Méline, la fille de la Destinée [Valiobservée !]
Posté : 13 févr. 2025 19:17
(Fiche établie avec l'accord des joueurs dont les personnages sont mentionnés dans l'histoire.)
"Mais pourquoi moi maman?"
La reine Alice Korvander dont le royaume n'existait plus sourit tristement en regardant sa fille. Les traits de la souveraine naguère si jolie avaient vieilli, rongés par la fatigue et le désespoir. Elle avait presque tout perdu et s'apprêtait à se séparer de la seule étincelle qui la faisait encore vivre: son enfant, sa fille qu'elle avait eu de ses amours avec l'empereur de Mijak, Wismerhill de Lhynn.
"Tu comprendras un jour, ma fille ..." furent les seuls mots qui sortirent de sa gorge nouée. A ses côtés, la reine Elena de Lumen lui enveloppa les épaules de ses bras amaigris; elle aussi paraissait bien plus âgée qu'elle ne l'était réellement. Avec elles se tenait aussi les derniers grands dignitaires de Terra. Ils n'étaient plus très nombreux, la plupart d'entre eux ayant péri au cours de ces cinq dernières années.
Méline Korvander soupira et tourna son regard vers l'Est et chercha au delà de l'horizon rougeoyant une réponse qu'elle ne trouverait pas. Elles étaient aux frontières de ce qui restait de la Confédération de Lumen, dernier refuge des peuples libres. Juchées sur un haut rempart d'une des superforteresses encore debout, ces femmes courageuses étaient le dernier espoir de l'humanité. Et Méline en était le maillon le plus essentiel.
"Je les retrouverai là-bas?"
Elle parlait de son père et de sa tante, Wismerhill et Mélinda, morts ensemble, inséparables jusqu'à la fin, légendaires héros à tomber face au vil Roi Cramoisi et à ses engeances venues d'ailleurs. Elle pensait aussi à Silvara, sa dragonne d'argent, qui s'était sacrifiée pour qu'Alice et sa suite puisse fuir la destruction de Sylvandell. Il était aussi question d'Adamante qui avait failli réussir à changer le cours de la guerre mais dont le sort avait été scellé par le Grand Ennemi lui-même. Son âme arrachée à son esprit errait encore dans les champs de braise où elle s'était éteinte. Lazare Viscarion et ses chevaliers avaient chargé au côté des orcs de Ghurren et leur héroïsme avait permis de gagner quelques jours en ralentissant les hordes adverses. Aucun n'était revenu. Et puis tellement d'autres dont les derniers actes mériteraient d'être comptés et entreraient dans la légende: Fiona déchainant sa magie contre un monstre titanesque, aussi grand qu'une montagne; Cirilla, interdisant seule le passage d'un col face à une armée noire; les paladins de l'Ordre du Griffon offrant leurs vies pour que les populations civiles puisse échapper au pire ... et tellement d'autres, tous morts, disparus.
"Tu les retrouveras tous oui, et ainsi, tu les sauveras."
Méline avait peur. Son monde brûlait, conquis par le Roi Cramoisi. Les armées de l'Ennemi avait balayé les forces terranes au cours des cinq dernières années. C'était un exploit car l'alliance de tous les peuples se serait opposé à lui sans difficultés. Mais il avait fait appel à une puissance obscure venue des confins de mondes oubliés, dans de lointaines galaxies: les Grands Anciens. Ces entités n'étaient en aucune mesure comparables à rien d'autre. Leur puissance dépassait l'entendement. Elles étaient immortelles et d'une infinie profondeur d'esprit. Le Roi Cramoisi avait longtemps œuvré pour les mobiliser à ses côtés. Nul doute que mensonges et perversions avaient usé la sagesse de ces êtres pour les tourner contre Terra. Ces créatures avaient balayé les dragons de Sylvandell et les légions de Mijak. Elles s'étaient repues de bien des corps et avaient assimilé les croyances des défunts. Par ce biais, elles avaient abattu Sha, Lust et d'autres divinités de première importance. Les humains avaient résisté comme ils avaient pu, alliés aux elfes, aux nains, aux orcs et à toute race désireuse de survivre. Année après année, les territoires libres s'étaient réduits et à présent, seul Lumen brillait dans l'obscurité. Le bosquet des Hauts-Elfes était tombé il y avait tout juste une semaine, privant les défenseurs de ses protections magiques. Il n'y avait plus de temps à perdre.
Dans cette réalité parallèle à celle que nous connaissons bien, l'avenir semblait bien sombre et peu d'espoir subsistait dans le cœur des personnages restants.
L'impératrice de Nétheril, Skuld, plus connue sous le surnom d'Ombre, vint poser sa main sur l'épaule de Méline.
"Il est temps Méline. Tu ne seras pas seule, nos enfants t'accompagnent. Vous serez forts et réussirez."
La jeune princesse hocha la tête. Oui, ils réussiraient. Le sang qui coulait dans ses veines était fort. De son père elle avait hérité d'une maitrise de la magie de l'air et d'un caractère bien trempé. De sa mère, elle avait la beauté, la force d'âme et une aura divine qui allait en s'étoffant. Comme ses frères et sœurs, elle était issue des innombrables amours de son père avec les grandes de ce monde. Wismerhill s'était assuré bien des fidélités et loyautés en enfantant avec des alliées puissantes.
Méline était née à Sylvandell et y avait passé une courte enfance heureuse, entre les soins d'Alice et de son oncle, les visites de son père et de sa tante adorée Mélinda, à qui l'on avait rendu hommage en nommant l'enfant Méline d'ailleurs. Elle avait adoré courir sur les pentes des montagnes du petit royaume, protégée par la présence de dragons bienveillants. Elle s'y était faite des amis de son âge dont peu subsistaient aujourd'hui. Et puis, il y avait eu l'invasion par le Nord. Sylvandell avait été le premier royaume à disparaitre et les souvenirs d'enfants aussi. Le regard triste de Silvara les regardant partir la hantait encore. Pour elle, la puissante dragonne aurait pu arrêter n'importe quel dieu mais le destin en avait voulu autrement. Ce fut la première de ses proches aimés à disparaitre. La suite de l'histoire de Méline se résume à une fuite perpétuelle, de citadelles en forteresses, d'espoirs douchés et des morts par milliers, toujours des morts ... Les ennemis de toujours devinrent des amis et Elena de Lumen accueillit tous ceux qui fuyaient. Méline adorait Elena, sa nouvelle tatie, tout comme elle aimait Ombre ou encore Adamante qui n'était plus.
Il y eut quelques victoires des peuples libres mais qui coutèrent cher en vies humaines. Les hommes mourraient sur le champ de bataille et les femmes durent s'adapter et préparer leur survie. Ce fut l'impératrice de Nétheril qui proposa LA solution. Pas pour ce Terra là mais pour l'autre, celui où la guerre n'avait pas commencé et où le Roi Cramoisi sommeillait encore. Ombre avait par le passé déjà connu une situation presque similaire et ses archimages avaient trouvé le moyen d'envoyer Méline dans cette autre réalité, 12 ans avant le début de la guerre, pour avertir ses parents et tous les autres du danger qui les guettaient. Leur Terra était perdue mais si l'on pouvait sauver l'autre, il fallait à tout prix essayer.
Méline avait été choisie pour cette mission. Il n'y avait pas à débattre pourquoi elle et pas une autre. Les survivants n'avaient pas le temps d'épiloguer. Elle était jeune et de sang impérial et divin. On la croirait. Et elle n'y allait pas seule, d'autres jeunes filles l'accompagnaient pour la protéger: la fille d'Ombre et Sha, celle de Ghurren et Fiona aussi, et une héritière de la dynastie des Viscarion , toutes précoces dans leur domaine de prédilection.
Méline acquiesça. L'heure n'était plus aux questions. Dans la cour de la Citadelle, les derniers archimages de Nétheril attendaient. A l'arrivée de la princesse et de ses amies, ils incantèrent et nourrirent un portail interdimensionnel de leur énergie vitale. Le sol tremblait sous l'effet d'un tel sort. Ils avaient mis deux ans pour le créer et le parfaire et ils devaient réussir.
Les adieux furent déchirants et les larmes emportèrent les regrets quand les quatre filles franchirent l'anneau scintillant qui se referma derrière elles. Terra était condamnée, longue vie à Terra!
Méline émergea du corridor magique un peu déboussolée. Ses sens mirent quelques secondes à se remettre et la première sensation qu'elle perçue fut une odeur douce de jasmin. Un rayon de soleil illumina son visage et elle ferma les yeux en se tournant vers l'astre solaire dont elle avait oublié le réconfort. Ses amies faisaient de même. Autour d'elles, tout était si ... calme. Quand Méline rouvrit les yeux, il lui sembla reconnaitre cet environnement. Face à elle, une femme surprise laissait en suspens le geste qu'elle s'apprêtait à faire. Elle était belle, lumineuse, et tellement familière.
"Ma ... Maman?"