The Multiversity

« …MAYDAY ! MAYDAY !… AVARIES IMPORTANTES… NOUS MANQUONS D’OXYGÈNE… MAYDAY ! MAYDAY ! »

En voyageant dans l’espace, l’Anneau de Jessica avait capté ce message de détresse. Elle revenait d’une mission de patrouille, un simple vol de routine destiné pour elle à expérimenter le voyage stellaire. Elle était après tout encore en formation, mais, en revenant, elle avait emprunté un chemin détourné, s’éloignant du chemin de retour initialement prévu. Un choix rendu nécessaire car il y avait une supernova en progression sur le chemin de retour. Elle avait donc emprunté un itinéraire alternatif, jusqu’à capter ce signal. Il émanait d’un système stellaire sur lequel les registres d’Oa ne comprenaient aucune information. Cela ne manquait pas de surprendre, car les Secteurs répondant à l’autorité des Green Lanterns étaient normalement minutieusement cartographiés et répertoriés. Or, elle n’avait aucune donnée sur ce système solaire.

Jessica apparut donc… Et évita de justesse un astéroïde qui se rapprochait d’elle.

« Woow ! »

Tout système solaire abritait des ceintures d’astéroïdes, mais, ici, la propension d’astéroïdes était incroyablement élevé ! Elle se décala donc, et déploya son Anneau, projetant des lasers multidirectionnels devant elle pour exploser plusieurs météorites. Elle constata vite que, à l’exception d’une étoile, le système solaire ne comprenait qu’une seule planète tellurique, une grande planète blanche qui ressemblait à une sorte d’énorme boule de neige. D’épais nuages recouvraient cette planète, et elle chargea l’Anneau de lancer un scan de la planète, tout en se dirigeant vers le signal de détresse. Pour la protéger du vide spatial, Jessica était recouverte d’un halo vert qui la protégeait.

« LANTERN CRUZ, signala l’Anneau, LE PROTOCOLE IMPLIQUE DE FAIRE UN RAPPORT À DESTINATION DE VOTRE FORMATEUR.
-  Alors, fais-le ! Mais je te signale que je dois venir en aide aux naufragés de l’espace dès que je capte un signal !
-  LANTERN CRUZ, VOUS ÊTES EN STADE DE FORMATION. AUCUN SAUVETAGE N’EST POSSIBLE S’IL PRÉSENTE UN RISQUE. »

Jessica grommela, et continua sa route. Elle vit de nombreuses carcasses de vaisseau… Beaucoup. Le signal émanait d’un énorme vaisseau qui semblait abandonné depuis des années.

« AUCUN SIGNE DE VIE DÉTECTÉ. »

La jeune femme acquiesça. Ce système étant très dangereux, elle décida de se rapprocher du vaisseau à la dérive pour désactiver le système, et finaliser son rapport. C’était un énorme vaisseau abandonné, ressemblant à un massif sarcophage qui dérivait à l’abandon. Jessica se rapprocha d’un sas, et l’ouvrit à l’aide de son Anneau, puis s’aventura à l’intérieur. Des carcasses flottaient dans l’espace, des squelettes dans des combinaisons spatiales. Elle étudia la zone, et commença progresser, bien loin de s’attendre à ce qui allait lui arriver…

Les aventures spatiales ! Ces trois avaient la capacité d’éveiller chaque explorateur dans le cœur de tous les enfants. Ils se mettaient à imaginer des voyages à une vitesse folle où les étoiles devenaient des lignes blanches sans comprendre le phénomène scientifique derrière. Même en grandissant, les adolescents et adultes pouvaient se protéger dans d’excitantes aventures. Avec des revolvers ayant un look rétro. Des combinaisons plus ou moins réalistes avec des bulles d’oxygène. Des aurores boréales prenant leur place dans le vide entre la matière. Ou encore de folles rencontres avec des espèces sexys, philosophes ou encore festives d’aliens.

Mais la vérité était tout autre. Benjamin était enfermé dans une espèce d’œuf de métal dérivant… il ne savait où. Dans l’espace infini de l’éternité si froide et noire… Oui, Benjamin était loin d’être l’enfant qu’il avait été. Il n’était plus le héros fonceur. Il était le mercenaire blasé.

*Pff, heureusement que je ne suis pas claustrophobe. *

L’incapacité de se lever. Une espèce de pompe brancher au niveau de son caleçon pour gérer… et bien, les besoins primaires. Des espèces de tablettes qui étaient censés être des « repas ». Rien n’envoyait du rêve.

*Bon. OK, c’est une capsule de survie. Mais quand même… *

Depuis combien de temps il dérivait ? Il n’en avait aucune idée. Il aurait pu demander à l’I.A. mineure de son « œuf ». Mais d’un, ça ne l’intéressait pas de compter le temps. Qui aimait entendre les aiguilles d’une horloge égrener chaque seconde perdue ? De deux, un astéroïde venait de le PERCUTER !

« Oh bordel de MERDE !! »

Donc, cet astéroïde n’était pas un phénomène isolé. Ce n’était pas une coïncidence si un unique caillou avait percuté un minuscule ersatz de vaisseau dans le désert des étoiles. Non, Benjamin était entré dans une zone hautement peuplé d’astéroïdes. Il était donc logique qu’il y ait une collision.

Le problème ? L’inefficacité du boucler de l’œuf endommagea la pauvre I.A. qui avait surtout pour but de l’emmener dans un lieu où il pourrait trouver de l’aide. Mais un problème n’étant jamais seul, d’autres suivirent. Un nouveau choc fit percuter la tête de Benjamin contre l’acier de sa capsule. Résultat ? Perte de mémoire et blessure qui couvrit une partie de son visage de sang.

Puis nouvelle collision. Plus rien ne bougeait. L’œuf semblait avoir trouvé une place de parking dans un immense vaisseau abandonné. Ironie oblige, la réalité est un crash dans un endroit tout sauf hospitalier. A son réveil, Benjamin devra gérer notamment avec une autonomie en oxygène, retirer la « couche » pour subvenir à ses besoins, savoir où il se trouve ou encore recouvrer la mémoire des derniers événements de sa vie.

Jessica explorait l’intérieur de l’immense vaisseau. Elle identifia des corps qui flottaient dans l’espace, et examina les logos sur leurs blouses. Son Anneau lui signala qu’il s’agissait d’une ancienne compagnie d’exploration spatiale, Yutani Space Corporation.

*Ce vaisseau date donc d’avant la fusion entre la Yutani et  Weyland…*

Le vaisseau devait donc être échoué depuis plusieurs siècles, avec des corps qui flottaient sans vie. Jessica se pinça les lèvres, consciente qu’elle allait devoir aller au pont de commandement, et utiliser son Anneau pour, à tout le moins, accéder à la boîte noire, et ainsi pouvoir répertorier le vaisseau, savoir ce qu’il faisait là, si sa présence était autorisée ou non… Jessica se déplaçait donc, tandis que le vaisseau tremblait régulièrement, heurté par des astéroïdes. Par certains endroits, plusieurs parties du vaisseau s’étaient disloqués, séparés du reste, et d’autres étaient extrêmement fragiles. Jessica continua donc sa traversée, quand l’Anneau capta un signal.

« SIGNAL REPÉRÉ, IL Y A UN BATTEMENT DE CŒUR À PROXIMITÉ ! »

Jessica sentit son propre cœur s’emballer, et se dépêcha de rejoindre le signal. Elle volait dans le vaisseau, filant le long de coursives.  Son chemin la conduisit vers une double porte scellée, et elle s’arrêta en voyant une inscription. Sur la porte, on avait mis un énorme panneau, en écrivant en rouge :

« N’OUVREZ PAS ! ILS SONT À L’INTÉRIEUR !! »

Elle fronça les sourcils, intriguée par ce message. Les verrous étaient usés depuis longtemps, mais elle pointa tout de même son Anneau, et matérialisa un léger filin qui passa entre les deux portes. Le filin se transforma alors en une grosse tenaille, écartant les deux parois… Et elle vit un cadavre cloué contre la porte, la tête en moins.

« Hum… J’ignore ce qui s’est passé ici, mais ce n’est pas un astéroïde qui lui a fait ça… »

Une autopsie fut réalisée sur le corps à l’aide d’un scanner de l’Anneau, qui se contenta d’examiner les os, puisqu’il n’y avait plus que ça sur ce corps en décomposition chronique.

« LA TÊTE A ÉTÉ TRANCHÉE, LANTERN CRUZ. L’AUTEUR A DÛ S’Y PRENDRE À PLUSIEURS REPRISES. JE DÉTECTE EN REVANCHE DE CURIEUSES EXCROISSANCES ET MALFORMATIONS OSSEUSES À HAUTEUR DES BRAS ET DES JAMBES.
-  Comment ça ?
-  L’ANATOMIE EST CONFUSE, JE N’AVAIS ENCORE JAMAIS VU UN TEL MODÈLE. »

Jessica vit une reproduction holographique du squelette, et fronça les sourcils. Le radius et le cubitus, les deux os de l’avant-bras, se prolongeait longuement, au-delà des deux mains, formant comme de longues pointes osseuses. Jessica pensa à une sorte de mutation étrange. Elle constata ensuite que de nombreux corps flottaient dans la salle, qui devait être une sorte d’énorme réfectoire. C’est au fond qu’il y avait le signal… Encastré contre le mur, retenu par des câbles et de l’acier, elle se rapprocha pour voir une capsule de survie. L’Anneau examina rapidement la capsule.
Elle n’appartenait pas à la Yutani, et un corps se trouvait à l’intérieur, en état de stase. Jessica laissa l’Anneau agir pour déverrouiller la capsule, mais les systèmes étaient endommagés, ce qui empêchait de l’ouvrir.

*Qu’à cela ne tienne, ce n’est pas une porte qui va me retenir !*

Jessica se concentra, et utilisa encore son Anneau. Elle arracha la porte, et généra autour de l’homme une combinaison spatiale verte. Relâché de son caisson, l’homme barbu bascula en avant, et Jessica l’intercepta. Elle l’aida à se coucher au sol, tandis qu’il recouvrait ses esprits.

« Monsieur ? Vous allez bien ? Je m’appelle Jessica Cruz, j’appartiens au corps des Green Lanterns. Est-ce que vous savez ce qui s’est passé ici ? Faisiez-vous partie de l’équipage ? »

Le vaisseau trembla encore, frappé par de nouveaux astéroïdes…

« Woh !... Quelle beauté… »

Les yeux vitreux, les mots étaient sortis dans un soupir incontrôlable. Benjamin n’était pas encore complètement réveillé. Il était comme piéger entre le domaine du rêve et celui de la réalité. Et puis, c’était étrange cette couleur verte qui l’entourait. Ça entourait aussi la femme qui le regardait. Ce vert : est-ce que l’Omnitrix avait débloqué une nouvelle fonction ? A moins que cela n’était un symptôme supplémentaire de son funeste futur ?...

« Où est-ce que je suis ?... Je… »

Ses paupières s’ouvrirent et se fermèrent plusieurs fois. Ce qu’il voyait… ça n’allait pas. Pourquoi ? Les perspectives. Il y avait quelque chose dans les perspectives qui rendait tout ça bizarre. Voilà, il venait de trouver. Il était au sol. Allongé. Comme s’il avait perdu. Comme s’il était une victime. Benjamin T n’était pas cela ! Alors il releva son buste. Chaque chose à la fois. Il se remettrait debout ensuite. Il fallait d’abord qu’il réponde à la dame. Parce que son cerveau lui rappelait qu’il y avait des questions en suspens.

« Aucune foutue idée de ce qui s’est passé ici. Je me souviens avoir erré dans le vide et… En tout cas, je ne faisais pas partie de « ça ». Je suis plutôt du genre cavalier seul. Pour ce que ça vaut de faire équipe… »

Une famille décédée. Des amis spécialistes des coups en traître. Sans parler de ceux qui n’étaient que des connaissances et qui jouaient chacun pour leur gueule. Sans connaître le passé de Benjamin, il était clair que l’homme avait connu des déconvenues. Si ce n’était des traumatismes ou une perte de confiance en quiconque.

Mais Benjamin était un homme seul et en besoin. Et il y avait une magnifique femme en face de lui qui le gardait en vie de sa magie. Ça valait soudainement énormément de choses ! Alors un sourire du genre confiant revint.

« Moi c’est Benjamin T. On pourrait dire que je suis un héros. Même si on m’a souvent répété qu’être payé pour mes exploits me classe plus facilement dans la catégorie des mercenaires. Mais peu importe si j’œuvre pour le Bien, hein ! »

Ce fut plus fort que lui, il la gratifia d’un clin d’œil alors… qu’il réalisait qu’il portait encore l’espèce de couche de l’œuf de survie. Ce n’était pas glorieux. Pas du tout… Il se jeta donc dans l’œuf qui l’avait gardé en vie dans les étoiles, se débarrassa de ce qui avait permis à la capsule de survie de gérer ses besoins élémentaires. Et revêtit une combinaison de dernière chance. En somme, c’était comme acheter une combinaison spatiale dans un supermarché qui ne vendait que ses propres marques économiques. La qualité était très loin d’être le premier critère. Mais au moins, il récupérait un minima d’autonomie et de prestance.

Jessica fronça les sourcils, surprise… Surtout quand l’homme lui fit un clin d’œil. Benjamin T., un héros… Elle n’en avait jamais entendu parler ! Mais, d’un autre côté, l’Univers était vaste, infini même… Il était donc toujours possible de rencontrer d’autres personnes. Jessica, un peu surprise, le laissa retourner dans sa capsule, et mettre sa propre combinaison.

« Je vois… Eh bien, puisque vous êtes un héros, vous allez donc pouvoir m’aider. Comme je vous l’ai dit, je m’appelle Jessica Cruz. Mon Anneau a capté un signal de détresse venant de ce navire. Comme vous avez pu le constater, ce signal est assez ancien, et, comme tout ce système solaire est dangereux, je cherche à le désactiver afin d’éviter que d’autres vaisseaux ne s’y perdent… Ce qui expliquerait sans doute les autres carcasses qui flottent dans l’espace. Une fois que cela sera fait, je pourrais vous escorter jusqu’à la prochaine station spatiale de maintenance. »

Elle ignorait s’il connaissait les Green Lanterns. Si le Corps était très connu, l’Univers étant infini, il y avait forcément des galaxies entières où personne n’avait jamais entendu parler du Corps. Mais Benjamin T. avait l’air très humain… Et portait après tout un nom humain. Jessica se retourna ensuite, et commença à marcher, voler pouvant surprendre l’homme. Ils quittèrent cette grande pièce, et Jessica emprunta un couloir. Le vaste navire disposait d’un antique système de tramway interne, qui permettait de rejoindre les différentes sections du navire. C’était cette station que Jessica recherchait.

« Il vaut mieux que vous restiez après moi, la structure du vaisseau est compromise… »

Ils rejoignirent une porte coincée que Jessica décoinça en tirant dessus. Des corps sans vie flottaient ici et là dans les coursives noirâtres du vaisseau. Jessica ouvrit donc la porte, essayant de ne pas faire trop de cauchemars, ou de ne pas songer à « Alien, Le Huitième Passager ». Elle descendit des marches, et rejoignit ainsi la station de tram.

« Bon… Est-ce que vous pouvez voler avec votre combinaison ? Sinon, je vais vous fabriquer un jetpack. Il faut rejoindre le pont de commandement… Et vous faites quoi dans la vie, au fait ? »

Si sa combinaison spatiale était de seconde qualité, ce qui était vraiment à chier (et s’appliquait à la grande majorité d’elles) : c’était le manque de poches. Benjamin ne savait pas quoi faire de ses mains. Il avait tellement l’habitude de les fourrer dans les poches de son pantalon. Mouais… le vide de l’espace n’avait jamais été son truc de toute façon. Et il fallait qu’il se retrouve dans une galère pareille. Bon, au moins, il y avait un joli petit lot. En plus de ça, c’était elle qui lui avait demandé de rester près d’elle. Inévitablement, il avait souri de joie.

« Je ne pense pas que cet assemblage de chinoiseries soit capable d’un truc pareil. Je vais déjà m’estimer heureux si dans 24h j’ai encore la possibilité de respirer. »

Benjamin était intrigué. Comment cette fille allait réussir à lui fabriquer un jetpack ? Elle n’avait rien sur elle. Pas pour lui déplaire, hein ! Mais à part cette combinaison noire et verte, et cet anneau brillant : zéro équipement.

*Green Lantern, qu’elle a dit. Ça me dit quelque chose. Des espèces de justiciers de l’univers, je crois. *

« Je pourrais voler mais ça pourrait ajouter d’autres complications. Disons que je préférerais garder ce tour dans ma manche, si tu vois ce que je veux dire. »

Se transformer en alien était possible. Mais parfois, la montre était capricieuse. Elle retransformait Benjamin en être humain. Et rien ne garantissait qu’il reviendrait avec la combinaison spatiale. S’il pouvait éviter de mourir pour un stupide bug de l’Omnitrix…

« Ce que je fais dans la vie ? Je dirais que je sauve des princesses enfermées dans des donjons en combattant des dragons. Bon, ce serait plutôt la version technologique 2.0 Les donjons devenant des vaisseaux spatiaux et les dragons des espèces de choses indescriptibles qui traînent dans le vide des étoiles. Mais il m’arrive aussi de mettre les pieds dans des mondes qui semble encore bloquer dans une espèce de moyen-âge. Avec des différences, hein. Je ne dis pas que la Terre est le centre de l’univers. Mais bon, ça reste quand même mon modèle de base. »

Un héros sauveur de princesse, terrasseur de dragons et capable de voyages dans le cosmos. Si ça ne faisait pas son petit effet auprès des hormones de Jessica, il allait devoir sortir le grand jeu des transformations aliens.

Elle avait l’impression d’être tombée sur un nouveau Guy Gardner. Il était un autre Green Lantern originaire de la Terre, connu pour son franc-parler, son style de dragueur lourd, et pour ses crises de colère. Une forte tête, un rookie qui était souvent repris par les Gardiens pour son manque de respect et son franc-parler. Elle comprit vite, à la manière dont Benjamin se mit à la tutoyer, et à se présenter comme un sauveur de princesse en détresse, qu’il appartenait à cette catégorie d’hommes qu’elle avait appris à détester quand elle était sur les bancs de la fac’ : les dragueurs invétérés, pleins d’assurance, allant du simple comique de situation pour les moins dangereux aux pervers arrogants pour les pires. Difficile de se faire un avis tranché, d’autant qu’il semblait que ce Benjamin souhaitait conserver ses pouvoirs secrets pour l’heure.

Tout ce qu’elle avait noté, et essentiellement retenu, c’est que, comme elle, il venait de la Terre.

« Vous êtes donc un compatriote.  Malheureusement, j’ai peur que vous ne trouviez personne à sauver ici… »

En remontant le tramway, Jessica constata que la voie de chemin de fer était détruite par endroits. Des débris flottaient dans l’énorme couloir, et elle vit en contrebas la carcasse du tramway. Elle descendit, et son Anneau généra une lampe, qui lui permit de regarder à l’intérieur. Il y avait de nombreux cadavres coincés là-dedans. Elle examina encore l’endroit où la voie de chemin de fer était sectionnée, et, en examinant la scène, elle constata que l’acier avait fondu aux extrémités.

*De l’acide…*

Curieusement, cette découverte la fit frissonner. Elle se déplaça encore, et vola à nouveau, rejoignant le quai du pont de navigation. Jessica se posa sur le quai, et vit de multiples traces d’impacts dans les murs.

« Il y a eu une sacrée bataille ici… »

Ils remontèrent un escalier menant vers le pont de commandement. L’escalier les conduisit directement au pont, qui était très large, avec un pont suspendu massif en hauteur qui se terminait par une large plateforme circulaire, permettant de commander. En contrebas, il y avait de multiples ordinateurs. En remontant l’escalier, Jessica aperçut de nombreuses traces de sang séché sur les escaliers, ainsi que d’énormes traces de griffes le long des murs.

Quand ils rejoignirent le pont, ce fut pour voir qu’un mur entier était composé d’une gigantesque baie vitrée ébréchée. Les boucliers étant éteints depuis longtemps, la baie avait subi l’assaut des astéroïdes. Là aussi, de nombreux corps flottaient. Jessica vola en hauteur, rejoignant la plateforme circulaire, et aperçut un grand ordinateur semi-circulaire au pied d’un pupitre surélevé.

« Bon, on va pouvoir en savoir plus… »

Jessica pointa son Anneau sur l’énorme appareil, et des câbles électriques jaillirent de l’Anneau, pour se nicher dans les connecteurs de l’ordinateur principal.

« L’Anneau va se connecter pour essayer de relancer les systèmes… »

On entendit l’ordinateur central vibrer, ronronnant furieusement. Des écrans multiples se mirent à clignoter, et Jessica fronça les sourcils.

« Peux-tu accéder au message de secours ?
-  TENTATIVE D’ACCÈS EN COURS, LANTERN CRUZ ! »

La voix de l’Anneau résonna à voix haute, permettant à Benjamin de l’entendre.

« FICHIERS IDENTIFIÉS, J’ESSAIE DE LES RECONSTITUER, ILS SONT GRAVEMENT ENDOMMAGÉS.
-  Pas de folie ; si tu n’arrives pas à les reconstituer, supprime-les. »

Depuis le pont principal, la surface de Tau Volantis se découpait, une immense planète tellurique, recouverte d’énormes nuages, comme si une tempête gigantesque s’était abattue sur la surface de cette planète. À proximité, Jessica observa avec curiosité un phénomène qui n’avait pas été diagnostiqué par son Anneau : Tau Volantis disposait d’une lune, un satellite naturel qui flottait à côté.

« Étonnant, je ne pensais pas que cette planète disposait de son propre satellite… »

Tandis que le vaisseau vibrait de partout, que l’Anneau lançait un diagnostic des systèmes, Jessica se retourna vers Benjamin.

« Donc… Tout à l’heure, vous m’avez parlé de facultés spéciales. Vous pouvez m’en dire un peu plus ? »

Généralement, porte une combinaison moulante en étant une femme apportait une certaine sexy-attitude dans le package. Ça ne semblait pas être le cas de cette Jessica qui lui avait dit « Vous êtes donc un compatriote. Malheureusement, j’ai peur que vous ne trouviez personne à sauver ici… »

« D’après mon expérience personnelle, dans un tel environnement, ce n’est qu’une question de temps avant que je ne te contredise. Et puis, je préfère voir les basses magouilles de réussir à réunir deux Terriens en plein milieu de nulle part, non ? »

Est-ce que Benjamin était intéressé par l’exploration de cette épave ? Non, bien sûr que non. Il avait abandonné son titre de héros depuis longtemps. Ça faisait des années que ces espèces d’expéditions d’urbex spatiales ne l’intéressaient plus. Il n’y voyait plus d’intérêt. Ça ne propulsait plus des shots d’adrénaline ou de joie dans son cœur et son cerveau.

Mais il était équipé d’une combinaison spatiale à chier sans aucun vaisseau pour dégager de là. Son échappatoire était cette femme beaucoup trop sérieuse. Trop professionnelle. Elle avait plus de conversation avec sa bague qu’avec lui…

Alors Benjamin suivait Jessica. Dès qu’elle tournait la tête vers lui, il affichait son masque de « dragueur ». Un sourire en coin. Une certaine joie voire sang-froid d’affichée. Mais dès qu’elle se concentrait de nouveau sur les corps flottants ou les indices disséminés : Benjamin faisait la gueule.

Voilà qu’ils étaient sur le point. La bague créa des espèces de câbles USB entourés d’un halo vert. Drôle de pouvoir… Ca évoquait aussi un manque d’imagination. Mais Benjamin n’avait pas un rapport à faire sur cette Jessica, alors il laissa ses yeux vagabonder d’un point à un autre. Faisant le tour des écrans, puis découvrant une planète à l’allure morose avant d’observer un peu plus précisément le satellite.

*Aussi abandonné et froid que moi… *

« Tu veux savoir en quoi je suis spécial ? »

Retour du sourire. Une expression qui, de son point de vue devait être charmante. Mais de celui de la super-héroïne ? Probablement très agaçante.

« Tu vois cette montre à mon poignet. Bon, ça ressemblait davantage à un bracelet quand j’étais môme. Aujourd’hui, ce serait plutôt un gantelet. Mais j’ai pris l’habitude de l’appeler une montre et, c’est très compliqué de changer les habitudes. Bref, cette montre est la source de mes facultés spéciales si tu veux. Si tu veux, c’est un peu comme la lampe magique dans Aladdin. Tu connais le dessin animé ou même enfant tu étais sérieuse comme tu l’es aujourd’hui ? Donc, cette montre, ça permet d’exaucer des vœux, si on veut. »

Benjamin n’avait pas envie de dire qu’il pouvait se transformer en des dizaines d’aliens à volonté. Il voulait parler avec elle. Avoir une interaction humaine. Créer du suspend et du mystère. En somme, c’était plus ou moins de la drague. De toute façon, un homme et une femme en plein milieu de rien : ça évoquait forcément des scénarios où les deux se rapprochaient tôt ou tard, non ?

Si elle le vouvoyait, lui la tutoyait. Cela, elle le nota. Elle avait aussi noté ses sourires de faux-charmeur, type dragueur lourd invétéré. Jessica tiqua quand il mentionna sa montre, puis lui parla alors de la lampe magique d’Aladdin, en lui demandant si, même enfant, elle était aussi sérieuse qu’aujourd’hui.

*Enfant, je n’avais pas connu Volthoom, je n’étais pas devenue agoraphobe ni paranoïaque…*

Dans un coin de sa tête, elle entendit néanmoins les intonations de la fameuse musique du Génie de la lampe d’Aladdin. Jessica se pinça brièvement les lèvres, regarda autour d’elle. Elle observa brièvement le tableau de bord de l’ordinateur central, qui était encore en train d’être analysé par son Anneau, puis se retourna alors vers Benjamin.

« Il y a longtemps que vous avez quitté la Terre, non ? Vous savez, depuis, il y a eu un mouvement du style MeToo. Je pense que vous n’auriez pas aimé… Vu votre mansplaining ambiant… »

Son ton semblait toujours aussi sérieux, et elle pointa son doigt vers sa montre :

« Je n’ai toutefois pas trop compris. C’est quoi, ton meilleur ami ? Ta montre, ou ta main droite ? »

Une réponse inattendue. D’une part, elle lui répondait sur le fait que, évidemment, elle connaissait Aladdin, mais, d’autre part, elle lui balançait une blague sexuelle, sa main droite étant évidemment une référence au fait de devoir se masturber en utilisant sa main. Jessica lui présenta alors son Anneau.

« Tu vois cet Anneau ? Il me permet aussi de matérialiser ce que je veux… »

Jessica ne pouvait pas trop l’utiliser, vu que l’Anneau continuait à fonctionner, et qu’elle n’avait pas envie de gaspiller inutilement son énergie.

« Enfin, tu as déjà eu l’occasion de voir ça. Ta montre fabrique elle aussi des constructions ? »

Si Benjamin ne comprenait pas le truc du MeToo ou du mansplaining, il avait parfaitement compris l’allusion à la branlette. Ca lui étira d’ailleurs un sourire. Donc Jessica avait tout de même un potentiel à la déconne. Ca, c’était une information très importante. Parce que, s’il était condamné à passer un bout de temps avec elle en plein milieu du vide des étoiles : il ne voulait pas que ce soit avec une bureaucrate chiante à mourir.

« Des constructions ? Tu sais, ma montre, ce n’est pas un Lego ou un jeu dans le genre. »

Il fallait arrêter cette représentation. Un pressentiment. Comme si, soudainement, Benjamin réalisait le contexte sombre qui l’entourait. La carcasse du vaisseau. La vision du satellite froid à travers la baie vitrée. Et même le sérieux de la fille en combinaison moulante. Alors son visage se durcit. Ce n’était plus celui d’un homme qui avait du mal à s’extirper du sommeil artificiel d’une capsule de survie. Ni celui d’un homme à l’humour trop lourd pour dissimuler des traumas.

« Le vrai nom de ma montre, c’est l’Omnitrix. C’est un artefact alien tombé sur Terre. Un que j’ai mis à mon poignet alors que j’étais encore stupide. J’avais dix ans. »

Avec le recul, il regrettait cette période. Si ça avait été le rêve de tout gosse de pouvoir se transformer en héros et partir en road-trip familial pour vivre des dizaines d’aventures : c’était aujourd’hui une source de souvenirs douloureux.

« Tu ne m’as pas l’air d’une fille qui va retourner sa veste. Trop sérieuse, pour ça. Et puis, vu qu’on plus ou moins dans un désert sordide dans l’espace… Bref, je vais te parler de mes capacités. L’Omnitrix est un réservoir à alien. Une technologique capable de copier l’ADN et de m’offrir la possibilité de me transformer. Je te passe les détails techniques et le fait que l’artefact soit parfois plus ou moins capricieux. Mais j’ai la possibilité de me transformer en une très large gamme d’aliens avec des pouvoirs et capacités très différentes. »

Enfin, Benjamin s’éloigna de Jessica pour se rapprocher de l’ordinateur central. Si la bague verte et son scan ne fonctionnait pas, ce serait à lui d’agir. Pas parce qu’il voulait percer le mystère de cette carcasse envoyant des messages qui piégeait les vaisseaux telle une sorte de Triangle des Bermudes. Mais parce que ses tripes lui disaient qu’il fallait qu’il récupère ses informations dans l’objectif de survivre. Donc, si le scan de Jessica échouait, il se transformerait en Biotech. Puis « fusionnerait » avec la technologie du vaisseau pour lire son « passé ».

Jessica fronça les sourcils devant les explications de Benjamin sur sa « montre »… L’Omnitrix. La manière dont il l’avait récupéré, et dont l’Omnitrix fonctionnait…

« Tu es sûr d’avoir les droits pour cet engin ? On dirait quand même un peu un plagiat de nos Anneaux. »

L’Omnitrix ne permettait pas de générer des constructions, mais de prendre des formes différentes. D’un autre côté, Jessica pouvait aussi, si elle le voulait, élaborer des constructions ressemblant à des formes différentes. Cependant, cela ne lui permettait pas d’avoir les capacités d’une autre race, contrairement à l’Omnitrix. Elle se dit qu’elle allait sans doute devoir en faire état dans son rapport. Bien des espèces cherchaient à reproduire la technologie unique des Gardiens, et il semblerait que les personnes ayant conçu l’Omnitrix y soient parvenues. Allait-elle devoir emmener ce séducteur endimanché sur Oa ? Au moins, il risquerait de bien s’entendre avec Guy Gardner, ils pourraient même faire des concours de biture au bar en se demandant quelle était l’espèce alien la plus sexy à se taper.

« J’ai moi aussi récupéré cet Anneau de manière assez fortuite sur Terre… Mais cela n’a pas été simple. Cet Anneau m’a aidé à en combattre un autre… Un Anneau maléfique, ayant appartenu à Volthoom, et portant en lui sa conscience… Un peu comme Sauron et l’Anneau Unique, tu vois le genre ? L’Anneau de Volthoom a tué des gens à qui je tenais, et il m’a à moitié rendu folle… Je me suis enfermée pendant des mois, car j’avais peur qu’il me possède… Mais, finalement, j’ai résisté à son attrait, et je suis devenue une Green Lantern. Enfin, il y a à peine quelques mois, j’étais encore en pyjama dans mon studio à manger mes corn flakes. Maintenant, je me retrouve dans l’espace, à des milliers d’années-lumière de la Terre. Donc, je suis techniquement en formation. Et vous, Monsieur T., vous allez devoir me suivre sur Oa. Votre Omnitrix risque d’intéresser de très près les Gardiens. »

Le vaisseau restait toujours aussi silencieux, mais, sans trop pouvoir se l’expliquer, Jessica avait un mauvais pressentiment en étant ainsi, le sentiment que quelque chose devait les observer… C’était un sentiment absurde, bien sûr, puisque l’Anneau n’avait détecté aucun signe de vie. Mais, en explorant ces carcasses de vaisseaux abandonnés, dérivant pour l’infini dans l’espace, Jessica ne pouvait que trembler.

Son Anneau continuait à reconstituer les fichiers de l’ordinateur, et commença à diffuser une vidéo. On put y voir un homme assez âgé, le commandant, avec une barbe blanche et un regard acéré.

« Colonel James Norrington, Capitaine du YUT-12. Ceci est mon journal de bord. Nous avons entrepris le voyage interstellaire pour rejoindre les coordonnées du secteur YUT-150-ST. Rien de particulier à signaler pour le moment, la majeure partie des membres de l’équipage sont en phase de repos cryogénique. Nous fonctionnerons comme convenu par le manuel sur un système automatique. Ceci est donc mon premier rapport avant que les derniers membres de l’équipe, moi y compris, ne rentrions en sommeil cryogénique. Nous nous réveillerons ensuite normalement, sauf incident, en ayant atterri sur la planète tellurique détectée à ZX-150-ST, dont le numéro de matricule est… 150-ST-01. »

L’enregistrement se termina ensuite, tandis que l’Anneau continuait son office de déchiffrement…

Mais c’était quoi cette nana ?! Coincée du cul semblait une bonne expression. Pas rapport à sa personnalité de séducteur, quoique, ça y avait aussi un lien. Mais quoi ? Madame EXIGE qu’il se rende sur une planète pour répondre à une espèce de tribunal ? Elle critiquait son Omnitrix d’artefact économique et de vulgaire copie de sa bague verte ? Non ! Et puis, voilà que soudainement Miss Mission lui déblatérait toute sa vie ? Qu’est-ce qu’il en avait à faire qu’un gars au nom de Pokémon l’ait traumatisé ? Est-ce que c’était une manœuvre de son parfait petit guide de possesseur d’anneau que de provoquer de l’empathie chez l’homme qu’elle avait pris sous son aile ? Enfin, aile. Elle n’en avait pas. Seulement une espèce d’halo vert qui lui permettait de léviter.

Alors il leva les bras en l’air pour stopper le moulin à paroles. Mais ce fut un autre gars, un total inconnu, qui prit le relai. Un certain colonel qui faisait son rapport de mission, balançant des chiffres et des lettres cryptiques pour faire bien et parlant de sommeil givré. Décidément, Benjamin s’était réveillé au mauvais endroit avec le mauvais secours. Sur ce dernier point, ça ne s’était pas joué à grand-chose. Une belle fille comme elle avec des pouvoirs, il y avait eu le potentiel pour que quelque chose se passe. Et puis… elle avait ouvert la bouche. Elle avait brisé le charme de sa langue.

« Bon. On va mettre les choses au point. De un, mon Omnitrix n’est pas une copie « made in china » de ton anneau. Tu as envie que je le traite de babiole verte ou pas ? Je ne pense pas. Donc sois gentille avec mon Omnitrix, et je serai gentil avec l’Anneau auquel tu mets un A majuscule devant. Ca s’entend à la façon dont tu le dis.

Ensuite, de deux, je me fiche de savoir ton origin story. Que tu aies été traumatisé, violé ou obligé de bouffer cent hamburgers ne changera pas un fait : on n’est que tous les deux, tu as au doigt un pouvoir puissant, la capacité de te barrer d’ici et de savoir quelle direction prendre. Alors que moi, même si mon Omnitrix est puissant. Je suis carrément paumé. Et en plus de ça, équipé d’une espèce de combinaison de survie qui semble avoir une durée de vie très limité. Trop limité.

Bref. On va forcément faire équipe dans les heures à venir. Pour ne pas dire jours à venir. Donc tu ne m’appelles plus Monsieur T. je n’aime pas ça. Et tu ne cherches pas à faire l’inverse en m’appelant par le diminutif de mon prénom. Je crois que ça m’énerve encore plus.

Ah. Et une dernière chose, si tu crois m’obliger à t’accompagner pour voir tes supérieurs, me coltiner un rapport, de la paperasse administrative, qui finira très surement par me proposer une espèce de Club Med spécial souris de laboratoire : tu peux te le carrer très loin là où je pense. Pour rester un minimum poli. »

Benjamin espérait avoir été assez clair. S’il pouvait avoir des bons côtés, il en avait aussi des pas agréables. Ceci étant dit, il n’en restait pas moins un professionnel et un survivaliste. Le message de ce colonel dont il avait déjà oublié le nom semblait donc important pour leur situation actuelle et à venir.

« Donc. Tu sais qui c’est le militaire de la vidéo ? Tu as une idée de quoi il parlait ? Parce que moi, rien. Que dalle. Nada. Je suis parfaitement inutile pour le moment. Sauf si ton Anneau n’est pas assez puissant avec ce qui reste de l’informatique à bord. Alors, dans ce cas, je me transforme en alien spécialisé dans le hacking. »

Jessica ne pensait pas qu’il prendrait mal sa remarque sur son Omnitrix. Pour elle, c’était juste de l’humour, mais il semblerait bien que, dans le monde de cet homme, seuls les hommes aient le droit de faire des blagues. Elle le laissa donc déblatérer son sac, y compris quand il indiqua n’avoir nulle intention de se rendre sur Oa… Une remarque au demeurant peu pertinente. Maintenant que Jessica l’avait rencontré, elle notifierait dans son rapport la présence de cet homme et de son Omnitrix. Les Gardiens surveillaient de très près l’usage de leur technologie, et les conventions galactiques qu’ils passaient pour intervenir dans les secteurs de l’espace prohibaient clairement la contrefaçon de leurs technologies futuristes. Si l’Omnitrix ne générait pas de constructions à l’infini comme l’Anneau de Jessica, il était malgré tout capable de générer des formes alien pour son utilisateur. Jessica ignorait toutefois comment l’Omnitrix fonctionnait. Pour elle, l’Anneau avait besoin d’un double carburant : l’énergie cosmique venant de la Batterie, et sa propre volonté. C’était ce qui semblait faire des humains de bonnes recrues : les humains avaient beaucoup de volonté.

La Green Lantern lui répondit rapidement sur plusieurs points :

« On ne se connaît pas encore assez pour que je vous appelle par votre prénom. Donc, soit vous me donnez votre nom, soit ce sera Monsieur T. Et arrêtez de me tutoyer, c’est une forme de sexisme, alors, si vous ne voulez pas que je vous laisse planté là avec votre ego de mâle blanc, je vous encourage à me respecter. »

Le ton était sec et froid. Oui, cet homme lui cassait les pieds, et elle ne cherchait pas à le masquer. De toute façon, tout cela serait bientôt fini. Elle allait bientôt récupérer les données de la boîte noire, puis elle sortirait de ce système, et déposerait ce phacochère sur pattes à la plus proche station spatiale. Elle se retourna vers les écrans, tandis que l’Anneau compilait les données. L’écran trembla encore…

« Colonel James Norrington, Capitaine du YUT-12. Ceci est l’entrée n°00037 du journal de bord. »

Le colonel Norrington semblait plus fatigué que lors de sa première entrée.

« Nous sommes en train de multiplier les sorties d’urgence du sommeil cryogénique. Il y a toujours des ratés dans ce type de procédure, mais, ici, le chiffre est anormalement élevé… Et les colons qui émergent ont peu ou prou tous les mêmes symptômes. Migraines, maux de tête, et ils font tous les mêmes rêves. C’est ça qui est étonnant. En sommeil cryogénique, on ne rêve pas… Enfin, c’est ce que je pensais. Je ne comprends pas ce qui se passe, et cela m’inquiète. »

L’écran s’éteignit ensuite. Jessica fronça les sourcils, et répondit ensuite à Benjamin T :

« Ce vaisseau appartenait à la corporation Yutani, une ancienne corporation galactique qui a fusionné il y a de nombreuses années avec sa rivale, Weyland. Le colonel Norrington… J’ai lancé une recherche parallèle. Les bases de données d’Oa indiquent qu’il a existé il y a plus d’un siècle, et qu’il est porté disparu suite à un saut galactique… Il avait des enfants. Ce qui est curieux, que c’est le Livre d’Oa ne mentionne pas cette mission. Je pense que la Yutani n’a pas déclaré cette mission. »

L’écran se ralluma alors. Norrington avait maigri, et avait les yeux rougis.

« Colonel James Norrington, Capitaine du YUT-12. Ceci est l’entrée n°00058 du journal de bord. C’est… Nous avons atteint ZX-150-ST. Il y a énormément d’astéroïdes, ils ont endommagé nos moteurs. Mais je ne comprends pas… La sonde spatiale indiquait qu’il y avait plusieurs planètes telluriques composant ZX-150-ST, mais nous n’en avons identifié qu’une seule. Nous sommes en train de préparer la colonisation de la planète, mais les choses s’aggravent sur le vaisseau. Ceux qui sont sortis de sommeil cryogénique prématurément, ils… Je suppose que la compagnie censurera ce message, mais… Leurs symptômes se sont aggravés. Ils sont devenus plus violents, agressifs, et continuaient à faire des rêves similaires. Le docteur Kitani a montré que leurs cycles de sommeil étaient exactement les mêmes. Ils rentrent tous en sommeil paradoxal au même moment, et… Je ne sais pas, je ne comprends pas ce qui se passe. C’est une planète morte, mais nos senseurs ont détecté des signaux venant de ZX-150-ST-01. En attendant, nous avons enfermé les Prématurés en zone de quarantaine, certains ocmmencent à écrire des mots en langue inconnue sur les murs, ou même à manifester des pouvoirs biotiques qu’ils n’avaient jamais eu auparavant. »

Norrington se tut pendant un moment, serrant ses mains entre elles.

« Je crois qu’ils ont capté un signal venant de cette planète… »

L’écran tressauta encore, et Jessica entendit alors un vrombissement important.

« LES DONNÉES DE LA BOÎTE NOIRE ONT ÉTÉ RÉCUPÉRÉES, LE SYSTÈME EST REMIS EN ROUTE. »

Des lumières commencèrent alors à se rallumer…  Et un tentacule gris jaillit alors pour attraper Jessica au cou. Elle poussa un couinement surpris avant de tomber au sol, et fut attirée vers l’arrière, le tentacule se raccourcissant pour révéler son propriétaire : un abominable monstre grisâtre fait de chair pourrie et de traces de sang…

C’était vraiment une casse-couilles ! Un pur produit de l’administration à laquelle on avait ajouté un anneau plein de pouvoirs galactique. Bordel ! Et elle voulait être vouvoyé. Benjamin avait manqué de faire une courbette exagérée en lui disant que, bien entendu, tout serait possible à Madame de la Haute. Mais il s’était retenu. Comme il l’avait déjà dit, sa survie passait par sa présence doublée de son anneau. Il allait devoir faire… des concessions.

Heureusement pour elle, les piques ne recommencèrent pas. Le fameux Colonel de l’épave recommençait à parler. Et plus il parlait, moins ça allait. Entre temps, la Green Lantern se targua de faire une recherche wiki-Oa et de crâner avec un nouveau florilège de connaissances. Mais… Benjamin s’en fichait. Que ce vaisseau ait été sur une mission légale ou carrément illégale : ça n’allait rien changer pour lui. Pour eux non plus, d’ailleurs. Il n’y avait plus rien à sauver de ces débris régulièrement percutés par les astéroïdes. Et bordel ! Que c’était chiant d’entendre ces impacts. Encore un qui venait juste d’avoir lieu.

Et enfin de la lumière. Benjamin était d’humeur à lancer une petite pique. Quelque chose comme quoi, Madame de la Haute avec son pouvoir tout-puissant avait enfin décider de faire ce que Dieu avait fait. Enfin, les six premiers jours. Etant donné que Jessica semblait partisane du dimanche du repos. Mais il n’en avait rien fait. Bien entendu, à cause du tentacule…

« Jessica ! »

Abandonnant la réflexion, Benjamin se jeta dans l’action. Sa survie dépendant de sa rapidité à réagir. La paume de sa main frappa le cadran de l’Omnitrix. Il n’avait pas fait attention à l’alien sélectionné. De toute façon, parfois, l’artefact n’en faisait qu’à sa tête et lui imposait une transformation. Parfois, l’artefact semblait aussi agir pour une force qui pourrait être nommée Destin.

La créature attaquant Jessica avait un tentacule. Benjamin aussi en possédait maintenant !

« Speectraal ! »



Ca lui arrivait parfois. Il criait le nom de l’alien en lequel il se transformait. Un reste de son enfance heureuse… Mais Spectral était tout sauf le produit d’un rêve. C’était plutôt la manifestation d’un cauchemar. L’environnement de l’épave, de la planète morte et de l’ennemi mutant lui allait à ravir. Spectral était le produit d’un fantôme doublé de tentacules noirs et gris ainsi que de griffes acérés.

Spectral se jeta donc sur le tentacule qui retenait le cou du Green Lantern (enfin, DE LA Green Lantern. Il ne voulait pas subir d’éternelles attaques féministes…). Les griffes tranchèrent le tentacule. Furieux, la créature lança son bras presque-humain pour le saisir à la gorge.

Spectral devint immatériel ! Il traversa l’ennemi tel un fantôme. Réapparut derrière lui. Et lui enfonça ses griffes acérés directement dans son crâne.

« Saauvetaage aaacompliii… »

C’était une particularité de l’alien. Sa voix semblait résonner. Son intonation semblait faire de lui le vrai méchant de cette épave. Mais ce n’était pas le cas. Spectral était ainsi fait. Un alien tout droit sorti d’une maison hantée ou d’un cimetière maudit.

Benjamin T. se transforma en une sorte de spectre infernal, et trancha le tentacule du monstre. Surprise, Jessica se retourna rapidement, et le monstre d’où émanait le tentacule poussa un grognement.

*Pourquoi l’Anneau ne l’a pas repéré ?*

Son Anneau lui avait dit qu’il n’y avait aucun signe de vie à bord de ce caillou ! Pouvait-il s’être trompé ? S’agissait-il d’un monstre qui était entré en hibernation profonde, si profonde que l’Anneau n’avait pas réussi à percevoir les infimes signes de battements cardiaques. Jessica se releva donc, et elle vit Benjamin, sous forme spectrale, passer à travers le monstre, et trancher son crâne. Du sang coagulé jaillit de la tête tranchée, et Jessica examina la carcasse avec l’Anneau.

« AUCUN SIGNE DE VIE DÉTECTÉ, AUCUNE TRACE DE BATTEMENT CARDIAQUE OU D’ACTIVITÉ CÉRÉBRALE !
-  Quoi ? Mais… C’est impossible ! »

La créature se retourna brusquement vers Benjamin, et sa main valide s’étira alors, se transformant en une longue griffe acérée. Spectral n’eut pas le temps de se rendre à nouveau invisible que la griffe le transperça.

« BENJAMIN ! »

Jessica attaqua avec son Anneau, envoyant des tirs laser qui transpercèrent le ventre du monstre. La bête se retourna vers Jessica, avec des trous dans son ventre, mais cela ne sembla nullement la stopper. La mâchoire de la créature pendouillait en l’air, retenue à sa tête ouverte par des filaments osseux et de chair. La bête attaqua avec sa griffe, et Jessica étira le long de son Anneau une lame-laser verte. Elle trancha la griffe avec sa lame-laser, et la bête trembla nerveusement sur place, poussant un mugissement de douleur.

« ANALYSE EN COURS… LA CRÉATURE EST UN DRONE, ELLE CAPTE UN SIGNAL ÉMANANT D’UNE AUTRE ENTITÉ, SIGNAL QUI SE CONCENTRE SUR SES MEMBRES. JESSICA, IL FAUT TRANCHER SES MEMBRES !
-  C’est quoi ce zombie de merde ? »

Dans tous les films, il suffisait de leur éclater la tête ! Mais celui-là réagissait différemment. Jessica s’écarta donc, et son Anneau fit feu encore, envoyant deux tirs lasers qui tranchèrent les jambes du monstre, les explosant. La créature chuta au sol, ses viscères se répandant sur le sol, et rampa lamentablement, avant de s’arrêter. Le signal qui avait réanimé ce corps s’était éteint. Fait notable : le sang s’échappant du monstre n’était pas liquide, mais sec, coagulé, comme si on cherchait à faire saigner un cadavre. Jessica ne songea pas à analyser le monstre, et se rua vers Benjamin.

« Benjamin, non ! Pourquoi est-ce que les hommes veulent toujours jouer au héros ? Vous allez bien ? Qu’est-ce que je peux faire ?
-  LANTERN CRUZ, CONCENTREZ-VOUS ! VOUS POUVEZ GÉNÉRER DES OUTILS CHIRURGICAUX AVEC VOTRE ANNEAU ! »

Jessica hocha la tête, s’efforçant de retrouver son calme.

Stupidement surpris ! Il s’en voulait tellement. Et il avait fallu qu’il se fasse transpercer au niveau du ventre. Benjamin ne savait même plus si revenir sous forme humaine lui permettrait de retrouver son corps sans dommage. Le voyage dans la capsule de survie et la forme spectrale foutait un bordel dans sa tête. Et voilà que l’autre féministe recommençait son délire. Elle s’inquiétait ou elle l’insultait ? Il était incapable de le dire.

« Tu aaas… déjaaa opérer un fantôôômeee ?... »

Retourner à sa forme humaine était probablement une meilleure idée que de se faire opérer par une rookie avec des espèces d’ustensiles de lumière vert dans une carcasse abandonnée relâchant des zombies non conventionnels. Mais il y avait cette foutue combinaison spatiale bon marché… La douleur faisait ressurgir le mauvais côté de Spectral. Benjamin devait faire un choix, et rapidement !

« Je préféreraaaiiis que tu ne me trifouiiilleees paaas… »

Toujours cette voix sorti d’outre-tombe. Une espèce de soupir qui se réverbérait. Un écho impossible qui semblait se créer de lui-même. Benjamin sous la forme de Spectral observa son environnement direct. Il y avait Jessica qui semblait paniquer (ce qui pouvait se comprendre). Il y avait le corps du zombie qui ne semblait en aucun cas un début de solution. Et il y avait le pupitre technologique qui avait permis au Colonel Machin de parler.

« J’aaaiii trouvéé… »

Utilisant l’Omnitrix, Benjamin changea d’alien. La transformation fut douloureuse. Le corps ectoplasmique chercha à redevenir l’être humain. Pendant un court instant, le froid des étoiles glaça l’organisme d’une façon différente du fantôme. Puis la transformation chercha le corps technologique de Biotech. Comme prévu, ce dernier avait hérité de la blessure de Spectral. Mais Benjamin avait un plan. Il s’immergea dans ce qu’il restait de la technologie du vaisseau. Il allait la « dévorer » pour guérir.

« Voilà. Ca devrait aller maintenant. »

Le problème, enfin le premier problème était que Biotech avait fusionné avec l’écran. Si le Colonel parlait à nouveau, ce serait au travers du nouveau corps de Biotech. Et il y avait un second problème. Que Benjamin s’empressa de dissimuler en plaçant sa main droite dans son dos. Une main aux griffes noires acérées… qui n’appartenait pas à Biotech. Qui appartenait à la voix pleine d’écho qui rebondissait dans sa tête…

« C’était quoi ce bordel ?! »

S’il avait été sous forme humaine, il aurait ajouté une pique concernant l’inquiétude pour lui. Mais la nature technologique de l’alien « l’obligeait » à se concentrer sur le problème actuel. Il se rendit alors compte que son corps liquide s’était connecté au cœur du vaisseau et commençait à rechercher qui était le zombie.

C’était incroyable ! Jessica allait de surprise en surprise, car, après ce mystérieux zombie anthropophage, la forme spectrale de Benjamin évolua, pour former une apparence plus symbiotique, l’apparence « Biotech ». Son Anneau analysa rapidement cette forme, ce qui se manifesta chez Jessica par l’un de ses yeux. Son œil droit s’illumina, et s’auréola d’une sorte de scanner rétinien, détaillant « Biotech ». Elle s’écarta ensuite, tandis qu’elle vit les tentacules de « Biotech » se rapprocher de l’ordinateur.

*Un transfert d’énergie… Il se nourrit d’énergie ?*

Elle observa son Anneau, se demandant si elle-même ne pouvait pas recharger les batteries de Benjamin. Il sembla retrouver son calme, et se mit à parler, d’une voix assez désincarnée, demandant ce qui venait de se passer.

« Je n’en sais rien ! Mais ce truc… C’est un corps mort qui a été… Réactivé. Un genre de signal, de transmission… Mon Anneau est en train d’analyser ça, mais je n’ai jamais vu de tels relevés. »

Elle avait déjà entendu parler du Black Lantern Corps, une faction de Green Lanterns ressuscités et transformés en zombies par le pouvoir du Dieu Nekron. Mais le signal ressenti par l’Anneau ne ressemblait pas à celui qui avait permis à Nekron et à son bras droit, « The Black Hand », de ramener à la vie des Green Lanterns morts.

Jessica examina encore le corps qui pourrissait et flétrissait à vue d’œil.

« Ce sont ses membres le point faible… Comme quoi, Georges Romero ne peut pas avoir raison sur tout. Il faut les trancher pour couper le signal. »

La jeune femme se massa nerveusement l’arrière du crâne.

« Je ne sais pas si c’est le bon moment pour vous le dire, mais… Je suis encore en formation. Je vais devoir appeler des renforts. »

Jessica releva sa main, et ordonna mentalement à l’Anneau de se connecter vers Oa. Elle attendit quelques secondes, puis l’Anneau finit par répondre :

« CONNEXION IMPOSSIBLE !
-  Comment ça, connexion impossible ? Tu te moques de moi ?!
-  LE SIGNAL ALIEN PARASITE LE CHAMP ÉMOTIONNEL QUANTIQUE. JE NE PARVIENS PAS À CONTACTER LA BATTERIE CENTRALE D’OA.
-  Mais… C’est impossible ! Réessaie ! »

Des bruits sourds résonnèrent alors. Jessica sursauta, sentant un début de panique l’envahir. Une double porte vola alors en éclats à proximité, les battants métalliques s’effondrant sur le sol, libérant une flopée de monstres qui s’élancèrent vers le duo en hurlant, faisant trembler le sol. Jessica puisa dans son Anneau, et généra un énorme mur qui repoussa les monstres.

Mais, déjà, d’autres monstres jaillissaient des conduits de ventilation, faisant sauter les grilles avant de s’extirper des conduits pour se rapprocher d’eux… Résister ne semblant être qu’une forme de suicide, la fuite s’imposait !

S’il n’était pas sous la forme alien de Biotech, Benjamin s’en serait très probablement donné à cœur joie. Non mais franchement ! Jessica en formation doublé d’une soudaine impossibilité à contacter les pontes ? Oui, il y aurait largement eu de quoi faire taire les élans féministes et reprendre une position de dominance. Mais voilà, sous sa forme de slime technologique, Benjamin était davantage dans la collecte d’informations et les traiter. Donc le fait qu’un signal soit planqué dans les bras et jambes l’intéressaient davantage à ce moment-là.

« Je vais tenter quelque chose. Tiens le coup ! »

Passant par le sol métallique qui était issu d’innovations technologiques, Biotech devint une espèce de flaque, passa sous le mur de protection de la Green Lantern et reprit une forme humanoïde de l’autre côté. Si l’Anneau avait raison et qu’une sorte de signal parasitait un échange radio, alors il y avait peut-être moyen qu’il parvienne lui-même à dompter cette technologie.

D’un coup d’un seul ! Biotech doubla en taille. Son corps comme projeté en arrière comme si un vent soudain avait soufflé dans une voile de bateau. Sans plus attendre, le corps humanoïde de Biotech retomba sur un de leurs ennemis affamés. Il le recouvrit complètement comme d’une seconde peau. Il fallait faire vite. Biotech avait déjà fait l’hypothèse que les congénères n’hésiteraient pas une seule seconde à un acte de cannibalisme.

*Si je parviens à localiser les émetteurs, alors… *

Biotech infiltrait le corps nécrosé comme s’il était un liquide en fusion s’adaptant au moule dans lequel il prenait forme. Car, au final, le corps de Biotech était comme la somme de millions de nanorobots. Alors infiltrer un corps organique était du domaine du possible.

*Est-ce que ce serait ça ? Comment est-ce que ça fonctionne ?... *

Voilà déjà qu’il se faisait attaquer. Biotech quitta précipitamment le corps de son premier cobaye. Son premier mouvement fut de vérifier dans quel état se trouvait la défense de la Green Lantern. Avait-il le temps de pousser une seconde expérience pour confirmer les premiers éléments découverts ?

C’était assurément une vision d’horreur ! Les monstres affluaient vers Jessica, qui s’efforça de conserver son calme. Plus elle paniquerait, et moins son Anneau serait efficace ! Elle ne voulait surtout pas perdre trop d’énergie en ce moment. Jessica déploya donc un mur de protection pour repousser les premiers Nécromorphes, mais, face aux autres qui jaillissaient depuis les conduits d’aération, elle généra finalement un bouclier autour d’elle. Un jet d’acide heurta la paroi. Le jet émanait de l’un des Nécromorphes, un Puker. Ces Nécromorphes avaient la cage thoracique ouverte, et des organes luisaient encore à l’intérieur : leurs poumons. Ils transformaient le sang du Puker en acide au contact de l’air lorsqu’il vomissait. Un vomi redoutable, puant et mortel. Jessica en aurait vomi, elle aussi ! Elle sentit les Nécromorphes s’acharner sur son bouclier, le faisant osciller. La jeune femme réfléchissait à trouver une solution, tandis que Benjamin, en preux chevalier qu’il était, s’était enfui sous sa forme liquide !

*Bordel, il faut foutre le camp d’ici ! C’est quoi ces horreurs ?!*

Les coups se multipliaient, et son bouclier ne tiendrait pas éternellement. Il rapetissait, et Jessica en avait des suées, des gouttes de sueur glissant sur son front. Elle finit même un genou à terre, comme si elle était « épuisée, et ferma alors les yeux. Elle se concentra, et son bouclier rapetissa encore dangereusement sous les grognements, les vociférations, et les lacérations des monstres… Puis Jessica hurla, et fit éclater son bouclier dans une décharge d’énergie. L’onde de choc repoussa les monstres, et elle se mit alors à voler. Jessica brandit son Anneau vers le Puker, son scanner rétinien l’analysant… Et elle tira une décharge d’énergie sur les poumons du monstre. Ses poumons éclatèrent, et la bête mugit quand son sang acidifié tomba sur ses chairs nécrotiques, la faisant fondre dans de grotesques gesticulations. Jessica se retourna ensuite vers les autres Nécromorphes, et généra autour d’elle des javelots, qu’elle projeta sur eux, les fauchant pour les clouer au mur ou au sol.

Un Nécromorphe la frappa alors dans le dos, et Jessica tomba au sol. En se retournant, elle vit un autre Nécromorphe, le Leaper. Une moitié de corps humain auquel une queue osseuse et faite de chair avait poussé, et qui pouvait s’agripper aux murs avec ses mains griffues, et se servait de sa queue pour bondir dans les airs. Sa gueule innommable était une mâchoire coupée en deux, fendue par de longues défenses osseuses. Jessica lança un javelot sur lui, mais le Leaper bondit en avant, évitant le projectile, et fila vers Jessica, ses défenses en avant. Jessica réagit par instinct, et généra un énorme maillet vert dans les airs, qui s’abattit avec violence sur le Leaper, répandant ses tripes et ses viscères tout autour.

Les premiers Nécromorphes hurlaient encore en se détachant des javelots de Jessica. D’autres monstres débarquaient encore.

« IL Y EN A TROP, JESSICA ! TU NE PEUX PAS TOUS LES AFFRONTER ! »

Cela, elle était d’accord. Mais que faire de Benjamin ? Celui-ci avait pris possession d’un corps, cherchant visiblement quelque chose… Tout ce qu’il obtiendrait en tentant de décrypter le signal, ce serait des messages cryptiques, incompréhensibles, potentiellement une violente migraine, et au mieux la confirmation que le signal émanait de Tau Volantis. Cependant, le signal psychique influait aussi sur les êtres vivants.

« Benjamin ! Je ne peux pas les retenir, il faut partir ! »

L’énorme vaisseau se remettait lentement en marche, et cela avait visiblement réveillé ces monstres. Jessica s’envola encore, se dirigeant vers une double porte. Depuis des conduits d’aération en hauteur, d’autres monstres avaient émergé. Plus petits que les autres, les Lurker généraient depuis leur dos trois tentacules faits de chair, avec des pointes. Ils projetaient ces pointes, des pointes osseuses. Jessica, surprise, s’en reçut plusieurs dans le torse. Son bouclier d’énergie la protégeait, mais l’un d’eux se ficha quand même dans son torse, et la projeta contre la baie vitrée du pont de commandement. Elle tomba sur une plateforme avec plusieurs pupitres formant un demi-cercle, et posa sa main sur son ventre. La pointe osseuse s’y trouvait, et elle cracha du sang entre ses lèvres. Jessica soupira en se redressant lentement. Un escalier se trouvait à côté d’elle, menant du pont principal à cette petite plateforme. Un Nécromorphe apparut déjà, et l’attaqua en s’élançant avec fureur sur elle. Jessica leva ses deux mains, dont l’une portait des traces de sang, et ses deux mains s’enroulèrent d’énormes gants verts, qui attrapèrent les deux pinces du monstre. Serrant ses lèvres, Jessica se concentra, et parvint à arracher les deux lames dans le prolongement de ses bras. La bête gémit en tombant au sol, mais Jessica était désormais dans une mauvaise posture. La blessure était superficielle, mais du sang coulait quand même, et elle n’avait pas le temps de cautériser, tant les monstres se ruaient sur elle avec fureur…

Sous la forme alien de Biotech, l’incompréhension avait mené à de l’exaspération. Un alien sous le signe technologique ne pouvait supporter que des mystères le demeurent. Il lui fallait trouver la réponse. Qui plus est, la découverte de cette dernière semblait se diriger vers la même destination des besoins des deux humains.

« Jessica ! »

Ça ressemblait à une version de l’Enfer dans le vide du cosmos. Il y avait largement de quoi recréer une version de l’Enfer de Dante et tous ses cercles avec cet environnement : le vide, l’univers en expansion, les monstres de toutes les formes, la mort qui ne voulait pas mourir, …

Le tout saupoudré du sang de Jessice. Mais également de la blessure de Benjamin qui était supportable grâce au changement de corps alien biotechnologique. Bref : c’était la MERDE !

« Barrons-nous d’ici ! »

Oui, il y avait une porte là-bas. Un couloir. Un escalier. Ou encore une bouche d’aération. Mais ce n’était pas l’objectif de Biotech. Tous ces endroits de passage emmèneraient plus loin sur le vaisseau spatial. En somme, ils continueraient à tourner en rond dans une boîte de conserve spatial en état de décomposition. Une prison dérivant dans le vide des étoiles ! Ce n’était donc qu’une question de temps avant que les nécromorphes parviennent à les piéger et les dévorer. Et le fait que le corps soit de chairs ou de technologie ne semblaient pas faire la moindre différence.

« Si tu as encore assez de forces pour nous enrober d’une espèce de combinaison spatiale magique verte : barrons-nous d’ici et allons-nous réfugier sur la planète là tout en bas ! »

Tel un fluide, Biotech parlait tout en esquivant les nécromorphes. Il ne cherchait pas le combat, cette forme alien n’était pas spécialisé pour. Alors il était comme une gerbe d’eau capable de changer de direction à loisir. Ondulant autour du corps d’un Puker, évitant les gaz nocifs. Donnant un coup dans la queue d’un Leaper pour le faire choire de sa position haute. Ou encore esquivant chacune des trois attaques d’un Lurker qui avait quelque chose de malsain, car quelque chose lié aux traits d’un enfant innocent.

« D’après mon analyse du cadavre, notre survie et les réponses se trouvent sur la planète. Ici nous est promis seulement la mort. Est-ce que ton corps tiendra le coup ou est-ce que je dois trouver une nouvelle transformation alien au risque d’aggraver mes propres blessures, Jessica ? »