The Multiversity

Cela faisait déjà un jour que le marchand et moi-même étions sur la route. Il avait décidé de participer à une réunion d’esclavagiste dans les Provinces Libres. Cela ne me disait rien car je n’avais reçu aucune éducation à ce sujet, autant dire que me laisser seul dans la nature était certainement le meilleur moyen que je meurs, faute de moyen pour m’orienter. Je m’occupais des tâches qu’il m’ordonnait, venant à recevoir le midi et le soir de la viande séché, voire de la soupe quand il estimait que j’avais assez travaillé.

Alors que l’aurore pointait le bout de son nez, le marchand grommelait. Visiblement il ne voyait pas des personnes qu’il connaissait pas au point de rendez-vous, venant à décider de stopper l’avancée et attendre pendant toute la mâtinée. Trois autres charrettes se joignirent à la nôtre, non sans que le marchand rouspète que ce retard allait lui coûter cher et que ses collègues avaient intérêt à lui être redevable pour son attente. Les autres vendaient visiblement des demi-bête, l’un des autres marchand venant à proposer que je sois avec un hybride tigre, mais le marchand refusa en disant qu’il était hors de question de vendre à perte la marchandise que j’étais.

Le soleil fut à son zénith quand nous sommes arrivés à cette fameuse réunion. Les étales se montaient, bien plus petite que dans la capitale Mijak, du fait qu’il y avait moins de marchandise à vendre, que c’était plus facile à monter et démonter. Le marchand m’ordonna de rester dans la charrette, de toute manière je n’aurais été d’aucune utilité pour cette tâche. Très vite la plaine accueillie un petit marché improvisé, comme il s’agissait d’une réunion annuelle, cela n’était connu que par le bouche-à-oreille, ainsi peu d’attaque possible et vue les créatures en vente, il ne faisait aucun doute que même une armée aurait été malmenée.

Une fois l’étale montée, il était temps pour moi d’être préparé, le marchand continuant d’être de mauvais humeur car il préférait laisser à des personnes compétentes cette tâche, venant à simplement me brosser les cheveux, passer un peu de poudre pour effacer quelques rides à cause du voyage et me parfumer. Il sortit une robe de qualité et colorée, disant que la tenue valait bien plus cher que moi, mais que pour gonfler ma valeur c’était une sacrifice nécessaire.

Une fois prête, il me fit monter sur l’étale, voyant qu’il y avait déjà des acheteurs qui faisaient le tour pour voir si des marchandises étaient intéressantes. Le marchand ne cria pas, venant à expliquer à un acheteur, qui venait pour la première fois, qu’ici il n’y avait pas de vente à la criée, ce qui expliquait que l’ambiance était plus calme et reposante. Le marchand pestait contre un concurrent qui avait pouponné bien trop ses esclaves, bien qu’après il disait que la marchandise de cet arriviste devait ne rien valoir.

Je restais sur l’étale beaucoup de temps. Les acheteurs potentiels s’approchèrent, questionnant le marchand sur moi. Le manque d’origine et le mutisme semblaient en rebuté de nombreux, demandant à plusieurs reprises si je n’étais pas atteinte de maladie, si ma virginité était vraiment attestée, le marchand sortant des documents de personne dont je n’arrivais pas à mémoriser le nom. Le marchand commençait à perdre patience, disant que les nobles ne me regardaient pas et qu’il aurait aimé que je sois d’une lignée connue d’elfe, car j’aurais été vendue dans l’heure, même si ce n’était que pour servir de pondeuse à des générations d’elfes de valeur.

D’autres personnes se mirent à arriver et le marchand reprit son visage amical, espérant que cette nouvelle vague de client allait aboutir à un achat, étant le seul article en vente de son étale, il espérait en tirer un bon prix.

D'ailleurs le prix de base avait été augmenté, à cause des vêtements et du parfum, étant à 25 pièces d'or de départ.

Un lieu assez discret où on peut acheter des esclaves ? Pourquoi pas ? Je ne sais pas qui je vais prendre et ce que je vais en faire, surtout que j'ai déjà Kariss qui s'occupe de tout chez moi, en tant qu'esclave. Evidemment, dans ce genre de décisions, elle n'aurait pas grand-chose à dire, et je ne sais pas si ça lui ferait plaisir, mais j'ai bien envie de voir ce que ça fait un esclave plus bas de gamme.

Ancarla, depuis que Maîtresse Evangéline a pris le pouvoir, est connu pour certains aspect de luxe, que ce soit la prostitution, le dressage d'esclaves ou l'étude de la magie rose. Il est aussi connu pour le tourisme, et on peut faire affaire avec Maîtresse Evangéline. Surtout qu'on reconnait les tenues habituelles d'Ancarla, et c'est ce que je porte. Ancarla s'est fait une réputation, et j'ai l'impression que les femmes d'Ancarla sont aussi connues pour leur côté maîtresse de luxe. Donc on m'a parlé de ce genre de lieux, en sachant que les esclaves ici n'ont pas beaucoup de valeur et que c'est un endroit calme.

Je suis donc allée voir ce lieu, dans un creux de plaine, donc assez caché pour s'assurer de ne pas être attaqués, mais assez accessible pour qu'on puisse y aller. On reconnait à ma tenue, à savoir mon pantalon en cuir noir, ma chemise à jabots, mes bottes cuissardes, mon manteau et mon chapeau à large bord. Bien sûr, on remarque le fait que j'ai les yeux vairons, sans savoir que mon œil gauche a une lentille magique bleue pour cacher l'œil d'Alecto. Après, on me remarque aussi parce que je dis parfois sans le vouloir : "Alecto", comme si c'était un trouble compulsif, et c'est le cas depuis l'Olympomachie.

D'ailleurs, pendant que j'explore, je commence à voir une esclave qui est plutôt belle, avec son corps dessiné, ses cheveux roux comme les miens, son corps généreux… hmm… elle m'intéresse. Je lui pose naturellement des questions. Peu importe si elle est vierge, peu importe si elle est fertile, pour moi. Je veux juste en connaître plus sur elle. Déjà, je remarque son mutisme. Le vendeur dit qu'il semble que ses cordes vocales ont été détruites, mais qu'elles l'étaient déjà quand il l'a reçu. On ne connait pas son origine, mais on sait qu'elle est une elfe des bois. Ca devrait être un petit défi, mais j'aime beaucoup les défis. J'envisage de l'acheter, ce qui ravit le vendeur. 25 pièces d'or ? C'est pas cher, mais je savais que c'était du bas de gamme. Je paie donc les 25 pièces d'or, et le vendeur marque naturellement qu'elle est vendue. A moi de faire d'elle ce que je veux, mais perso si je ne veux pas la revendre, je veux quand même qu'elle vive une belle vie, même avec moi.

Je commence à emmener cette femme, qui a comme nom temporaire Carpe, car elle est muette comme une carpe… mais j'ai envie de changer de nom. Par ailleurs, je me présente à elle. Après tout, c'est moi sa Maîtresse, maintenant.

"D'ailleurs, je m'appelle SeNastrand Nausica, mais tu peux m'appeler Mademoiselle Nausica ou Mademoiselle SeNastrand, comme tu veux. Comme ça tu peux y mettre un nom. Je te préviens, je tâche toujours de ne pas être cruelle et si tu dois m'écouter, je peux aussi t'écouter en retour. J'ai pas envie que tu sois malheureuse avec moi."

On n'est pas égales du tout, mais je préfère les relations plus diagonales qu'une relation purement verticale. Je la regarde ensuite avec le sourire.

"Tu aimes ton nom Carpe, d'ailleurs ?"

Peut-être que je la prends de court, mais je lui ai prévenue que je l'écoute. Je suis même prête à laisser exprimer sa personnalité. Normalement, c'est à moi de faire d'elle ce que je veux, mais je préfère plutôt lui laisser de la liberté.

La vague passa, encore une fois mes origines inconnues et mon mutisme eut raison de l’envie de m’avoir, entendant certaines personne dire que j’étaie un gâchis, car si mon mutisme était transmis aux enfants, alors je serais plus une source d’embarras pour eux, en tout cas c’est ce que mes oreilles avaient comprise. Le marchand tapotait du pied, une chose était certaine, si je n’étais pas achetée avant son départ, il allait me punir, c’était toujours comme ça quand son énervement était palpable.

C’est alors qu’une femme rousse s’approche, le marchand chassant sa colère pour être aimable avec cette femme. Elle me pose des questions, mais n’étant pas en mesure de répondre, c’est le marchand qui s’occupe de formuler les réponses, venant des fois à grossir les traits, je ne pouvais savoir que le marchand voyait en cette femme la parfaite cliente pour se débarrasser de moi, tout en récupérant l’argent dont il avait décidé pour ma vente.

Comme pour la précédente femme qui m’avait acheté et n’étant qu’une intermédiaire, elle fut conduite derrière l’étale où il y avait la carriole, ils mirent un petit moment. Certainement que le marchand lui avait donné une copie des documents certifiant qu’en dépit de mon mutisme je n‘avais aucune maladie ou malédiction, tout en s’assurant que la femme avait les moyens et une identité, l’entendant baragouiner quelques choses d’inaudible, avant que cette femme ne revienne.

Je n’eus pas de collier avec une laisse, certainement que cette nouvelle maîtresse voulait me tester aussi. Quand elle commença à partir et le marchand me faisant signe que c’était bon, je me mis naturellement un peu en retrait vis-à-vis de cette femme, me calant à sa vitesse, afin que l’on vît bien qui était la maîtresse et l’esclave, comme on me l’avait appris.

J’entendis cette femme me parler, mémorisant l’identité de cette femme, même si avec mon mutisme elle risquait d’attendre très longtemps avant que je l’appelle ainsi, je fit un mouvement positif de la tête, pour signaler que j’avais bien compris comment se nommait ma nouvelle maîtresse, même si ce n’était que phonétiquement. D’autres mouvements similaire se succédèrent quand ma maîtresse parlait, je ne devais pas douter de ses mots, même si mes expériences me susurrent que ma maîtresse voulait certainement me tester avant d’arriver chez elle et que s’il y avait punition, cela serait soit sur la route, soit une fois dans sa demeure.

La question sur ma dénomination me causa un frisson. C’était une question qui ne pouvait être répondu avec ma tête, venant à choisir la meilleure option, hausser des épaules. Répondre positivement aurait pu être vu comme un signe de rébellion et une personnalité individuelle, ce qui était interdit pour un esclave, un esclave doit ne vivre que pour ses maîtres. Aussi précieux que cela puisse être, en tant qu’esclave je ne pouvais m’y attacher, si mes possesseurs décidaient de le changer, je ne pouvais m’y opposer. Répondre négativement serait un mensonge et il ne faut pas mentir à ses maîtres, seul eux ont ce droit ou peuvent nous ordonner de mentir.

Cette maîtresse pouvait aussi tenter de me tester, pour déterminer si j’allais avoir besoin de rééducation, afin d’être une esclave à son goût. Je ne savais pas à quoi m’attendre, ma nouvelle maîtresse paraissait, en public tout du moins, être une femme douce et prenant soins de ses objets nouvellement acquit, mais, rien ne disait qu’en privé elle aimait les casser méthodiquement.

Pour le cas présent maîtresse Nausica avait certainement déjà de nouvelles dénominations à m’affubler, allant accepter sagement tout ce qu’elle souhaitait, car ce n’était pas à moi de dire non sur comment elle voulait m’appeler, pouvant aussi bien porter un prénom que ma maîtresse aimait, que d’autres qui ne viserait qu’à m’humilier.

Aucune maladie ni malédiction, vierge et fertile. Pour ces deux derniers points, ça me dérange pas, tant qu'on peut profiter l'une de l'autre de temps en temps. Après, si elle est essentiellement hétéro, ça me dérange pas non plus, juste je serais un peu déçue mais c'est pas grave. En tout cas, étant donné qu'elle a une éducation pauvre, ça veut dire qu'elle est encore une feuille blanche que je peux remplir, mais c'est pas pour autant que je vais remplir de n'importe quoi. En fait, bien qu'elle m'appartienne, elle va écrire cette feuille avec moi.

Comme elle est muette, je ne m'attends déjà pas à une réponse orale, juste je voulais qu'elle intègre comment elle pourrait m'appeler, mentalement, surtout si jamais elle trouve un moyen oral de m'appeler, malgré son mutisme. Après, si elle peut se montrer un peu méfiante de mes mots, je trouve ça quand même normal, car elle a peut-être appris à être méfiante.

Je vois qu'elle a un frisson, et j'ai l'impression qu'elle hausse les épaules plus pour éviter de mentir que parce qu'elle ne sait vraiment pas. Elle va comprendre que je vais donner du mou quand même. J'ai pas empêché Kariss d'avoir sa propre personnalité, mais elle ne la connait pas, donc je la comprends tout à fait. Je me dis qu'elle n'aime pas son nom, donc je pourrais en changer.

"D'accord, alors je vais réfléchir à un autre nom. Réponds honnêtement, je ne te punirai pas pour avoir dit non, d'accord ?"

Elle doit vivre pour ses maîtres, je ne remets pas ça en cause, mais je veux quand même qu'elle ait sa propre personnalité, une sorte de libre-arbitre, sans pour autant qu'elle ne veuille partir d'ici. Si je l'ai achetée, ce n'est pas pour qu'elle parte derrière, je veux qu'elle soit à l'aise avec moi.

"Qu'est-ce que tu dirais d'Elwynn ? J'ai envie de te donner un nom plus elfique, mais si tu n'aimes pas, je peux en changer."

Peut-être qu'elle est un peu délicate, mais ça peut me plaire. Elle a appris à s'adapter à ses maîtres et maîtresses, mais ça ne veut pas dire que je vais pas m'adapter à elle. Elle a de la chance d'avoir une nouvelle maîtresse comme ça. On continue d'ailleurs notre trajet, et en tant que voyageuse, vu que j'ai de toute façon de quoi faire une tente, on va pouvoir se poser en plein air.

Ma nouvelle maîtresse disait réfléchir à un nouveau nom et de répondre honnêtement, venant à dire qu’elle ne me punirait pas si j’exprimais un avis négatif. Je répondis d’un oui mou de la tête, je n’avais connu que Carpe, aussi avoir un nouveau nom ne changerais rien, si ce n’est répondre à cette nouvelle dénomination.

J’attendis donc patiemment qu’elle me trouve un nom, Elwynn, si je ne savais pas comment cela pouvait être écrit, cela restait facile à mémoriser phonétiquement, venant à entendre dire que c’était un style elfique, autant dire que cela pouvait très bien avoir une signification péjorative, le sens m’échapperait totalement. Mais peu importait le sens, c’était le nouveau nom auquel je devais réagir si elle m’appelait, je répondis d’un petit hochement positif de la tête.

Je continuais de la suivre, venant à constater qu’elle portait un étrange sac, la règle voulait que l’esclave porte les bagages de son maître, mais comme maîtresse Nausica ne me l’avait pas confié, je n’avais aucun droit de faire la demande, d’autant que cela ne paraissait pas bien lourd. Je la vis prendre la direction de la plaine, pensant qu’elle aurait au moins une charrette, mais constatant, vu l’état de ses bottes, que ma maîtresse était certainement le genre à préférer marcher.

Cela n’était pas dérangeant pour moi, on m’avait bien dressée pour que je sois endurante à l’effort, maîtresse Nausica aurait chargée mon dos de biens lourds, j’aurais tenté de suivre son rythme. Je restais toujours un peu en retrait, me doutant que la nuit tombée ma maîtresse allait certainement me donner des tâches dont je n’avais pas l’habitude, on m’avait éduqué pour servir une noble dans une maison, pas une maîtresse vivant dans la nature, autant dire qu’elle risquait d’être fortement déçue si elle espérait de moi faire un feu autrement que dans une cheminée ou chercher de la nourriture.

Je me demandais où elle pouvait bien habiter, l’état de ses chaussures me disant que maîtresse Nausica était assez loin de chez elle. Je me demandais aussi si sous cet aspect humaine ne se cachait pas en vérité une bête qui m’avait acheté une misère pour sustenter sa faim, mais je n’avais pas peur, après tout ma maîtresse possédait tout les droits sur moi, y comprit de mort.

Donc elle veut bien d'Elwynn, c'est vendu. Elle passe maintenant de Carpe à Elwynn.

"Alors vendu, tu t'appelles désormais Elwynn."

Après, je me doute qu'elle n'a pas appris à avoir un avis. En fait, vu que je compte la garder sur le long terme, le fait qu'elle puisse me dire ce qu'elle veut ne me dérangera pas, donc je lui apprendrai sans la moindre crainte. D'ailleurs, j'ai beau venir d'une aristocratie mineure, et habiter dans la maison de Maîtresse Evangéline, je compte lui apprendre d'abord à vivre dans la nature, afin qu'elle puisse le faire pendant que je fais quelque chose d'autre. C'est comme si c'était mon esclave pendant mon voyage, alors que Kariss s'occupe de ma chambre.

La nuit tombe doucement, et donc on finit de s'installer. Du coup, étant donné que je vais lui donner une nouvelle tâche, je vais la former à ce qu'elle puisse vivre dehors, dans la nature.

"Pour commencer, on va aller chercher du bois et des pierres, pour le feu. Ne t'inquiète pas, pour l'allumer, je vais le faire moi-même."

Là encore, c'est une tâche simple, mais je vais quand même l'aider, car à deux on peut aller plus vite. Des branches de bois et des pierres sont rapidement trouvés ici, et je l'apprends naturellement à placer les pierres en cercle et les brindilles au centre, se rejoignant au milieu et relevés, d'où cette disposition en cercle des pierres pour le maintenir, en plus de l'empêcher de se répandre au niveau du sol.

"Voilà ! Comme ça, on a du feu et on est en sécurité. D'ailleurs, tu peux monter une tente ?"

Je la laisse répondre et elle me déclare que non, elle ne sait pas. Je lui souris et l'incite à s'approcher de moi.

"Alors je vais t'apprendre. Moi-même ça m'a pris du temps avant d'apprendre, donc si jamais tu peines avec ça, je peux t'aider."

Oui, c'est à la Maîtresse d'aider son esclave. Je suis particulière, on peut dire, mais c'est pas grave. Je lui fais des indications pour qu'elle sache monter la tente. D'ailleurs, je remarque en plantant la tente qu'elle est athlétique, juste qu'elle n'est pas habituée à faire ce genre de tâches.

"Tu apprends vite."

En tout cas, cette tente est bien placé assez près du feu pour qu'on puisse se réchauffer, mais assez éloigné pour l'empêcher de brûler. Je la laisse continuer, ça ne va pas durer longtemps, mais en attendant, je prends mon pistolet pour le pointer sur le bois, et je tire trois fois pour que les étincelles s'accumulent assez pour pouvoir vraiment prendre. Ah oui ! C'est vrai que c'est bruyant, un pistolet, et que ça peut rendre sourde si je ne faisais pas attention.

"Ah ! Désolée pour tes oreilles."

Je me suis mise à la suivre jusqu’à ce que la nuit commence à envahir le ciel, venant à me demander d’apporter du bois et des pierres. Je m’attelais à la tâche, venant à saisir des cailloux de toute taille, apprenant qu’il fallait de gros cailloux. La même chose se passa pour le bois, apprenant que je devais apporter du bois qui était dur et sec, pas du bois souple et vert. Cela ne ressemblait en rien à une cheminée, mais le fait d’avoir mentionné l’usage du feu, j’assimilais que maîtresse Nausica comptait faire un foyer.

Ma maîtresse se mit à me demander si je pouvais monter une tente, je supposais que cela était dans son sac, baissant le regard et venant à tourner la tête de gauche à droite, pour signaler que je ne savais pas faire ce genre de chose.

Maîtresse Nausica vint à déballer ce qui était nécessaire pour la tente, voyant les bout de métal qu’il fallait planter dans le sol, comme ce que le marchand avait planté pour protéger un peu son estrade de vente. Je vins à utiliser la force de mon corps et mon poids pour planter les bouts de métal dans le sol, ce qui aurait pu surprendre ma maîtresse face à ma passivité habituelle. J’écoutais ses explications pour pouvoir continuer, n’étant pas spécialement sensible au compliment que ma maîtresse avait faite, un esclave obéit, pas besoin d’être mielleux avec lui.
Je venais à finir de monter le long bâton en fer qui devait aller au centre de la tente, venant à commencer à hisser la tige jusqu’à ce qu’un premier coup de feu vint faire vriller mes oreilles.

Je ne pus m’empêcher de sursauter et lâcher le bâton de métal, ayant toute la toile qui retombais sur moi, entendant d’autres coup de feu et ensuite maîtresse Nausica s’excuser, ce n’était donc que ma possesseuse. Je repris la tige et monta jusqu’à planter l’objet à l’emplacement où cela semblait aller, venant à toucher un peu la tente de l’intérieur pour s’assurer que cela n’allait pas tomber facilement, avant de ressortir.

L’oreille gauche continuait un peu à siffler à cause des coups de feu, mais cela passerait, ce n’était pas douloureux, donc cela voulait certainement dire que l’oreille allait bien. Je vis le feu qui avait pris, comprenant qu’il n’y avait pas qu’avec les gros morceaux de bois, coupés à la hache, que l’on pouvait créer un feu qui réchauffe. Cependant, je me disais que cette flamme allait nécessiter beaucoup plus de petit bois pour rester vif.

Je regardais le tas de bois et vint chercher de quoi augmenter la quantité, pour que maîtresse Nausica puisse avoir du feu jusqu’au matin.

Malgré le désagrément suite à mes trois coups de feu, j'aurais peut-être eu besoin d'un seul coup de feu avec la magie de foudre mais c'est pas grave, la tente finit par être montée, avec le pilier de métal au milieu.

D'ailleurs, Elwynn prend l'initiative de prendre du bois en rab pour pouvoir alimenter le feu quand on sent que la flamme s'éteint doucement. Sûrement qu'elle a appris à le faire pour les feux de cheminées, donc je pense que c'est déjà bien.

Je la laisse venir avec le tas de bois et lui sourit.

"J'ai l'impression que tout se passe bien, Elwynn. D'ailleurs, il faut savoir que je suis une voyageuse qui traverse tout Terra, et si je t'ai achetée, c'est surtout pour que tu m'accompagnes dans mes voyages. C'est pour ça que je t'apprends les rudiments de la survie."

Je pose ma main à côté de moi, pour l'inciter à s'assoir à côté de moi. J'ai d'ailleurs l'impression qu'elle tâche surtout d'obéir, comme une servante sans personnalité. C'est un peu ennuyeux, mais je crois que c'est à quoi je pourrais m'attendre, en général.

"Après, j'ai bel et bien un endroit où vivre convenablement, et c'est plutôt loin d'ici, à Ancarla. Si tu t'attends à t'occuper d'une chambre, j'ai déjà une autre esclave pour ça."

Comme ça, elle comprend quel est son rôle avec moi. Je vais faire en sorte qu'elle reste définitivement avec moi. Je lui souris doucement.

"J'ai l'impression qu'on t'a empêchée d'avoir ton propre caractère, de peur que tu finisses par te rebeller contre ton Maître ou ta Maîtresse, je me trompe ?"

Dans les devoirs d'esclave, l'honnêteté est primordial, et pour être franche, si elle me ment et que je le découvre, je le prendrai mal. Là-dessus, je vais pas remettre ça en cause. Ce que je remets en cause, c'est plus le côté froid, sans personnalité, ça peut me perturber.

"Alors je vais te briser cette règle. Je sais, tu dois vivre pour moi, mais ça veut pas dire que vais devoir modeler toute ta vie selon mes envies. Je préfère que tu commences doucement à te former un caractère. S'il y a des choses que tu n'aimes pas, tu me le dis, d'accord ? Bien sûr, un ordre reste un ordre, même si tu n'aimes pas y obéir, ça ne change pas. Juste, n'aie pas peur des représailles si je te pose une question qui fait appel à ton caractère."

C'est encore compliqué pour elle, avec une éducation, mais je veux qu'elle comprenne que je veux pas tout modeler sur elle non plus. Je vais la modeler, mais je veux pas faire quelque chose qu'elle n'aime pas faire.

"Mais bref… il faut que je te trouve un moyen de communiquer si jamais tu as des questions à me poser..."

Pour ça, le mieux serait d'aller à Ancarla, comme ça on pourrait lui trouver un moyen. En tout cas, je réfléchis un moment. Parce que c'est vrai que parfois, être muette a de gros désavantages.

"Est-ce qu'on t'a appris à écrire ?"

Maîtresse Nausica se mit à me parler du pourquoi de mon achat, venant aussi à interpréter que cette femme avait aussi sans doute envie d’avoir une autre personne avec elle lors des voyages, venant à supposer que ma maîtresse avait aussi certainement acheté une personne avec qui partager ses nuits dehors, étant donc plus attirée par les femmes.

Quand elle m’indiquait de me poser à côté d’elle, je réagis au quart de tour, comme une machine rodée à obéir à la moindre demande de son maître. Elle me parlait de chez elle, ne sachant pas du tout où cet Ancarla se situait par rapport à ici. Mais, elle m’indiquait que je n’étais pas la seule esclave, une autre venant à s’occuper de la demeure, ce qui était logique si elle ne m’avait acheté que pour l’accompagner en dehors de sa demeure. Cela voulait dire que cette autre esclave serait ma supérieure et que je devrais l’obéir pour faire des tâches dont elle voudrait me donner la charge.

Quand elle me questionnait sur mon éducation pour être une bonne esclave, je me contentais d’hocher positivement de la tête. C’était quelque chose de normal pour une esclave d’obéir et de ne pas faire du mal inutilement à son maître ou faire quelques choses qui puisse l’énerver.

Je ne compris par ce brisage de règle. Maîtresse Nausica était étrange, une esclave doit vivre et obéir aveuglément à son maître. Certes je pouvais avoir un visage radieux et moins froids, mais cela n’était que sur demande ou quand je devais accompagner mon maître dans une soirée, tout en gardant en tête de mon statut. Se former un caractère, c’était quelques choses d’hors de ma portée, cela voulait dire juger son maître, remettre en cause ses décisions, avoir du caractère c’était être une esclave rebelle, ce qui était mauvais. De plus elle appuyait sur le fait de continuer à obéir aux ordres sans discuter, ne comprenant pas où elle souhaitait en venir. D’un côté elle me disait d’être plus rebelle et de l’autre de continuer à la servir aveuglément.

Tout cela étant trop compliqué, je le chassais de mon esprit, je n’aurais qu’à répondre comme d’habitude.

Maîtresse Nausica se mit à parler de trouver un moyen de communiquer, suivit d’une question dont elle avait certainement eu la réponse lors de mon achat, après tout c’était certainement marqué sur les documents qu’elle avait reçus, mais peut être souhaitait-elle avoir la confirmation sans la pression du vendeur.

Je fis un mouvement de la tête allant de droite à gauche et inversement. Pour moi les lettres étaient des formes que je ne comprenais pas. Compter restait possible avec mes doigts, bien qu’avec mes mains il soit en théorie possible de compter bien plus que dix. Mais je ne répondis pas en avance, il était malpoli de prendre des initiatives pouvant mettre mal à l’aise ses maîtres, sauf cas où sa vie était menacée.

Je le vois dans ses yeux, elle ne comprend absolument pas ce que je veux dire par là. Pas grave, elle va comprendre, notamment quand je la ferai rencontrer Kariss. Mais bref, je lui demande si elle sait écrire ou non… apparemment non. Bon, je crois qu'il va falloir lui apprendre, et je pense que Kariss pourrait le lui apprendre. Ca va pas être si compliqué, mais je pense que c'est important.

"D'accord, alors je te présenterai Kariss, je suis sûre qu'elle pourra t'aider à apprendre à écrire. C'est mon autre esclave, si tu veux."

Mais sinon, en attendant, je pense que je devrais trouver un autre moyen. Cela dit, Kariss peut faire des sceaux, donc peut-être qu'elle pourrait l'aider à pouvoir parler aussi. Je ne sais pas trop, je ne sais pas ce qui se passe pour qu'elle soit muette, mais je m'adapte aussi.

"Bon, j'ai pas beaucoup de solutions, Kariss doit en avoir plus. En tout cas, n'aie pas peur de t'exprimer. Si tu veux quelque chose, tu me le dis."

Je veux pas qu'elle soit affamée ou autre. D'ailleurs, le repas va bientôt commencer, et pour ça je crois que le mieux c'est de savoir comment elle peut chasser.

"D'ailleurs, tu sais chasser ?"

Elle me répond non. Alors c'est pas grave, surtout que la seule arme qu'il y a ici, c'est mon pistolet qu'elle a entendu. Je reprends donc mon pistolet et le lui tend.

"Tiens, c'est ce qu'on appelle un pistolet. Il suffit d'appuyer sur un bouton pour projeter une bille de métal tellement rapidement que ça peut transpercer un corps et le tuer. Je vais t'apprendre à l'utiliser. D'ailleurs, tu utilises majoritairement quelle main ?"

Tout d'abord, je vais lui apprendre à tenir l'arme. Je regarde donc quelle main elle utilise le plus, avant de lui faire prendre le pistolet. Je prends les doigts pour lui montrer comment tenir le pistolet. Elle se laisse faire, c'est l'avantage de lui faire apprendre au début.

"Voilà comment tu dois le tenir tant que tu n'es pas prête à tirer, comme on dit. Une fois que tu as une cible à viser, voilà ce que tu dois faire."

Je lui prends donc l'index pour le faire entrer dans le ponté, le doigt près de la queue de détente. Par la même occasion, je la fais viser le feu encore bien allumé.

"Et pour tirer, tu appuies sur ce qu'on appelle la queue de détente. Vas-y."

Je lâche ses mains pour cacher ses oreilles, car ça fait mal aux oreilles, d'entendre ça, quand on n'est pas habitué.