L’EMPIRE DE MIJAK
« Qui contrôle le Continent contrôle l'Heartland ;
Qui contrôle l'Heartland contrôle l'Île-Monde ;
Qui contrôle l'Île-Monde contrôle le monde. »
I – HISTOIRE DE MIJAK
1°) La Fondation de Mijak : conséquences du Grand Conflit
L’Histoire de Mijak est intimement liée à celle des grands évènements cosmiques qui ravagèrent et modifièrent en profondeur Terra, et plus particulièrement le
Grand Conflit. Ce conflit ancestral, qui opposa les Anges aux Démons, connut une résonance particulière sur Terra, car cette planète est après tout le Monde Ultime. Elle abrite la légendaire Tour, pivot de tous les mondes et soutien de toutes les réalités. Elle était donc une cible de choix pour les Démons, et, après avoir été affaiblie suite à l’attaque des Grands Anciens, la Tour avait besoin d’être protégée. Jusqu’au Grand Conflit, cette protection était assurée par les elfes et par les humains de l’Eld, le premier royaume humain. Cependant, à la fin du Grand Conflit, l’Eld avait été affaiblie, et les elfes étaient devenus une race plus affaiblie. De plus, les régions entourant la Tour étaient très dangereuses, abritant les monstres les plus redoutables de Terra, ainsi que les vestiges du Grand Conflit, comme des hordes d’Orcs, de gobelins, de multiples forteresses détruites abritant quantité de fantômes, de Liches, et d’autres abominations.
C’est ce qui amena les Anges et les Démons à prévoir, dans le cadre du Traité de paix entre ces deux espèces, un chapitre particulier consacré à la fondation d’une plateforme militaire. L’Eld avait installé près de la Tour un solide bastion, le
Château Discordia, qui avait prouvé son efficacité pendant le Grand Conflit, mais qui était ravagé. Le Traité de paix impliquait la reconstruction de Discordia, et, de manière plus large, la militarisation de cette région ravagée. C’est donc dans ce contexte que les Eldois choisirent de financer et de soutenir l’installation d’une colonie à proximité de Discordia, tout en envoyant ingénieurs, charpentiers et ouvriers reconstruire Discordia, avec l’aide de plusieurs clans démoniaques qui avaient été décimés pendant le Grand Conflit. Eux n’avaient plus rien à gagner en retournant en Enfer, et restèrent donc sur place pour aider les humains. On aurait certes pu envisager une alliance entre Anges et Démons, mais les Archanges et les Archdémons craignaient tous deux de voir les leurs s’entendre à tel point qu’ils finiraient par donner naissance à une espèce honnie, fruit de l’union des Anges et des Démons, comme cela avait parfois pu être observé lors du Grand Conflit.
D’aucuns auraient pu craindre que les Démons restés sur Terra ne cherchent à asservir les humains, mais les braises de la guerre étaient encore chaudes, et les Démons avaient perdu Satan, leur dirigeant. Ils n’avaient guère envie d’être embrochés par les Anges restés du côté de Lumen. C’est ainsi que la
colonie de Mijak vit le jour, en référence au nom de la plaine aride sur laquelle la colonie fut installée : Mijak. Un endroit austère, mais dégagé, avec des forêts à proximité, et faisant office de point-relais entre Gilead, capitale de l’Eld, et Discordia.
Pendant ces premières années, la colonie de Mijak était un camp militaire, un camp qui se fortifia ensuite. Les attaques de monstres et d’Orcs depuis les montagnes environnantes furent un problème que les démons parvinrent à pallier, en arrivant à soumettre les Orcs, grâce, dit-on, à un mélange combiné de magie et de puissance physique... Et sans doute grâce aux courbes affriolantes des succubes ayant rejoint la colonie. C’est d’ailleurs grâce à ces succubes qu’on dut une hausse de la natalité.
Peu à peu, ce qui n’était qu’une simple colonie eldoise se mit à grandir, à évoluer, jusqu’à se doter de murs, de remparts, gagnant en importance au fur et à mesure que l’Eld finissait par rapetisser et par décliner. Elle était administrée depuis ses origines par un conseil, composé d’humains et de démons, et, aussi improbable que ce soit, les Démons n’éradiquèrent jamais les humains, ni n’invoquèrent d’autres Démons pour mener une invasion massive de Terra. Peut-être virent-ils dans les humains de Mijak quelque chose de singulier ? Ou peut-être n’avaient-ils guère envie de tomber sous la tutelle d’un Archdémon ? Ou peut-être craignaient-ils aussi une réponse des Anges, et l’annihilation de leur colonie.
Cette période est à l’origine de bien des légendes mijakiennes. Elle est relatée sous le terme de «
Premier Siècle », le «
Siècle de la Fondation », ou encore «
L’Ère des Pères Fondateurs ».
2°) L’indépendance de la colonie de Mijak
Plusieurs raisons amenèrent les Mijakiens à cesser de se considérer comme des Eldois. Il y avait la distance, bien sûr. Gilead était une ville très éloignée. Ensuite, Mijak se construisit de manière de plus en plus autonome, car, si la colonie dépendait à l’origine des vivres et des caravanes humanitaires arrivant de l’Eld, celles-ci se tarirent de plus en plus, parce que l’Eld en fournissait moins, mais aussi parce que les routes devenaient de plus en plus dangereuses. De fait, la première véritable cassure entre la colonie de Mijak et l’Eld fut une grave disette, une famine qui manqua bien de détruire la colonie, et de déclencher une guerre civile, certains démons suggérant de tuer les colons humains pour les dévorer ensuite.
C’est cette crise qui conduisit les Mijakiens à envahir des terres plus éloignées des leurs, s’emparant par la force de terres appartenant à des tribus barbares. Cette première crise se termina comme cela, et contribua à constituer l’identité propre de Mijak : ne compter que sur soi, et ne pas attendre la pitié des autres.
Enfin, la dernière crise qui conduisit à une guerre ouverte fut l’avènement de la religion. Le développement du monothéisme sur Terra avait conduit au développement d’une religion messianique et dogmatique, l’
Ordre Divin. Les Eldois envoyèrent à Mijak des missionnaires religieux, chargés de répandre la bonne parole dans des terres impies, essentiellement auprès de Démons. La venue des missionnaires donna néanmoins lieu très rapidement à de vives tensions, les Démons voyant en eux des agents des Anges, envoyés pour les détruire en amenant les humains mijakiens à les haïr. Les religieux arrivaient toutefois trop tard, car Humains et Démons de la colonie avaient déjà commencé à s’unir depuis des années, donnant naissance à des rejetons hybrides, des humains démoniaques.
Une communauté religieuse s’installa toutefois à Mijak, avec une église, les tensions continuant chaque jour à croître. L’Ordre Divinr éprouvait les mœurs sexuelles assez débridées de Mijak, et s’offusquait que les Mijakiens ne viennent pas assister à leurs messes. Ils ordonnèrent l’abolition de plusieurs cultes tolérés à Mijak, et s’indignèrent en apprenant que la colonie de Mijak disposait également de plusieurs colonies annexes avec des Orcs. Pragmatiques, le Conseil mijakien avait toléré le culte orc, et était partisan d’une religion souple et inclusive, admettant divers divinités issues d’autres panthéons, sans prédominance d’une divinité sur l’autre, contrairement à l’Ordre Divin.
Finalement, l’église fut brûlée, et la colonie de Mijak fit face aux représailles des Eldois. Plusieurs croisades furent lancées par l’Eld pour tenter de ramener les Mijakiens à la raison, donnant lieu à des conflits armés redoutables. Mijak ne put que proclamer son indépendance, devenant un royaume indépendant. Le Conseil mijakien nomma un stratège militaire à leur tête, afin de diriger leurs troupes. L’armée mijakienne était déjà assez hétéroclite, comprenant des factions diverses : humains, Démons et Orcs principalement... Même si des troupes de Barbares, subjugués par les Démons, les rejoignirent.
C’est ainsi que, après le Premier Siècle, Mijak connut, pendant le deuxième siècle, une période turbulente, rythmée par les incursions eldoises : les «
Croisades mijakiennes ».
Les vagues d’attaques croisées amenèrent à un conflit croissant entre la colonie mijakienne et l’Eld. Il y eut plusieurs vagues d’invasions, qui amenèrent notamment les croisés à s’emparer de plusieurs territoires mijakiens, formant les États pontificaux de Mijak, établissent leur siège dans la citadelle de Corvus. La plus significative des croisades fut aussi celle qui amena les Mijakiens à proclamer leur indépendance, car les forces croisées parvinrent jusqu’à la capitale, qu’ils mirent à sac, établissent des bûchers, des exécutions sommaires, pendant les sorcières, arrachant les ailes des Démons. Une véritable purge religieuse, qui fut toutefois repoussée. Et, dans les ruines encore fumantes de la ville, les Mijakiens proclamèrent leur indépendance.
Le Maréchal-en-chef fut nommé
Roi de Mijak par le Conseil, et proclama le
Royaume de Mijak.
3°) Du royaume à l’Empire de Mijak : le Traité de Corvus
Le royaume de Mijak était encore jeune, et commença par mener une série de contre-offensives sur les positions eldoises. De son côté, l’Eld avait également des problèmes sur l’Ouest, du côté de Lumen, car les Luméens étaient également en train de se séparer du Vieux Royaume. Mais, si les Eldois étaient en train de négocier avec les Luméens, face à des Miajkiens démoniaques et violents, une réponse militaire fut choisie. Les troupes mijakiennes et eldoises se heurtèrent autour de Corvus, car les Mijakiens entendaient bien récupérer le contrôle des États pontificaux.
La bataille de Corvus se termina par la victoire des Mijakiens, et par de nombreux prisonniers de guerre, dont plusieurs hauts-prélats de l’Ordre Divin. Cette situation amena les Eldois à multiplier les contre-offensives, mais sans parvenir à reprendre Corvus. Des deux côtés, le conflit s’enlisait, jusqu’à ce que des pourparlers ne soient finalement envisagés. L’Eld ne pouvait plus se permettre de maintenir un conflit si éloigné de ses terres, et, de leur côté, les Mijakiens commençaient à affronter d’importantes dissensions internes, notamment de la part des clans orcs, des tribus barbares, qui entamaient des vagues de révoltes, motivés par plusieurs aristocrates mijakiens ambitieux.
C’est ainsi qu’à Corvus, Mijak et l’Eld mirent fin à la guerre. Le
Traité de Corvus fut signé. Par ce traité, l’Eld reconnaissait l’existence et l’indépendance de Mijak, qui, de son côté, restituait ses prisonniers de guerre. Les frontières entre l’Eld et Mijak furent également incluses dans ce traité, mais qui partagea les Mijakiens. Pour les uns, le Roi en place avait été un mou, car, si les Eldois avaient envisagé la paix, c’est parce qu’ils étaient affaiblis. Ils venaient en effet de perdre Lumen, qui avait proclamé son indépendance... Ils étaient partisans à la reprise des hostilités, afin de renverser l’Eld, de marcher sur Gilead. Mais la plupart des Conseillers s’opposaient à cela, préférant plutôt consolider leurs positions internes.
Quoi qu’il en soit, le Traité de Corvus symbolisa aussi, à l’échelle internationale, la consécration d’une alliance tripartite entre l’Eld, Lumen, et Mijak, au nom de la protection de la Tour, et contre la menace des Grands Anciens. Ce fut finalement cet ultime argument qui s’imposait à la plupart des Mijakiens, car ils ne voulaient pas d’une guerre totale contre l’Eld, seul royaume qui, selon eux, était à même de repousser les Grands Anciens.
Mijak passa ensuite plusieurs siècles à se construire, à améliorer ses fortifications, et à envahir des contrées sauvages et reculées. Il y eut beaucoup de tensions internes, notamment auprès des Orcs et des Barbares. Bon nombre de clans orcs furent massacrés, bon nombre de tribus barbares furent rasées, remplacés par des colons mijakiens qui venaient exploiter leurs terres, installant des mines. C’est pendant cette période que Mijak conçut plusieurs alliances avec de grandes familles naines et développa une relation avec les
Drows, de dangereux Elfes Noirs, mais qui excellaient dans la collecte d’informations.
Il y eut des coups d’État, des rébellions, des dissensions... Et, peu à peu, le Royaume devint un Empire, s’étalant de plus en plus, jusqu’à s’avancer vers les anciennes terres eldoises. Les frontières définies par le Traité de Corvus furent ainsi progressivement oubliées, les Mijakiens poursuivant leur marche, en oubliant les vieilles prophéties.
Et, un jour, le Roi Cramoisi devint l’Empereur de Mijak.
4°) La Guerre Civile du Roi Cramoisi
«
Gloire au Roi Cramoisi ! »
(« Affiche de propagande ashnardienne interdite »)
«
Votre première fois, hein ? Essayez de les ignorer, ne prêtez pas attention aux cris. Et félicitez-vous de pouvoir en cauchemarder cette nuit, c'est le signe que vous êtes toujours en vie... Et, avec un peu de chance, le réveil vous permettra d'oublier. »
(« Le Maréchal Jöder s'adressant à son second »)
4.1°) Contexte
Le Château Discordia avait été l’une des raisons d’être de Mijak. Et, bien des siècles après, Discordia restait un impressionnant bastion, situé dans des contrées austères, à l’extrême est de l’Empire, qui s’étalait à l’ouest. La Tour n’était plus qu’une vieille légende oubliée par tous, et les terres de Discordia appartenaient depuis des éons à un puissant Démon,
Ram Aballah. On le surnommait également «
Seigneur des Araignées », car l’Aballah commandait aux araignées. Il était aisément reconnaissable à la longue cape rouge qu’il portait sur son corps.
L’Aballah devint Empereur après un énième coup d’État à la capitale, où, par malheur, celui qui avait tenté de renverser l’Empereur mourut lors du siège. L’Empereur lui-même,
Sézékiel VII, trépassa peu de temps après. Le Conseil Impérial profita de cette occasion pour tenter de consolider la situation, de renforcer le rôle de l’Empereur, car les putschs militaires avaient trop tendance à se multiplier, et freinaient la bonne marche de l’Empire. Mijak envisageait en effet de s’attaquer à Lumen. Plusieurs échauffourées avaient déjà eu lieu, et les terres moribondes de l’Eld n’intéressaient guère les stratèges mijakiens. En revanche, les terres fertiles de Lumen étaient très intéressantes, d’autant que, si les Mijakiens avaient oublié les légendes de la Tour et les Grands Anciens, ils n’avaient pas oublié les Croisades mijakiennes. L’Ordre Divin et les Anges représentaient une sorte d’ennemi héréditaire, donnant aux envies mijakiennes un courant de pensée idéologue. Impossible toutefois d’envisager une campagne militaire à l’autre bout du continent avec le risque que le pouvoir impérial ne change de main.
Le Conseil Impérial organisa donc des
États Généraux Extraordinaires en vue de stabiliser la tête de l’Empire. À l’issue de ces États Généraux, Ram Aballah fut désigné Empereur.
Le Seigneur des Araignées était plutôt méconnu, et on savait qu’il régnait d’une main de maître sur Discordia. C’était un démon puissant, qui ne tarda pas à s’imposer, parlant par l’intermédiaire de son Magicien,
Walter o’Dim, un homme qui s’avéra extrêmement instruit.
4.2°) Le règne de l’Aballah
Quand l'Aballah arriva au pouvoir, il entreprit de dissoudre le Conseil Impérial, estimant que cette institution avait une influence trop forte au sein de l'Empire. La cour de l'Aballah se déplaça ensuite pour s'installer au cœur de Mijak et l'Empire passa assez rapidement de la dictature au totalitarisme. Un totalitarisme barbare, sanguinolent, où d'immenses purges furent organisées dans tout l'Empire. Deux siècles après, on conte encore les atrocités qui furent commises par l'Empereur Fou, qu'on surnomma le Roi Pourpre, l'Écarlate, ou encore le Roi Cramoisi. Tous les nobles eurent pour obligation de siéger continuellement dans la capitale, afin que l'Empereur puisse veiller sur eux. Continuellement, il commettait de sinistres tueries, en arguant que tel ou tel noble voulait le trahir, sans même chercher de preuves. Esclave, soldat, noble, nul n'avait d'importance aux yeux de l'Écarlate, qui avait transformé les douves impériales en lacs de sangs, jonchés de cadavres, des corps étant empalés et dévorés par les corbeaux et les araignées dans toute la ville. Des corps pendus flottaient le long des créneaux, et la seule cour du Roi Cramoisi se résumait à des milliers d'araignées qu'il lâchait sur ceux qui l'importunaient, pour les plus chanceux. Les plus malheureux étaient enfermés dans le "nid" du Roi Cramoisi, où ils étaient progressivement digérés par ce dernier et par ses araignées, mettant des années à mourir.
Se régalant de chair humaine, l’Aballah adorait dévorer ses propres sujets. Sa cruauté était sans limites, et il gouvernait par une terreur sans nom, ayant fait de Mijak un cimetière rougeâtre à ciel ouvert. Les cadavres pendaient à chaque coin de rue, ou étaient embrochés sur des pics. Les belles mares mijakiennes se remplirent de sang, tandis que des guillotines étaient installées sur chaque place. Un régime de terreur sans précédent, qui marqua l’inconscient collectif terran, amenant les étrangers à voir en Mijak un véritable «
Empire du Mal »..
Sur la scène internationale, Lumen ne devint plus une priorité pour l'Empereur, qui envoya des légions entières dans tous les coins de Terra, à la recherche d'objets, d'artefacts. Aujourd'hui encore, le but de ces expéditions n'est pas toujours clairement établi, et c'est de cette époque que la réputation d'Empire du Mal se concrétisa, les troupes mijakiennes ignorant la pitié, et n'hésitant pas à opprimer les peuplades qu'ils allaient voir. Les militaires et les nobles vivaient constamment sous la terreur d'être un jour appelés à l'heure du déjeuner... Car, à l'heure du déjeuner, le Roi Cramoisi prenait sa véritable apparence, celle d'une énorme araignée-garou, et déchiquetait lentement ses victimes, faisant preuve d'un talent inné. Leurs hurlements se répandaient dans toute la ville, comme un rappel constant. De plus, le Roi Cramoisi étant perpétuellement relié à ses araignées, il n'avait aucun mal à espionner la vie privée de ses sujets, les araignées pouvant, après tout, facilement s'infiltrer dans une maison. Les terres entourant la capitale se transformèrent ainsi en un gigantesque charnier, les séides du Roi Pourpre balançant et empilant les cadavres, attirant la nuit de sinistres créatures nécrophages, qui se repaissaient de leurs chairs, ainsi que celles des vivants.
4.3°) Le Conclave de Braun
Ne pouvant supporter cette situation, de nombreux nobles et autres barons se regroupèrent entre eux, envisageant progressivement de faire ce qui semblait alors impensable pour n'importe quel Mijakien : se révolter. Les putschs étaient fréquents à Mijak, mais n’opposaient généralement qu’une famille à une autre, et étaient, somme toute, l’expression de la logique mijakienne ; si l’Empereur en place n’arrivait pas à survivre à un putsch, alors il était logique que celui qui le renverse prenne sa place.
Les raisons des insurgés étaient nombreuses et variées, mais, parmi toutes ces raisons, il y en avait une qui les liait tous. Tous en avaient assez des déjeuners sinistres de l'Empereur, et ils décidèrent finalement de se réunir dans la maison de Lord Braun pour envisager une révolte. Le Conclave de Braun eut ainsi lieu, et consista en un vote qui aboutit à la restauration du Conseil Impérial. Un argument juridique développé par le Conclave fut de considérer que, à l'origine de l'Empire, un conseil fut établi pour orienter l’Empire, et que c’était ce Conseil qui avait permis, à l’époque, d’unifier les différentes forces composant l’Empire.
Parmi les familles et les clans ayant signé le Manifeste du Conclave de Braun, on trouve, outre les Braun, le clan démoniaque de Kalleygh, connu pour ses nombreux Lycans et autres créatures infernales, et la glorieuse famille d'Adalcine, sans compter quelques personnalités, comme l'Archimage Vatarys, ou le Maréchal Jöder. L'Ordre Immaculé eut également une forte influence au sein du Conclave, le Roi Cramoisi ayant banni toute forme de religion.
Le Conclave de Braun fut rapidement découvert par l'Aballah, et plusieurs familles lui apportèrent rapidement son soutien. Il y eut notamment les Var Emreis, une famille d'humains très ancienne, puisque son arbre généalogique remonte aux origines de l'Empire, ou encore les Warren. Les différentes maisons des nobles ayant signé le Manifeste furent assiégés par les troupes du Roi Pourpre, mais ces derniers étaient déjà partis.
Ce premier acte marqua le début de la Guerre Civile.
4.4°) La Chute du Roi Cramoisi
Le conflit dura un certain nombre d'années. Si l’Eld n’avait pas été aussi affaiblie, sans doute les Eldois auraient-ils pu en profiter pour achever Mijak. Les insurgés fondirent sur les places fortes des soutiens de l'Aballah. Ils étaient en nette infériorité numérique, car l'essentiel de l'armée restait fidèle à l'Empereur. Ils réussirent, dans les premiers mois, à obtenir quelques victoires, en prenant de solides forts, mais manquaient d'organisation, et de stratèges militaires. Jöder, qui était le seul véritable stratège de cette armée, fut en effet capturé par les troupes loyalistes, quand elles reprirent un fort militaire. Il ne connut pas une fin heureuse.
Après quelques actions éclatantes, les insurgés, qui avaient espéré une révolte générale de la part des vassaux, et même d'autres grandes maisons restées neutres, se retrouvèrent dans une situation précaire. Les forts et les villes qu'ils avaient pris ne pouvaient être tenus, et tous craignaient bien trop l'Œil du Roi Cramoisi pour oser le défier ouvertement. Les insurgés choisirent alors une autre approche, et se lancèrent plutôt dans la guérilla, en essayant d'augmenter leur soutien. Envoyant des agents dans les villes, se réfugiant dans les colonies et les royaumes périphériques, ils essayaient d'encourager les nobles à la révolte, en finançant la rébellion. Cependant, les vassaux ne croyaient pas trop aux chances des insurgés, devant l'omnipotence du Roi Pourpre. Il leur fallait un exemple, une action forte. Les insurgés décidèrent alors de s'attaquer à un endroit symbolique, un pari audacieux : la forteresse légendaire des Var Emreis, Hildegarde.
Pour prendre le fort, les insurgés firent croire à une diversion, qui amenèrent les Emreis à envoyer une partie de leurs armées ailleurs. Grâce à l'aide d'agents infiltrés, les insurgés parvinrent à passer par des poternes discrètes, et, au cours d'une mission d'infiltration, ouvrirent les portes aux renforts. Les défenseurs, pris par surprise, furent tous massacrés, et Hildegarde fut prise par les rebelles.
Cependant, les Emreis apprirent rapidement qu'Hildegarde était tombée, et se mobilisèrent. Leur armée retourna vers le fort, et l'assiégea. Pour les insurgés, le siège d'Hildegarde fut décisif, car ils n'étaient alors perçus que comme quelques poches de résistance désorganisées, qui, par miracle, avaient réussi un exploit. Les insurgés se défendirent, et parvinrent à tenir deux semaines, avant que, du ciel, des renforts providentiels n'arrivent. Des dizaines de dragons s'abattirent sur les camps des Emreis, les brûlant, incendiant les armes de siège, les tentes, carbonisant les soldats. Le long de la plaine en contrebas d'Hildegarde, on assista à un spectacle magnifique et terrible : des milliers de torches humaines, formant un brasier colossal, alimenté par les centaines et les centaines de tentes qui brûlaient, les hurlements sonnant comme une merveilleuse mélopée aux oreilles des insurgés. Dans la périphérie, les insurgés avaient trouvé un soutien auprès du royaume de Sylvandell, un petit État militarisé connu pour avoir de redoutables dragons.
Le siège d'Hildegarde fut gagné par les insurgés. Les Emreis capitulèrent, et, en moins d'une semaine, les insurgés partirent à l'assaut. Les Emreis formant l'une des plus puissantes familles mijakiennes, leur chute sonna l'inversion du conflit. Les vassaux les rejoignaient, et, en quelques années, les insurgés parvinrent aux portes de la capitale, où ils découvrirent le plus sinistre des spectacles.
La capitale toute entière avait été massacrée. Un immense mausolée hantée de cadavres, de goules, d’alpyres, de graveirs, et d’araignées qui avaient tissé leurs toiles. Il n'y avait plus un seul survivant. Dans un accès de rage et de démence, le Roi Cramoisi avait tué tout le monde, y compris ses propres troupes. Il ne restait plus que des morts, partout, à perte de vue, remplissant les collines. Les insurgés parvinrent à purifier la capitale, qui avait connu là sa deuxième mise à mort, après celle des Croisés eldois. Quant au Roi Cramoisi... Il repartit chez lui.
Cette victoire funeste sonna la fin de la Guerre Civile.
5°) Les conséquences de la Guerre Civile
5.1°) L’équilibre des pouvoirs
De ce conflit sanglant, il y eut, comme dans toute guerre, des gagnants, et des perdants. L'autonomie politique de Sylvandell fut accrue, tandis que plusieurs puissantes familles furent intégralement massacrées et dépossédées, afin de financer la reconstruction de l'Empire. Ce fut le cas des Warren, qui furent dépossédés de leurs biens, et ne gardèrent plus que leur manoir au sein de la capitale. Les Var Emreis furent lourdement appauvris et discrédités. Ils durent payer de lourdes taxes, mais réussirent progressivement à reprendre leur influence au sein de l'Empire, jusqu'à avoir aujourd'hui un conseiller impérial.
Le Conseil Impérial fut institué, la ville d'e Mijak fut nettoyée, et, pendant un mois, on brûla sans relâche les cadavres laissés par l'Empereur fou. D'immenses fournaises brillaient dans la nuit, alors que le feu ne semblait jamais devoir s'arrêter. Cette guerre donna principalement lieu à un affaiblissement de la légitimité de l'Empereur, qui ne fut plus perçue comme invincible.
Le domaine des Aballah fut amputé du territoire mijakien, considéré comme une zone de non-droit. Bien sûr, les Mijakiens envoyèrent des contingents pour appréhender le Roi Cramoisi, mais nul ne revint. Ceci contribua à créer une légende, celle de l'Œil du Roi Cramoisi.
5.2°) Les Malterres de la Discorde
Les terres de l'Aballah sont désormais connues sous le nom de
Malterres de la Discorde, et se composent de plusieurs endroits :
- Fedic. Fedic est la ville frontalière entre Ashnard et les Malterres. C'est une petite ville fortifiée comprenant un gouverneur, un château, et qui surveille les Malterres de loin, transmettant continuellement des rapports d'activités au Palais Impérial. Avant, les autorités de Fedic envoyaient des agents dans les profondeurs des Malterres, mais, comme ces agents ne revenaient jamais, leur patrouille a été limitée au monastère des Blood Brothers. À partir de Fedic, il existe une ancienne route, désolée, qu'on appelle "King's Way" ;
- Monastère des Blood Brothers. Les Blood Brothers sont un ordre de moines guerriers mijakien qui ont établi aux frontières des Malterres un monastère, le dernier signe de civilisation.
- Tonnefoudre. Tonnefoudre est une ville-fantôme, qui constituait jadis la préfecture, et qui est maintenant une grande ville désolée. Elle a été désolée par des sorts de magie noire de pestilence, qui ont tué tous les habitants de la ville, en faisant un lieu particulièrement dangereux, où la toxicité de l'air y est forte.
- Château Discordia. Château Discordia est un imposant fort, en plein milieu des Malterres de la Discorde. C'est un grand château se découpant en deux parties : le château extérieur, et le château intérieur.
- Casse-Roi russe. Le Casse-Roi russe est un immense château au fin fond des Malterres. Il est relié au sol par d'énormes chaînes de fer noires, au sommet d'une montagne qui semble flotter dans les airs. Au sol de la montagne, on trouve une petite ville sinistre, Castel-Town, un village aux rues étroites, avec des rivières affreuses, et un petit fort, en contrebas, qui permet d'atteindre les grottes menant à la seconde partie du château, en hauteur. Cette seconde partie abrite le trône du Roi Cramoisi, et son "cocon".
Dans l'ensemble, les Malterres sont un lieu particulièrement inhospitalier, d'où personne ne revient. Cet endroit est le lieu de nombreuses légendes, les plus fantaisistes disant que les Malterres protègent l'accès, derrière les épaisses montagnes du Casse-roi russe, à un océan, dont ne peut accéder que par les Malterres. Il y aurait, devant cet océan, un champ de roses rouges éternelles, Can'-Ka No Rey, et, au milieu de ce champ, une tour sombre qui n'a jamais été bâtie par les hommes. Ces légendes oubliées correspondant à des épisodes qui ne doivent pas être inconnues du Voyageur attentif.
Le Seigneur des Araignées, s'il est toujours en vie, fait de plus en plus parler de lui. À Fedic, une secte est née il y a vingt ans, se réclamant du Roi Cramoisi. On la reconnaît à ce logo qu'elle trace dans les rues, représentant l'Œil du Roi Cramoisi. Cette secte s'est également fait connaître pour avoir procédé à des rituels sacrificiels, en massacrant des fermiers, des vagabonds, et se répand dans Mijak. La secte profite en effet du courant de mécontentement qui traverse l'Empire, enlisé dans son conflit avec Lumen, et de la crise de légitimité impériale, pour augmenter son influence, et on a déjà pu recenser des crimes sacrificiels dans Mijak elle-même. On ignore qui est derrière cette secte. Pour les uns, ce serait le Roi Cramoisi en personne, dominant sa secte depuis l'abominable palais du Casse-Roi russe. Pour d'autres, ce ne serait que quelques fanatiques isolés.
6°) La guerre contre Lumen et la Chute de l’Eld
C’est après la Guerre Civile que la campagne militaire contre Lumen commença. Elle était rendue nécessaire, comme un moyen pour permettre aux Mijakiens d’oublier les exactions et les divisions de la guerre. Le Conseil Impérial unifia les Mijakiens contre un ennemi commun, rappelant aux leurs les souvenirs tragiques des lointaines Croisades. Rien n’unissait mieux les Mijakiens que la guerre, et celle-ci commença donc.
Une guerre violente, qui dure jusqu’à aujourd’hui, et qui connut des phases de calme et d’accélération. La dernière en date fut indéniablement la
Chute de l’Eld. Mijak était le coupable parfait, car, après tout, Mijak avait été jadis en guerre avec l’Eld, et souhaite envahir le monde entier. La réalité est que le Conseil Impérial n’a pas ordonné d’attaques, et a perdu plusieurs diplomates mijakiens.
Pour autant, la guerre est présente, et, à chaque jour qui passe, elle continue à ravager un peu plus le monde.
II – L’ÉCONOMIE DE MIJAK
Puissance militaire avant d’être une puissance économique, Mijak repose beaucoup sur la production massive et sur l’esclavage. L’économie du pays est très centrée sur elle-même, et accepte peu les échanges internationaux. Les relations économiques avec des États non-mijakiens sont soumises à de fortes restrictions et à de lourds droits de douane, dans le but de décourager les Mijakiens de faire du commerce avec eux. Mijak se livre volontiers à une politique économique très protectionniste, en encourageant le développement d’un fort marché intérieur.
L’Empire dispose donc de considérables revenus, mais également de très importantes dépenses militaires, puisqu’il entretient une très vaste surface.
Son économie très centralisée repose pour l’essentiel beaucoup sur les taxes que l’Empire collecte depuis ses colonies et ses provinces impériales.
III – ORGANISATION POLITIQUE
Au sommet du pouvoir, on trouve deux institutions, l’
Empereur et le
Conseil Impérial. La répartition des pouvoirs entre ces deux institutions a fait l’objet de multiples évolutions historiques. Pour comprendre le fonctionnement des pouvoirs entre les deux, il faut se rappeler l’anecdote française du vase de Soissons. Selon cette anecdote célèbre, le Roi Clovis, au lendemain d’un siège, vit un jeune soldat freluquet briser devant lui un butin de guerre, le vase de Soissons. Plus tard, au moment d’examiner les troupes en vue d’une bataille, Clovis revit ce soldat impertinent, et se vengea de l’affront qu’il avait subi à Soissons en le tuant.
L’un des enseignements politiques de cette histoire, jeune Lecteur, est liée au fait que Clovis avait, en temps de guerre, droit de vie et de mort sur ses soldats, et avait un pouvoir bien plus limité en temps de paix. Ainsi en va-t-il pour l’Empereur mijakien, qui dispose essentiellement de prérogatives militaires. C’est un chef guerrier qui délègue au Conseil Impérial le bon fonctionnement du pays. Les problèmes sociaux, économiques, l’organisation du pays, relèvent ainsi des attributions du Conseil Impérial. Dans les faits, toutefois, le Conseil dispose aussi de prérogatives militaires, de sorte que l’Empereur a un rôle qui apparaît de plus en plus symbolique, mais qui n’en est pas moins réel. C’est à lui, et non au Conseil, que les Mijakiens jurent allégeance, et il peut se voir attribuer les pleins-pouvoirs en cas de crise grave.
Au niveau local, l’Empire dispose d’une multitude de circonscriptions administratives, des provinces impériales bénéficiant de régimes juridiques particuliers. Les provinces les mieux intégrées sont au centre de l’Empire, et forment tout simplement des
provinces impériales. Certaines circonscriptions ont toutefois pu bénéficier leur fonctionnement interne, comme le royaume de Sylvandell, ou même Papua. Ces provinces fonctionnent sur un modèle fédéraliste, respectant l’autorité supérieure de l’Empire, payant des taxes, contribuant à l’effort de guerre, mais disposant d’une souveraineté intérieure, d’une autonomie qui leur permet d’avoir leurs propres lieux de cultes, leurs propres fonctionnement. Dans ce système, le souverain local est également, au sens du droit mijakien, le Gouverneur impérial.
Les provinces centrales fonctionnent sur un modèle très féodal, avec des duchés, des comtés, des baronnies, etc...
IV – LA CAPITALE IMPÉRIALE
Fruit de son histoire, la capitale éponyme de l’Empire est en forme de double cercle. Elle présenta ainsi une urbanisation très maîtrisée :
- Le Cercle Intérieur comprend le Palais Impérial et toutes ses dépendances, comme les ambassades diplomatiques. Le Palais Impérial est une ville dans la ville, séparée par plusieurs ponts et par un grand lac. Le Donjon Impérial représente le plus haut bâtiment de la ville, et abrite en son sommet les quartiers personnels de l’Empereur, et ses Dragons Impériaux, dans un jardin qui leur est spécialement dédié,
- Le Cercle Extérieur correspond à la ville elle-même. On entre dans la ville par 24 corps de garde, chacun de ces corps de garde donnant ensuite sur un large boulevard menant tout droit au Cercle Intérieur. Autrement dit, la ville est construite autour de ces 24 boulevards, comprenant 24 districts, ou quartiers, qui correspondent chacun à l’un de ces boulevards. Il est à noter que Mijak dispose de nombreuses tours de surveillance et bastions à l’intérieur de la ville, ainsi que d’étranges passerelles qui surplombent la ville, partant depuis les murailles du Palais jusqu’aux murailles extérieures. Ces passerelles sont inaccessibles aux simples voyageurs, et permettent de déployer les troupes rapidement d’un bout à l’autre de la ville.
La population impériale ne cessant de croître, et la ville ne pouvant s’étendre, le prix de l’immobilier n’a fait que monter depuis ces dernières années, à tel point que les autorités locales redoutent l’apparition d’une bulle immobilière.