The Multiversity

[Reine Alice Korvander]

Un sourire victorieux orna les lèvres de Ewald Borsodi quand il serra dans sa main le menton de sa proie.

« Héhé ! Voilà ce qu’on appelle une belle prise, les gars ! »

Les mercenaires et autres criminels l’accompagnaient semblaient également très satisfaits. On pouvait aisément le concevoir, car la femme qui était ainsi attachée n’était autre que la célèbre Princesse de Sylvandell ! Suite à l’Olympomachie, Sylvandell était un pays affaibli, qui avait dû envoyer une bonne partie de ses troupes pour aider à la reconstruction de la capitale. Les autres soldats se battaient dans les montagnes contre les incursions de monstres, ou dans les mines contre les monstres nécrophages. Ces évènements avaient permis à l’Affiliation de mener un raid des plus osés, mais qui fut finalement couronné de succès. Conglomérat de renégats, de traîtres, de déserteurs, et de bandes de pillards, l’Affiliation était une organisation terroriste qui avait jailli des cendres de l’Eld et de ses baronnies endeuillées pour prospérer, profitant aussi du conflit entre Lumen et Mijak pour se renforcer au fur et à mesure des années. Au sein de cette organisation très hétéroclite et à la hiérarchie confuse, Ewald Borsodi était l’un des lieutenants de l’Affiliation, ce qui en faisait un pion parmi tant d’autres.

Avec son frère Horst Borsodi, les Borsodi avaient fondé il y a quelques années une maison de vente aux enchères, se chargeant d’organiser des enchères publiques, judiciaires, ou privées. Toutefois, Ewald avait fini par tomber en disgrâce lorsque des enquêtes judiciaires avaient révélé qu’il truquait les enchères, embauchant de faux enchérisseurs pour faire monter la sauce, trafiquant également certains lots pour les rendre plus attractifs. Des enquêtes plus profondes l’accusaient également de s’être acoquinés avec le crime organisé pour blanchir les vols réalisés par les criminels. Lorsque la situation était devenue explosive, Horst avait limogé son frère, et ce dernier avait tout perdu, ; se retrouvant sous une montagne de dettes. Poursuivi par les agents de l’Empire, Ewald Borsodi avait disparu… Jusqu’à se retrouver ici.

Lui et ses hommes avaient mené une action redoutable. La jeune Princesse était alors en train d’inspecter l’ouverture d’une des nouvelles mines de Sylvandell quand Ewald et ses hommes avaient déclenché une attaque de monstres nécrophages dans une mine, dispersant les gardes. Pour cela, ils avaient dû attaquer l’un des nids de monstres, les faisant fuir pour les amener vers les mines. Dans la foulée, les hommes de Borsodi avaient creusé une galerie sauvage, et en avaient profité pour emmener Alice, affrontant ses gardes. La jeune Princesse avait donc été kidnappée ! Ils l’avaient emmené à travers la caverne, la ramenant vers un endroit sécurisé, une maison assez isolée au cœur de Sylvandell. Enfermée dans la cave, bâillonnée, le Joyau de Sylvandell leur était offert.

« Ne nous reposons pas sur nos lauriers, on doit encore l’exfiltrer du pays. »

Pour ça, Ewald avait un plan sinistre, qui consistait à enfermer Alice dans une vierge de fer factice. Suite à sa déchéance, il s’était officiellement reconverti comme bourreau, et vendait des instruments de torture. Un commerce sinistre, qui collait finalement bien au personnage. Ils étaient venus à Sylvandell pour proposer leurs instruments, et en avaient visiblement profité pour mettre au point leur rapt. Ils n’avaient plus qu’à attendre l’heure prévisible de leur départ. Plusieurs jours s’étaient donc écoulés, et, si personne n’avait encore osé toucher la Princesse, elle sentait bien qu’ils étaient de plus en plus tentés. Ewald, qui travaillait de toute évidence pour quelqu’un d’autre, les sermonnait à chaque tentative maladroite, affirmant que la Princesse devait être livrée intacte à leur commanditaire.

La Couronne avait évidemment lancé d’importantes recherches, et offert à récompense quiconque pourrait retrouver Alice…Et c’était par l’intermédiaire d’une personne tout à fait inattendue que ce sauvetage allait commencer !

[Selene]

Selene aimait bien ce monde. Comparé à la Terre, il regorgeait de magie. Bien sûr, ce n'est pas comme si elle en manquait, avec le temps, comme beaucoup de pratiquants, elle s'était sécurisé quelques sources, mais ça ne l'aidait pas forcément en déplacement. Ici, elle pourrait en profiter partout et, si c'était la quantité ambiante, elle était impatiente de trouver une source, où elle serait plus abondante. Vraiment, ce monde avait du potentiel.

Mais, comme souvent en fait, sa population posait problème. D'une manière générale, Selene n'avait rien contre les gens, un monde sans vie était aussi un monde sans nourriture, mais ils étaient parfois une vraie plaie. Le hasard avait apparemment voulu qu'elle n'arrive pas vraiment au bon endroit au bon moment. Il semblait qu'une personne importante aie été kidnappée, et des gens en armes et armures la recherchaient. Ce n'était qu'un petit problème pour la mutante, des soldats lambda ne devaient pas avoir beaucoup de chance contre elle, mais elle préférait ne pas attirer l'attention sur elle trop vite. Et ce n'était pas forcément le plus facile, quand on n'avait que ses vêtements sur soi, et que la quasi seule chose qu'on savait sur le coin, c'était que, au moins, les locaux parlaient une langue connue. Au moins, l'endroit avait une ambiance un peu médiévale, on ne lui demanderait probablement pas de montrer des papiers qu'elle n'avait pas. Mais la sorcière préférait quand même passer sous les radars, évitant les coins peuplés, ce qui ne la rendrait que plus suspecte si elle était découverte, cependant.

Et c'est en restant à l'écart des sentiers battus que Selene finit par tomber sur une planque. Bon, ce n'était qu'une petite maison, rien de plus, mais bâtie si loin de tout, ça ne laissait pas beaucoup de possibilités, et la montagne n'était pas suffisamment boisée ni proche d'un lac pour que ce soit une cabane de bûcheron ou de pêcheur. La mutante se concentra sur son intérieur, et constata qu'elle était habitée. Trop, même, pour la taille de la bâtisse, ça faisait beaucoup d'occupants et, de ce qu'elle ressentait, l'une de ces personnes n'était pas vraiment de bonne humeur. Pour définir son état, la sorcière emploierait plutôt le terme de détresse. Les kidnappeurs avaient déjà gâché sa découverte de ce monde en commettant leur méfait mais, maintenant, ils se trouvaient sur sa route, à croire qu'ils le faisaient exprès. Enfin, si la personne kidnappée était retrouvée, l'agitation sur laquelle Selene était tombée devrait se calmer, il semblait que sa meilleure option était donc de jouer les héros.

Selene ne s'embêta pas à frapper à la porte ou à vérifier si elle était ouverte. Elle n'en avait pas besoin et se téléporta directement à l'intérieur. Elle s'occuperait de la cave plus tard, et préféra commencer par le rez-de-chaussée. Une femme en tenue de latex révélatrice qui apparaît au milieu d'une pièce occupée par des hommes peu recommandables, il devait y avoir quelques films qui commençaient comme ça. Mais ce n'était pas ce genre de film et, une fois à l'intérieur, la mutante devait donc faire ce que tout héros faisait quand il entrait dans un nouveau lieu, que ce soit un repaire de bandit, la maison de simples villageois ou un palais royal : ouvrir les coffres et les armoires, fouiller les tiroirs et casser toutes les jarres, afin de ramasser tout ce qui peut être utile.

"Bien. Des devises."

On ne pouvait pas dire que Selene avait besoin d'argent. Au contraire, même ceux qui savaient qu'elle était riche au-delà du raisonnable sous-estimaient souvent sa fortune. Mais bon, même si agiter de bons vieux dollars marchaient aussi dans d'autres pays, ça n'était plus vraiment le cas quand on changeait de planète, et encore moins de monde. Bien sûr, la mutante avait aussi des valeurs sûres, comme des pierres qui brillent et des métaux qui brillent, mais il fallait encore les écouler, ce qui n'était pas toujours facile. Finalement, trouver de quoi régler ses frais dans un butin, c'était le bon plan. Et il semblait que les affaires marchaient bien dans le coin, comme quoi, sauf accident, le crime payait. La sorcière s'intéressait surtout aux plus grosses pièces, c'était généralement celles qui avaient le plus de valeur, pour éviter de les perdre, mais aussi parce que, si les pièces qui valaient le moins valaient moins que le métal utilisé pour les faire, tout le monde les fondrait pour se faire des bénéfices.

[Reine Alice Korvander]

Quand Selene entra dans la maison, qui était la partie habitable d’une vieille ferme les malandrins situés dans la cave de regardèrent entre eux, pendant alors à des gardes, ou à des mercenaires venus récupérer le corps gracieux de la Princesse. Ils entendirent alors des bruits de pas, puis des bruits d’éclats, notamment lorsque la femme renversa des jarres. Alice commença alors à gémir, cherchant à faire du bruit, ce qui amena l’un des hommes à la gifler sèchement.

« Hum !
-  La ferme ! Vous deux, allez voir ce qui se passe là-haut ! »

Juste avant cette venue, Alice se trouvait en fâcheuse position, car Ewald l’avait attaché debout à des chaînes, tout en la déshabillant. Humiliée, celle-ci n’avait rien pu faire, finissant finalement dans des sous-vêtements noirs devant des hommes aux regards libidineux, louchant volontiers sur les formes onctueuses de la Princesse.  Elle était le « Joyau de Sylvandell », après tout. Ewald se rapprocha d’elle, souriant avec une lueur de perversion dans les yeux, et déplaça sa main. Il caressa sa joue, et déplaça ensuite sa maçin baladeuse vers l’un de ses seins, qu’il pinça alors. La Princesse gémit encore, en le fusillant du regard.

« Quand on pense que tu t’es offerte à un bâtard de Bas-Elfe… Salope de Princesse ! »

Ewald la gifla alors, et Alice grogna, avant de sentir ce porc palper encore ses seins. Il n’avait aucune raison de se méfier, car il pensait à un simple individu qui viendrait ici chercher fortune. Cette ferme était abandonnée et la Couronne menait une procédure en vue de devenir propriétaire de la parcelle, puis de la revendre. Il y avait encore des pillards ou des types qui venaient ici, mais ils utilisaient la ferme comme quartier général, avec une salle de réunion, des coffres d’équipement… Les deux mercenaires remontèrent à l’étage, et, en ouvrant la porte menant à la cuisine, s’arrêtèrent en croisant le regard d’une femme. Une brune aux cheveux longs avec des sous-vêtements en latex qui recouvraient son corps.

« Tudieu, c’est quoi ce bordel ?!
-  Matez-moi cette bombasse… Qu’est-ce que tu fous là, bébé, toi et ton joli cul ? Tu viens nous prêter main-forte ?
-  Qui t’envoie ? Les déserteurs de Rédanie ?
-  Je suis pas contre l’idée de la sauter de suite, le chef risque de se taper l’autre pute de Princesse pendant ce temps… »

L’un des mercenaires leva la main vers Séléné, prêt à la caresser…

[Selene]

Visiblement, Selene avait attiré l'attention. En même temps, elle n'avait pas cherché à être discrète, au contraire, on pouvait facilement croire qu'elle avait fait exprès de se faire remarquer. En tout cas, pendant qu'elle fouillait, deux hommes arrivèrent, depuis le sous-sol apparemment. La mutante n'eut pas à les écouter longtemps pour comprendre que ce n'était pas vraiment les génies de la bande. On pouvait comprendre leurs réactions face à la magnifique sorcière, mais on ne pouvait pas dire qu'ils faisaient dans le raffinement. Comme quoi, ce genre d'individus était sans doute commun à tout les mondes, sans doute était-il plus logique que la simplicité soit partout, tandis que la sophistication apparaissait occasionnellement. Enfin, ce n'était pas important.

"Vous tombez bien, j'ai besoin de renseignements."

Selene attrapa la main qui approchait d'elle et son bras prit le noir de son gant, sa forme d'ombre permettant de faire disparaître cette fine barrière qui les séparait d'un contact direct. Quand la mutante avait besoin de savoir quelque chose, elle ne comptait pas forcément sur la bonne volonté des personnes présentes, pas quand il lui suffisait de se nourrir de leur énergie psychique, pour s'accaparer par la même occasion leurs connaissances. L'homme n'était pas vraiment quelqu'un d'exceptionnel, il fallut moins d'une seconde pour que la sorcière le vide entièrement et qu'il tombe en poussière. Aussitôt, Selene accéléra et se jeta sur l'autre, plaquant sa main sur sa bouche pour éviter qu'il ne crie. Pas la peine de déjà alerter celui qui était resté en bas.

Car il en restait un en bas. Ce n'était pas dur de le savoir, l'un des hommes l'avait évoqué, ainsi que la princesse. Si Selene n'avait été au courant de rien, il l'aurait directement informée de tout, même si ce n'était pas suffisant pour parfaire la culture générale de la mutante. À présent, elle en savait déjà plus sur la situation, sur ce monde et sur la monnaie et ce qu'elle valait. Elle pourrait même savoir ce qu'étaient les déserteurs de Rédanie, si elle s'embêtait à se poser la question. Mais honnêtement, ça ne l'intéressait pas, pas encore en tout cas, elle verra peut-être plus tard.

En attendant, comme évoqué plus tôt, il en restait un, en bas, avec la princesse et, quand elle descendit, elle put constater que, effectivement, le chef risquait de se la taper. Il allait vite en besogne, même si il en était encore aux préliminaires

"J'espère que je n'interromps rien."

Bien sûr, Selene était là pour interrompre, et l'une des deux personnes en face d'elle n'allait pas s'en plaindre. Dans un sens, c'était une bonne chose que la mutante sache ce qu'il en était réellement. Une blonde enchaînée et en sous-vêtements, qui se faisait tripoter par un type en rut, ça ressemblait aussi à une fin de soirée normale entre adultes consentants, pour la mutante.

[Reine Alice Korvander]

Alice gesticulait encore sur place, sentant les mains baladeuses d’Ewald. Elle avait encore la joue rouge, marquée par sa gifle, et se débattait encore, grognant et vociférant. Autour d’eux, les autres hommes d’Ewald attendaient impatiemment leur tour, conscients qu’ils allaient tous pouvoir se la taper ! L’inverse serait tout simplement trop cruel pour eux ! Ewald, de son côté, devait bien admettre qu’il avait envie de se la taper. Elle était bonne, mine de rien, cette salope nymphomane !

« Je sais ce qu’on dit sur vous, Princesse, sur vos orgies… Alors, inutile de jouer les pudiques avec moi ! »

Il abaissa son pantalon, et Alice couina en sentant son membre poisseux contre ses fesses, glissant sur sa culotte noire. Elle se tortilla sur place, nerveuse, se sentant horriblement impuissante. Ewald releva la main, et, tout en commentant la beauté de son cul, gifla sèchement son postérieur. Il ricana ensuite grassement, mais, avant qu’il ne puisse la prendre, des bruits de pas se firent entendre. Il pensait revoir Guillaume et Albert, mais, au lieu de ça, ce fut une femme aux cheveux noirs en tenue de dominatrice qui descendit. Elle observa l’assemblée, et son regard croisa celui d’Alice.

« C’est qui, celle-là ? Qui a commandé une pute ?! »

Près de Selene, il y avait un guerrier orc, massif, avec deux dents devant formant des défenses qui ressortaient de sa bouche.

« Hm-hmmm… !! »

Ewald, surpris, essayait de comprendre ce qui venait de se passer là-haut. Lui et ses hommes n’étaient pas des magiciens, même s’il connaissait la magie.

« C’est Guillaume et Albert qui t’envoie ? Baisez-là, les gars ! Moi, je m’occupe de notre Princesse… »

Un ricanement traversa l’assemblée, et l’Orc se rapprocha. Sa grosse main se posa sur l’épaule gauche de Selene, et il serra dessus…

[Selene]

Décidément, ces bandits n'étaient pas du genre à se tracasser. Après, ils pensaient peut-être que leur nombre et leurs muscles les mettaient à l'abri de certaines menaces, et Selene, il était vrai, ne semblait pas aussi dangereuse qu'elle l'était. Mais bon, ça ne justifiait quand même pas le comportement primitif de cette bande.

"Pourquoi tout le monde s'imagine que quelqu'un m'envoie? J'ai l'air de quelqu'un qui ne peut pas aller quelque part par soi-même?"

D'abord les déserteurs de Rédanie, puis Guillaume et Albert, et elle était passée d'aide à pute. S'il était vrai que la politesse ne sauvait pas des vies, ça ne voulait pas dire qu'il fallait se montrer vexant. Et sa proposition de tourner son arrivée en orgie était un peu gâchée par le manque total de bonnes manières et de considération de cette bande.

"Par contre, je vais refuser votre proposition. Honnêtement, vu la tête que fait votre autre invitée, j'ai l'impression que vous êtes de mauvais coups."

L'un des bandits posa sa main sur l'épaule de Selene. La sorcière pourrait sans doute le transformer en crapaud, il serait tout aussi vert et dégoûtant, juste moins musclé mais, puisqu'il comptait visiblement impressionner la mutante par sa force, autant lui répondre en conséquence. Elle attrapa donc la main et tordit le poignet. En fait, en terme de trucs verts et musclés, ce monde ne valait pas ce qu'on trouvait sur Terre. Le pauvre ne devait peut-être même pas être capable de soulever plus d'une tonne, alors que ce n'était pas réellement le minimum pour commencer à être pris au sérieux chez les "heavy hitters".

"C'est consommable, ce truc?"

Il fallait le dire, en terme d'énergie psychique non plus, il n'était pas très tentant. Il n'avait certainement pas été engagé pour son intelligence, il n'était pas même sûr qu'il soit capable de parler. En même temps, avec ses défenses de phacochère, il ne serait pas étonnant qu'il aie aussi un défaut d'élocution. Selene pourrait sans doute aspirer son énergie aussi, mais ça lui donnerait peut-être la même impression que de prendre un produit sans sucre.

Par contre, il n'était pas seul, et la plupart des autres avaient l'air humain, et assez intelligents pour ricaner, ce n'était pas forcément grand chose, mais c'était assez pour être jugé acceptable. Le bas du corps de Selene se transforma, prenant sa forme d'ombre, et fondit sur les autres bandits, en des filaments d'une matière noire, qui s'enroulait autours d'eux et absorba en un instant leur énergie psychique. Finalement, il ne restait que le chef, la mutante voulait quand même s'offrir le plaisir de le laisser réaliser qu'il avait mal jugé la situation. Oh, et il restait aussi le truc vert, la sorcière n'avait pas encore décidé si elle allait s'en débarrasser comme les autres, ou si elle allait éviter de consommer quelque chose qui semblait avarié.

"Enfin, peut-être aussi que ce n'est pas son truc, d'être attachée. Il y en a qui aiment ça, mais ce n'est pas le cas de tout le monde."

[Reine Alice Korvander]

Ewald avait un mauvais pressentiment… Qui se confirma dès qu’il vit la femme briser sans difficulté le poignet de Bosboff. L’Orc poussa un hurlement de surprise et de douleur en se reculant, sa main tordue dans un angle peu agréable à voir. Surpris, les autres se préparèrent à attaquer, mais, ensuite… Ewald recula précipitamment en voyant des tentacules noirs jaillir des jambes de la femme, et s’attaquer à ses hommes, qui poussèrent des hurlements de douleur. Ils s’effondrèrent en quelques secondes sur le sol, toute trace de vie ayant quitté leur corps. Alice écarquilla les yeux, pensant alors qu’une sorcière de Sha avait dû venir l’aider. Bosboff déglutit nerveusement, et, sans demander son reste, fuit en beuglant un mot simple, qu’il répéta à plusieurs reprises :

« Sorcière ! Sorcière !! »

La femme le laissa partir, et fixa Ewald. Médusé, ce dernier regarda la femme en fronçant les sourcils, et sembla arriver à la même conclusion qu’Alice.

« C’est l’Ombre qui t’envoie, hein ? Merde ! On nous avait dit que ça pouvait arriver. Tu crois peut-être que je vais parler ? C’est vous qui allez nous en dire plus ! Tu aurais dû me tuer quand tu en avais l’occasion, sorcière !
-  Hmmm.. !! »

Ewald sortit de ses affaires une capsule noirâtre, et la Croix de Sylvandell se mit à trembler sur place. C’était un cas de dernier secours, et Ewald avala le contenu de la capsule sans aucune hésitation. Un liquide noir déferla en lui, et il gémit, ses veines prenant une teinte noirâtre. Il s’appuya à la table, et sembla basculer sur place, avant de vomir une bile noirâtre. Et, quand il releva la tête, ses yeux avaient viré à un noir d’encre total, recouvrant la totalité de ses prunelles. Ce qu’Alice voyait était un cas terrifiant d’alchimie, quelque chose qu’elle ne pensait tout simplement pas capable… La magie stockée en bouteille. Une magie noire terrifiante, que l’homme avait avalé sans la moindre hésitation.

« J’accomplirai ma mission, et le Roi me félicitera ! »

L’homme hurla alors, et son cri déchiqueta la matière autour de lui. Les corps de ses camarades se flétrirent sur place, et la réalité elle-même sembla se modifier, s’altérer, comme si quelque chose la corrompait, la corrodait. La magie répondait à la magie, et Ewald poussa un ricanement funeste, tendant sa main vers la femme… Mais, dans sa précipitation, son attaque avait aussi déchiqueté les liens retenant Alice, mais pas celle-ci, grâce à sa Croix, qui formait comme un halo doré. N’écoutant que son courage, Alice s’interposa, bras écartés, entre Ewald et la mystérieuse femme. L’attaque d’Ewald ricocha sur Alice, et le frappa de plein fouet. L’homme hurla, du sang noirâtre s’échappant de son corps. Il bascula sur le sol, blessé, et regarda la femme.

« Im-Impossible !
-  Vous avez osé enlever la Princesse de Sylvandell, déserteur Ewald Borsodi ! Vous m’avez menacé, injurié, et avez attenté à ma pudeur, sans compter l’utilisation d’une magie interdite !
-  Rrrrraaaahhh !! »

Ewald perdait peu à peu contenance avec la réalité. Il déploya sa main pour une ultime attaque, mais la Croix scintilla encore, et repoussa encore l’attaque, défonçant le sol autour de l’homme. Ewald s’écrasa sur le sol, inerte, respirant lourdement, intoxiqué à la magie. Alice se retourna alors vers sa sauveuse, et s’inclina devant elle.

« Je vous remercie pour votre aide, sorcière. Soyez assurée que je parlerai bien de vous à la Déesse Sha. Sans votre aide, je n’ose imaginer ce que ces brutes m’auraient fait, alors, et sur un registre plus personnel… Je vous remercie ! »

Et, faisant preuve d’une franchise assez surprenante, Alice se rua dans les bras de la sorcière, venant la câliner !

[Selene]

Ça ne rata pas. Au moins, à présent que tous ses hommes étaient morts, le chef de la bande, ou de ce qu'il en restait, un orc en fuite, ce n'était pas vraiment le sommet de la gloire, réalisait qu'il n'avait pas affaire à une fille de joie recrutée pour distraire la petite troupe. Par contre, il n'avait pas bien compris le pseudo monologue sur le fait que tout le monde pensait qu'elle était forcément envoyée par quelqu'un. A présent, c'était l'Ombre. La mutante ne connaissait pas forcément ce que c'était ici, mais ça faisait partie des noms très originaux qui étaient souvent choisi par les organisations secrètes. Visiblement, ils auraient pu envoyer quelqu'un pour sauver la princesse, et le fait que ça fasse partie de ce qui était prévu montrait que cette organisation avait une capacité à rester secrète aussi impressionnante que celle du SHIELD.

Et en réaction à ce qui venait d'arriver, l'homme prit une fiole et en but le contenu. Mine de rien, ça arrivait plus souvent qu'on ne le croyait, même si c'était plutôt associé à la science, domaine qui ne semblait pas assez développé dans le coin pour des super-dopants performants. Cependant, le résultat fut assez impressionnant, même si le vomi noir devait sans doute être vu comme un contrecoup négatif. Mais la destruction de la matière, c'était tout de suite plus menaçant, même si la mutante savait aussi le faire. Ça indiquait cependant que, finalement, le chef pourrait éventuellement la blesser, même si elle devrait y survivre. Et si ça se compliquait réellement, il y avait fort à parier qu'elle pourrait toujours lui couper la tête. Mine de rien, c'était souvent une valeur sûre, que ce soit pour éliminer un adversaire, ou parfois pour l'incapaciter temporairement. Ce serait sans doute suffisant, si les gens n'utilisaient ce genre de produits qu'une fois qu'ils en avaient réellement besoin, c'était que, généralement, l'effet était temporaire. Ça, ou alors qu'il transformait le consommateur en bombe, la finalité étant d'emporter les autres avec soi.

Mais, alors que l'homme attaquait Selene, elle, n'eut pas à se défendre, la princesse s'était interposée. Visiblement, elle arrivait à le maîtriser, ou en tout cas, l'objet qu'elle portait y arrivait, parce que l'énergie semblait provenir de lui. La mutante pourrait toujours s'y intéresser plus tard mais, pour le moment, elle se focalisait plus sur ce qui arrivait au chef des bandits. Visiblement, c'était ses attaques qui lui étaient renvoyées, l'objet n'avait peut-être aucun but offensif et ne servait qu'à la défense mais, en tout cas, il se révélait plutôt efficace. Bien sûr, pour en juger, il faudrait évaluer quelle efficacité il fallait pour repousser les attaques de l'homme mais, vu la confiance qu'il avait en sa fiole, ça devait représenter une certaine difficulté, selon les critères du coin.

Une fois débarrassée de la menace, la princesse se tourna vers Selene, pour la remercier, d'abord officiellement, puis officieusement en ponctuant avec un câlin. En fait, il n'y avait pas tant d'audace à imaginer ce que les bandits lui auraient fait, c'était facile à le deviner, elle était enchaînée et en sous-vêtements dans un lit et le chef avait déjà sorti son engin. Par contre, pour le long terme, la mutante savait déjà, de l'énergie psychique qu'elle avait pris à ses hommes, qu'il avait un commanditaire, sans plus. L'une de ses dernières phrase, "pour le roi", pouvait sans doute donner un indice sur celui-ci. Comme cette région avait une princesse, elle avait sans doute aussi un roi, mais ça devait en être un autre. La sorcière pourrait peut-être en apprendre plus en assimilant l'énergie psychique du chef, il semblait encore en vie, donc ça restait possible, restait à savoir si, après son dopage, il restait consommable.

"Sha?"

Même si Selene ne semblait pas spécialement s'intéresser aux remerciements de la princesse, elle ne lui rendait même pas son câlin en la serrant contre elle, ça ne voulait pas dire qu'elle ne restait pas attentive. D'un mouvement de la main, la mutante attira la fiole du bandit, et l'observa un peu. Elle semblait vide, mais contenait peut-être encore des traces de son contenu. La princesse avait parlé d'une magie interdite, elle parlait peut-être de ça, ce serait intéressant d'en savoir un peu plus, surtout si ça avait donné l'espoir à un vulgaire petit bandit de quand même battre quelqu'un qui venait d'éliminer toute sa bande en un instant.

"Ça fait longtemps que je n'ai plus entendu ce nom. Elle n'était pas en exil ou quelque chose comme ça?"

Ce n'était peut-être pas la même, en fait, même si son nom pouvait être connu dans d'autres mondes. Et quand Selene disait longtemps, ce n'était pas quelques décennies, comme la plupart des gens. En fait, c'était quelques siècles, pas si longtemps que ça quand même, son nom ayant commencé à se faire rare durant la célèbre époque de l'obscurantisme. Et puis, même si le folklore de la sorcellerie avait vénéré son nom, beaucoup des pratiquants, surtout actuellement, lui préféraient les Vishanti, jugés plus bénéfiques.

"Et tu peux m'appeler Selene. C'est beaucoup moins impersonnel que sorcière."

C'était le terme qui était venu à la princesse, apparemment. Ça lui avait sans doute semblé plus honorifique que mademoiselle, puisque ça reconnaissait sa maîtrise de la sorcellerie, mais la manière ton le truc vert l'avait employé en fuyant laissait supposer que, dans le coin, ça pouvait avoir un sens péjoratif. Ou c'était juste lui, qui avait une très mauvaise image de la sorcellerie, même si la mutante ne l'avait pas utilisée contre lui. La sorcière se demandait d'ailleurs si il avait une destination en tête, en partant, des renforts à appeler, ou si il allait juste courir comme ça jusqu'à ce qu'il en aie assez, avant de continuer à vivre sa vie. Ce n'était pas bien important, mais la question se posait, quand même.

[Reine Alice Korvander]

La mystérieuse femme en tenue de latex ne lui rendit pas son câlin, et était… Plutôt étonnante. Elle répéta benoîtement « Sha », et Alice se recula un peu, surprise.

« Vous… Vous n’êtes pas envoyée par la Déesse Sha ? »

Visiblement non… Elle avait entendu parler d’elle, mais elle se contenta de dire qu’elle la pensait exilée. C’était… Plus ou moins ça. Sha avait été bannie par Héra alors que l’Ombre cherchait à guérir Zeus des maux qui l’affligeaient… Des maux originaires de la Boîte de Pandore. Sha avait finalement été victime de son aide, car elle avait été bannie par l’un de ses plus redoutables ennemis, Blaine, un enfant de Tzeentch, qui avait été créé par le Dieu Noir pour détruire Sha et toute sa lignée, Tzeentch étant furieux que Sha se soit éloignée de lui. Sous l’influence des maux de la Boîte de Pandore, les Olympiens avaient contribué au bannissement de Sha. Donc, dans une certaine mesure, elle avait bien été exilée, oui… Mais ce fut un exil forcé, loin d’être volontaire. Pour ne pas le savoir, cette femme devait venir de loin. Alice sentait la Croix vibrer à côté d’elle, signe que cette femme avait de toute évidence un très grand pouvoir.

« Je… Je vous prie de bien vouloir accepter mes excuses pour mon impudence, Madame. »

Changement de ton chez Alice, qui se courba respectueusement, avant de relever le buste.

« Je suis la Princesse Alice Korvander, future Reine de Sylvandell, et ces rustres m’avaient kidnappé. Je vous remercie donc chaleureusement pour votre aide, et vous invite au Château, où nous discuterons naturellement de votre récompense. Mais, pour l’instant, et si ça ne vous fait rien, je souhaiterai pouvoir récupérer mes affaires. »

En bikini, ce n’était tout de même pas très seyant pour une Princesse ! Elle remonta à l’étage, laissant la femme la suivre. La Princesse trouva rapidement la malle abritant ses affaires, et s’enferma dans une chambre, laissant la porte entrouverte pour pouvoir se changer,n tout en entendant ce qui se passait dehors.

« Vous connaissez la Déesse Sha, alors ? C’est la Déesse des Sorcières… Elle a été bannie pendant des siècles, mais elle est finalement sortie de son bannissement. C’est une Déesse mijakienne, et elle fait partie du Conseil Olympien, maintenant… Suite à l’Olympomachie… »

On pouvait dire que la Déesse avait bien placé ses pions pour devenir l’une des figures majeures des panthéons terrans. Alice enfila une courte robe blanche, des gants blancs, ainsi que des collants, et termina par ses bottes, puis sortit finalement de la chambre.

« On se sent mieux comme ça ! Et vous, Selene ? Vous êtes une sorcière, alors ? Si ce n’est pas la Déesse Sha qui vous envoie… Quel heureux vent vous a amené à croiser ma route ? »

[Selene]

La princesse aussi pensait que Selene avait été envoyée. C'était vraiment une manie chez les gens du coin, alors qu'elle avait déjà commenté ce point. Mais bon, au moins, cette fois,, ça aurait été par une déesse, c'était quand même mieux que les autres suppositions. Visiblement, ça semblait normal ici qu'une déesse envoie ses dévots directement en mission, ça pouvait laisser penser une plus grande implication de leurs divinités dans les affaires humaines. Ou peut-être était-ce seulement Sha. Comme l'avait précisé la princesse, elle revenait d'un bannissement, mais avait rejoint le panthéon, il se pouvait qu'elle se montrait plus présente au début, histoire que son culte se réinstalle suffisamment.

Après avoir parlé d'une visite du château et d'une récompense, le deuxième pouvant sans doute être plus intéressant que le premier, la princesse se présenta en bonne et due forme. Au moins, elle avait un nom simple, Selene avait l'habitude des royautés aux noms à rallonge et à la dizaine de prénoms. Puis elle souhaita récupérer ses affaires, elle devait sans doute commencer à avoir froid, en sous-vêtements dans une cave. La jeune femme remonta donc, pour les retrouver. Afin de se rhabiller, Alice se rendit dans une autre pièce, dont elle laissa juste la porte entrouverte. La mutante ne voyait pas bien pourquoi, elle ne devrait pas se retrouver plus nue que ce que la sorcière avait déjà vu, puisqu'elle ne ferait que remettre des vêtements par dessus. Après une explication sur la place de Sha dans les croyances locales, la princesse finit par sortir, de nouveau dans une tenue présentable. Enfin, une tenue blanche, avec des sous-vêtements noirs, ce n'était pas forcément une bonne idée, mais elle faisait ce qu'elle voulait.

Et c'est alors que la conversation d'Alice tourna vers Selene. Elle avait bien compris que la sorcière n'était pas envoyée par Sha, mais elle voulait alors savoir comment elle s'était trouvée là. C'était une plutôt longue histoire mais, en élaguant un peu, il y avait moyen de faire court.

"Disons que j'aime voyager tranquillement mais, en ce moment, il était impossible de faire cent pas sans être contrôlée par des gardes. Alors j'ai décidé de sortir des sentiers battus et je suis arrivée ici."

Un vent de hasard, donc. C'était globalement ça. Et maintenant que la princesse était plus à l'aise, il fallait peut-être plus s'intéresser à ce qui importait vraiment, et ce n'était pas vraiment la récompense, même si ça pouvait être intéressant aussi..

"Sinon, ce rustre a dit pour le roi, tout à l'heure. Je suppose que ce n'était pas ton père."

Selene n'écartait pas l'hypothèse pour autant, il y avait parfois des histoires de ce genre au sein d'une seule court, mais elle pensait plus à un autre roi, c'était quand même plus probable. Ce n'était pas que ces intrigues l'intéressaient réellement, mais ce serait bien que son séjour, dont elle ignorait encore la durée, ne soit pas sans arrêt dérangé par ces histoires.

"D'ailleurs, est-ce qu'il est encore vivant? Il avait l'air de l'être, ou presque."

Alice semblait l'avoir oublié, Selene aussi, au fond. Peut-être pensait-elle le faire récupérer par des gardes plus tard, à présent qu'il n'était plus vraiment en état de résister, mais peut-être avait-il aussi vécu ses derniers instants, tout simplement.

[Reine Alice Korvander]

Les sous-vêtements noirs d’Alice ne se voyaient fort heureusement pas sous la robe. La femme en tenue de dominatrice en latex lui expliqua alors qu’elle se promenait par hasard… Un hasard qui l’avait amené à rentrer dans une maison qu’elle ne connaissait pas ? Alice restait dubitative. Elle voulait en savoir plus sur cette femme. Est-ce que quelqu’un l’envoyait ? Ou était-elle ici de sa propre initiative ? L’un dans l’autre, la jeune tête blonde ne croyait pas au hasard, et elle était donc curieuse d’en savoir plus. La magicienne l’interrogea alors sur l’individu qui l’av ait molesté.

« Je pense qu’il est mort… Il y a encore cet Orc qui s’est enfui, mais je laisserai cela aux gardes. Venez, Selene. »

Alice n’allait pas vraiment pleurer sur le sort de quelqu’un qui avait voulu la tuer et la vendre. Il avait mentionné un « Roi », ce qu’Alice avait noté. Elle rejoignit la porte, et entra sur une cour avec de la terre battue. Une annexe se trouvait devant, une écurie avec un atelier. Elle reconnut rapidement les lieux. Elles étaient bien dans la vallée de Sylvandell, dans un coin reculé. La Princesse se déplaça vers les écuries, où plusieurs chevaux étaient attachés. Ils devaient appartenir à ces bandits, qui s’étaient emparés de cette ferme à l’abandon. Le vent faisait remuer les cheveux d’Alice, qui se rapprocha de l’un des chevaux, et attrapa la selle. Elle soupira devant le poids de l’équipement, mais posa la selle sur le dos du cheval, et prépara ce dernier.

« Le Roi de Sylvandell est mon père, il n’a aucune raison de me capturer… Ces gens œuvraient pour le compte du Roi Cramoisi. Je vous expliquerai plus tard. Pour l’heure… Vous êtes venue comment, au fait ? À pied ? »

Et elle n’avait pas Sali ses bottes… Quelle magicienne ! Alice savait que sa robe allait être bonne pour une séance de nettoyage ! La jeune Princesse grimpa sur le cheval.

« Je sais monter à cheval, nous allons aller vers le plus proche village… En chemin, vous n’aurez qu’à me dire qui vous êtes. Je doute, pour être honnête, que vous soyez une simple femme de passage. Déjà, les simples femmes sans histoire ne se promènent pas avec une tenue de latex de dominatrice sur le corps, et, ensuite, elles ne neutralisent pas tout un gang de mercenaires à elle seule. »

Alice l’invitait à grimper derrière elle sur le cheval pour se mettre en route…

[Selene]

Alice pensait que le bandit était mort. Elle n'en était donc pas sûre non plus, même si c'était l'idée qu'elle privilégiait. Elle comptait quand même faire capturer l'orc qui s'était enfoui. Ça ne serait peut-être pas évident, par contre, elles ne savaient pas dans quelle direction il était parti, ni combien de temps il comptait courir. Si ça se trouve, il ne s'arrêterait jamais et ne serait jamais retrouvé, et une légende commencerait à raconter que, la nuit, si on tend l'oreille, on peut encore l'entendre crier "Sorcière!". Mais bon, là encore, ce n'était pas le problème de Selene, pas plus que qui était le réel commanditaire des bandits. Par contre, elle se demandait si Roi Cramoisi était un surnom qu'on lui donnait dans son dos, ou si il avait lui-même choisi un titre aussi... moisi. C'était peut-être aussi simplement son nom de famille, et ça expliquerait pourquoi il était méchant. La princesse avait dit à Selene qu'elle lui expliquerait plus tard, la mutante en saurait sans doute un peu plus plus tard, même si ça ne la concernait sans doute pas vraiment non plus.

En sortant de la maison, Alice trouva des chevaux et en sella un. Après être montée dessus, elle invita Selene à se placer derrière et avait tourné à nouveau la conversation vers la mutante. La princesse ne semblait pas vraiment convaincue par le fait qu'elle passait juste par là, pourtant, c'était vrai. Presque.

"J'ai dit que j'étais de passage, pas que j'étais une simple femme."

Il était évident que, d'une manière générale, une personne ordinaire n'était pas vraiment apte à neutraliser facilement tout un groupe de personnes. Mais l'explication à cette facilité était toute trouvée, Alice l'avait déjà donné elle-même. Selene sauta derrière la princesse, se calant à l'arrière de la selle. Ce n'était pas vraiment une deux place, la mutante se retrouva collée à la jeune femme, et s'y accrocha. Alice avait parlé d'aller au village le plus proche, peut-être connaissait-elle assez les lieux pour savoir par où aller, ou alors, elle se disait qu'elle finirait par en atteindre un en allant tout droit, si possible en trouvant un chemin à suivre.

"Mais une simple sorcière n'aurait pas pu les neutraliser? Ça ne m'a pas semblé très dur."

C'était encore quelque chose que Selene semblait ignorer, le niveau de la sorcellerie dans le coin. La magie était abondante, et le simple terme de sorcière était connu, donc il existait une connaissance de celle-ci. Il serait étonnant qu'elle ne soit pas développée, mais pas impossible. Après, Selene n'avait pas forcément été en position favorable pour une sorcière, manipuler la magie demandait de la concentration et parfois du temps, être cernée ainsi ne rendait pas les choses faciles et la princesse l'avait peut-être aussi vu surpasser la montagne de muscles verte en force. C'était aussi possible avec la magie, mais ce n'était pas vraiment souvent le style des pratiquants.

"Et tu trouves que c'est une tenue de dominatrice? Elle est plutôt confortable pour voyager."

C'était une notion qui semblait assez universelle, visiblement, la tenue de Selene évoquait, ici aussi, une partie des pratiques BDSM. Ca faisait un peu partie du thème du dress code du Hellfire Club, et la mutante s'y était habituée. Et, apparemment, le latex était connu ici aussi. Même si c'était un polymère, il n'était pas si difficile à obtenir naturellement, il suffisait juste d'avoir découvert un arbre dont la sève avait ces propriétés. Mais, si Alice en avait parlé, c'était peut-être aussi pour faire la différence avec une simple femme. Au delà du coté dominatrice, le matériau n'était peut-être pas souvent porté, pas par tout le monde en tout cas.

[Reine Alice Korvander]

Le duo fila jusqu’au plus proche village. Alice avait très vite reconnu où elle était. Elle sentait la femme se serrer contre elle, et la Croix vibra à nouveau à ce contact, comme pour illustrer les pouvoirs paranormaux dont disposait la femme. Une fois qu’elles eurent rejoint le village, Alice rejoignit rapidement l’échevin local. Sylvandell fonctionnait sur un système féodal, chaque ville était administrée par un échevin, lequel pouvait disposer, selon la taille de la ville, d’un bailli, d’un prévôt, et ainsi de suite. En l’occurrence, le petit village abritait uniquement un échevin, dans le manoir central. La venue de la Princesse ne manqua pas de surprendre l’échevin, Eldric Loncenoir, qui accueillit naturellement la Princesse. Ils étaient au cœur de la vaste vallée de Sylvandell, et Eldric envoya immédiatement un messager prévenir la capitale. Alice, elle, eut droit à un bain, et indiqua aux villageois que la femme qui l’accompagnait, Séléné, était sa sauveuse, et qu’elle devait être traitée avec tous les égards dus à ce statut.

Le temps pour Alice de se nettoyer, et Séléné pouvait rejoindre l’auberge, ou rester dans le bureau d’Eldric, qui se trouvait au-dessus de l’auberge. Il y avait une carte de Sylvandell, qui permettait de voir que le village se trouvait dans la partie basse du royaume. La partie haute correspondait à la capitale, abritant également les structures administratifs et centrales : l’Arène, la Cathédrale, le Palais Royal… Ainsi que le chemin menant au Sanctuaire des Dragons. Peu à peu, l’auberge se remplit. La rumeur que la Princesse se tenait là avait traversé tout le village. Fermiers, bûcherons, chasseurs, venaient s’accumuler, et, quand la Princesse finit par sortir de la salle de bains, revigorée, elle alla les saluer.

« La Princesse !
-  Aussi belle que dans mes souvenirs… »

Alice les rejoignit, et invita Séléné à la suivre, la tenant par la main. Son accoutrement suscita bien des regards curieux, mais, comme elle accompagnait la Princesse, elle n’avait rien à craindre. Le moins qu’on puisse dire, c’est que la Princesse était très populaire ici. L’échevin semblait ravir de partager le pain et le vin avec une femme aussi belle.

Un rugissement ne tarda pas ensuite à se faire entendre. Dans beaucoup d’autres contrées, l’approche d’un dragon aurait paniqué les villageois, signe que le village allait se faire brûler. Toutezfois, les villageois se précipitèrent hors de l’auberge avec soulagement. Le soleil brillait haut dans le ciel, mais sa lumière fut voilée par un corps massif qui se rapprocha. Un énorme dragon doré approchait, et se posa en plein milieu du village. Il se posa avec majesté, faisant virevolter du vent autour de lui, surprenant les villageois. Les enfants désiraient le toucher, s’approcher de lui. Le chevauchant avec élégance, un dragonnier descendit au sol, et s’agenouilla devant la Princesse.

« Majesté, je suis rassuré de vous savoir saine et sauve. Sa Majesté a envoyé une troupe dans la ferme où vous étiez honteusement retenue, et Sa Majesté souhaite que vous et votre sauveuse m’accompagniez de suite pour rejoindre le Palais Royal. »

Alice se retourna vers Séléné, et lui sourit.

« Je suis sûre que tu n’as pas peur de monter à dos de dragon, toi… »

Curieusement, elle ne savait encore pas grand-chose d’elle, mais elle ne pouvait pas non plus la laisser là, pas après ce qu’elle avait fait en venant la sauver…

[Selene]

Selene n'eut pas de réponse sur le fait qu'une sorcière "normale" aurait pu venir à bout des mercenaires. C'était peut-être un juste retour des choses, puisque elle-même se montrait peu explicative face aux tentatives d'Alice d'en savoir plus. La mutante évitait d'entrer dans les détails, pour éviter de dire n'importe quoi, mais sa manière de répondre de manière anodine aux questions de la princesse pouvait peut-être commencer à la desservir. Mais la blonde semblait quand même continuer de se montrer sincère avec elle, il était tout aussi possible qu'elle ne discutait pas quand elle montait à cheval. C'était vrai que ce n'était pas une situation propice pour parler, elles ne se faisait pas face, le bruit des sabots résonnait en continu et il fallait aussi faire attention à la manière dont la monture était dirigée. Personne n'aimait se prendre une branche en pleine face, surtout en plein galop.

Et la conversation ne put pas réellement reprendre une fois la monture arrêtée. Alice avait effectivement assez vite trouvé une ville, ou peut-être juste un village, Selene ne connaissait pas non plus les normes de ce monde. Et c'était une notion qui dépendait du niveau de population dans les agglomérations, en général. Il semblait quand même y avoir pas mal de monde, et même une auberge, mais ça ne voulait rien dire. Quoi qu'il en soit, une fois arrivée, la princesse n'eut pas réellement de temps à consacrer à la mutante, entre une entrevue avec le responsable local, pour expliquer la situation et que des mesures soient prises, puis directement après un bain, pour effacer un peu sa captivité. Heureusement qu'il y avait une auberge, donc. Au moins, avec l'argent qu'elle avait récupéré, elle pouvait tester ce qu'il y avait à boire dans le coin. Bien sûr, c'était un établissement rustique, dans une petite bourgade, ce n'était pas vraiment le meilleur témoin de qualité, mais ça lui donna déjà un premier petit aperçu. Et elle eut ensuite droit à un second puisque, après qu'Alice soit enfin revenue de son bain, elle fut confiée à un repas avec elle et le dirigeant local.

Il sembla à Selene que le vin qu'on leur servit était meilleur que celui qu'elle avait reçu par elle-même. Ça n'en était pas pour autant un breuvage exceptionnel, mais bon, c'était toujours la qualité d'un coin paumé, ça ne voulait toujours rien dire. La mutante ne prit par contre que peu de pain, elle n'avait pas besoin de manger, puisqu'elle se nourrissait d'énergie psychique. Elle n'avait d'ailleurs pas non plus besoin de boire mais, contrairement au pain qui était souvent insipide, à l'exception de la croute si il était bien cuit, les boissons avaient quand même l'avantage d'avoir une certaine richesse gustative, même si elle n'était pas remarquable ici.

Mais le repas fut interrompu par un rugissement qui sortait de l'ordinaire. Il était plus puissant que ce qu'on pouvait entendre d'habitude. À première ouïe, l'animal qui le poussait devait être plus gros qu'un ours ou un tigre mais ça ne voulait rien dire, la nature développait parfois certaines caractéristiques de manière disproportionnée, une manière pour un animal de tromper les autres, pour les intimider. En général, quand un tel cri se faisait entendre, la sagesse recommandait de rester à l'intérieur mais, au contraire, la foule rassemblée dans l'auberge se précipita dehors. Alice, et du coup Selene aussi, suivit le mouvement. La sorcière put voir un dragon, mais il adoptait déjà une attitude qui ressemblait à une manœuvre pour se poser. Ses mouvements d'ailes, pour stabiliser son corps avant de mettre les pattes au sol, provoquèrent des bourrasques qui surprirent les villageois. Ce n'était pas pire que le déplacement d'air d'un hélicoptère, finalement, seule la cape de Selene fut affectée par ce vent, tandis qu'elle restait impassible. Voir un dragon était pour elle comme entendre le nom de Sha, c'était quelque chose qu'elle connaissait assez pour ne pas être abasourdie, même si elle n'avait plus forcément l'habitude. Sur Terre, les dragons avaient une certaine tendance à se mêler des affaires des autres, c'était pourquoi il n'y en avait plus. Mais le vieux Saul comptait quand même sa transformation en l'une de ces créatures puissantes parmi ses tours préférés, même si il avait une préférence pour les dragons asiatiques, question de culture.

Un homme chevauchait le dragon, une sorte de soldat, et en descendit, pour faire un bref rapport à Alice. Même si il lui donna un résumé des mesures prises, il était surtout là pour la ramener au palais, c'était plutôt logique, ainsi que Selene.

"Je n'en ai pas l'habitude, mais ça doit être comme monter sur un cheval."

Selene n'était plus sûre de l'avoir fait. Morganne, en son temps, en avait un, mais juste pour servir de monture, c'était trop encombrant, en comparaison à un griffon, un hippogriffe ou un pégase. Et ça mangeait plus, aussi, mais, sur ce point, c'était à ça que servaient les ennemis. Par contre, si Alice parlait juste du fait qu'il fallait du courage pour monter sur le dos d'un animal qui semblait apprivoisé, ça ne posait absolument aucun problème pour la mutante. Au contraire, à proximité d'un dragon, son dos était encore l'endroit où on était le plus en sécurité. Elle laissa quand même la princesse grimper dessus la première, question de priorité, avant de s'installer derrière elle, comme sur le cheval. C'était reparti pour un trajet, et la sorcière ne savait pas exactement combien de temps il allait durer. À vol de dragon, ça devait aller plus vite, mais elle ignorait la distance qu'il y aurait à parcourir.

[Reine Alice Korvander]

Le petit groupe n’alla pas très loin. Sylvandell était un royaume coupé en deux. Au sud, il y avait la partie inférieure, une large vallée entourée de montagnes, avec des fermes, des forêts, des villages… Et, au-dessus, séparée par une énorme ville et une paroi, il y avait la partie haute, supérieure, du royaume. On put rapidement voir de grandes tours le long de la montagne, faisant office de protections. Le Château royal apparaissait ensuite, énorme et massif, bien plus grand que l’ancien Château royal, qui consistait en une petite tour isolée sur une saillie rocheuse jaillissant du sol. Au loin, à l’horizon, d’autres montagnes se dressaient, et on pouvait, en regardant bien, voir des dragons qui remuaient au loin. C’était le Territoire des Dragons, une terre interdite aux hommes, et où les dragons pouvaient les attaquer. Peu de personnes pouvaient s’y aventurer sans risques.

En l’état, le dragon se rapprocha du Château royal, une grande structure avec de grands jardins en son centre. Le Château était également divisé en deux, avec, au nord, le donjon, une grande volière pour permettre aux dragons de se poser, un bastion annexé au donjon abritant le siège de la Commanderie Noire. Tout au sud, derrière les grands jardins, il y avait des parties plus vivantes, comme une auberge, et d’autres structures. Les jardins étaient librement accessibles par de grands corps de garde. Le dragon survola cette zone, avant de se rapprocher de la volière, et se posa à l’intérieur. La silhouette massive du dragon atterrit sur une plateforme ensablée, et des palefreniers leur firent face, accueillant le dragon qui grogna sur place, manifestant son mécontentement.

« Nous y sommes ! »

La nouvelle du sauvetage de la Princesse se répandit dans tout le château, et Alice eut droit à beaucoup de visites tandis qu’elle se faisait examiner par l’apothicaire royal. Sans réelle surprise, les agents royaux interrogèrent aussi Séléné, voulant savoir qui elle était. L’interrogatoire fut mené par un jeune chevalier sylvandin, Sire Joffrey de Panzouic. Il jeta un regard curieux vers l’accoutrement de la femme, qui fut interrogée dans un endroit confortable, l’un des salons du Château.

« La Couronne tient à vous remercier d’avoir su nous ramener intègre notre Princesse, Madame. Pour autant, nous devons mener une enquête, laquelle commence par savoir comment s’appelle la femme qui est à l’origine de ce sauvetage, et savoir aussi ce qu’elle fait à Sylvandell. »

[Selene]

Le voyage ne fut pas trop long et se fit autant en hauteur qu'en longueur. Le château était apparemment situé à une altitude supérieure aux petites villes. C'était sans doute plus pratique pour le défendre, contre le niveau technologique de ce monde en tout cas. Et le palais en lui-même était plutôt impressionnant. C'était normal qu'il soit grand, la royauté avait l'habitude de faire aussi fastueux que possible, mais c'était justement ainsi un bon témoin des ressources du royaume.

Mais Selene n'aurait pas tout de suite l’occasion de le visiter. Alors que la princesse partit de son coté, remplir des formalités pour voir si elle allait bien, apparemment, Selene fut prise à part, visiblement pour se renseigner sur elle. La mutante n'avait probablement pas le choix, en tout cas si elle ne souhaitait pas perdre l'avantage de bons rapports avec ce pays. La sorcière préférerait quand même y couper, même si les premières questions étaient plutôt simples, ça pourrait ne pas durer, et elle sentait venir la question de savoir d'où elle venait. Bien sûr, Selene pouvait citer des lieux, en absorbant l'énergie psychique des bandits, elle avait fait une bonne réserve de connaissances, et supposait que Mijak était une bonne réponse à cette question. Apparemment une grande ville, influente, et ça ressemblait à un pseudo-anagramme de magique, ce qui ne gâchait rien.

"Je m'appelle Selene. La princesse a déjà dû le dire."

Selene s'était déjà présentée à la princesse, et celle-ci avait probablement donné cette information, quand elle avait été prise en charge. La mutante prenait ses aises et s'installa confortablement, ça ressemblait après tout plus à un salon qu'à une salle d'interrogatoire mais, même là, elle aurait sans doute la même assurance. Après tout, même si elle n'aimait pas spécialement cette inquisition, elle estimait pouvoir parfaitement y répondre et, dans le cas contraire, elle pourrait toujours y couper court. La sorcière jouait donc le jeu, pour le moment, avec l'idée que ça se passerait forcément bien.

"Quant à la raison de ma présence, je voyage, tout simplement. Ça aussi, je l'ai dit à la princesse."

Ça, par contre, Alice ne l'avait peut-être pas dit, parce que c'était trop vague et pourtant évident. En fait, parce que c'était plutôt flou, c'était une réponse qui amenait inévitablement les questions suivantes, entre autres concernant l'endroit d'où elle venait, mais sans doute aussi concernant son voyage, quelque chose qui n'est généralement vu que comme un moyen, et demande donc plus d'explications et de détails, plus que ce que Selene donnait pour le moment en tout cas, même si elle y répondait assez naturellement et spontanément.

[Reine Alice Korvander]

L’interrogatoire de Séléné n’aboutit à pas grand-chose, mais rien ne permettait de démontrer qu’elle était une menace… Et puis, si elle avait voulu du mal à la Princesse, elle ne l’aurait pas libéré. Fort de ce raisonnement d’une indéniable perspicacité, l’interrogatoire fut rapidement terminée, et on offrit à Séléné l’opportunité de prendre un bain, et de bénéficier de l’hospitalité de la Couronne. À la sortie de son interrogatoire, une jeune femme, Mineko Azumi, annonça en effet à Séléné que la Princesse l’invitait à dîner le soir, et qu’elle pouvait prendre un bain, nettoyer ses vêtements, et avoir une chambre pour la nuit auprès du quartier des célébrités.

« Vous avez aussi le droit à un massage après votre bain. »

Visiblement, la Princesse avait ordonné qu’on prenne soin de la femme ! Séléné ne pourrait toutefois pas la voir avant le soir, puisque la Princesse allait passer sa journée à se remettre de son agression, mais aussi à écouter l’enquête qui allait avoir lieu. Des enquêteurs royaux examinaient en ce moment la ferme où elle était retenue, emmenant les cadavres, cherchant le moindre indice susceptible de déterminer le mobile et les potentiels complices des ravisseurs. Mineko, de son côté, conduisit donc Séléné, lui permettant de faire à peu près tout ce qu’elle voulait, même si le nettoyage était indispensable. Crapahuter dans une forêt vous laissait toujours des marques, et ses belles bottes avaient bien besoin d’être nettoyées.

Séléné allait aussi pouvoir constater que, malgré l’univers médiéval où elle avait atterri, la salle de bains disposait d’un système de tuyauterie très moderne, avec la possibilité de générer de l’eau chaude. Un système de plomberie moderne, qui s’expliquait par la présence d’une chaudière alimentée par une gemme magique de feu et par du charbon. Un ensemble somme toute très réussi, de quoi offrir à Séléné l’occasion de se détendre d’ici à la soirée, où Mineko irait encore la chercher pour l’inviter à la salle à manger.

Le soir venu, la Princesse portait sa désormais traditionnelle robe chinoise moulante, et avait un port beaucoup plus altier que quand Séléné l’avait trouvé dans la cave. Et, surtout, quand Séléné entra dans la salle à manger, elle put voir que la Princesse était aussi en train de nourrir ses enfants, Aerin et Erwan, les allaitant l’un après l’autre…

[Selene]

Finalement, l'interrogatoire de Selene fut plus court qu'elle ne l'aurait pensé. Il fallait dire, et le lieu où il avait lieu le montrait bien, qu'il s'agissait juste d'obtenir quelques renseignements, ce n'était pas comme si la mutante avait commis un crime. Enfin, ça, ça dépendait un peu de leur politique migratoire, mais il ne semblait pas, pour le moment, qu'il y avait le moindre problème à ce niveau-là. La sorcière put enfin se détendre, en profiter d'un traitement beaucoup plus hospitalier. Un bain, un massage, et visiblement un nettoyage de sa tenue pendant qu'elle-même se lavait. Selene était plutôt endurante, elle pouvait supporter des conditions de vie très dures, mais elle savait apprécier et savourer ce confort de vie. Et, à ce niveau, le château pouvait étonner, l'eau courante, même si c'était un fonctionnement assez simple, avait mis du temps à être aussi élaborée que celui qu'elle trouva ici. Après, même si il fallait inévitablement passer par quelques étapes, chaque civilisation se développait différemment, en fonction des besoins qui se présentaient, mais aussi des idées qui germaient et bien sûr des ressources qui étaient disponibles.

Et après le bain, ce fut au tour du repas. Il arriva au soir, Selene eut donc un peu de temps pour se détendre. Bien sûr, elle avait récupéré sa tenue, mais elle n'était pas une barbare, elle n'allait pas diner à la cours en tenue de voyage. Grâce à l'énergie psychique qu'elle avait absorbée, elle avait quelques connaissances de ce qui se portait dans le royaume, mais elle avait quand même quelques doute que des bandits de bas étage sache réellement ce qui se portait dans la haute société. D'un mouvement de la main, elle changea donc sa tenue, pour quelque chose de plus correct, bien que toujours aussi confortable, un mélange de robe traditionnelle et de robe de soirée, ça devrait passer.

Quand elle arriva, le diner avait déjà commencé. Pour certains en tout cas, si aucune des personnes assises ne mangeaient encore, Alice allaitait deux enfants. Les siens, probablement. Comme la princesse lui semblait jeune, la mutante n'avait pas pensé qu'elle était mère, mais il était vrai que les dynasties misaient beaucoup sur le nombre des héritiers. Il suffisait de voir les monarchies qui restaient sur Terre, les couples princiers finissaient rarement avec un seul enfant. La sorcière attendit qu'on lui présente un siège, elle n'était pas vraiment au courant de la disposition de la table, qui avait souvent son importance dans ces milieux. Elle préférait éviter de s'assoir et qu'un barbu avec une couronne vienne ensuite lui dire que c'était sa place. La sorcière n'avait pas encore vu le roi, mais tous les rois étaient barbus, c'était la règle. Enfin, sauf en France ou, vers la fin, certains n'avaient même pas l'âge pour avoir ne serait-ce qu'un fin duvet.

[Reine Alice Korvander]

Par rapport à l’ancien château, la salle de banquet était encore plus grande, et ressemblait beaucoup à l’ancienne salle. C’était donc une grande pièce haute de plafond, avec une grande table centrale en forme de U, la Princesse étant au bout. On trouvait également d’autres longues tables, deux autres tables longues à gauche et à droite, formant deux longues rangées. Guerriers, dragonniers et connétables venaient à loisir manger ici. C’était une tradition sylvandine. On pouvait même trouver de simples voyageurs. Une petite table ronde était réservée à proximité du fauteuil de la Princesse, où on nourrissait ses enfants. Des jumeaux… De mémoire d’archiviste, c’était une première au sein du royaume et de la longue lignée des Korvander ! Aerin et Erwan, deux magnifiques enfants… Alice pouvait passer des heures à les observer.

Elle sortit de ses pensées quand Selene arriva. La jeune femme avait troqué sa combinaison moulante en latex (ce qu’Alice trouva presque dommage) au profit d’une robe médiévale. Sans doute l’avait-elle emprunté, ce qui n’était évidemment pas un problème, puisque cela faisait partie des ordres donnés par Alice. Quoi qu’il en soit, la femme se rapprocha, et Alice l’invita à s’asseoir à côté d’elle.

« Ma sauveuse se doit d’être à mes côtés… »

Si Selene avait opté pour une robe médiévale classique, Alice, elle, portait une robe chinoise, très moulante. Un cadeau de mariage de Mélinda, une robe qu’elle n’hésitait pas à porter aussi souvent que possible.

« Je vous en prie, régalez-vous. »

C’était un festin digne de ce qu’on pouvait imaginer de tout banquet médiéval. Sylvandell étant éloignée de la mer, il y avait souvent de la volaille, mais aussi de la viande. Un joli poulet se trouvait devant Selene, avec de multiples légumes et autres accompagnements. Alice attrapa plusieurs tranches de blanc, et les avala avec appétit, savourant ce mets chaud, agréable. Le poulet trempait dans sa sauce pour éviter qu’il ne soit trop sec. Tout autour de la table, les gens parlaient de choses et d’autres, mais leur soulagement à savoir la Princesse revenue était palpable.

Alice ne tarda pas à lancer la conversation avec Séléné :

« Alors, dites-moi, quelles sont vos capacités ? Est-ce que vous êtes vraiment une sorcière ? Et combien de temps envisagez-vous de rester à Sylvandell ? S’il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour vous, n’hésitez pas, je… Je suis un peu votre obligée, après tout. »

Mine de rien, c’était à elle qu’Alice devait de pouvoir festoyer ce soir !

[Selene]

Selene n'eut pas à attendre longtemps pour qu'on lui désigne une place. Alice l'invita vite à ses cotés, privilège pour l'avoir sauvée, et la mutante vint donc s'assoir sur la chaise qui lui était présentée. Même si ce n'était pas très important pour elle, pouvoir être à coté de la princesse était sans doute un honneur, il fallait quand même espérer qu'aucun de ses deux bébés ne régurgite son lait sur la sorcière. La nourriture était abondante, surtout de la viande avec quelques accompagnements, un festin classique de cours du Moyen-Âge, en somme, avec beaucoup de convives, qui semblaient venir de milieux très hétéroclites.

Selene prit une tranche du poulet qui se présentait devant elle, et commença à la manger doucement, en contraste total avec la princesse qui se servait plus généreusement, et avait déjà englouti quelques tranches. Alice devait avoir faim, même si elles avaient déjà mangé dans la petite ville, mais elle devait sans doute reconstituer quelques réserves, après avoir nourri ses deux nourrissons. Autours d'elles, quelques discussions arrivaient à l'oreille un peu distraite de la sorcière, jusqu'à ce que ce soit la voix de la princesse, plus proche, qui viennent l'interpeler. Elle lançait elle-même la conversation, et Selene en était à nouveau le sujet, il fallait dire qu'il y avait encore beaucoup à dire sur elle, et que Alice voulait clairement en savoir plus.

"Bien sûr que je suis sorcière. Tu en doutes?"

Même si Selene avait d'autres capacités, et les avait utilisées, elle était malgré tout aussi une sorcière, et ça la résumait assez bien. Alice voulait en savoir plus sur ses capacités, la "démonstration" qu'elle avait faite dans le repaire des bandits donnait apparemment l'impression que celles de la mutante étaient plutôt exceptionnelles. Après, même si la magie était abondante dans ce monde, ça ne voulait pas dire que la sorcellerie était répandue, et encore moins quelque chose de commun. Il n'était pas rare que, malgré tout, les sorciers restent une caste restreinte, et que ses membres ne parcourent pas forcément les routes très souvent. Il était vrai que les pratiquants de la magie avaient, d'une manière générale, tendance à rester chez eux, pour développer leur art, entre autres.

"La manipulation de la magie offre de nombreuses capacités, presque une infinité de possibilités quand on sait comment la manier, je doute que le repas dure assez longtemps pour en faire une énumération complète."

Encore une fois, Selene ne savait pas exactement quelle était la connaissance de la sorcellerie dans ce monde. Même sur Terre, alors qu'il y avait depuis longtemps une bonne connaissance de sa nature basique, qui permettait d'en faire un peu ce que son utilisateur voulait, on trouvait encore des "cultures" où l'on n'en connaissait que des manifestations spécifiques, et ne faisait que les répéter. D'une certaine manière, ces groupes brûlaient du pétrole parce qu'ils savaient juste qu'il pouvait brûler, sans savoir qu'il était possible d'en faire du plastique, ou de le raffiner pour en faire un combustible capable de faire autre chose que de chauffer et éclairer, comme alimenter un moteur à explosion. Si, sur ce monde, ils en étaient à avoir à peine effleurer la magie, et ne l'exploitait que d'après quelques sorts qu'ils avaient réussi à découvrir, la maîtrise que la mutante en avait devait sembler assez exceptionnelle, même sans compter sur ses autres capacités.

Selene s'interrompit pour prendre une bouchée de son poulet. Ça permettait de marquer une pause, après une réponse concernant ses capacités, qui en soulignait le vaste panel, en écartant ainsi l"idée d'entrer plus en détail pour tous ses aspects. Ce n'était pas le seul sujet que Alice avait lancé, elle voulait aussi savoir combien de temps la mutante comptait rester dans son royaume, tout en lui proposant, d'une certaine manière, de lui demander si elle voulait quelque chose.

"Par contre, je ne sais pas combien de temps je compte rester. Disons que je n'ai en ce moment ni destination ni but, je prends un peu les choses comme elles viennent."

L'avantage de l'immortalité, c'est qu'on avait tout son temps, l'inconvénient, c'est qu'il fallait l'occuper. Le pire ennemi des immortels, et des gens intelligents aussi, c'était l'ennui, il fallait bien s'occuper l'esprit. C'était pour ça que des immortels bien plus vieux que Selene s'étaient trouvé un hobby, qui était devenu une obsession avec le temps. La mutante, quand elle n'avait rien d'important à faire, s’attelait donc à quand même faire quelque chose, avec un peu plus de diversité que d'autres, et, d'une certaine manière, pour le moment, l'exploration de cette région en faisait partie.

"Et je ne suis pas encore à Sylvandell depuis assez longtemps pour savoir ce qu'il y a d'assez intéressant pour m'y attarder."

Selene s'interrompit encore, prenant une nouvelle bouchée, tout en tournant son regard, non plus sur le repas, mais vers Alice qui, même avec l'excuse de ne pas encore bien connaître le pays, devait penser qu'il regorgeait de raison de s'y arrêter. Après tout, la plupart des gens aimaient leur propre pays, et y voyait les attraits, en partie parce que c'était parfois la seule chose qu'ils connaissaient. Bon, la princesse avait sans doute déjà eu l’occasion de le quitter, même dans un conteste plus médiéval, elle pouvait avoir un rôle diplomatique, et s'était peut-être déjà rendue chez des souverains voisins. À moins qu'elle ne soit plutôt une princesse qui reste au château, ce qui, étant donné ce qui lui était arrivé, n'était pas forcément non plus un mauvaise idée.

"Mais peut-être peux-tu me faire quelques suggestions sur les attraits de la région? Je suppose que tu dois savoir ce qui vaut le détour dans le coin."

Encore une fois, en tant que locale, Alice devait connaître ce qui était digne d'intérêt dans le coin. Des lieux, ou autre chose. Bien entendu, pour le moment, Selene ne comptait pas partir, elle attendait toujours la récompense promise, elle n'allait pas la laisser là. Enfin, elle pourrait le faire, même si elle ne la réclamait pas, elle n'était pas aussi avide, surtout qu'elle ne pensait pas que ce serait aussi époustouflant que ça, malgré une éventuelle grande valeur, si elle devait trop attendre, elle finirait sans doute par en avoir marre et repartir. Enfin, encore une fois, la longue vie qu'avait connue la sorcière l'avait rendue patiente, elle n'était pas à quelques jours près.