant net son crâne en deux.  Le corps sans tête, chuta en avant et une flaque de sang se répandit sur le sol. Se mettant sur la défensive aux côtés de Médonée, la Lycane se mis à défendre du mieux qu’elle pouvait la maison de Scybilla.

Les secondes lui parurent des minutes et les minutes des heures….La sorcière de Koldoue leur avait dit que le remède ne prendrait pas longtemps mais quand des ennemis affluaient sans cesse, cette notion de «  pas longtemps » semblait durer une éternité. La chose principale à faire était de bloquer par n’importe quel moyen la porte, afin de diminuer l’afflux d’ennemis. Et quoi de mieux que les cadavres de ces derniers ? Peu à peu, les corps qui tombaient sous les coups meurtriers des deux femmes formaient une sorte de barrière qui réduisait la mobilité de leurs assaillants.

« !! Attention ! »


Un fil de soie gluant venait d’être lancée en direction des deux femmes. Par réflexe la Lycane se baissa pour éviter de se retrouver bêtement entoilée mais cette diversion permis à un autre adversaire de gagner du terrain et de porter un coup de pommeau au niveau de son abdomen.  Le soufflant coupé, la Louve cracha un peu de sang avant de saisir rapidement sa dague et de l’enfoncer dans la gorge de son ennemi, ce dernier étant suffisamment à porter pour cela. Un juron lui échappa et portant une main à son ventre, la lycane se mis à tousser. C’est qu’il avait taper fort le salaud !  Elle fut obligée de laisser Médonée gérer l’assaut pendant une bonne minute avant de pouvoir se rebattre à ses côtés.

Puis, soudain, sans que rien ne les préviennent, un sort de téléportation les mena vers un autre endroit….

La maison de Scybilla n'allait pas résister plus longtemps. Médonée et Shad descendirent rapidement, rejoignant l'entrée. Elles eurent à peine le temps de descendre l'escalier que le bouclier explosa. La porte, elle, n'offrit guère de résistance, et Shad bondit sur le premier malandrin, le tuant d'une attaque rapide et violente, faisant couler le sang le long de la porte. Un bandit utilisa ensuite un sort, et lança une boule de Terre qui fit exploser la porte en mille morceaux, permettant ainsi aux autres d'avancer.

Jadis femme pacifiste, Médonée avait appris à se battre, et, quand les ennemis s'approchèrent, elle bondit brusquement en avant, et envoya son pied se loger dans la tête de l'un d'entre eux, à l'aide d'un puissant coup de pied retourné, l'envoyant heurter le mur. Un autre s'élança vers elle, en faisant tournoyer son fléau d'armes, et elle l'évita en bondissant sur le côté, puis le fouetta avec ses pattes, le repoussant violemment contre le mur.

« Ils sont nombreux... »

Ce fut tout ce qu’elle eut l’occasion de dire. S’équipant d’une épée, un autre zélote hurla vers elle. Les tatouages qu’ils portaient rappelait à Médonée ceux des Arachnistes, ce qui l’amena à comprendre que ces bandits n’étaient pas un simple gang de rue, contrairement à ce qu’on aurait pu croire, mais des fanatiques... Probablement les larbins de la secte de Charlotte, appelés à devenir des Arachnistes en remplissant des missions et des activités. Autrement dit, ils se battraient jusqu’au bout, car ils étaient prêts à  donner leur vie à cette folle.

Le zélote armé d’une épée manqua Médonée, qui se réfugia dans le salon, où il la poursuivit en hurlant, avant de tendre sa main, envoyant une boule de feu. Avec l’une de ses pattes, Médonée la coupa, puis elle bondit sur la table, s’élançant dans les airs, évitant à nouveau la lame, qui décrivit un mouvement circulaire au-dessus de la table. Les pattes de la femme-araignée fouettèrent l’homme au visage, perforant sa mâchoire, le balançant au sol dans des filaments de sang. Médonée se rétablit après ce glorieux salto pour voir un autre bandit l’attaquer, avec un fléau d’armes.

Les boules de fer s’abattirent violemment sur la table, et Médonée en tomba au sol. Elle fit une roulade, évitant l’attaque supplémentaire, puis bondit sur le côté, et frappa l’homme, encore avec ses puissantes pattes. Le coup fut tel que l’ennemi passa à travers la fenêtre, s’effondrant dans le jardin. Néanmoins, d’autres Arachnistes approchaient, et balancèrent des filaments de toile sur les fenêtres, arrachant ainsi les panneaux de bois qui en avaient condamné les accès, dans de multiples craquements. D’autres filaments jaillirent ainsi fusant autour de la jeune Médonée, la contraignant à fuir vers l’arrière précipitamment.

*Ça se complique ! Scybilla n’a toujours pas fini ?*

Plus le temps passait, et plus défendre la zone devenait difficile. Shad elle-même se retrouva attaquée par un ennemi, et Médonée bondit vers l’homme, empêchant ce dernier d’asséner à la Louve un coup fatal. Elle s’élança sur lui, et ses pattes le transpercèrent, l’empalant sur elle, puis elle balança le corps contre un autre ennemi. Dans le jardin, les Arachnistes continuaient à balancer des filaments de toile, et des archers venaient ensuite les soutenir, enflammant les toiles, déclenchant peu à peu un redoutable incendie.

« On monte, vite !! »

Médonée laissa Shad grimper l’escalier la première, elle-même restant un peu en retrait. Un ennemi se rua vers elle avec une épée dans la main, hurlant comme un dément, et elle posa ses deux mains sur son poignet, l’empêchant d’abaisser son arme. Néanmoins, l’homme la repoussa, et les chevilles de Médonée heurtèrent une marche, l’envoyant s’affaler sur l’escalier. L’homme en lâcha son épée, et posa une main sur sa gorge, cherchant à l’étrangler.

« Argh !!
-  Meurs, salope ! Ton sacrifice... Est ce que la Reine requiert... »

La jeune femme grogna encore, et frappa avec ses ongles, qui poussèrent pour devenir des griffes acérées, dont elle se servit pour lacérer le ventre de l’homme. Il se mit à gémir, crachant du sang sur le visage de la femme, mais tint bon, ce qui l’amena à frapper encore, lacérant le corps de l’homme, jusqu’à pouvoir le repousser avec ses jambes. Il partit en arrière, heurtant le sol, et Médonée se redressa. Elle se retourna, cherchant à remonter, mais un archer réussit à la toucher, décochant une flèche qui l’atteignit dans le dos.

« Aaaaahhh... !! »

Dans un hurlement de douleur, Médonée trébucha à nouveau, mais essaya quand même de grimper vers le grenier. Les Arachnistes s’approchaient, pendant que l’incendie se répandait le long de la façade de la maison, mais aussi à l’intérieur. Médonée se rapprocha de Shad, et Scybilla les téléporta alors. Elles arrivèrent dans une sorte de grand hall, avec des piliers évoquant un temple, et, assez rapidement, plusieurs femmes se précipitèrent vers Médonée et Shad, tandis que Scybilla s’avança un peu.

« La flèche n’a pas atteint une zone sensible… Nous allons vous soigner toutes les deux. »

Et, pour ça, Scybilla utilisa encore des sortilèges, qui amenèrent Shad et Médonée à s’endormir toutes les deux.

Si téléportation il y’avait eu, c’était que Scybilla avait terminé sa mixture et qu’à présent, Charlotte ne pourrait plus le suivre à la trace. Mais au vue des évènements qui venaient de se passer, la Lycane eut tout juste le temps de jeter un œil sur le lieu où elles étaient arrivées. Elle eut l’impression d’être dans un ancien temple mais déjà plusieurs femmes accouraient vers elles et surtout…Scybilla grâce à sa magie, les plongea dans un profond sommeil. Un sort particulièrement efficace dont la Lycane n’avait pu apposer aucune résistance, tombant comme une souche et étant à présent, ainsi que Médonée, entre les mains des sorcières servant Scybilla et par extension : Sha.

Quand elle se réveilla quelques heures plus tard, la Lycane se redressa sur le lit où elle avait été déposée, un fin bandage de lin autour de son abdomen. Finalement, le coup porter par son adversaire avait été plus violent qu’au premier abord. Sans doute des liaisons internes. Regardant autour d’elle, la Louve vit quelques femmes passer, l’une d’entre elle, remarquant qu’elle était enfin sortie de sa torpeur lui amena une tasse fumante. Anticipant sa question, la femme lui précisa qu’il s’agissait d’un remède, certes un peu amer, mais fortement efficace pour finir de soigner les blessures et pour retirer les derniers résidus du poison de Charlotte qui pourraient subvenir dans son organisme.  Goûtant une gorgée, la Lycane afficha une moue dégoûtée. En effet pour être amer ça l’était ! Mais elle se fit violence et but petit à petit la boisson qui lui était proposée. Et malgré un coup infâme, les résultats étaient là. Petit à petit, l’Okami reprenait des forces, se sentant mieux de minutes en minutes.

Elle « dégusta » son thé seule avant de le poser contre le plateau prévu à cet effet, cherchant par la suite Médonée du regard. Elle n’était pas là. Etait-elle dans une autre pièce ? Ou était-elle déjà parfaitement rétablit ?  Pour cela, il n’y avait qu’une seule façon de le savoir : Se lever et chercher la réponse.  Sans attendre une seconde de plus, l’Okami sortit de son lit,  portant sur elle qu’une simple robe de couleur ébène. Ses affaires étant sans doute rangées quelques part…Après tout, qu’elle fut dénudée pour les soins ne l’étonnait guère. Elle haussa simplement les épaules dans un léger soupir et se mis à marcher à travers les corridors.

Et quel lieu !  La magie palpitait dans chaque recoin, des incantations pouvaient se faire entendre ici et là, les adeptes des arts occultes pressaient le pas, tentaient divers sortilèges, perfectionnaient leurs arts. Prise d’un doute, la Lycane essaya un petit tour pyrotechnique. La simple flammèche qui naquit dans le centre de sa main lui apporta un soupir de réconfort. Refermant sa main, elle étouffa la flamme, ne laissant qu’une petite fumée noirâtre s’échapper de son poing fermé. Continuant de marcher, la Louve observait, cherchant la présence de Médonée ou de Scybilla.

Elle finit par s’arrêter subitement en passant devant une salle, se retournant pour voir apparaître dans son champ de mire, trois silhouettes qu’elle ne connaissait que trop bien. Et singulièrement, elle ne put retenir sa joie, se retrouvant en moins de quelques secondes contre Élise, la queue battante à tout rompre, heureuse et soulagée de voir que la Reine des Araignées se portait pour le mieux, faisant fi des personnes autour. Remarquant son geste, elle souffla un mot d’excuse et se recula, oreilles légèrement baissés sous la gêne qu’elle aurait pu occasionner. Mais elle ne demeurait pas moins heureuse.

Sans trop de surprises, le refuge des sorcières se trouvait dans les souterrains de Koldoue, dans une ancienne crypte que les sorcières avaient réaménagé, en protégeant l’accès par des runes et des glyphes, dissimulant l’entrée derrière un mur factice, qui faisait office d’illusion magique depuis les égouts. C’était un refuge secret, abritant, depuis des années, le culte de Sha. Scybilla en était la gérante. Le lieu était sûr et protégé, même si, parfois, des monstres arrivaient à entrer. Pour l’heure, personne n’avait encore remarqué ce caveau, car Scybilla avait veillé à en supprimer les plans dans les registres cadastraux et les plans de la municipalité. De cette manière, la zone était protégée par le secret. Autant dire que Charlotte allait avoir bien du mal à remonter jusqu’ici.

Quand Shad revint à elle, elle tomba rapidement sur un trio. Il y avait Médonée, pleinement rétablie, Scybilla... Et Élise ! La Reine des Araignées était là, visiblement en pleine forme, et Shad alla se précipiter contre elle, avant de s’excuser... Mais, si elle levait la tête, elle pourrait voir un fin sourire orner les lèvres d’Élise.

« Oh... Moi aussi, je suis bien contente de te revoir, Shad. Médonée m’a raconté tout ce que tu as fait pour me retrouver, c’est... C’est impressionnant ! »

Élise était bien en vie. Cette fois, c’était bien elle, et non White Elise. C’était la vraie Reine, celle que Shad avait rencontré dans la Forêt des Toiles, et qu’elle avait aidé à vaincre Brahmin. Celle qu’elle devait retrouver pour la ramener auprès d’Elena Ivory, après son escapade en Enfer. La Reine lui souriait, continuant à la caresser, et relâcha ensuite le corps de l’Okami.

« Médonée m’a raconté que tu avais beaucoup voyagé. J’ignore s’il existe une autre Okami sur Terra qui a pu faire des voyages aussi impressionnants que toi. Je suis heureuse et fière de t’avoir comme alliée, car, pour vaincre l’usurpatrice, il va falloir que nous mobilisions toutes nos forces.
-  Nous avons purgé vos corps du venin de Charlotte. Elle n’a pour l’heure plus aucun moyen de vous retrouver. Ce lieu est sûr. »

La précision était utile pour rassurer tout le monde.

« Donc... J’imagine que tu as bien des questions, Shad, mais j’en ai aussi. Déjà... Comment vas-tu ? Et, ensuite... Tu as vraiment été en Enfer ? »

On pouvait presque lire de l’admiration dans la voix d’Élise.

Contrairement à son habitude, la Louve se laissa cette fois enserrer et cajoler, ne disant rien, profitant juste de l’instant, sa queue battant tranquillement dans le vide. C’était comme si une grosse épine venait de lui être retirée du pied et elle ne pouvait que se délecter de cet instant. Enfin elle avait retrouvé Elise, la vraie et non sans mal ! Mais tout était loin d’être fini et la Reine des Araignées ne tarda pas à en faire la remarque.  Il restait encore les usurpatrices qui en cet instant devaient remuer ciel et terre pour les retrouver. Se retournant vers Scybilla, l’Okami hocha simplement la tête en guise de remerciement avant de se reculer d’Elise.

« Je pense que Médonnée as dû te raconter ce que je lui avais déjà résumé pendant que je …dormais. Pour répondre à tes questions…Oui je vais bien, un petit tiraillement au ventre mais…rien de grave – elle se tourna vers la sorcière – merci pour les soins – avant de se retourner vers Elise –quant à ta dernière question. Oui, c’est vrai. »

Il était vrai qu’à bien y réfléchir, la Lycane pouvait se vanter d’être une des seules hybrides à ne pas rester cloîtrés chez un particulier à satisfaire toutes sortes de désirs et plaisirs sexuels. Non, elle voyageait, laissant ses pas la guider aux travers des sentiers, faisant tout aussi bien des rencontres bénéfiques que sordides. Mais cela faisait partie des risques d’un tel mode de vie et..elle ne s’en plaignait pas. La découverte poussée par une certaine forme de curiosité accrue la poussait à découvrir toujours de nouvelles contrées. Mais pour l’heure, l’instant n’était pas au voyage et elle devait apporter certaines précisions à Elise.

« Donc…Oui j’ai été en Enfer, poursuivi par l’un des champions du Roi Cramoisi et aidée  par Alastar Magoa … »

Et elle leur résuma toute l’histoire. La course poursuite avec le champion, son sauvetage par le Diablotin, sa dette qu’elle devait payer, sa rencontre avec différents généraux des Enfers et également Lucifer, son escapade dans l’un des anciens fort du Roi Cramoisi, l’ancienne cité et le portail d’où avait émergé Hastur grâce au médaillon d’Elise et pour finir ses récompenses octroyer par Onyxian Magoa pour avoir aidé les Enfers. Mais elle revint surtout sur un des points les plus importants pour cet instant :

« Quand je fus en Enfer, Lucifer m’a demandé de te retrouver et…de te convaincre de te rendre à Lumen afin d’y rencontrer la Reine Elena Ivory car ce serait elle qui pourrait rassembler les Immortels afin d’arrêter une fois toute cette folie. Et…TU es l’une d’entre elle. »

Les dés venaient d’être jetés. Certes, la Louve aurait pu y aller autrement, mais, sur le coup, elle avait préféré jouer la carte de la franchise et d’y aller directement.

« Cependant…Je pense que cela devra attendre encore un peu…Comme tu l’as dit, nous avons deux usurpatrices à combattre et une invasion à éradiquer. »

Cela semblait plus facile à dire qu’à faire !  La Lycane rajouta également :

« Il faudrait aussi que je parte à la recherche d’Aoife, depuis le temps, je ne sais pas si elle erre encore dans les égouts à combattre ces immondices… De plus peut être qu’avec son aide, nous pourrions disposer de plus d’hommes pour combattre Charlottes, White Elise et leurs araignées.»