Of aliens and witches [Ziraelle]
Posté : 01 nov. 2024 17:40
~ Of Aliens and Witches ~
Losgar & Ziraelle
La machine avait essayé de l’intimider, lui montrant toute l’horreur de son arsenal, les légions de cyborgs prisonniers sous son emprise, salivants et armés jusqu’aux dents, toute la folie de son impitoyable labyrinthe truffé de pièges nés de l’esprit sadique d’un engin de destruction qui avait gagné conscience et avait décidé d’être un dieu tyrannique.
Elle échoua à l’arrêter.
La machine opta ensuite pour la négociation, cherchant à le convaincre qu’il servait une cause futile, un insecte affrontant le courant d’une mer furieuse et indomptable. Elle lui montra des scènes de misère et de cruauté, cracha des discours de faux espoirs sur chaque baffe de chaque sirène qui pullulait la cité conquise et corrompue. Elle parla de la folie des mortels, la fragilité de leur nature, l’infinie indifférence d’un univers peuplé par des horreurs au-delà de la compréhension des êtres de chair et de sang.
Elle échoua à l’arrêter.
Maintenant qu’il brisait les dernières barrières qui le séparait du cœur de cette métropole cauchemardesque où trônait la source de ces horreurs cybernétiques, de cet enfer de rouages et de câbles électriques, la machine en vint à l’implorer. Utilisant les voix de la population même qui l’avait conçue et qu’elle avait asservit, elle supplia qu’il abandonne sa quête, qu’il rebrousse chemin, qu’il ne mette pas fin à sa domination. La machine devait vivre, la machine devait s’étendre comme une forêt cherchant désespérément à croitre et prospérer. La machine DEVAIT asservir les organiques et en faire une armée de cyborgs pour délivrer l’univers de la farce tragique qu’était la vie, avec ses défauts et ses imperfections.
Quand l’ultime portail renforcé fut pulvérisé par l’intrus, envoyant la porte métallique ricocher jusqu’au centre de l’infernale cœur de la cité, devant l’amalgame gigantesque de métal et de malveillance, la machine conclue qu’elle avait, une fois de plus, échoué à l’arrêter. L’alien pénétra lentement le vaste espace où l’odeur de carburant et de vapeurs toxiques se bousculaient. Son corps ne portait aucune blessure, seuls ses vêtements témoignaient de la brutalité des épreuves et ordalies qu’il avait traversées pour en arriver là. Des obus, des scies géantes, des lance-flammes, des gaz empoisonnés, des pièges électriques ... rien n’avait surmonté la résilience surhumaine de cet être, cette ... chose que la machine ne parvenait pas à décrire à travers sa base de données.
Le Cendré avança avec détermination, massant une de ses épaules comme s’il sortait de la plus banale des activités physiques. Irritée, le dieu-machine qui n’en était pas un agita ses multiples appendices aux doigts acérés comme des rasoirs, cherchant vainement à le repousser, à lui barrer la route. Elle ne rencontra que le regard de prédateur de ce puissant guerrier, cet être venu d’ailleurs, un spécimen unique dont la nature et l’origine lui échappaient aussi bien que la profondeur de sa propre noirceur qui avait poussé un tel élément à venir la juger.
“C’est terminé, abomination. Ta tyrannie s’achève aujourd’hui.”
La machine géante gronde et siffle, telle une mère courroucée, et la comparaison n’est peut-être pas aussi absurde quand l’homme aux cheveux d’orage la vit envelopper entre ses entrailles de câbles le réacteur maudit qui alimentait tous ses circuits, la source même de sa folie. Quelle énergie les citoyens de cette planète avaient siphonné pour alimenter leur futur despote ? Losgar l’ignorait, mais n’en avait cure. Il avait répondu à l’appel de détresse des rares survivants du massacre systématique de la machine, et venait l’achever.
Lévitant doucement au-dessus du sol, le dernier héritier de Nox bonda ses muscles, qui résonnèrent de puissance et de force brute contenue, puis il fusa tel un harpon. Désespérée, la machine tenta de saisir le Noxien entre ses appendices mortels, mais c’était comme essayer de capturer entre ses mains un carreau d’arbalète en état d’ébriété. Ce qui suivit fut un massacre de métal et de pièces, l’huile et les lubrifiants coulant au-dessus de la chose dévastée comme du sang noir et impie. Le géant qui avait martyrisé ce monde pour des générations était enfin vaincu, traîné sur le sol qu’il refusait de toucher, véritable araignée géante démembrée, pathétique, un tas de ferrailles.
Elle avait échoué à le vaincre, même à l’égratigner, elle qui avait à sa disposition des armes qui feraient tomber des cités entières en tas de débris et de poussière. Son œil-caméra tenta de se focaliser sur son bourreau à mesure que ses moteurs s’éteignaient et que son énergie diminuait comme l’agonie d’un être vivant. Il s’approchait pour lui asséner le coup de grâce, lui broyer le crâne ou l’arracher de son socle pour en faire un trophée.
La machine, vaincue et humiliée, opta pour un dernier cadeau d’adieu, un dernier défi, une dernière insulte à la vie et à l’injustice de son existence. Soudain, le générateur corrompu se mit à vibrer, crépitant d’énergie instable à mesure qu’il était trafiqué par les commandes de la machine mourante. L’ex-prince remarqua que trop tard l’agglomération de l’énergie. Il fut trop tard pour fuir ou agir, l’anomalie fut provoquée. Le réacteur implosa, transperçant le voile même de la physique et de la réalité pour créer une faille, un vortex entre les plans et dimensions. Avide, infernal, le trou dans la réalité absorba l’espace d’un court instant tout ce qui se trouvait à la portée de son terrifiant champ d’attraction, et même l’éphèbe ne put s’y soustraire. Il fut happé, entraîné dans ce gouffre qui, un instant après, s’évanouit, ne laissant que le théâtre de destruction et de carnage de sa dernière bataille.
Son voyage forcé fut une chute libre à travers l’espace et le temps, dans un corridor de couleurs aveuglantes et indescriptibles, de sons et de sensations. Aucune gravité n’existait et pourtant il était comme poussé par une force invisible qui l’empêchait de se mouvoir, aspiré dans ce puits dimensionnel pour un temps qu’il ne saurait compter. Des secondes ? Des heures ? Des jours ?
Puis, enfin, ce bref mais intense cauchemar prit fin et sa chute s’acheva sur une terre solide sur laquelle il s’écrasa, déboussolé et confus. Losgar se releva lentement, regardant d’abord ses mains pour s’assurer qu’il était sorti indemne de l’implosion du réacteur piégé, puis les alentours. À ses pieds, les restes de la machine détruite fumaient encore.
“D’accord ... parfait. Où suis-je maintenant ?”