The Multiversity

Le ciel pleure de toutes ses larmes au-dessus d’une montagne entourée d’une luxuriante végétation des plateaux. Alors que la pluie diluvienne ramollie le sol et gonfle les courants d’eau, le hurlement céleste gronde et frappe la terre de bruits stridents. La brunette ne craint pas les longs et spontanés rayons zigzagués d’énergie à percer les tympans. Son Mark II vise un adversaire qui lui, au contraire, nourrit une crainte grandissant chez la demoiselle. Le type au visage voilé et habillé de la toge de la Mort bloque rayon laser et tirs explosifs avec un cercle défensif, un peu comme un bouclier d’énergie. Elle recule tandis que lui avance. Son aura révèle une malice et un amusement perceptible dans le gloussement glacial de sa voix. La noirceur bloque sa vision avec la foudre comme seule source de lumière. Des quadrupèdes, créatures corrompues par un sortilège démoniaque, l’attaquent des broussailles avec des hurlements déchaînés. Kim Uzuki les repousse, les transperce de sa lame en tungstène. Le sang tâche sa tenue de civile alors que son corps est repoussé par un sort. Elle percute le tronc d’un arbre centenaire, criant de douleur face contre sol.

- Quelle naïveté de croire que toi et ton vaisseau des étoiles puissiez venir sur ces terres comme sur les plaines de Lumen. Je suis conscient de ce que vous êtes, voyageuse de l’Arc-en-ciel. Ce symbole sur cette étrange arme me parait inconnu et pourtant…

L’inconnu saute pour esquiver la lame, évitant ainsi de perdre pied quand il se rapproche de la femme au sol. De son pied il plaque l’arme au sol et afflige un coup sur le visage de Kim avec l’autre. D’un geste de la main, des monstres bipèdes sortent à leur tour de la forêt et s’unissent pour prendre le Mécha du bout de leurs bras. La brunette observe impuissante son unique moyen de déplacement emporté par des bêtes immondes, paralysée par le puissant homme qui lui agrippe le chignon. Elle grogne de douleur et voit de plus près une marque sur le cou de l’individu sous le grondement et éclat d’un éclair au loin.

- Même nos propres alliés ne conçoivent par ce genre d’arme aux mille visages. Mon maître et mon roi seront bien informés de cette présence « étrangère » sur ces terres. Mais rassure-toi, ton golem de métal restera mon petit jouet d’étude. Quant à toi, je te donnerai comme poupée sexuelle à mes animaux en chaleur. Après tout, seuls tes outils m’intéressent.

Kim halète avec force et concentre son électricité dans le Mark II. Elle ferme les yeux et se prépare à l’impact violent qu’elle compte provoquer. Poussé au maximum, l’arme décharge un choc répulsif sur une dizaine de mètres. Si l’homme peut léviter pour échapper à tout impact, l’humaine se retrouve projeté sur des mètres en direction d’un versant. La boue évite des blessures mortelles mais les roulades la secouent dans tous les sens. Son corps tombe alors dans une rivière à fort débit et se fait emporter. Flottant au-dessus du courant, elle s’évanouie sous le traumatisme de sa chute.

**Flashback**

- Le monde ultime ?

- Exactement. Notre compagnie a découvert cet emplacement grâce aux analyses que vous nous avez fournies. Il suffit d’imaginer une ribambelle d’enfants avec l’un d’eux davantage plus grand et fort. L’univers est un jardin avec des trouvailles dans chaque coin et recoin et nous avons trouvé le jackpot.

Kim soupire d’impatience à bord de son mécha. Elle se trouvait alors en suspension dans l’espace à contempler le vide. À l’autre bout de canal de communication se trouvait une ombre assise dans un fauteuil de bureau rembourré de cuir avec le logo de Vector Industry imprimé sur le mur.

- Nous sommes très satisfaits par vos explorations et votre performance, mademoiselle Uzuki. Les données recueillies par le Mark II nous permettrons de nous préparer contre les Xénos et toute autre menace aussi dangereuse.

- Alors pourquoi dois-je explorer cette dimension ? Les Xénos n’attendent pas et capturent des femmes d’Uatis. Je devrais être là-bas pour enfin renvoyer ces monstres dans leur astéroïde et trouver une façon d’exploser ce gros rocher.

- Il s’agit d’un monde dont l’existence semble prendre le pas sur toutes les autres réalités. Nous souhaitons une simple reconnaissance des lieux et nous contacter dans les plus brefs délais. Tout ce qui parait étrange nous suffit. En échange, je vous promets une généreuse récompense à votre retour, une seule et unique requête à nos frais.

Kim hausse le sourcil, suspicieuse de cette vague et alléchante promesse. Elle s’étire les bras et lâche un faible bâillement. Les commandes en main, le mécha accélère en préparation d’un saut en hyperespace.

- Faites en sortes que je revienne chez moi avec ma cité et ma mère en vies.

**Fin Flashback**

Le matin est frais. La longue nuit de pluie est terminée et le sol commence à se sécher sous le chaud soleil. Au bord de l’eau, Kim repose sur un amas de petits cailloux érodés par la nature. Son corps est recouvert d’ecchymoses en plus d’avoir ses vêtements trempés et déchirés. Toujours prisonnière d’un rêve vide, elle continue néanmoins de respirer, son endurance et sa volonté assez solides pour la maintenir vivante.

La flèche traversa l’air, filant entre les arbres. Elle longea une branche d’arbre encore trempée, et se planta dans le flanc de la biche, qui poussa un hennissement de douleur, et se mit à galoper rapidement. Clara ne put que pester silencieusement, car son tir avait loupé de quelques centimètres une zone fatale, qui aurait permis de tuer la biche sur le coup.

« Si tu avais accepté de l’empoisonner, nous n’aurions pas eu à lui courir après... soupira sa comparse.
-  Je n’aime pas faire souffrir les bêtes inutilement, ni empoisonner la victuaille à destination de la Horde. »

Guère concernée par les problèmes moraux de Clara, Shadow haussa les épaules. Les deux Amazones étaient en chasse, et, comme à leur habitude, elles y allaient par deux. Le campement principal de la Horde était proche, et les greniers mobiles de la Horde commençaient à se vider. Il fallait donc chasser, récupérer de la nourriture. Clara étant une chasseresse, son rôle était tout à fait indiqué, mais, en ce qui concerne Shadow... Elle tenait davantage de la tueuse que de la chasseresse, ce qui en faisait un choix assez curieux.

*Mais peut-être que le Conseil souhaite l’apaiser ? On dit que la chasse inculque la patience...*

Pour Shadow, ce n’était en tout cas pas encore un franc succès ! Elles chassaient depuis maintenant une heure. Un violent orage avait secoué la région, et les animaux ressortaient peu à peu de leurs tanières. Clara avançait lentement, essayant de faire le moins de bruit possible, faisant attention aux branches d’arbres, à tous ces petits détails qui étaient susceptibles de trahir sa présence. Elles avaient aperçu cette biche, isolée, qui se mit à fuir, laissant derrière elle des traînées de sang.

Les deux Amazones rejoignirent le lieu où la biche avait été touchée. Au vu des traces de sang...

« Elle n’en a plus pour longtemps, trancha Shadow, mais elle va nous faire courir.
-  C’est comme ça que la chasse fonctionne.
-  N’empêche, je te vois rarement louper ton coup. Je comprends que tu souhaites tuer cette biche en une fois, bien sûr, alors... Pourquoi ce tir loupé ?
-  Parce que tu me déconcentres ? » répliqua doctement Clara.

La réalité est que elle-même ignorait les raisons de cet échec, qui, effectivement, ne lui ressemblait pas. Mais est-ce que tout pouvait s’expliquer ? En attendant, elles avaient un animal à traquer ! Clara se redressa lentement, et suivit les traces de sang, qui serpentaient le long de cette forêt sauvage. Fort heureusement, l’orage n’avait pas déclenché d’incendies en frappant les arbres, mais le vent avait arraché de multiples branches, et avait même partiellement déraciné certaines souches d’arbres. Les Amazones en profitaient d’ailleurs aussi pour remettre à jour leurs points de repère, afin de pouvoir mieux avancer dans la forêt ensuite, et s’y repérer plus aisément. Quand on menait une vie comme la leur, sauvage et non sédentarisée, il fallait savoir baliser autour de soi, et prendre ses précautions.

Shadow avait toutefois raison sur un point : la biche allait galoper. Clara en était réellement désolée pour elle, car son intention était de la tuer d’un coup, de lui éviter de souffrir inutilement. Elle ne pouvait que se sermonner elle-même, tout en se promettant de rapidement retrouver l’animal. Elles continuèrent donc à marcher sur ses traces, longeant un cour d’eau qui serpentait à travers la forêt, convoyant régulièrement les branches d’arbres soufflées par le vent.

Cette région de Terra était déserte. Il n’y avait pas de villages alentour, mais, en revanche, il y avait des monstres, des créatures infiniment plus dangereuses que les biches. Ceci expliquait aussi pourquoi les Amazones voyageaient à deux. Shadow était peut-être impatiente, mais, contre les monstres, elle était au moins aussi efficace que Clara, et, ensemble, elles formaient un duo polyvalent. L’une attaquait à distance, couvrant ainsi celle qui affrontait les autres au corps-à-corps. De cette manière, elles se couvraient mutuellement.

Clara continuait sa marche, ce qui les amena à contourner un rocher, tout en suivant les traces de l’animal blessé.

« Elle est vraiment partie loin...
-  Et vu l’état de la forêt... Enfin, c’est toi la spécialiste en forêt ! »

L’archère haussa doucement les épaules, ne relevant pas le commentaire sarcastique, et poursuivit plutôt sa marche...

...Ce qui les amena près d’une berge où Clara fronça les sourcils en entendant des grognements.

« Qu’est-ce que... ?! »

Il y avait un corps inanimé sur la berge, retenue par les rochers et par plusieurs branches d’arbres... Ainsi que par plusieurs loups affamés qui rôdaient près du corps.

L’arc de Clara se banda rapidement, et une flèche fusa vers l’un des loups, l’atteignant sur le flanc. Les autres loups aboyèrent, furieux, et se retournèrent, tandis que Shadow se mit en position.

« C’est une Amazone ?
-  Je n’en sais rien ! Mais, dans le doute... »

Clara avait déjà équipé son arc lorsque les loups, affamés, s’élancèrent vers elles. Shadow courut alors en avant, et bondit en hauteur, évitant la gueule d’un loup, et tournoya en virevoltant, de manière à les frapper avec ses lames, faisant couler le sang depuis le dos des loups. Ceux-ci aboyèrent douloureusement en s’écroulant au sol, et un troisième bondit vers Shadow, la gueule ouverte... Avant de se recevoir une flèche en pleine gueule, qui ressortit de l’autre côté de son cou.

Ainsi débarrassées des bêtes sauvages, les deux femmes s’approchèrent de la femme blessée. Ses vêtements étaient dans un triste état, en lambeaux, avec de multiples ecchymoses.

« Par la Déesse, elle a l’air de s’être bien battue... »

Clara récupéra un élixir d’Hirondelle accroché à sa ceinture, un élixir améliorant la cicatrisation des plaies, et le fit boire à cette femme, tout en retirant quelques-uns de ses vêtements pour voir l’état de ses blessures. A priori, il n’y avait aucune hémorragie interne, et elle tâtonna son corps, cherchant des traces d’os brisés.

Il allait falloir quelques minutes le temps que l’Hirondelle fasse effet, ou, plutôt, commence à faire effet. Mais, pendant ce temps, les femmes sentirent d’inquiétants bruits de pas, des craquements sur les branches d’arbres abandonnées au sol, signalant l’arrivée de nouveaux monstres...

Un brin de conscience subsiste encore après cette expérience très difficile. Kim cligne faiblement des yeux, le corps immobile. Ses muscles lui font souffrir le martyr. La douleur la cloue contre les rochers humides, avec une flaque d’eau alentour de l’aventurière en péril. En effet, la faiblesse attire les prédateurs et son sang est senti à des mètres à la ronde par le sens aiguisé des loups. De tels canins n’hésitent pas à mordre et achever une proie à terre. Ce qui sauve Kim d’une mort horrible sont les arcs électriques dansant sur la surface de son Mark II. Les canons ne répondent pas aux signaux électriques et l’arme produit un ronronnement anormal. Mais c’est surtout la menace d’un choc violent au contact de l’eau qui garde les quadrupèdes à l’écart. Avant de sombrer d’épuisement, elle a une impression de déjà vu.

**Un lointain souvenir**

Une jeune fille de dix ans retourne à la maison avec son sac à dos et un moral très bas. Elle balaie les cailloux de son pied et tourne les yeux vers un gamin éloigné faisant la grimace et un geste de moquerie du doigt. La fillette accélère le pas et rentre chez elle en claquant la porte. Sa mère appelle son nom mais elle va se réfugier dans son lit, dans ses couvertures. Une autre femme cogne à la porte de chambre et entre quelques minutes plus tard.

- Alors, on fait une grosse boude à cause des examens ? On a pourtant pris soin d’étudier ensemble les nuits dernières.

- Les autres me traitent de « prise électrique » ! Chaque fois que je touche à du textile ou que je frotte mes mains sur un truc j’envoie un choc au toucher. Ils disent que ça pince trop.

L’adulte va s’asseoir sur le bord du lit. D’une main rassurante celle-ci vient caresser la tête de la fillette avec une douceur rassurante. La femme va même jusqu’à embrasser longuement le front de l’enfant. Un choc survient ; la fille le ressent s’échapper de son corps mais la présence mature n’en dit aucun mot.

- les enfants sont enclins à éviter la difficulté. On ne peut en rien changer des gosses qui grandissent et deviendront un jour de belles femmes intelligentes. Un jour, tu trouveras des femmes qui te respecteront pour qui tu es.

La belle femme la retient alors contre son corps dans un câlin attendrissant. Elle observe par la fenêtre la banlieue toute propre et paisible où elles vivent. Au loin, la capitale d’Uatis rayonne de ses lumières artificielles et de ses projecteurs pointant vers les étoiles. D’un sourire amusé elle écoute sa compagne hurler comme une bonne mère au foyer que le repas est prêt. Elle prend la fillette dans ses bras, le fait s’asseoir sur son épaule.

- Le respect est mutuel. Promets-moi de rester humble et gentille. Deviens meilleure pour toi-même et pour tous les autres et enfin ils cesseront ces jérémiades.

- Oui, mère.

**Fin du souvenir.**

Lorsque l’élixir coule dans sa gorge et entre dans son organisme, l’uatéenne sent des forces revenir. Les plaies et coupures profondes se referment comme une forme de guérison accélérée. Il faudra un certain temps avant que la brunette rouvre les yeux dans un état confus. Sa dernière vision était celle de loups affamés et maintenant elle voit le visage de deux resplendissantes femmes à ses côtés. Kim tousse et relève difficilement la tête, puis le haut de son corps. Sa respiration se saccade, un regard nerveux scrutant les bois avec une anxiété décuplée par le bruit de ces monstres au loin. À son avant-bras reste accrochée son arme. L’ouverture partielle des canons lui fait confirmer la gravité de sa situation et rumine sa colère d’une morsure de sa lèvre inférieure.

- Là, je suis foutue. Aucune ville à des kilomètres à la ronde et l’essentiel de mes outils sont inutilisables.

Kim tourne ensuite son attention sur les deux femmes. Elle inspire et cherche la détente tandis qu’elle les observe, elles et leurs attirails. Ces demoiselles légèrement habillées ne cachent pas une aura puissante de guerrières et une aura de beauté qui captive quiconque reconnait la vraie beauté de la gente féminine. Elle frisonne et constate bien vite l’état de ses vêtements et que certains morceaux ont été retirés. L’élixir, dont le goût reste en bouche, peut ainsi terminer la cicatrisation des coupures. Kim hoche humblement la tête.

- M-merci pour votre aide. J’ignore qui vous êtes mais je préfère vous faire confiance que de rester aux prises avec ces monstres. Je suis une alliée et j’ai perdue quelque chose de très précieux…ces horreurs en sont peut-être après moi.

« Ce n’est pas une Amazone, je ne vois aucun tatouage sur elle...
-  Dois-je te rappeler que nous sommes supposées venir en aide à n’importe qui, surtout de notre sexe ?
-  Même dans un endroit dangereux comme celui-là ? »

La flèche de Clara siffla en réponse, et transperça le crâne d’un Warg affamé, tuant cette espèce de gros chien hirsute. D’autres grondements se faisaient entendre, et Clara perçut notamment le roulement de petits cailloux le long des falaises les entourant, signe qu’une meute était en train de se rapprocher. Elle prépara un nouvel arc, tout en semblant enfin vouloir répondre à son partenaire :

« Il n’y a que la tête posée contre la poitrine d’une femme que nous ne sommes pas en danger, ma sœur. »

Shadow persifla tout en se relevant. Il fallait encore que l’Hirondelle fasse effet, et, pendant ce temps, les bêtes se multipliaient. Les Wargs avaient probablement été attirés par le sang de la biche, ou par celui de cette femme. Clara décocha une nouvelle flèche à un angle, entre deux rochers, et transperça le crâne d’un autre Warg qui furetait par là, et se retrouva transpercé à hauteur de la gueule. Comme toujours, l’archère amazone se montrait terriblement observatrice, ne laissant passer aucun angle mort, tandis que les Wargs se rapprochaient.

Les deux Amazones savaient qu’ils allaient bientôt charger... Et la mystérieuse femme se mit soudain à réagir, émergeant de son sommeil. Elle leur expliqua être une « alliée », et les remercia pour leur intervention.

« Ne nous remercie pas encore, nous avons dû rester à veiller sur toi, la Belle au bois dormant, et les Wargs nous ont encerclés... »

Les quelques approches des monstres n’avaient eu que pour but de tester leurs défenses. Les Wargs étaient régulièrement utilisés comme montures par les Orcs. Soit ceux-ci étaient purement sauvages, soit ils l’étaient devenus. Dans tous les cas, ils étaient dangereux, et allaient bientôt attaquer de partout. Si le trio partait devant, elles se feraient attaquer de toute part. Impossible de passer par l’eau déchaînée de la rivière.

« Soit on tente une charge désespérée, soit on attend d’être submergées... Tu sais te battre, cocotte ? »

Shadow avait ses lames, mais elle avait aussi une lame de rechange, une longue dague qu’elle jeta au sol, à côté de la femme, tandis que les Wargs rugissaient à nouveau.

« Ils arrivent ! »

Gauche, droite, et plusieurs bondirent sur le devant, fonçant sur les trois femmes en hurlant furieusement.

« POUR LA DÉESSE !! »

Et Clara décocha sa flèche !

Les deux guerrières à l’habillement très minimal sont chacune différente l’une de l’autre. La blonde est une femme dont l’arc et les flèches servent à contenir les quelques bêtes courageuses de s’approcher de leurs proies. La seconde à la chevelure noire corbeau montre un certain cynisme face à ce scénario d’encerclement, comme si venir la secourir risque de leur coûter la vie face à une horde de monstres chiens au nom inconnu pour l’étrangère du lot. Kim soupire devant de surnom approprié mais aussi réducteur. Elle reconnait bien là le genre de commentaires au sein des militaires, chez les femmes fortes qui n’attendent que voir les tripes de la brunette en action. La distribution de la longue dague lui donne une arme avec laquelle se défendre mais loin de sa familiarité avec la technologie.

Kim prend l’arme et se relève de son lit de roches inconfortables. Ses blessures sont refermées, son endurance revient et son énergie circule de nouveau dans ses veines. Dos à une rivière agitée, elle confronte de face les étranges créatures agissant avec une conscience de meute; tester la proie puis sortir l’assaut total une fois les options épuisées. Cette attitude lui rappelle une race en particulier. Son expression se durcit, sa voix se refroidit. Des arcs électriques dansent dans sa paume et circulent le long de la dague. Elle l’imbibe d’une couche d’électricité qui double la taille de l’arme en apparence et la rallonge de plusieurs centimètres. La demoiselle à la chevelure d’ébène la fait sourire de cette question mal placée.

- Si vous me donnez une minute, je pourrais les vaincre d’une attaque que je me suis juré de conserver en dernier recours. Si tu veux voir de quel bois je me chauffe, ne met pas les pieds dans l’eau.

Elle donne le ton sur ses facultés, sur la portée de ses pouvoirs sur des monstres sans intelligence avancée. Sa dague sert de catalyseur à son électricité. La force de ses éclairs se concentre autour du métal comme un paratonnerre, à la différence que la mutante peut tout décharger dans la direction de la pointe. Son avertissement concerne les deux femmes aucunement immunisé à ses décharges tandis que Kim peut rester en place et recevoir la première vague de Warg. Leurs musculatures quasi humaines et leurs fourrures ne serviront à rien. L’humaine envoie un arc électrique spontané dans le crâne de la première bête. La seconde emboîte le pas avec une paire de compagnons dont elle fait rôtir les corps avec un flux qui se propage dans l’eau. Sa dague retrouve une forme normale sans que  Kim ne lève le petit doigt. Toutefois, elle remarque un Warg attaquer le blanc de la seconde guerrière. Elle saute par-dessus l’archère blonde et place devant la créature, son arme se plantant dans sa gorge. Les gicles de sang viennent se répandre sur une joue, puis sur ses seins. Les membres tremblants, elle repousse le corps dans l’eau après un bon effort. Elle ressent la présence des autres en retrait et son expression devient glaciale. Ces Wargs lui font trop penser aux Xénos de son monde d’origine et cela était la dernière goutte.

- J’imagine que je dois une faveur à votre déesse. Vous m’avez sauvée avec cette boisson miraculeuse et je compte vous rendre la pareille.

Kim prend un caillou à ses pieds et la serre fortement. Des éclats de lumières clignotent à répétition dans sa paume avant de lancer la roche dans les airs avec un angle parfaitement vertical qui le force à retomber au sol. Elle vise l’orée des bois d’où viennent les Wargs. Ses doigts attendent le bon instant pour une pichenette chargée en arcs électriques.

- Couvrez-vous les oreilles et restez à couverts.

Lorsque sa pichenette touche le caillou, une détonation fulgurante éclate. Il devient un projectile de haute vélocité qui charge la horde et transperce le corps de ceux dans le chemin. L’onde de choc repousse ces bêtes jusqu’à les faire valser en retrait. Le sol se déchire sous l’impulsion et laisse la marque de son parcours bien loin dans la forêt. Kim retrouve une humeur moins rigide et plus détendue ; si ces chiens ne sont pas morts l’onde de choc leur a détruit les tympans et les canaux internes. Elle fixe ses adversaires vaincues, oubliant sa nudité et le sang pour une prestance et une aura de combattante forte et fière de son succès.

« T’accorder une minute ? Hey...
-  Ce n’est pas à nous qu’il faut demander ça ! »

La magie était familière des Amazones. C’était surtout le cas pour Shadow, qui se mit à attaquer... En se téléportant. Ou, plutôt, elle avançait subitement très vite sur une trajectoire rectiligne de quelques mètres, se transformant alors en une sorte de série d’ombres avant de fondre sur ses ennemis, les attaquant avec ses deux longues dagues. Une véritable tornade de beauté et de sauvagerie, comme on imaginait les Amazones se battre. Elle dansait sur place, et bondit en hauteur, évitant la gueule d’un Warg tout en tournoyant sur place, et trancha sa gorge avec sa lame. Shadow retomba ensuite au sol, et fléchit les genoux, dégageant un angle de tir à Clara qui s’en servit pour décocher une autre flèche. Le projectile transperça la cage thoracique d’un Warg, tandis que d’autres bondissaient depuis les flancs, renversant une série de cailloux avant d’atterrir à même le sol, et de se ruer vers l’archère.

Clara n’était toutefois pas qu’une simple archère, elle était une Amazone. Et, tandis que les Wargs s’approchaient sur son flanc, elle décocha une nouvelle flèche, atteignant le Warg du milieu, puis sortit sa longue épée tout en remettant son arc dans son dos, et frappa avec celle-ci. De son côté, Shadow continuait à bondir, mais même les deux Amazones ne pouvaient lutter indéfiniment contre un tel nombre.

*Les Wargs commencent à nous déborder...*

C’est à ce moment que Clara sentit une hausse d’activité magique émaner de son dos. Se retournant, elle vit des éclairs suinter autour de la jeune femme, celle qu’elles venaient de sauver.

*C’est une magicienne ?!*

Quoi qu’elle puisse être, la femme attaqua alors, générant des arcs électriques... Et termina par une surpuissante explosion qui fit trembler la zone, provoquant une faille sur le sol en envoyant une sorte de rayon d’énergie. Une violente explosion résonna à l’entrée de la crique, dispersant les Wargs, et convainquit les derniers de ces monstres de fuir à bride abattue. Les deux Amazones restèrent légèrement silencieuses devant ce spectacle pendant quelques secondes, avant qu’un sifflement ne s’échappa des lèvres de Shadow :

« Okay... C’est pas mal. »

Clara se retourna vers la femme, et fronça doucement les sourcils, sa curiosité piquée à vif :

« Qui es-tu, exactement ? Une sorcière ? Une magicienne ? »

Extraterrestre ou mutation d’une espèce animale, une horde reste la même; paquetée en un large groupe avec une soif pour détruire, tuer ou capturer une proie inférieure. Kim Uzuki connait bien cela et les méthodes déployées par son peuple pour lutter contre un avantage numérique. Des canons lasers peuvent tuer mais le tir rectiligne ne tue que ce qu’ils se trouvent en ligne de mire. Le « railgun » de l’aventurière déploie une physique plus avancée pour mettre à terre les Wargs. Avec la retombée de la poussière, elle observe le carnage; Les chiens étaient soient réduits en pièces, vidés de leur sang via des blessures internes ou dans le coma après la perforation des tympans. Le retrait des autres bestiaux donne ainsi sa première victoire sur le sol de Terra. Elle pousse alors un gros soupir de soulagement, son inspiration d’un calme plus serein, jetant un regard curieux sur son corps tâché de sang dans sa nudité presque totale. Au vue des circonstances, elle se sent satisfaite de son état actuel, même que le sang de son ennemi sur sa peau procure une étrange sensation de fierté.

Kim hoche la tête face aux deux amazones ayant offertes une performance exceptionnelle. La blonde avait gardé son combat à distance bien propre, ciblant les points faibles pour ensuite changer d’arme au moment opportun. Celle-ci a une intelligence tactique terre-à-terre logique avec l’environnement et les dangers de la faune. L’amazone à la chevelure d’ébène a démontré une prouesse digne d’une furie de la nature. Si Kim est la foudre qui grille les monstres dans un châtiment divin, cette Shadow était comme une bourrasque de vent létale qui en tournant autour de l’ennemi est devenue une tornade qui lacère et transforme la tempête en une pluie de sang. La jeune brunette montre son respect avec un hochement de tête poli. Elle reconnait tout autant les qualités combattives de ces femmes que ces dernières face au pouvoir très puissant de la mutante.

La question la pique au vif. Elle croise les bras pour cacher sa poitrine et songe hâtivement à une réponse. Ce monde connait rien de la technologie et expliquer sa situation avec des termes scientifiques seraient difficile, voir aussi contre-productif. Il est plus utile de respecter ses propres paroles – quand elle clame être une alliée – pour survivre et recevoir une aide immédiatement nécessaire.

- J’avoue ne rien savoir en magie ni sorcellerie. Je ne connais même pas la différence entre les deux. Je suis née avec mes pouvoirs et j’ai dû apprendre à les maîtriser depuis presque 5 ans.

Elle serre son bracelet au niveau du poignet. Elle peut sentir que les circuits sont endommagés par l’eau et les chocs physiques de la précédente nuit. Sans expert en technologie, la communication est impossible avec sa réalité. Kim repose ses yeux sur les amazones avec un regard plus ferme et sérieux.

- Je suis venue sur ces terres avec mon méch…non, avec mon « Golem de métal ». J’ai été acculée par un mage très dangereux. Il a détruit mes armes et volé mon golem. Je ne pourrai jamais retourner chez moi sans elle. Son nom est Dinah.

Kim ramasse son Mark II du sol. La surface plate tâchée par la boue et abîmée par l’eau ressemble plus à une planche métallique inusitée que l’aventurière place alentour de son avant-bras. Un symbole rouge y est visible, ce que la brunette néglige de cacher.

- Je ne suis qu’une étrangère à vos yeux mais je demande votre aide. N’importe quoi qui puisse me guider dans la bonne direction ou me donner des ressources essentielles. Je suis prête à tout pour gagner votre support.

Après le combat contre les Wargs, Shadow et Clara reprenaient leurs esprits, et Clara en profitait évidemment pour se renseigner. Elle nota alors la curieuse arme que la femme portait, et fronça les sourcils, se faisant la réflexion que les Métallurgistes aimeraient sans aucun doute inspecter cet équipement.

« Tu n’es pas originaire de Terra, hein ? Ce genre d’armes que tu portes... Ça vient d’ailleurs. »

Clara était une Amazone endurcie, entraînée. Autrement dit, elle savait qu’il existait d’autres mondes que celui-ci, comme bien des Amazones. Les Métallurgistes récupéraient d’ailleurs des pièces d’équipements venant d’autres mondes, principalement du Rustworld, mais l’arme de cette femme avait l’air un peu trop moderne pour venir de ce monde ravagé. La puissante Clara hocha donc doucement la tête, tandis que la femme leur expliqua qu’elle avait affronté un magicien, et qu’elle devait retrouver son « golem de métal », Dinah.

Le terme fit doucement sourire Clara, qui posa ses mains sur ses hanches. Shadow avait rangé ses lames, et haussa les épaules, presque dédaigneusement.

« Elle parle d’un mecha, non ?
-  Je crois bien, oui. »

Clara croisa doucement les bras, avant de préciser :

« Nous ne sommes pas totalement incultes, jeune femme, sourit-elle doucement. Mais vous n’avez pas l’air de venir du Rustworld... Peut-être Uatis, non ?
-  Il nous arrive parfois de nous y rendre.
-  La Horde des Amazones a beau n’avoir pas de patrie, notre tradition est séculière. Les aînées chantent et content encore les légendes de l’Arc-En-Ciel, l’époque des jours heureux, avant que l’Eld ne chute, et que la lignée d’Arthur l’Aîné ne soit définitivement brisée lors de la chute de Gilead. »

Face aux Amazones, cette jeune femme n’était pas tombée face à de simples sauvages. La Horde suivait son propre code d’honneur, mais disposait clairement d’une culture, avec une histoire... Et, bien que tout soit de tradition orale, la Horde disposait aussi de manuscrits, de parchemins, d’écrits relatant les légendaires contes amazones, dont les contenus ancestraux récitaient, sous forme de légendes, des faits historiques oubliés même de la mémoire des hommes.

« Je sais que ton mécha s’appelle Dinah, mais tu es toujours une étrangère tant que je ne saurai pas ton nom, jeune femme. Disposes-tu d’un moyen quelconque de retrouver ton robot ? »

Sauf tout le respect qu’elle doit avec humilité envers ces femmes et leurs cultures d’origines, Kim ignore tant de choses de ce monde, tant d’informations sur l’existence de sa propre patrie et de l’Histoire de cet univers qu’elle sous-estime son interlocutrice. Elle agit comme une exploratrice rencontrant une tribu autochtone avec un préjugé plus relié à son ignorance qu’à une insulte vulgaire et indigne. Elle parle avec de simples termes et devient bouche bée à la surprenante réponse de l’amazone blonde. Kim hoche la tête à la question sans raison de cacher la moindre information ni même son arme présentée sur tous les angles. L’extrémité du Mark II est dirigé vers le côté, curieuse de voir si la fonction la plus basique fonctionne. D’un courant électrique prudent, une ouverture se déclenche et laisse sortir une lame tungstène attaché en permanence au dispositif moderne. Sauf que désormais, la lame reste exposée à l’air libre.

Le moment le plus choquant reste les propres mots de l’archère et de sa partenaire. Elles connaissent le terme Mécha mais aussi l’existence de ce monde post-apocalyptique où une connaissance personnelle vit des journées chaudes et érotiques. Par la suite, Kim écoute les brèves anecdotes d’une légende autour de l’Arc-en-ciel. Différentes réalités distantes et parfois unies dans le plus grand secret. Le cœur de l’aventurière se resserre devant cette découverte qui la bouleverse son esprit.

- Je…viens d’Uatis, oui. Je m’appelle Kim Uzuki. J’ai passé cinq ans dans un camp militaire pour m’entraîner et devenir forte contre des ennemis de ma patrie. Je n’ai jamais vu ni entendu votre peuple venir dans  ma réalité. Désolée…

Kim s’excuse pour le bouleversement secouant sa tête et son attention. Elle garde la lame dirigée vers le bas tandis que son arme cache sa poitrine nue. Sa respiration cherche l’équilibre face à un cœur qui palpite. D’un œil fuyant, elle scrute l’amont du courant d’eau et pointe vers les verdures des kilomètres plus loin.

- Le magicien parlait de son maître et de son roi. Il n’a spécifié aucun nom mais il savait pour mon mécha et la valeur que mon véhicule représente. Tout ce que je peux confirmer c’est qu’il veut garder Dinah pour lui out seul, un cas typique de soif de pouvoir ou de curiosité.

Cela dit, Kim est loin d’être prête à remonter une distance aussi dense et longue que cette forêt de Terra. Quel genre de femme peut survivre à une expédition avec une arme dysfonctionnelle et sans vêtements ? La modernité ne suffit pas pour cette tâche de longue haleine et Kim le devine aussitôt sans repaire. La jeune brunette commence à se rapprocher. Sa main tendue vers les deux femmes, elle les fixe avec une détermination qui supplante son pas de géant vers un abysse de mystères et de découvertes.

- Eld, Arthur l’Aîné, Gilead, ces noms ne me disent rien. Mais, je souhaite en apprendre plus à leurs sujets et écouter vos légendes. Ma venue ici à un sens et je désire le découvrir, quitte à vous suivre jusqu’en enfer. Laissez-moi vous rejoindre et payer ma dette envers vous, pour avoir sauvé ma vie.

« Les Amazones sont discrètes, surtout sur d’autres mondes. Il aurait été en réalité surprenant que tu aies entendue parler de nous, jeune femme. »

Pudique, elle dissimulait cette poitrine de manière inattendue, en faisant léviter une sorte de dague. Des éclairs suintaient de l’objet, protégeant ainsi ses seins. Clara en sourit légèrement, tandis que la jeune femme leur expliqua un peu plus longuement ce qui l’amenait ici. Un magicien, un maître... Clara, qui était plus cultivée que Shadow sur ces sujets, resta silencieuse, tandis que la jeune femme reprit. Kim leur expliqua qu’elle voulait les rejoindre, et Clara sourit brièvement, surtout quand Kim évoqua la dette qu’elle leur devait.

Clara avait rangé son arc dans son dos, et approcha sa main de la dague électrifiée. Elle se concentra, et une aura magique recouvrit ses doigts. Elle posa ensuite la main sur l’épée, et frémit en sentant les courants électriques la traverser, se heurtant toutefois à son bouclier magique, et maintint encore la pression... Jusqu’à ce que la lame cesse de briller. Clara la regarda alors, et hocha doucement la tête, constatant les pouvoirs magiques de la jeune femme. Et son autre main, plutôt que de serrer celle de Kim, alla caresser sa joue. Son pouce glissa contre ses lèvres.

« N’aie pas honte de nous montrer tes formes, Kim. Et nous pouvons t’offrir l’hospitalité au sein de la Horde. Quant à ta dette... Puisque tu reconnais en devoir une, il est logique que nous en tenions compte. »

Protéger Kim des Wargs n’était pas, en soi, un acte dont elle devait se sentir redevable, mais l’honneur était très important chez les Amazones. Si Kim estimait qu’elle devait laver son honneur en remboursant sa dette, aucune Amazone n’aurait été contre. Kim avait au passage pu voir que, même si Clara avait un style moins impressionnant que Shadow, elle n’en restait pas moins une redoutable guerrière, qui maîtrisait aussi bien la magie que le combat physique.

« Tant pis pour la biche, mais nous revenons avec une femme bien plus intéressante.
-  Je trouve aussi.
-  Il ne nous appartient pas de décider si nous t’aiderons à retrouver ton robot, Kim. Le Conseil des Amazones examinera ta requête, si tu en as une à faire. En attendant, hâtons-nous, la zone n’est pas sûre. »

Clara lui rendit sa lame en tungstène,  avec un léger sourire sur le coin des lèvres.

« Terra est un monde à la technologie que tu risques de trouver arriérée, et nous n’avons pas emmené de chevaux. Autrement dit... Il va falloir marcher. »

Fort heureusement, il n’y avait qu’une demi-heure de marche, environ, avant de rejoindre le campement.

« Ton robot, s’enquit Shadow, qu’est-il capable de faire exactement ? »

Kim connait la légende des Amazones, surtout la version terrienne. Cette interprétation allégorique de femmes rejetant leur société originelle pour devenir leur propre patrie et forger leurs lois et coutumes donna une inspiration inébranlable à celles cherchant l’égalité ou la supériorité sur leur comparse du sexe opposé. Les effets sur la Terre deviennent plus visibles et surtout plus efficaces à mesure que les décennies passent, que le flot nettoie les veilles blessures et emporte la vielle garde idéologique dans les abysses. Sur Uatis, la civilisation féminine est un croisement entre force et sagesse, un compromis qui permet à des femmes comme Kim de rester forte sans devenir une bourrine comme certaines soldates zélées. En y songeant, son monde d’origine ressemble à ce rêve idéalisée de la société matriarcale mais sans les Xénos venus d’un immense astéroïde.

Elle inspecte les deux femmes du regard, surtout leurs attirails. Sa première rencontre avec de vraies fières guerrière amazones est déjà d’un enrichissement essentiel pour comprendre Terra et s’entourer de personnes fiables. La brunette plie les jambes jusqu’à récolter de l’eau de rivière de sa main. Sa main se promène sur sa poitrine et ses abdominaux pour laver la peau de la souillure sanglante et hideuse du sang de Warg. Ce bref moment de purification donne la chance à l’archère de toucher la lame chargée en électricité. Kim lève la main pour la prévenir mais la blonde contrôle la situation avec aisance. L’éclat électrique finit par s’estomper, son arme redevenue normale et maniable sans danger. Mutation et magie ne semble n’avoir aucune distinction entre les mains de cette amazone d’une beauté fascinante pour l’uaténienne. La caresse la garde détendue. Sa bouche répond en de légers soubresauts dont le dernier mouvement la fait embrasser ce pouce.

- Tant que cette dette reste dans les limites du raisonnable, je l’assumerai. En revanche…

Kim récupère sa lame, la réinstalle dans le creux de son arme technologique qui sera en mesure de la retenir le temps de cette marche vers leur camp, vers la Horde. Une fois lavée, elle comprend que le chemin se passera sans vêtement pour recouvrir ses seins nus. La longue trempette sous la pluie et dans la rivière l’ont assez engourdie pour que le froid ne puisse gêner sa marche. Quant à sa réplique, elle enchaîne avec un ton plus stressé.

- Je ne veux pas perdre mon indépendance, ni ma liberté et ni mon honneur pour une question de paiement même si on parle de ma propre vie. J’ai déjà perdu des années de ma jeunesse dans un monde vide et froid, cloîtrée entre quatre murs parce que des femmes vénères et ignares pensaient que la ville grillerait de mille feux ! Je refuse d’être enchaînée comme une chienne tant que je pourrai respirer. Voilà pourquoi j’ai dû laisser mon mécha et me jeter dans le torrent.

Après avoir retenue ses émotions tout le long de cette attaque de Wargs, Kim se trouve le moment pour défouler cette frustration qui la démange depuis son humiliant échec contre ce mystérieux magicien. Rejouer la scène la fait frapper le poing contre le tas de roches avant de se relever rapidement et avec un froncement sur son front. Ensemble, les trois femmes suivirent un itinéraire vague, perdu dans les brousses et le cœur silencieux de la forêt centaine, peut-être millénaire. Les exercices de piste en pleine nature lui sont une denrée rare, même avant de devenir une combattante. Mais toucher les racines des arbres et sauter par-dessus des concaves lui redonne l’envie de marcher plus longtemps et d’apprécier le nacrée des fleurs, le chant d’oiseaux inconnus.

Son attention se tourne alors vers Shadow. La plus silencieuse de deux amazones se retient d’être curieuse et de parler de tout et de rien. Kim la voit comme une combattante bâtie pour le combat et non pas pour les discussions autour d’un thé. Toutefois, la brunette se reconnait légèrement chez cette femme froide d’apparence mais plus encore en son sein. Kim va jusqu’à l’aider à grimper une racine encore plus grosse sur leur chemin. Sa main serre la sienne puis son autre bras la retient de glisser sous un lichen plutôt humide.

– Mon robot est ma soupape de liberté. C’est avec Dinah que je voyage à travers les étoiles, explorant la voie lactée et l’œuvre des univers et des déesses. Elle a un potentiel militaire et des armes qui surpassent ceux plus arriérés de votre Terra. Ce que mon arme peut faire, elle en est capable à une dimension plus élevée. Mais heureusement pour nous, ce magicien n’a pas la clé d’activation.

Clara avait noté le bref baiser de Kim sur son pouce, qui avait de quoi lui donner des idées. Le trio marchait à travers la forêt, prudemment, car Clara ne pouvait pas exclure une autre attaque. La forêt était dangereuse, surtout quand elle était si profonde, et a fortiori après une tempête qui avait manifestement perturbé le fonctionnement normal des animaux. Menant la marche, Clara avançait en tête, tandis que Kim exprimait son point de vue, ce qui fit doucement sourire la jeune femme.

« Les Amazones ne se soumettent à personne, jeune femme. Nous obéissons à notre Déesse, mais nous ne renonçons jamais à notre fierté. »

Kim aida Shadow à enjamber une branche, ce qui agaça la jeune femme, qui n’aimait pas spécialement qu’on l’aide... Mais offrit à Clara une ouverture toute trouvée. Ainsi, quand Kim se retourna encore, Clara lui fit face, et caressa à nouveau sa joue, un sourire légèrement coquin sur les lèvres. Son pouce glissa alors sur les lèvres de la jeune femme, les tripotant, glissant son ongle dessus... Et elle répandit un léger arc électrique, qui fit frémir la jeune femme.

« En ce qui concerne ton honneur, par contre... Il reste à définir ce que tu entends par là. »

Shadow leva les yeux au ciel en les dépassant.

« Vous croyez que c’est le moment pour ça ? La forêt est hostile, je vous rappelle ! »

L’archère haussa doucement les épaules, puis retira tout aussi rapidement sa main du visage de leur jeune amie, laissant ainsi tout loisir à cette dernière de réfléchir intensivement à ce qui venait de se passer. Clara poursuivit ensuite sa marche, jusqu’à rejoindre la sortie de la forêt. De grands rochers se trouvaient là, avec des parois épaisses. Fort heureusement, aucun animal sauvage ne vint les attaquer, et le petit trio s’avança encore, filant à travers un dédale, qui les rapprocha ainsi d’une partie du très vaste camp.

La Horde s’était installée dans une plaine, et Clara leva la main, saluant des femmes guerrières qui montaient la garde, des sentinelles aussi faiblement vêtues que Clara ou Shadow. Clara s’approcha encore, avant de se retourner vers Kim, un nouveau sourire venant perler sur ses lèvres :

« Je te souhaite la bienvenue au sein de la Horde des Amazones, Kim ! »

Kim n’a connue que deux modèles de société jusqu’à présent : l’armée et la vie civile. Une ville comme Uatis subsiste des générations durant par l’élaboration et la perduration d’un système de lois et une justice bien que chacune soient à l’unique avantage de la gente féminine. Outre la nature partisane de son monde d’origine, Kim a vécu ses plus jeunes années comme enfant modèle sous le parapluie des bonnes manières comme aider une femme à monter une racine centenaire. De l’autre côté de la médaille, sa carrière militaire forcée lui montra l’aspect intense et impitoyable de l’entraînement et de l’ascension vers l’évolution de soi. Ce chemin – elle le sait trop bien – mène vers un caractère rigide, pessimiste, méfiant et même cruel. L’amazone à la chevelure d’ébène est une parfaite réflexion de ces femmes soldates nées pour leur tâche primordiale pour le combat et la guerre.

Lorsque la brunette se retourne vers la blonde, cette dernière la surprend par une proximité à peine ressentie. Elle est pourtant capable de conserver son alerte, un esprit ouvert aux sons de la forêt et aux bruits des animaux encore absents suite à une tempête mémorable. C’est la même caresse sensuelle qui réchauffe sa joue en besoin de chaleur comme pour tout son corps. Cette seconde fois la fait frémir, un regard attentif à cet arc électrique qui réanime ses nerfs et sa peau frigorifiée. Kim se délecte de ce toucher avec une envie de détendre ses paupières et de laisse sa bouche  être caressé et stimulé par le même pouvoir qu’elle pensait être la seule à maîtriser. La jeune aventurière fixe la blonde avec un brin de sévérité. Les amazones ne se soumettent à personne, disait-elle ? L’uatéenne, sauf son respect envers Clara, repousse le pouce vagabond avec son index.

- Je croyais avoir été claire…

L’interruption de Shadow convainc les deux demoiselles à reprendre le chemin. Il est de toute façon préférable de laisser les bêtes réclamer leurs terres sans présence humaine pour déranger le juste équilibre de la forêt. La chance leur sourit tandis que de longues minutes passent sans anicroche et ni embuscade. Un amas de rochers particulièrement épais crée un entonnoir naturel qui pousse chacune à suivre un dédale entre les parois lisses mais donc l’érosion a formé des cavités et des ords parfois tranchants. Kim file à travers le chemin délié en longueur en réfléchissant aux paroles de Clara. Refuser la soumission et l’enfermement, tout cela sont des termes antagonistes au principe de liberté. L’honneur et la liberté, ce sont deux définitions différentes. Elle se sent incomplète, perdue, incapable de se définir entièrement.

Un rayon de lumière indique la fin du dédale et le débouchement vers la plaine. Au bout du tunnel se trouve cet éclat qui non seulement illumine son visage mais aussi l’abysse d’ignorance qui voile son jugement. Kim cligne des yeux et les couvre de cette lumière éblouissante. Du sommet d’un léger escarpement, elle découvre ce pâturage de terres arables habité par un camp immense. Cette légion se révèle être la Horde des amazones, la patrie nomade de ses sauveuses. En s’approchant, elle inspecte du regard ces tentes, ces huttes aux tissus bien résistants et parfois colorés servant de demeures. Kim s’imagine mal comment ces femmes arrivent à tout empaqueter et continuer leur route quand la menace devient imminente. Toutefois, seule l’aventurière approche de l’entrée de la Horde avec une escorte qui convainc les gardes au repos.

- Je vous en remercie…

La brunette se mordille la lèvre, gênée par son manque de bonne manière envers un léger détail.

- Euh…j’ai oublié de demander vos noms, à toutes les deux.

Où que la jeune aventurière se tourne, elle croise l’attrayant physique de femmes à moitié nues. Car de l’autre côté du contrôle elle aperçoit les premières curieuses cessant leurs banales activités, naturellement intriguée par la nouvelle arrivante. Toutes respectent une tenue vestimentaire volontairement limitée où les courbes, la taille et la forme des seins se distinguent avec aisance. Pour Kim, cette vision est la meilleure des salutations. Elle agite sa main, puis elle leur lance un sourire convivial en guise de premier contact avec la Horde.

- Je vois surtout des demoiselles de mon âge. Avez-vous des enfants et des adolescentes dans votre communauté ? Que pense votre peuple des étrangères comme moi ? Je vous admets que passer d’un monde technologie à un autre plus antérieur me désarçonne.

La Horde formait une grande colonie, comprenant plus d’un millier de membres. De nombreuses femmes se tenaient là, des guerrières musclées dans des tenues rupestres, dans des armures légères. Une Amazone comptait principalement sur son agilité et sur sa dextérité, comme l’avait démontré plus tôt Clara et Shadow. Elles se présentèrent à la jeune femme, puis Clara salua Shadow, qui les laissa toutes les deux. Rapidement, la rumeur d’une nouvelle arrivante remonta au sein de la Horde, sans pour autant créer des attroupements. Les femmes qui préparaient leurs arcs, qui nettoyaient leurs armures ou leurs épées, l’observèrent silencieusement. À plusieurs reprises, Clara s’interrompit pour embrasser plusieurs Amazones, plaquant ses lèvres aux leurs, faisant légèrement durer le plaisir en se blottissant contre elles.

De son côté, Kim put ainsi constater que, chez les Amazones, les mœurs sexuelles étaient très libres. Clara s’avançait très librement, et répondit sans ombrages aux interrogations de la jeune femme :

« Les enfants et les aînées se situent dans une partie spéciale du camp. »

Il n’était pas encore prévu que Kim puisse y accéder. Après tout, mine de rien, la jeune femme venait tout juste de débarquer au sein de la Horde, et, même si Clara n’avait aucune raison de se méfier d’elle, elle n’envisageait tout simplement pas, en l’état, de la rapprocher des parties protégées du camp. En chemin, elle lui expliqua que la Horde formait une société composée de plusieurs castes. Il y avait les Guerrières, les Chamanes, et les Ouvrières, avec des sous-castes parmi la classe des Ouvrières, comme les Métallurgistes. Une organisation simpliste, avec à la tête de ce peuple le Conseil des Amazones, représentant chaque caste, et présidée par la Reine amazone.

Dans l’absolu, la caste des Guerrières dirigeait la Horde, et disposait donc d’une représentation majoritaire au sein de la Horde. Le Conseil prenait toutes les décisions, allant des simples décisions nominatives aux décisions collectives impactant l’ensemble de la Horde, comme le choix de leur itinéraire. La Horde formant un peuple non sédentarisé, celui-ci était, par définition, en perpétuel mouvement.

« Tu es la bienvenue ici, Kim, l’assura Clara. Nous sommes un peuple hospitalier. Mais le choix final revient à notre Reine. »

La Reine Andromaque était une Reine puissante et respectée, qui ne se trouvait pas dans la tente du Conseil, mais dehors, près d’un camp d’entraînement. Elle observait Hagran et Fanis, qui se livraient toutes les deux à un rude duel, sous le regard de plusieurs bancs de jeunes Amazones, et de plus âgées. Les filles aimaient bien les affrontements, et voir les Amazones se battre était un vrai régal. Les lames s’entrechoquaient, les corps se déplaçaient rapidement, mélangeant coups de pieds aux mouvements de lames.

Clara se rapprocha lentement, et posa sa main sur le dos de Kim, afin de doucement l’amener vers l’avant.

« Va saluer ma Reine, Kim... »

Clara ne lui glissa rien sur un éventuel protocole à respecter.

La situation n’en serait que plus typique !

Il s’avère que ces deux précieuses alliées au combat ont chacune un nom : Clara et Shadow. Elle approuve silencieusement de cette sélection précise au vue de leurs attitudes et de leurs physiques. Clara aux cheveux clairs et Shadow avait une chevelure noire et un caractère sombre à quelques occasions. Kim s’intéresse tout également aux autres femmes aux formes différentes mais toujours sensuelles.  Elle aime la féminité et la force mixées dans un cocktail parfait que sont les guerrières et femmes soldates de son monde. Sa nouvelle plus grande surprise la fait rougir sans moyen de dissiper l’effet sur ses joues ni sur l’éclat de vie qui s’allume dans ses pupilles. La discipline est une habitude si ardemment acquise au cours de son entraînement militaire que voir Clara agir comme une lesbienne décomplexée lui pique le cœur. Ces baisers délicats et parfois sauvages donnés à d’autres amazones aussi banalement que de serrer la main fait naître un sentiment de jalousie que la brunette reni avec empressement.

La réponse sur la position actuelle des jeunes et des vieilles la ramène au moment présent où elle passe à côté des gardes pour pénétrer sur la terre de la Horde. Kim peut voir l’ébruitement venant des témoins, des poignées de femmes la zyeutant et la fixant avec intérêt. Certaines sont prêtes pour la guerre et d’autres vivent pour la paix et la liberté de leurs mœurs. La description de la communauté présente une structure simple et intègre tant aux lois qui régissent ce peuple et les décisions prises par la reine. Kim pense aux principes d’une monarchie mais à l’écoute de ses sujets. Pourtant, une caste à la majorité écrasante existe et à la place de vivre en dictatrice tend la main à la minorité s’afférant aux tâches essentielles, vitales pour la vie de société. À voir la cohésion au sein de ces castes, elle ressent une admiration devant ces vagabondes à la destination sans fin. Plus elles avancent dans le camp et plus la brunette voit l’attention à son égard se répandre aussi vite qu’envoyer un courriel électronique.

- Je ne doute pas que votre reine soit la seule à écouter et agir devant ma plaidoirie.

Le mot est très juste lorsque Kim aperçoit l’arène et le combat brutal en cours. Elle dépasse Clara et observe le spectacle de deux nouvelles amazones tester leurs forces à armes égales. Le choc des lames fussent dans l’air, la respiration saccadée et bruyantes rappelle qu’elles se donnent à fond et se battent pour leur honneur sans retenir leurs coups. Kim est si absorbée par son statut de spectatrice que l’amazone blonde la guide d’une légère poussée vers une femme plus âgée, charismatique et intimidante.

- Me quoi ? Mais je ne peux pas faire ça dans cette tenue et avec mon arme.

Il ne faut pas oublier que l’aventurière garde son arme Mark II contre son avant-bras et sans moyen de la dématérialiser. C’est presque nue, avec un short souillé par l’eau et une lame en tungstène pointant vers le sol que la nouvelle venue se retrouve à fixer la reine Andromarque. Sans savoir le protocole – assumant qu’il existe – Kim a du mal à cacher son embarras d’être une parfaite étrangère lui adressant la parole et ce devant plus de témoins.

- Mes respects, majestée…je ne compte pas aller par quatre chemins : Ma venue ici est due à des circonstances malencontreuses et sérieuses. Je ne viens pas de ce monde et des forces inconnues pourraient venir me chercher tôt ou tard.

Son arme métallique d’un métal blanc, lisse et plat, est présentée à la reine. Cet objet est unique dans tout Terra et l’humaine se montre beaucoup plus sûre dans ses paroles. Présenter une arme assez près de cette reine attire forcément les regards, une fois encore. Un frisson lui parcoure le dos. L’inconfort qu’elle apporte dans le camp d’entraînement est palpable. Si ces gens savent sur les fonctions de cette technologie, Kim serait déjà mise à terre les mains attachées dans le dos. Le récit de Clara sur les nombreuses réalités refait surface et la brunette rajoute :

- J’ai peur d’avoir mis les pieds dans une dangereuse affaire. Une menace pèse sur l’Arc-en-ciel et vous êtes les seules à pouvoir m’écouter.

L’approche de Kim amena les Amazones à cesser de s’entraîner. Elles la regardèrent se rapprocher, tout comme les spectatrices, tandis que Clara, amusée, restait un peu en retrait. Elle s’amusait de l’émoi de la jeune femme, qui se présentait devant une Reine... En petite tenue. Fort heureusement, il n’y avait pas beaucoup de protocole chez les Amazones, y compris devant la Reine. Andromaque observa donc Kim, et la salua rapidement, avant que la jeune femme, confuse, les joues rouges, ne lui parle de manière assez confuse. Elle alla jusqu’à lui parler de « l’Arc-En-Ciel », ce qui amena doucement Andromaque à froncer les sourcils. Clara, de son côté, s’était également rapprochée, et Andromaque finit par parler, en posant ses deux mains sur les épaules de la jeune femme.

« Pour commencer, femme... Comment dois-je t’appeler ? Moi, je suis Andromaque, Reine des Amazones... Mais, vu que tu n’es pas une Amazone, je ne suis pas ta Reine, non ? »

Andromaque n’était clairement pas l’archétype de la Reine arrogante. Elle était fière, oui, mais, comme toute Amazone, elle savait aussi se montrer chaleureuse et rassurante. De fait, elle était sans doute moins austère que bien d’autres Amazones. C’était sous le règne d’Andromaque que la Horde avait mis fin à certaines de ses pratiques les plus barbares, comme les abandons d’enfants difformes ou du mauvais sexe. À sa manière, Andromaque était une progressiste, et cela se ressentait dans sa manière de gouverner, très proche de ses sœurs.

Kim allait lui dévoiler son identité, mais, brusquement, la main d’Andromaque glissa de son épaule pour caresser l’un des seins de la femme, et elle rajouta, avec un sourire légèrement mutin sur les lèvres :

« Pour tes hommages, tu m’en offres deux jolies, en tout cas... Même si je pense que ta pétoire fera aussi le bonheur des Métallurgistes. »

Clara lui présenta ensuite brièvement Kim, expliquant qu’elle et Shadow l’avaient trouvé le long de la rivière, et l’avaient sauvé d’une meute de Wargs... Et que Kim avait manifesté d’impressionnants pouvoirs magiques en provoquant une puissante explosion au milieu de la meute. Elle rajouta ensuite que Kim recherchait son robot, un mécha qui avait été endommagé suite à un combat contre un mystérieux magicien.

Andromaque hocha doucement la tête, avant d’enchaîner :

« Tu es mécanicienne, Kim ? Nous avons récupéré quelques unités améliorées, mais notre chère Cymé a bien du mal à comprendre le fonctionnement de cette mécanique informatique. »

Elle rajouta ensuite, pour revenir sur le sujet :

« Et en quoi l’Arc-En-Ciel serait menacé, jeune femme ? »

Tout en adoptant un ton léger, Andromaque n’avait pas oublié ce que Kim lui avait dit...

Le son des lames s’éteint pour laisser le vent des plaines remplir le vide que laisse derrière un léger silence. Malgré les petits ébruitements de quelques femmes – amies ou amantes – Kim est à la fois rassurée et victime d’une boulette dans le creux de son ventre. Ce moment la surplombe d’un poids intense sur les épaules alors que cette étrangère se retrouve dans une audience publique avec la reine Andromaque des Amazones. Elle reste tendue, droite comme dans un salut militaire dont un geste positif suffirait à relâcher la pression que la brunette s’impose toute seule. Il ne faut pas longtemps pour que les mains détendent ses épaules et finisse par lui faire relâcher sa vaine tentative de garder une figure posée et en contrôle.

Cette reine n’a rien d’un monarque normale, ni d’aucun récit de fiction. Kim a ses préconceptions de cette fonction et des responsabilités qui incombe chaque souveraine à assumer. Elle aurait dû deviner qu’une fois l’éthique jetée aux orties tout devient possible. Une main vient alors la peloter. La brunette sursaute et couine d’un ton  suave. Ses doigts se crispent sous le réflexe et la tension qui traverse ses nerfs. Elle n’arrive pas à le croire, préférant la blague la plus coquine de l’univers à un fait sur la cheffe d’une Horde de femmes indépendantes. La caresse réchauffe son sein, envoie un signal au téton pour s’épanouir en un bourgeon rose dur.

- Ah…oui. Appelez Kim Uzuki. Je ne suis pas de ce monde et pourtant vous me traitez avec les bras grands ouverts. Pourquoi ?

Clara se mit alors à résumer leur rencontre dans les bois et les circonstances derrière sa la présence de Kim dans le paysage de Terra. Les faits sont exacts pour la plupart sauf pour de petits détails sur l’état du mécha que l’aventurière omet de rajouter afin de laisser la belle blonde parler librement. Son attention se porte sur la reine dont quelques pouces la séparent de la femme mature. Elle peut sentir son odeur, fixer de près  la peau encore soyeuse et parfumé qui enivre l’imagination de Kim. Son arme se rabaisser jusqu’à frotter le bout de la lame déployée sur la terre fraîche. S tête s’agite en un hochement négatif avec une main recouvrant le dit pétoire.

- Non, je n’ai aucun talent de mécanicienne. J’aurai besoin d’une experte en technologie avancé pour réparer mon arme et mes bracelets. Chaque bracelet a une fonction informatique mais mon Mark II a des atouts conçus pour une seule tâche : combattre et vaincre. À l’origine, je suis une guerrière avec pour objectif de tester ce prototype à travers les mondes de l’Arc-en-ciel.

L’évocation de ce terme mystique et encore mystérieux pour la demoiselle réveille une interrogation tout à fait légitime et sérieuse sur la menace mentionnée. Kim agrippe les mains de la reine. Contrairement au geste fait dans la forêt avec Clara, elle ne repousse la douceur de ces doigts. La tentation grimpe chez cette nouvelle arrivante au cœur d’une Horde affichant avec fierté sa liberté de mœurs. Son geste est une acquisition graduelle des pratiques des amazones.

- Le menace est davantage une supposition que l’absolue vérité. Ce magicien a évoqué un maître magicien tout puissant ainsi qu’un roi inconnu. Si un laquais connait l’existence des machines, alors ses maîtres aussi. Existe-il un roi maléfique capable de connaître des réalités au-delà de ce monde ultime ?

Elle fronce alors les sourcils. Après une inspiration, elle continue :

- Le monde ultime, c’est ainsi que mon employeur nomme ces terres. Il savait forcément des choses et je suis tombé dans le panneau. Cette affaire sera difficile à résoudre mais je m’en tiens à mon propos : une menace plane forcément sur tous ces mondes et je dois découvrir la vérité pour y remédier. Mais sans vous, je ne pourrai rien faire.

Clara nota, avec amusement, que Kim ne fit rien quand la Reine palpa sans hésitation son sein, se contentant de rougir, visiblement trop surprise pour réagir... Mais pas pour que son téton se mette à durcir. Andromaque en sourit brièvement, avant de libérer le sein de la jeune femme, qui retrouva rapidement son calme. En revanche, elle contesta avoir tout talent dans la réparation, ce qui risquait de poser souci. Même si les Amazones arrivaient à retrouver son robot géant, il faudrait encore le retrouver. Sur tout ce qui relevait des technologies futures, Cymé était la grande spécialiste parmi les Métallurgistes, mais même elle avait, dans ce domaine, ses limites. Andromaque nota donc tout cela, tandis que Kim lui parla davantage de l’Arc-En-Ciel, ainsi que d’éléments qui refroidirent l’humeur bon enfant de la Reine.

« Hmmm... »

Elle laissa passer quelques secondes, le temps de réfléchir, puis hocha la tête.

« Suis-moi, Kim. »

La Reine se mit à marcher, et se dirigea vers la tente de commandement. La Horde était un peuple non sédentarisé, et il n’y avait donc aucune maison bâtie. On pouvait voir plusieurs tentes, abritant l’auberge, ou d’autres lieux, ainsi que, au loin, les caravanes et les chariots des Métallurgistes. Andromaque, elle, rejoignit la tente du Conseil. Une pièce se trouvait là, avec une table en bois comprenant plusieurs sièges, et des armoires derrière, ainsi qu’une autre pièce, montée derrière une claustras en bois, abritant d’autres ouvrages.

Andromaque resta silencieuse pendant quelques secondes, et se retourna vers la jeune femme.

« Le Monde Ultime... C’est comme ça que la Déesse surnomme Terra. Le monde de l’Eld, la Terre de l’Aîné... »

La tradition amazone était orale. Il y avait peu d’écrits, tout se transmettait dans le coin du feu-de-camp, amis il y avait des histoires qui n’étaient pas pour les chastes oreilles, des histoires que les jeunes ne devaient pas entendre sous peine de voir leurs nuits être volés par d’horribles cauchemars.

« Il existe un Roi maléfique, oui... Un être abominable qui a élu domicile sur ce monde, et dont la Horde est intimement liée. »

Andromaque se tut encore, comme si elle réfléchissait, puis se retourna subitement vers Kim :

« Tu viens de Tekworld ? Ou de Megapolis ? Et... Que connais-tu exactement sur le peuple des Amazones ? »

Les derniers fragments d’information transforment l’ambiance bien-vivante en une scène plus sobre et grave. Après un instant de réflexion, la reine invite Kim à la suivre à l’écart des amazones présentes. La bonne humeur semble terminée, alors que la brunette laisse Clara et Shadow derrière après un bref salut de la tête. Une fois dans la tente de commandement, elle remarque la qualité de la menuiserie sur le design distinct de chaque siège alentour de la table principale. Les accoudoirs et accotoirs sont sculptés selon les castes de l’Horde afin d’y siéger leurs représentantes. Comprenant où elle se trouve, Kim se retient de crier victoire ou de montrer un sourire satisfait. Même en ayant réussie à convaincre la reine, beaucoup de questions pendouillent dans son esprit, harcelant sa réflexion.

- Si je comprends bien, L’Eld et la terre de l’Aîné sont des territoires de Terra ? Comme des provinces éloignées ? Ou bien ce sont des noms donnés au même plan d’existence ?

Kim se permet de zyeuter la pièce. La terre sert de plancher et les toiles de murs mais l’espace est large et aisé d’y respirer avec quiétude. L’artisanerie du bois ne se voit que dans les sculptures et la menuiserie de morceaux aguichant comme le claustra les séparant d’une pièce différente. Peut-être est-ce les quartiers de la reine ? Toutefois, ses pensées se tournent vers un aveu perturbant. Ce roi maléfique dont elle soupçonne l’existence est non seulement vrai mais un lien uni la Horde à cet être que la reine en personne refuse de nommer devant son peuple. Kim serre le poing sous le réflexe de la méfiance et retire son arme de l’avant-bras. Elle le dépose avec lourdeur sur la table, la pointe de l’arme visant un point vide hors de porté d’Andromaque. Il est très difficile pour la jeune arrivante de le laisser sur cette table et de ne pas pointer son doigt méfiant chargé d’éclair vers la femme mature.

- Dans d’autres circonstances, je me replierai sur moi-même et j’aurais fuie cette plaine. Mais vos guerrières m’ont sauvé la vie et j’ai vu la bonté de votre cœur et la droiture de votre âme. Expliquez-moi comment vous êtes liées au responsable de mes malheurs.

Tant de femmes à la conscience pus sensible s’effondreraient devant ce secret très compromettant. La peur se répandrait comme un virus et briserait l’unité de la Horde. La capacité de la reine à parler d’un sujet aussi grave est tout comme accordé une grande confiance en la jeune brunette. Kim est une humble femme détestant l’association d’un groupe avec une organisation malsaine ou un être vil de conscience et assoiffé de pouvoir. Malgré tout, elle priait pour que sa bonne foi soit donnée envers la bonne personne, à une bonne reine.

- Je m’excuse d’avoir à moitié mentie. Je viens de Tekworld et sa technologie m’est évidemment familière en matière de réparation. Toutefois, cette arme ici présente vient de Megapolis. Son fabriquant est une compagnie experte dans le déplacement en hyperespace, une façon de voyager à travers les réalités. En fait, elle se spécialise en armement ainsi que dans d’autres départements scientifiques. Je crains donc qu’il faille plus que changer quelques circuits grillés pour tout réparer.

Kim caresse la surface de la pétoire lisse et plate où le logo y apparait; Deux magatamas rouges de symétrie identique mais de face opposée qui, avec de l’imagination, suit le sens des aiguilles d’une montre.

- Je connais le nom de l’homme qui m’a envoyée sur Terra. Le président de Vector Industries : Wilhelm. Quant à votre peuple, mon savoir est limité. Je sais que vous êtes des femmes fortes ayant rejeté les sociétés humaines par principe de liberté. Grâce à vous et Clara, je découvre vos mœurs libertines, ce qui est loin de me déplaire. Bref, j’ai encore beaucoup à apprendre. Si jamais je dois m’accoutumer à la vie au sein de la Horde pour accomplir mes objectifs, je livre mon sort entre vos mains.

Elle tend la main et la fixe avec le plus grand sérieux possible. Il n’y a aucune autre alternative que de les rejoindre et devenir plus forte au sein des Amazones.

Qui mieux que la Reine pouvait renseigner Kim sur ses interrogations ? Oh, en réalité, Kim aurait également pu interroger les Anciennes, mais elles étaient peu nombreuses au sein de la Horde. Mine de rien, la Horde menait une vie difficile, exigeante, et les potions et mutagènes que les Amazones prenaient pour renforcer leur corps avaient aussi pour effet de diminuer leur espérance de vie. Ceci étant dit, dans la mentalité amazone, aucune Amazone pure n’avait envie de vieillir. La vieillesse était l’avilissement du corps humain, l’impossibilité à pouvoir se battre, la honte constante et l’infamie perpétuelle. Les Amazones ne vivaient que pour la guerre et la bataille, elles n’avaient pas d’autres fonctions. Une fois qu’elles avaient passé l’âge, elles mourraient. Les Anciennes étaient des érudites, d’anciennes ouvrières, mais beaucoup étaient dans des temples. Celles qui restaient devaient s’assurer de ne pas devenir des poids pour la bonne marche de cette société rugueuse et exigeante. Toutefois, les jeunes appréciaient les Anciennes, qui n’étaient jamais avares en contes, en exploits, et qui permettaient de veiller sur les petits... Ou d’enseigner la magie.

Andromaque écouta les explications de Kim, retenant les siennes dans l’attente d’en savoir plus. Elle apprit ainsi que Kim avait été envoyée sur ce monde par un certain Wilhelm. Le nom ne disait rien à Andromaque, mais Kim lui confirma avoir l’habitude de voyager à travers les Rayons, puisqu’elle avait découvert son arme sur Megapolis.

*Le Rayon indigo...*

Les Amazones connaissaient ces mondes, très différents de Terra, très particuliers. La jeune Kim termina ensuite en expliquant vouloir se rapprocher de la Horde. Souriant doucement, Andromaque se rapprocha d’elle. Elle avait pu noter la tension qui régnait dans le corps de la jeune femme, sa nervosité. Elle sourit brièvement, et hocha la tête.

« C’est une preuve de confiance... Ou d’inconscience. »

Andromaque répondit enfin à ses questions :

« L’Eld, la Terre de l’Aîné... Tout cela désigne un très ancien royaume, Kim. Le premier royaume humain de Terra, fondé par Arthur Eld, le Roi Arthur I^er, ou encore Arthur l’Aîné... Par référence à son fils, Arthur II, Arthur Le Jeune. L’Aîné est une figure légendaire sur Terra, presque mythologique. La légende du Roi Arthur... Celui qui fonda le royaume humain, qui unifia les hommes, les elfes, les nains, et protégea le monde connu contre les autres menaces. »

La Reine se tut pendant quelques secondes, observant encore ses manuscrits, ses parchemins, tous témoins de temps anciens, révolus. Elle soupira doucement, avant de reprendre :

« Mais l’Eld n’est plus. Officiellement, le royaume a été entièrement ravagé par les Mijakiens. »

Le nom ne devant pas dire grand-chose à Kim, Andromaque lui expliqua que Terra était dominée par deux grandes puissances : Lumen, à l’est, un royaume florissant entouré de multiples royaumes humains et même elfiques, formant ensemble une vaste confédération, et, de l’autre côté, à l’ouest du vaste continent, l’immense Empire de Mijak. Un Empire militaire et guerrier qui envahissait le monde.

« Pour tenter de résoudre le conflit, le dernier Roi de l’Eld, Steven Deschain, avait organisé des pourparlers dans sa capitale, Gilead... Officiellement, les Mijakiens ont utilisé ces pourparlers pour envahir l’Eld, et ont tout détruit. Depuis lors, la guerre règne sur Terra, mais le Conseil Impérial de Mijak n’a jamais confirmé avoir organisé le massacre des Eldois. »

Kim arrivait dans un contexte tendu, dans une situation complexe.

« Nous, nous sommes l’armée des Dieux olympiens, qui formaient avec l’Eld une alliance ancestrale. Je ne renie pas en soi la version officielle, mais... J’essaie de comprendre les incohérences. J’essaie de comprendre pourquoi les Olympiens ne sont pas intervenus, pourquoi notre Déesse refuse de répondre à nos interrogations. Car la chute de l’Eld a fait plus que précipiter Terra dans une guerre totale. L’Eld, vois-tu, avait aussi pour fonction de séparer les Rayons, ceux-là même que tu as utilisé pour voyager de Tekworld à Megapolis. Sa chute a entraîné un dérèglement cosmique, qui conduit à un inquiétant phénomène de convergence des Rayons. »

Andromaque se tut ensuite pendant quelques secondes, puis regarda encore la jeune femme. Elle se doutait bien que Kim devait avoir des questions, mais elle-même en avait aussi, et s’empressa de les formuler :

« Qui est ce Wilhelm ? Quelles étaient vos relations avec lui ? Et comment une Uatéenne a-t-elle pu récupérer une arme venant de Megapolis ? »