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Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 06 mars 2025 22:35
par Sally Whitemane
Le claquement des talons métalliques de bottes de guerre résonnait sur le dallage froid de la nef de l'abbaye de Valmortel. L'édifice était glacial mais correspondait précisément à l'allure de la femme qui remontait l'allée centrale des travées vides vers l'autel.
Sally Whitemane, sanglée dans son armure écarlate, battait les dalles d'un pas rapide. Derrière elle, une sœur de l'Ordre, l'abbesse en personne, tentait de se maintenir au niveau de la Grande Prêtresse tout en lui faisant son rapport.
Abbesse: "Le front tient mais les Olympiens tentent de prendre les hauts cols pour perturber nos ravitaillements. Un affrontement majeur a eu lieu a Valnoir il y a deux jours entre nos armées et une importante force ennemie. Nous les avons repoussé victorieusement."
"L'état de nos pertes?"
Abbesse: "Bien moindre que ce que nous pensions. Nos guerrières ont fait preuve de bravoure, comme toujours. Seulement ... L'inquisitrice Samia a été tuée lors de ces combats. Elle s'est battue héroïquement en menant nos troupes face aux hordes putrides."
Sally s'arrêta brusquement, tournant son regard de feu vers la sœur qui perdit un peu de sa contenance.
"Samia? Comment est-ce possible? Personne ne lui arrivait à la cheville!"
Abbesse: "Un démon majeur Grande Prêtresse ... Un être opportuniste venu des Enfers pour massacrer et propager ses folies. C'était un monstre de flammes et ses attaques ont incinéré Dame Samia, bien qu'elle l'ai frappé mortellement."
Les mâchoires de Sally se crispèrent au point de saillir. Samia et elle avaient été apprenties de l'Ordre ensemble et avaient beaucoup partagé. La grande-Prêtresse refoula certaines émotions pour ne garder que la colère et une furieuse envie de tout détruire.
"Pourquoi nous a tu trahis Arès ... Nos prières ne résonnent plus au Panthéon. Tu n'es plus là pour soutenir tes fidèles."
Abbesse: "Pardon Maitresse?"
"Rien ... Une réflexion personnelle ..."
Dès le commencement de l'attaque des dieux de l'Olympe contre les royaumes libres de Terra, l'Ordre Écarlate, fidèle à l'empereur Wismerhill, avait aligné ses armées sur le front oriental du conflit, face à la grande mer séparant Mijak de l'Olympe, loin de la maison-mère des sœurs. Depuis, les combats avaient été incessants et Sally Whitemane chevauchait par monts et par vaux pour motiver ses troupes et même les mener au combat quand cela s'avérait nécessaire. Plus d'une sœur de sa connaissance était déjà tombée sur l'un des innombrables champs de bataille. Samia était vraiment celle qu'elle aurait voulu voir vivre et passer ce conflit.
La Grande-Prêtresse, maitresse et Inquisitrice Suprême de l'Ordre reprit sa marche métallique pour rejoindre l'autel et s'y agenouiller. Elle ne pria pas Arès, mais se parla à elle-même, incitant sa haine des démons et des ennemis de Mijak à la hisser au sommet de ses capacités guerrières. Quand elle eut terminé, elle donna ses ordres à l'abbesse.
"Je m'adresserai à nos troupes demain. La perte d'une inquisitrice peut inquiéter. En attendant, rassemblez les invocatrices disponibles dans la crypte de l'abbaye. Je ne laisserai pas la mort de Samia impunie. Son assassin n'est plus mais je vais envoyer un message aux Enfers. Nous allons convoquer un Lord que je me chargerai personnellement de faire souffrir. Je lui arracherai sa corne et j'éradiquerai son âme mille fois maudite. Ainsi, les maitres du Tartare veilleront à ne pas s'ingérer dans les actions de l'Ordre Écarlate. Informez moi quand la convocation sera prête."
L'entreprise était risquée. Un Lord des Enfers n'était pas un diablotin. Mais Sally Whitemane était la représentation même de la puissance cléricale. Et même si son dieu avait choisi le mauvais camp, elle conservait un pouvoir considérable, en plus de sa volonté de fer.
Une nonne vint la chercher bien plus tard. Les préparatifs nécessaires avaient demandé du temps. Toujours équipée pour la guerre, elle traversa les différents niveaux du monastère de l'Ordre pour rejoindre la crypte où se déroulerait une délicieuse séance de torture.
Les invocatrices étaient là, nombreuses pour une telle convocation, parées de longues capes rouges et le visage dissimulés sous leur capuches.
"Mes sœurs ... Livrons bataille!"
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 08 mars 2025 13:53
par Valac
Sally Whitemane s’avança dans la crypte, le bruit métallique de ses pas résonnant contre les murs humides de pierre noire. Les torches, tremblotantes sous le souffle glacé qui émanait du cercle d'invocation, projetaient des ombres vacillantes sur les visages encapuchonnés des invocatrices. Le sang frais versé sur le sol noirci formait déjà un motif complexe de runes et de sigils, vibrant d'une énergie sombre. L'odeur de la cendre, du fer et de la chair brûlée saturait l’air, rendant chaque respiration lourde et poisseuse.
Une grande conglomération de prêtresses et d’inquisitrices s’étaient rassemblées à l’appel de leur maîtresse, prêtes à mener une juste revanche contre les forces de l’ennemi qu’elles haïssaient le plus. Des appareils de tortures enchantés et marqués par des runes sacrées avaient été mis à disposition de Sally et ses sœurs, promettant d’exquises tortures pour le diable qu’elles allaient traîner de force hors de son territoire infernal. L’Ordre était en effet expert dans l’art de faire souffrir les damnés, et bien des démons avaient connu des souffrances aussi atroces qu’entre les mains de leurs princes impitoyables.
“Qui oses invoquer le grand Xul’Karoth ?!”
La voix tonitruante avait résonné au milieu du chant des prêtresses, faisant trembler les murs de la crypte. Les invocatrices tressaillirent, leurs chants montant d'une octave tandis que le cercle d'invocation palpitait d'une lumière rouge sang. L'air devint électrique, saturé de mana corrompue. Une forme émergea du centre du cercle : Une silhouette obèse et énorme, couverte d’écailles pales, aux proportions terrifiantes. La bête ressemblait à une sorte d’alchimie obscène d’humanoïde et de dragon, arborant une rangée de crocs carnassiers et dotée de lourdes ailes noires d’où émanaient des fumées nauséabondes.
Si ce n’était pour le cercle d’invocation, la chaleur qui émanait du
démon majeur aurait calciné les prêtresses les plus proches, mais l’odeur putride qui émanait du monstre était toute aussi puissante, arrachant des hoquets et toux chez les moins endurantes.
Le visage reptilien du monstre infernal tourna lentement pour contempler avec rancœur et moquerie chacune des inquisitrices présentes, une langue fourchue venant lécher ses yeux bulbeux avant qu’il ne remarque la présence de la Grande-Prêtresse.
“Sally ... je comprends mieux. Personne n’est assez stupide et arrogant pour invoquer le grand Xul’Karoth, un des grands seigneurs du cercle de la Gourmandise et Dévoreur des Tourments. Personne sauf toi, petite salope humaine.”
Le dragon bipède se pencha maladroitement, tentant de presser la barrière qui le retenait avec ses larges pattes griffues. Les serres plongèrent dans le bouclier magique, le faisant crépiter violemment. Son visage se fendit d’un sourire cruel, ses lèvres rouges et bulbeuses se dilatant grossièrement.
“Hmm ... je peux sentir d’ici ta colère, mais aussi ta douleur. Délicieux. Tu as perdu quelqu’un qui comptait pour toi, et je vois de qui tu parles. Ta petite inquisitrice que Zuul a fauché ? Au moment même où je te parle, elle doit se faire baiser par tous les trous par les soldats de Zuul, son âme à jamais servant leurs éternelles pulsions. Ha ha ha !”
Caressant son triple-menton avec une de ses mains, l’affreux monstre porta à nouveau son regard vers les rangs d’invocatrices en présence.
“Et le plus ironique dans tout ça ? Elle est morte à cause de la trahison d’une de tes disciples. Ici présente, avec nous. Tu aimerais savoir qui ?”
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 12 mars 2025 16:24
par Sally Whitemane
L'Ordre Écarlate était avant tout un Ordre guerrier, prompt à diffuser la parole divine à grands coups de masses ou au fil de lames bénies. Les sœurs rouges n'avaient aucuns penchants pour les fioritures, les démonstrations grandiloquentes ou les étalages de richesses. Sorties de la Grande Cathédrale du Couvent-Mère qui représentait nécessairement la puissance de l'Ordre, elles ne recherchaient que l'efficacité dans l'action et évitaient les dépenses inutiles. C'est pourquoi la crypte de l'abbaye de Valmortel était aussi austère et froide que la pierre qui l'entourait. Seules les ombres tremblotantes des sœurs, projetées par les flammes des torches fixées aux parois, rendaient un semblant de mouvement. La litanie sourde et gutturale ajoutait à cette atmosphère une dimension entêtante et presque malsaine.
Sally Whitemane n'eut pas à attendre longtemps. La puissance de l'invocation collective capta un être d'un niveau qui convenait parfaitement pour faire passer le message qu'elle voulait aux Enfers. La Première Inquisitrice sentit la présence du démon avant même qu'il n'apparaisse. Un sourire carnassier barra son beau visage : elle ne pouvait espérer mieux.
L'intrusion forcée et voulue du démon fut brutale. Le cercle de fidèles vacilla mais tint bon, submergé par une odeur atroce qui appelait à se vider.
Comme toujours et quel que soit le niveau du démon convoqué, la séance commençait par une démonstration de mépris et de vulgarité qui ne surprenait pas. Les Infernaux avaient toujours eu cette arrogance crasse et mal placée que Sally adorait briser.
"Xul'Karoth ... J'aurais espéré un véritable démon plutôt qu'une limace à peine plus effrayante qu'un vermisseau..."
Le mépris perçu dans la voix de la Grande-Prêtresse était aussi profond que l'infini ... Elle s'approcha de la barrière mystique empêchant la créature de l'atteindre, son visage à quelques centimètres des griffes qui pourraient la déchirer.
"Tu pues la merde de tes maitres. J'imagine que tu leur as léché le cul en raclant bien les bords. Tu es tellement misérable que même un incube sans couilles parviendrait à t'engrosser."
La vulgarité faisait partie du quotidien de Sally même si elle se répercutait plus dans son lit que dans une crypte de l'Ordre.
Elle était fière, cette humaine glaciale et sans pitié. Et elle ne laissa rien transparaitre quand le sort de Samia fut évoqué.
"Zuul est mort. Elle l'a éliminé. Et il était puissant, lui. Tu ne lui arrivais pas à la cheville. Il est vrai que si c'est toi qu'elle aurait rencontré, elle serait toujours là."
La remarque suivante du démon ventru la laissa aussi de marbre et pourtant, l'incandescence d'un sort de détection du Mal explosa dans la crypte. Sally ne connaissait pas toutes les invocatrices présentes. Le démon ne lui avait pas mis le doute mais sa harangue rappelait que de temps en temps, un contrôle des vertus était indispensable. Le Pouvoir de Sally emplit la crypte de son énergie vindicative, passant sur les silhouettes des prêtresses et reniflant leur âme.
"Non ...."
Une fissure vint ébrécher le masque ivoirin de la Grande-Prêtresse.
"Non ..."
Personne ne pouvait se défiler à un sort aussi pur. La Détection du Mal portait bien son nom et là, à cet instant, révélait l'ampleur d'une immense trahison.
Sally recula d'un pas en arrachant sa masse de guerre à son ceinturon. Une douleur vive lui vrilla le cerveau mais elle claqua un mot d'ordre qui pulvérisa une des silhouette encapuchonnée. Si Arès avait toujours été la divinité protectrice de l'Ordre, Sally aurait été intouchable. Ce n'était plus le cas et sous le coup d'une nouvelle attaque psychique lancée par d'autres traitresses, elle plia le genou, haletante. Ses possibilités de réaction venaient de se réduire considérablement. Mâchoires crispées, elle déchaina son Pouvoir clérical pour tenter de renvoyer l'immonde démon, la menace principale, dans le trou nauséabond qui lui servait de demeure.
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 14 mars 2025 18:41
par Valac
Un ricanement tonitruant empli la crypte. Le démon hideux se moquait éperdument de la Grande Prêtresse, savourant le spectacle de sa surprise et de la trahison qui se déroulait sous ses yeux sombres et malsains, de sa douleur sous les attaques psychiques.
"Faible… Ils t'ont abandonnée, Sally Whitemane. Ton dieu n'écoute plus tes prières."
L’une des formes encapuchonnées que Sally avait violemment envoyé valser avec son pouvoir se redressa. Abaissant sa capuche. Le visage pâle et anguleux de
Sœur Elyria émergea de l’ombre, ses yeux noirs brillant d’une lueur malsaine. Une des inquisitrices d’élite de l’Ordre, sa réputation était telle que bien des sœurs évitaient de parler en sa présence de peur de s’attirer son regard impitoyable. Dévolue à la cause impériale et au culte d’Arès, sa trahison devait être un choc.
Deux autres prêtresses, des loyales servantes de Sally, s’étaient précipitées pour appréhender la parjure, mais furent aussitôt occis par les deux lames d’Elyria, tranchant dans la chair et les os comme si elles n’avaient été que des fétus de paille. D’autres sœurs se tournèrent contre les siennes, dégainant leurs armes et poignardant leurs consœurs. Le chaos régna rapidement, et Xul’Karoth éclata d’un rire humide. Elyria avança lentement vers sa supérieure.
“Maîtresse… Vous pensiez vraiment que nous allions continuer à servir un dieu qui nous a abandonnées ? Les dieux de l’Olympe apportent des promesses vides. Mais il existe un maître plus généreux, plus présent. Des offrandes. Du pouvoir. Il offre ce que les chiens olympiens nous refusent.”
Elle jeta un regard de côté au démon de la Gourmandise qui pressait son hideux museau contre la barrière du cercle, les toisant en agitant sa langue putride et noire entre ses crocs jaunis.
“Tu crois que les dieux de l’Olympe se soucient de toi ? De nous ? Ils te corrompent et t’utilisent comme une putain pour leurs guerres.”
Voyant que Sally matérialisait son pouvoir pour essayer de bannir Xul’ hors du monde réel, la traîtresse aux cheveux noirs éclata à son tour d’un rire cruel. Avançant vers les glyphes et runes démoniaques qui avaient été tracées sur le sol de la crypte, elle ignora le carnage des soeurs qui s’affrontaient, du sang qui venait former une marre rouge à ses pieds.
“Tu es faible, Sally. Il était temps qu’on t’ouvre les yeux. Qu’on te fasse voir ce qu’un vrai maître peut offrir comme pouvoirs ... et plaisirs. Vois par toi-même l’étendue de ton insignifiance.”
Sur ses mots qui sonnèrent comme une condamnation à mort, la cruelle inquisitrice piétina le cercle d’invocation et rompit la circonférence parfaite du cercle avec son talon, brisant ainsi la barrière. Une onde de choc se propagea, libérant une odeur nauséabonde de souffre et de décomposition qui attaqua les narines de toutes les fidèles de l’Ordre. Déployant ses ailes déchirées, l’abominable Xul’Karoth enjamba le cercle devenu obsolète, son corps vibrant d’un rire profond.
“Beau travail, petite mortelle. Je te récompenserais plus tard. J’ai une salope à la langue trop pendue à mâter ... Sally, voyons si tu feras la fière quand je te vais bouffer tes tripes en les suçant par ton cul.”
Elyria recula lentement, fixant sa maîtresse avec dédain et mépris. Le démon n’attendit pas que Whiteman se relève, avançant déjà à grands pas pour l’engloutir dans sa gueule béante ...
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 17 mars 2025 22:28
par Sally Whitemane
"Pas toi ..."
La trahison était d'autant plus vile que l'amitié liant Sally et Elyria avait été forte. Elle aussi était de sa génération et avait côtoyé Samia lors de fêtes crapuleuses organisées alors qu'elles n'étaient que novices. C'est un culte entier qui s'effondrait autour de Sally Whitemane; non pas seulement celui de leur divinité mais aussi celui de la camaraderie, des bons souvenirs passés ensemble et des longues années de travail acharné pour arriver là où elles en étaient.
"Pourquoi nous fais tu ça Elyria? Tu nous condamnes toutes..."
Autour d'elles, c'était le chaos. Le sang des pieuses inondait les dalles sacrées de la crypte, auquel s'ajoutait celui, corrompu, des traitresses mais malheureusement, en trop faibles quantités.
Il restait une chance de sauver l'honneur des sœurs de Foi mais elle se tarit avec le rire cruel d'Elyria qui profanait la symbolique mystique destinée à retenir le monstre des Enfers.
Cette dernière offense fit vaciller la flamme faible qui brillait encore dans le regard de la maitresse de l'Ordre.Sally fléchit, les deux genoux au sol, à observer ses mains baignant dans le sang de ses sœurs. La bile montait, écœurante et motivée par la présence plus vive du démon purulent.
"Je te maudis mille fois Elyria. Que les Dieux n'aient aucune pitié quand tu devras te présenter à eux."
Ce serait ses dernières paroles et elles n'eurent comme écho que le regard méprisant de la traitresse. Le démon se rua sur Sally et comme promis, tous crocs dehors, il mordit violemment pour arracher ... le néant.
Une des dernières sœurs survivante du massacre avait tiré la Première Inquisitrice en arrière, par le col. Sans grâce et sans élégance, sur les fesses, ses talons battant le sol pour s'éloigner, Sally venait de gagner quelques secondes de répit. Seulement il n'y avait aucune autre issue que celle tenue par ses nouvelles ennemies, bien trop nombreuses. La sœur héroïque se campa devant sa maitresse, masse d'arme levée, déterminée à vendre chèrement leur peau. Elle était jeune, peut être à peine sortie de son noviciat. Elle aurait pu bénéficier d'une élévation rapide si son fait d'arme put jamais être relaté, ce qui ne serait pas le cas ... Le démon la broya avant qu'elle ne puisse à nouveau réagir. Son corps disparut entre les mâchoires du montre et il le mastiqua sauvagement entre bruits d'os brisés et suintements de chairs disloquées. L'être démoniaque rota et recracha une partie du visage et un bout de botte.
Si une jeune sœur s'était dressée face au monstre, alors la Grande Prêtresse se devait de mourir dignement. Sally saisit l'arme de la sacrifiée et se leva, gauche sur ses jambes. Sa tentative de renvoyer le démon l'avait affaiblie, bien plus qu'elle ne l'aurait voulue. En vérité, elle n'était pas en mesure de faire face à qui que se soit.
Sa dernière volonté fut un désir de mort; le besoin meurtrier de quitter ce monde, accompagnée par celles qui l'avait trahie et par le suppôt du Mal immonde qui s'élevait devant elle.
Peut être que quelque part, on porta attention à ce vœu de destruction, peut être qu'une divinité en manque de fidèles estima qu'il y avait là une chance de briller, ou peut être encore, un joueur guettait cet instant pour s'arroger les services d'une femme particulièrement "spéciale" à côtoyer. Qui savait?
Sally Whitemane tendit la main, doigts écartés masquant son visage, terrifiant de haine. Une immense source lumineuse jaillit de ce geste vengeur et envahit la crypte et les sœurs noires présentes eurent les rétines brûlées par cette incandescence de fin du monde.
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 06 avr. 2025 22:45
par Valac
Une lumière aveuglante. Une prière désespérée. Une explosion d’énergie pure.
Et, au cœur de la fournaise blanche, une silhouette émergea, insensible à la brûlure mystique qui consumait la crypte. Elle fendit l’éclat sacré comme une ombre consciente, irréelle, se mouvant avec une élégance presque moqueuse. Le démon Xul’Karoth recula d’un pas, les ailes griffues repliées sous l’effet de la surprise, puis d’un début de crainte animale.
« Tu n’étais pas convié à cette fête, Valac… » grogna la bête, ses crocs bavant d’une rage contenue.
Le nouveau venu s’arrêta à la lisière du carnage. Il portait un manteau noir aussi soigné que sa posture. Pas une goutte de sang sur ses bottes malgré le sol souillé. Il ne portait ni armure, ni robe rituelle. Son élégance était simple, mais chaque détail trahissait la précision, la maîtrise. Un long manteau sombre comme une nuit sans lune, ses cheveux noirs tirés en arrière, et son regard… ah, ce regard. Froid comme un gouffre, mais brûlant d’un feu avide. Il ne venait pas pour tuer. Il venait cueillir.
L’étranger posa lentement une main réconfortante sur l’épaule de la Grande Inquisitrice, et sa voix suave, délicieuse comme un vin empoisonné, se fit entendre pour l’oreille seule de Whitemane :
“Ton coeur a exprimé sa requête et je viens t’offrir ton désir de vengeance, Sally. Que ta justice soit.”
Quel artefact, quel talisman ou gris-gris occulte et malsain avait-il utilisé pour renforcer l’énergie divine qui émanait de la prêtresse ? Elle ne pouvait le savoir, mais elle sentit que sa magie avait décuplé, alimentée tant bien par sa haine immense que par son désespoir profond. La venue de ce mécène sombre et ténébreux fit pencher la balance.
Alors que la lumière surnaturelle explosait des paumes de Sally Whitemane, repoussant les ténèbres d’un dernier éclat incandescent, le démon Xul’Karoth hurla, sa chair boursouflée se consumant par endroits sous l’intensité du rayon divin. Les cris des traîtresses retentirent alors que leurs yeux se liquéfiaient dans leurs orbites, et la crypte, baignée dans une clarté aveuglante, sembla suspendue dans le temps.
Mais toute lumière, même sacrée, s’épuise. Et celle-ci mourut aussi vite qu’elle était née.
« Quel spectacle », murmura l’étrange démon, sans cornes ni flammes, sans ailes ni queue, sa voix aussi suave que perverse. « Même dans l’effondrement, tu rayonnes, Sally Whitemane. »
Son arme tomba sur le sol humide de la crypte, les forces de la trahie la quittant après ce terrible affrontement. Elle chancela, et il fut déjà là, sa main gantée se glissant dans son dos pour la retenir. Il la soutint sans violence, sans pression. Mais elle sentit aussitôt le piège.
Un filet invisible se refermait autour de celle qui venait de tout perdre. Pas fait de chaînes, mais de mots, de regards, d’intonations qui prenaient racine dans son esprit. Son impuissance, son désespoir, étaient autant de clous qui venaient percer son armure d’invincibilité fanatique. Le diable balafré avait soigneusement étudié sa proie, et en insidieux prédateur, avait longuement préparé le théâtre de sa chute pour mieux la savourer comme un fruit qui aurait mûri.
« Tu es allée jusqu’au bout, Sally. Jusqu’à la dernière prière, jusqu’au dernier éclat de lumière. Tu as tout donné. Et que t’ont-ils offert en retour ? Le silence. »
Ses doigts glissèrent jusqu’à sa nuque, caressant une mèche de cheveux poisseuse de sang et de cendre. Il la força doucement à le regarder dans les yeux.
“Moi, j’ai répondu à ton appel.” Souriant avec la douceur d’un amant amoureux, le manipulateur se pencha à son oreille, son souffle la frôlant comme une caresse des plus intimes. « Je t’ai vue, Sally. Pas la prêtresse. Pas la sainte. Toi. La femme. Seule, en colère, désirant… autre chose que ce mensonge doré servi par l’Olympe. »
Elle pouvait sentir, derrière son sourire et la lueur mesquine et cruelle de son regard, que l’infâme sauveur était derrière tout ceci. Quel esprit machiavélique et sadique pouvait faire dresser les sœurs les plus fidèles les unes contre les autres et utiliser un démon majeur comme un simple pion dans son jeu ? Sally était déjà empêtrée dans la toile de l’araignée avant même qu’elle ait foulé ses talons métalliques dans cette crypte.
La belle prêtresse guerrière sentait ses forces l’abandonner tandis qu’une froideur terrible engourdissait ses muscles. Elle avait puisé dans sa force vitale, et son corps succombait à un lent trépas. La seule chaleur qu’elle pouvait sentir, c’était les mains presque brûlantes de l’hérétique, la couvant d’une étreinte protectrice, douce ... possessive.
« Tu peux continuer à les maudire, à hurler que tu mourras pour ces dieux qui t’ont abandonné. Mais je te propose autre chose. Une vérité plus ancienne, plus brute. Pas de trône doré. Pas de jugement. Juste un pacte. Toi… et moi. Tu t’estompes en ce moment, consumée par ta rage et le vide laissé par ceux qui t’ont trahi. Je peux combler ce vide ... te faire renaître, te sauver. »
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 12 avr. 2025 14:58
par Sally Whitemane
L'odeur dans la crypte était immonde. Outre les émanations de soufre venues des Enfers avec le démon obèse, les relents de chairs carbonisées ajoutaient encore à l'horreur des corps meurtris ou mutilés. Des volutes de fumée persistantes filtraient des yeux encore grésillant des traitresses écroulées mortes aux pieds de Sally. L'attaque avait été dévastatrice mais pas suffisamment pour se débarrasser de Xul' Karoth. Sally était trop faible pour une lutte aussi mortelle que celle qu'il aurait fallu mener. Ainsi donc, elle mourrait sans avoir pu venger ses sœurs ni prévenir personne du drame de Valmortel. Si elle avait pu faire usage de cette magie au mieux de ses capacités, c'est à dire sans être épuisée et avant le trépas d'Arès, le gros démon aurait été balayé par sa puissance.
Bien qu'horriblement blessé, il n'allait faire qu'une bouchée d'elle mais l'improbable venait de survenir, et ce n'était pas une bonne surprise. Le nouveau venu qui émergea des limbes magiques générées était bien différent des habituels envoyés des Enfers, ne serait-ce que par son apparence. La prêtresse mit sur son visage le même nom que prononça Xul' Karoth. Ils étaient peu nombreux ... non, en fait l'histoire n'en retenait que deux à avoir échapper aux purges démoniaques lancées contre les adeptes et enfants de Lilith. La Mère avait réchappé au carnage et ce n'était en rien surprenant car la démone maitresse n'avait que peu d'adversaires capables de la terrasser. Ses enfants en revanche avaient été traqués et éliminés un par un. Valac avait survécu, cela se savait, et on disait même que d'autres pouvaient s'être cachés des traques de tous leurs tourmenteurs. Mais cela était peu probable que ce soit vrai. Seul Valac restait une valeur certaine et sa présence face à la Grande Inquisitrice le certifiait définitivement.
"Valac ... Tu es venu sauver ton petit frère?"
C'était cruel car si les démons ne ressentaient ou ne témoignaient que peu d'empathie, même pour leurs "proches", Valac n'avait pu sauver aucun des siens, que ce soit dans ses intérêts ou pour des considérations plus personnelles.
Valac ... Dans d'autres circonstances, il aurait été une belle prise, un énorme moyen de pression pour prendre la main sur les décisions des maitres des Enfers envers qui Sally éprouvait un mépris planétaire. Lui, l'insaisissable fils de la grande Lilith ... Lui l'éternel fuyard ... Lui, le survivant d'une cabale ayant fait trembler l'empire des démons ... Quel ... hasard curieux.
La lumière sacrée s'était adoucie jusqu'à s'éteindre. A l'apogée de son incandescence, Xul' Karoth avait crevé et ses entrailles s'étaient répandues, souillant encore plus le sol de la crypte. De ce démon majeur ne resterait qu'un souvenir qui serait rapidement oublié par tous. La valeur des démons ne se mesuraient guère à leur importance mais plutôt à leur pouvoir de nuisance quand ils commençaient à s'agiter un peu. Xul' Karoth n'avait jamais vraiment inquiété personne; ce qui n'était pas le cas de son cousin éloigné. Malgré son état, Sally ne pouvait que subodorer un piège ou un dessein à cette tragédie sanglante. Un plan avait dû être conçu pour aboutir à un final dont elle n'avait pas encore connaissance. Elle doutait que ce soit elle qui soit exclusivement visée car après tout, elle aussi était remplaçable, mais le miel qui enroba les paroles de Valac lui mit un doute à ce sujet.
"Oh? Des compliments? Tu m'en vois charmée, démon."
Il y avait une règle simple qu'il fallait absolument suivre: ne JAMAIS faire confiance à un démon.
"Tu m'excuseras de douter de ta sincérité Valac. J'ai torturé suffisamment de tes semblables pour savoir qu'un démon n'est rien autre qu'un menteur qui ne connait pas le sens de la générosité. Que veux-tu?"
Elle frissonna. Elle avait froid et son seul point de repère réel était le contact chaud des mains de son adversaire. S'il était là, c'est qu'il y avait un intérêt. La revendre? Non, ridicule. Tirer d'elle des informations? Il faudrait les lui arracher. Une monnaie d'échange? Discutable mais peu probable ... Mais maintenant, considérant les origines de Valac et surtout, les gênes démoniaques de sa conceptrice, Sally eut un doute.
"Tu ne comptes tout de même pas faire de moi une de tes putes?"
Elle parvint à éclater de rire, ce qui rendit un son aussi froid que l'atmosphère de la crypte. Elle l'observa. Il était loin d'être laid, bien au contraire. Son physique faisait honneur à sa réputation. Sally Whitemane était la maitresse de l'Ordre Écarlate mais aussi une fabuleuse salope aux conquêtes masculines de tout genre innombrables. Des démons ... elle s'était déjà amusée avec certains qui en valaient la peine ... avant de les mettre à mort. Oh bien sûr, ils n'avaient pas la puissance de celui-ci mais ...
"Ne me parle pas de l'Olympe Valac. Chacun perd à un moment ce à quoi il croit."
Malgré tout, elle calculait, mesurait les risques, analysait la situation. Elle était faible mais cela passerait et même si Arès avait failli à son devoir de dieu, elle restait une formidable inquisitrice, avec ou sans sa bénédiction. Encore une fois, Valac représentait un rouage intéressant dans sa guerre avec les démons, complémentaire à l'Olympomachie.
"Un pacte est hors de question. Disons qu'une entente temporaire pourrait amener à revoir certaines considérations ... si je survis."
Oui, si elle survivait ...
Ne pouvant plus lutter, elle se sentit partir. Ses yeux se fermèrent sur un beau visage absolument diabolique.
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 16 avr. 2025 20:52
par Valac
— Tu ne comptes tout de même pas faire de moi une de tes putes ?
Ces mots, Sally les avait crachés avec son orgueil d’inquisitrice, comme une dernière arme. Mais son rire, quoique glacé, avait été un masque fêlé. Valac s’en souvenait, et son sourire s’était creusé dans l’ombre de la crypte comme une plaie douce.
Il s’était penché, ses doigts effleurant le front de Sally alors qu’elle perdait conscience.
« Pute ? Non, Sally… je n’ai pas besoin de catins, ce serait bien mondain de te transformer en suceuse de queues de premier ordre. Non. Je veux des lionnes. Des louves. Des bêtes fières qui grondent, mordent et obéissent… quand ça compte. »
Son souffle glissa sur ses lèvres comme une caresse de velours noir. S'il avait de plus grands projets pour elle, sa réponse laissait clairement comprendre que le sort sexuel dont avait parlé la prêtresse n’était pas incompatible avec ses plans.
« Le mensonge est une monnaie courante aussi bien dans les entrailles du Tartare que derrière les portes du divin sanctuaire. Tu comprendras que les anges de tes dieux, aussi, ont le mensonge écrit sur chaque plume de leurs ailes. Mais je n’ai pas besoin de t’induire de mythes pour t’avoir, mon objet de désir. »
Ses yeux, deux pierres d’ambre liquides dont l’une, frappée par la lame divine d’une archange vengeresse, avait marqué la chaire d’une balafre indélébile, avaient scruté ce visage marqué par le sang et la lumière morte. Il murmura encore :
« Tu ne crois pas aux pactes. Alors je t’offre autre chose : un choix. Car vois-tu… tu me dois la vie, Sally Whitemane. Et je n’oublie jamais une dette. »
**
*
Le néant avait englouti la crypte.
Le silence d’après la mort n’était jamais paisible — il était moite, pesant, obscène. Il s’infiltrait entre les os, remontait les nerfs et se lovait dans la conscience comme un amant possessif. Sally avait sombré dans ce silence… et quand elle rouvrit les yeux, ce ne fut pas vers la lumière qu’elle se réveilla.
Mais vers l’obscur.
Le réveil.
Une chaleur moite, presque animale, l’enveloppa avant même qu’elle n’ouvre les yeux.
Elle n’était plus dans la crypte.
Ses paupières s’écartèrent lentement, et la réalité lui mordit les sens : elle était nue sous un manteau de soie noire et de dentelle fragile, allongée sur un autel circulaire aux rebords couverts de chaînes décorées, d’anneaux dorés et de sceaux runiques qui pulsaient. L’autel lui-même semblait vivant, réagissant à sa respiration, à son trouble intérieur. Autour d’elle, un cercle de colonnes d’obsidienne s’élevait, torsadées de lianes rouges et de crânes masqués. L’autel était un trône de la luxure, un berceau pour le péché, un lieu où les saintes se transformaient en catins et où les nobles étaient souillées et reforgées en quelque chose de plus primal. Au-dessus d’elle, un plafond en ogives, constellé de fresques païennes : des scènes d’orgies démoniaques, de sacrifices d’anges, de divinités enchaînées et profanées, dans une beauté baroque dérangeante. Chaque coup d’œil semblait révéler un détail nouveau, une bouche ouverte là où on croyait voir un œil, une queue lovée dans un ventre béant.
Chaque pilier abritait une silhouette encapuchonnée, immobile, esclave ou dévot. Des queues de bête remuaient parfois sous les robes. D’anciennes guerrières ? D’anciennes saintes ? Chacune portait un masque animalier : chiennes, chattes, louves, juments. Leurs colliers résonnaient à chaque pas comme une procession de dévotion pervertie. Mais aucune ne regardait Sally. Elles savaient qui était la préférée du moment.
Une odeur d’encens noir, de peau chauffée et de sueur sanctifiée flottait dans l’air. L’atmosphère était lourde, presque liquide, comme si les lois du monde ici s’étaient tordues autour d’un plaisir interdit.
Elle n’était pas entravée… mais chaque muscle tendu disait le contraire. Elle n’était pas prisonnière. Elle était offerte.
Valac apparut derrière elle, comme une présence qu’on sent avant de la voir. L’enfant de Lilith était vêtu d’un manteau d’ombre et d’un collier de crocs de vampires. Torse nu, ses tatouages brillaient faiblement, comme des sigils démoniaques qui respiraient à même sa peau. Sa peau écarlate avait été cérémonieusement marquée par ses servantes pour d’obscurs raisons que même le savoir occulte de l’inquisitrice ne pouvait deviner, si ce n’est sa nature pervertie.
« Tu es dans l’un de mes refuges, Sally. Un sanctuaire au-delà du Bien et du Mal. Ici, les faux dieux n’osent poser le regard. Ici, même les démons s’agenouillent. »
Il s’approcha, posa le bout de ses phalanges sur son ventre nu, lentement, avec une tendresse dérangeante. Son regard était plus intime que celui d’un amant.
« Xul’Karoth allait t’arracher l’âme et la recracher comme un os moisi, l’offrant à ses larbins qui auraient fait de toi leur amuse-gueule pour l’éternité. Le voir brûler a été un moment des plus délectables, je ne regrette aucunement de t’avoir aidé à immoler un des servants des Sept.”
Les Sept. Ce mot avait été prononcé avec autant de venin qu’on aurait presque attendu qu’un filet de poison s’extirpe des lèvres parfaites du prodige de la Goetia. Les esclaves baissèrent la tête, certaines murmurant des mots inintelligibles ou se cachant dans l’abris des ombres et des colonnes.
« Les Enfers sont gangrenés par l’incompétence de Lucifer et ses sycophantes. Les anges sont faibles, oublieux, impuissants. Et les dieux... des parasites qui se disputent comme des enfants capricieux. Le règne ne m’intéresse aucunement, mais tu sais pourquoi ils me craignent, pourquoi ils ne veulent pas que Dame Lilith écrase la Cour des Serpents et brise le Pacte des Cieux. Car ils craignent de perdre leur fragile sens de pouvoir. »
Un langoureux soupir s’extirpa de la commissure de ses lèvres. Elle pouvait sentir tant de choses différentes entre lui et les autres démons qu’elle a torturé durant sa carrière religieuse. Le manque d’aura démoniaque qui généralement imbibe d’une odeur de soufre les grands diables. Valac, lui, transpirait d’un parfum des plus exquis et raffinés.
“ Nous partageons une haine commune. Je désire exploiter cette haine viscérale. Faire de toi une entaille dans les flancs des Princes Infernaux. Un poignard plongé dans le cœur du Panthéon qui t’a largué comme un jouet dont on se serait lassé. Ne me réponds pas tout de suite ... je te laisserais méditer sur ton choix. Par contre ... il va falloir te requinquer, et la solution est probablement à la hauteur de ta perversité, Grande Inquisitrice. ”
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 22 avr. 2025 19:51
par Sally Whitemane
La sensation était curieuse. Sally avait vaguement l'impression d'être nauséeuse mais quand elle atteignait un pic désagréable, une douceur onctueuse légèrement soufrée la ramenait à un état plus cotonneux. Elle bougea, d'abord un doigt, un frémissement, une tentative d'ouvrir une paupière. Ne sachant si elle était morte ou pas, elle tentait prudemment de reprendre le contrôle de ses sens. Autour d'elle, seul un murmure bruissait, pas désagréable mais pas naturel non plus.
Enfin, elle ouvrit les yeux et sut qu'elle vivait. Elle inspira brusquement comme si on l'avait privée d'air durant un long moment. Les tissus qui la recouvrait étaient si légers qu'elle aurait cru ne pas être couverte. Elle n'avait pas froid. Elle parvint à bouger sa tête pour observer les lieux. Amusant ... d'ordinaire, c'est elle qui se tenait à la périphérie de cercles de ce genre, dans l'attente de torturer un citoyen des Enfers.
"Valac ...?"
Elle détesta sa voix qui sonna comme celle d'une vieille sorcière chevrotante. Elle avait soif et pourrait avaler même de la lave incandescente.
Le démon était là, tellement ... lui-même.
"Quelle mise en scène ... Tu cherches à impressionner quelqu'un?"
Elle se redressa sur ses coudes quand il lui toucha le ventre. Sally la salope frémit à ce contact. Le démon avait pour lui une beauté irréelle et l'inquisitrice savait déjà qu'il ne manipulait pas son esprit pour lui présenter une forme acceptable. Non, il était ainsi depuis le jour de son apparition.
Sally fit l'effort de lever une main pour lui saisir la mâchoire. Le geste aurait pu être un acte de domination mais elle n'en avait pas encore totalement la force. Elle figea son regard dans le sien quelques instants. Les acolytes de Valac frémirent quand l'immonde humaine toucha leur maitre. Cette insolence devait être punie mais ... ils ne pouvaient qu'obéir au démon.
"Valac ... Tu souffres? Quelle ironie ... Tu es capable de ressentir des émotions?"
Il se livrait brut, dévoilait les prémices d'une réflexion destinée à changer les ordres établis, qu'ils soient du côté de la lumière comme des limbes des ténèbres.
"Et tu aurais besoin d'une simple humaine pour t'accompagner dans tes plans qui je pense, ont comme objectif de remplacer le Mal ... par un autre Mal? Je suis flattée mais je ne peux m'empêcher de penser que tu as surtout envie de baiser autre chose qu'un cheval ou une chèvre..." ajouta t'elle en désignant d'un mouvement de tête dédaigneux les formes attentistes en bordure de l'autel.
Elle se redressa et les voilages glissèrent le long de ses formes. Sally n'avait rien de la frêle innocente ni de la noble princesse. Elle était une prêtresse-guerrière et son corps alliait autant la grâce que la tonicité et la force, le tout galvanisé par une poitrine qui rendait jalouse n'importe quelle papuanne.
"Ma ... perversité? Valac ... Tu t'adresses à une mère inquisitrice. Douterais-tu honnêtement de ma pureté? Ce serait criminel de m'adonner aux plaisirs si inutiles de la chair. C'est bien de mon esprit vif et calculateur dont tu as besoin non?"
Ah ... Sally l'hypocrite ... Il se disait tellement de choses à ton sujet, et toutes étaient vraies. Certains appétits ne pouvaient être assouvis que par la plus basse des envie primaire. Cela ne t'empêchais pas d'être aussi avide de bonnes grosses queues que de prières interminables ...
"Que m'as tu préparé qui puisse donc me ... requinquer?"
Re: Les cendres de la Foi [Valac]
Posté : 03 mai 2025 18:12
par Valac
Valac observait.
Immobile. Insondable. Installé dans une posture presque paresseuse, mais où chaque ligne de son corps semblait dominer l’espace comme une main gantée de velours posée sur une gorge offerte. Il ne disait rien — il n’avait pas besoin de parler — car tout en lui était déjà langage : la lenteur calculée de sa respiration, le regard d’ambre luisant comme l’œil d’un félin repu, et l'ombre d’un sourire qui, chez un autre, aurait semblé affecté, mais qui, sur ses lèvres, évoquait la certitude tranquille d’un conquérant. Même le silence autour de lui semblait s’accorder à son rythme, comme si l’air lui-même retenait son souffle, suspendu à la moindre de ses pensées.
Sally émergeait.
Sa peau, tendue sous les voiles diaphanes, luisait d’une moiteur délicieuse. Chaque frisson qu’elle ne contrôlait pas, chaque respiration brisée, faisait naître une onde invisible que Valac sentait vibrer jusque dans les tréfonds de son être. Son souffle saccadé portait encore l’empreinte de son inconscience, de ce moment entre les mondes où il l’avait maintenue suspendue, ni morte, ni vivante, juste assez lucide pour se souvenir de lui. Et elle se souvenait, oh oui… Ses yeux se plissèrent, non pas à cause de la lumière, mais pour tenter de dissiper cette confusion brûlante qui lui restait du contact démoniaque. La réalité se déployait lentement, mais elle s’y raccrochait comme une naufragée agrippant un radeau.
Chaque battement de cils était un frisson.
Chaque tressaillement de ses muscles, un soupçon de honte ou de désir — difficile à distinguer, mais Valac n’avait que faire de cette nuance. Il aimait cette confusion. Il s’en nourrissait. Il la cultivait avec un raffinement cruel. Il connaissait le jeu des masques et n’ignorait rien des postures que les êtres se donnent pour conserver une dignité illusoire. Mais ici, dans ce sanctuaire profané, il n’y avait que la vérité nue. La chair tendue par l’humiliation ou le plaisir. L’âme à vif.
Quand elle murmura son nom, sa voix fragile lui parut déjà une offrande.
Une supplique. Une faiblesse qu’elle aurait préféré ignorer, mais qui résonna en lui comme un hymne bienvenu. Il s'approcha d’un pas, puis s’accroupit à sa hauteur, comme pour égaliser la distance — mais sans jamais céder un seul pouce de pouvoir. Sa main se posa sur son ventre, comme un voleur subtiliserait un secret, et remonta lentement jusqu’à sa clavicule, effleurant chaque tension, chaque mémoire nerveuse. Il traçait des lignes invisibles qu’elle n’osait lire, mais qu’elle ressentait, jusque dans les replis secrets de son esprit.
« Impressionner ?... Non. »
Un souffle à peine. Une confidence plus qu’une réponse. Sa voix, grave et feutrée, caressait plus qu’elle ne frappait. Elle était conçue pour être absorbée, avalée. Il pencha la tête, son regard explorant chaque centimètre de peau visible, et même ceux dissimulés — car Valac regardait toujours au-delà des apparences.
« Je n’ai pas besoin de mise en scène pour te séduire. Regarde-toi, Sally. Même ton cynisme vacille devant le spectacle de ta propre faiblesse. »
Ses mots claquaient doucement, comme une gifle de soie. Il voyait l’humiliation se disputer l’orgueil dans ses yeux. Et il savait qu’elle haïssait plus encore l’intensité du trouble que cette situation réveillait en elle.
Elle tenta de lui saisir la mâchoire — bravade dérisoire — mais il la laissa faire.
Il appréciait ce geste, comme un chat goûte les griffures de la souris trop fière pour mourir sans ruse. Son menton sous sa main semblait presque offert, mais son regard en retour, brûlant de maîtrise glaciale, inversait l’équation. C’était lui qui la tenait, même soumise à son contact.
« Tu me demandes si je souffre… »
Sa voix se fit miel noir, un vin empoisonné et exquis. Elle ondulait dans l’espace comme une caresse impure. « Je ressens tout, inquisitrice. Mais pas comme vous. Vous filtrez, vous refrénez. Moi, je m’immerge. Je savoure. Je transforme chaque douleur en jouissance. Chaque chute en triomphe. »
Ses doigts glissèrent dans sa nuque, frôlant la racine de ses cheveux. Il sentit son pouls s’y presser, chaud, vibrant. Un point de tension délicat, qu’il effleura à nouveau, juste pour voir son souffle se suspendre. Il voulait qu’elle sente la domination non pas comme une violence, mais comme un parfum entêtant, une invitation lente, irrésistible. Elle pouvait mourir d'une volonté de cet homme, sa vie était indubitablement entre ses doigts. Il l'avait sauvé, et il pouvait aussi l'éteindre. Quel était son dessein ?
« Tu joues à la pureté. Mais tu es pleine de contradictions. Un corps de guerrière… Une bouche qui veut blesser… Et des cuisses qui frémissent dès que j’approche. Tu vois ? Je suis bien plus honnête que toi. » Il laissa flotter un silence empli de sous-entendus. Et il savait qu’elle les comprenait tous. Son regard n'avait pas manqué les signes trahissant, au-delà de la fierté de Sally, les prémisses d'un appétit fiévreux. Le bout de ses tétons qui se durcissaient sous son toucher, la fine pellicule d'humidité qui commençait à couler entre ses cuisses, la chaleur de sa respiration ... nul besoin d'artifices ou d'aphrodisiaques pour appeler la bête qui sommeillait au fond de la Grande Prêtresse.
Puis il recula.
Un claquement de doigts, et une prêtresse à la beauté impie cachée derrière un masque d'obsidienne s’avança avec un plateau d’argent. Une coupe ancienne. Une carafe d’hydromel noir. Liqueur interdite, fermentée dans les rêves d’hommes qui n’avaient jamais connu le sommeil. Valac y trempa deux doigts, lentement, puis se tourna vers elle.
Il leva la coupe — mais ne la lui tendit pas.
Il la laissa juste hors de portée, assez loin pour que le moindre mouvement vers elle prenne l’allure d’une soumission. Et pourtant, il ne souriait pas. Pas encore. Il attendait qu’elle comprenne.
« Tu veux te relever ? Reprendre ton feu ? Très bien. Mais bois-le, comme il se doit. Pas comme une noble. Pas comme une sainte. » Il approcha la carafe de ses propres lèvres, mais ne but pas. Il la renversa lentement, l’hydromel traçant une fine ligne sur son torse, entre les arabesques des muscles de sa peau, jusqu’au creux de sa hanche.
« Comme une femme qui reconnaît… qu’elle a soif. »
Et la provocation, là, était nue, brûlante, impitoyable. La coupe était à portée. Mais le véritable nectar s’écoulait plus bas. Lentement. À gouttes longues et épaisses.
Il s’assit, écartant son manteau d’ombre. Le voilà qui dévoilait son arme de chair, son braquemart à la couleur de sang et de passion, sur lequel déjà commençait à s'écouler quelques filets de la liqueur interdit mais Ô combien vitale pour la sainte femme.
Il ne disait rien. Il respirait, fort. Vivant. Entier. Souverain. Et dans cette respiration, il y avait l’appel. Le test. La cruauté du choix qu’il lui imposait.
Le silence se fit, épais.
Ses suivants retenaient leur souffle, subjugués. Valac, lui, attendait.
Pas une parole. Pas une moquerie. Juste le regard de l’Inquisitrice, qui oscillait entre indignation et… quelque chose de plus profond. Plus ancien. Plus dangereux.
Désir ?
Peut-être.
Mais ce n’était que le début.