Troublée, Shad regarda derrière elle, comme pour s’assurer que personne ne viendrait les surprendre. Aucun risque de ce point de vue. Jinx savait qu’Alastar était en ce moment en train de s’amuser avec l’une des concubines du harem, et qu’il en aurait probablement pour plusieurs heures. La répartition horaire quotidienne, chez Alastar, reposait essentiellement sur ses innombrables relations sexuelles avec ses amantes ou ses amants.
« Merde, ça se voit tant que ça ? Pourquoi cette question ? J’imagine que tu y as aussi eu droit si tu me le demandes ainsi….Ha et au risque de paraître naïve mais… Tu n’es pas qu’une simple messagère du Monarque Lucifier non ? »
Jinx esquissa un léger sourire, et croisa les bras, penchant la tête sur le côté.
« J’ai été éduquée par Lucifer... Je suis techniquement sa fille. Lucifer a estimé que, pour que ma formation soit complète, il me fallait perdre ma virginité. Je l’ai perdu dans ce harem, avec le Diablotin... Enfin, plus précisément, Lucifer a appelé Alastar, et Alastar m’a fait l’amour dans ma chambre. Je ne te cache pas que j’étais inquiète au début... Mais c’était ce que mon père voulait. Il voulait m’éduquer, pour que je sois un peu moins craintive. Quant à Alastar... Il était ravi d’être dans un Palais, et de pouvoir forniquer avec moi. »
Elle l’avoua toujours avec un sourire sur le coin des lèvres, puis poursuivit.
« Effectivement, je ne suis pas qu’une simple messagère, Shad... Même si je remplis parfois ces fonctions. Lucifer a jadis aidé mes parents biologiques, et le prix pour son paiement était le droit de surprise... Droit qu’il a invoqué quand j’avais six ou sept ans. Il m’a pris sous son aile, et m’a progressivement formé, afin de devenir la femme que je suis actuellement. »
Le droit de surprise était une vieille coutume, un droit ancestral qui était encore invoqué par les sorceleurs... Et même essentiellement par eux. Il s’agissait d’un mode de paiement consistant, pour un couple, à promettre l’un de leurs enfants à un homme qui les avait sauvés. Les sorceleurs, par nature stériles, invoquaient parfois ce droit pour avoir des héritiers et des élèves. C’était un droit assez mal vu, et Lucifer l’avait jadis invoqué auprès des parents naturels de Jinx. Le reste était sans grande importance... Ou l’était tellement que Jinx n’avait pas envie d’en parler avec une femme qui, après tout, restait encore une inconnue.
« Et je demandais juste ça pour me renseigner, petite Louve... Tu es suffisamment mignonne pour plaire à quelqu’un qui sélectionne avec soin ses amantes, a fortiori chez lui. »
Elle se déplaça encore un peu, continuant à observer les livres. Combien de temps avait-elle passé dans des bibliothèques similaires, à s’imprégner de l’histoire de l’Enfer, de la démonologie, et de la magie ?
« Il est normal que tu sois intimidée par cette audience, Shad... Mais le simple fait que Lucifer m’ait envoyé est un gage de confiance et de paix. Nous n’avons pas envie de te voler ton médaillon, ni de mettre fin à tes jours. Plusieurs des concubines de Lucifer viennent de cet harem... Et le Monarque n’a pas envie de se mettre en porte-à-faux avec ça. En revanche, nous ignorons l’identité de l’homme qui t’a attaqué... Ni ceux qui l’ont envoyé sur toi. »
Ou alors, si Lucifer le savait, il s’était bien gardé de le dire à Jinx. La femme se retourna vers Shad, et posa une main sur son épaule, une main rassurante et agréable :
« Je suis venue pour t’aider... Et pour te dire que tu as intérêt à entraîner ton cul. »