The Multiversity

[Leona Morimoto]

La limousine des Morimoto venait de rentrer dans la propriété de la Sainte-Arcadie, l’immense manoir des Morimoto, le fief des Morimoto. Un bâtiment colossal à l’histoire riche. La limousine conduisait deux invitées de choix : Patricia Thompson, dite « Pattie Cosplay », et son agente, Aoki Kou. Récemment, Patricia Thompson avait publiquement annoncé qu’elle changeait d’agence, et qu’elle avait rejoint l’agence de Aoki Kou. Elle avait aussi annoncé qu’elle s’installait à Atarashï Yoake. Dans le petit monde des idols, la nouvelle était remontée aux oreilles de Reina Morimoto. Quand elle avait appris cela, elle avait senti l’esprit de Kelly Thompson s’éveiller. Reina avait ensuite mené une enquête, et avait découvert que le père de Patricia Thompson était originaire des États-Unis, et qu’il était le petit-fils de la sœur de Kelly Thompson. Cette dernière était une aviatrice américaine qui avait été grièvement blessée lors de la Seconde Guerre Mondiale. Sur le point de mourir, Kelly Thompson avait accepté d’être l’hôte de Reina. Le corps de Kelly avait été régénéré par l’esprit de Reina, et, depuis lors, l’esprit de Kelly était lié à celui de Reina. Pour les Morimoto, les liens du sang étaient importants.

Reina était la Présidente de la Fondation Jinmu, et son fils était le Proviseur du lycée Jinmu. Elle avait donc autorité, et avait proposé à l’agente de Pattie Cosplay un rendez-vous pour discuter de l’organisation d’un festival de cosplays au sein du lycée, avec en tête d’affiche Patricia Thompson. Le projet s’inscrirait dans le cadre de la kermesse annuelle du lycée, et Reina envisageait aussi d’y faire participer les idols de l’agence d’Aoki, comme les Strawberry Girls, un trio de jeunes idols qui étaient en pleine ascension. La limousine les amena dans l’un des garages de la propriété où les deux invitées furent accueillies par deux ravissantes maids, Sachie Asagari, et Marika Mamiya.

« Nous vous souhaitons la bienvenue, Kou-sama, et Thompson-sama. Maîtresse Reina-sama est impatiente de vous rencontrer.
- Veuillez nous suivre, s’il-vous-plaît. »

Les deux femmes furent conduites à travers de magnifiques couloirs lustrés vers un salon convivial. Il y avait des plantes, et d’immenses fenêtres, offrant à la salle un éclairage très fort. Signe de l’importance de ce rendez-vous, Reina Morimoto se tenait là. On avait préparé des corbeilles de fruits et de gâteaux, ainsi que des domestiques, comme Yuuna Mitarai, qui était chargée de servir leurs invitées.

« Je vous souhaite la bienvenue à l’Arcadie, Mesdames ! Je vous en prie, installez-vous, je vous remercie d’avoir accepté mon invitation. »

Dehors, le soleil commençait à se coucher, Reina avait donc naturellement préparé le repas. Il y avait des fruits de mer, et autres plats.

« Comment trouvez-vous Atarashï Yoake, Thompson-sama ? » demanda Reina à Patricia, qui se trouvait sur le plan de table installée juste à côté d’elle, sur la gauche de Reina, Aoki était installée sur le même banc que Patricia, tandis que Leona était assise en face de Patricia.

[Patricia Thompson]

Il s'en était passé des choses dans la vie de Pattie depuis son retour à la maison. Elle a passé son enfance ici, avec ses amies, ses lieux communs. Manipulée en quelque sorte, elle a vite dû assumer ce qui s'était passé avec les Venay, même si ce n'est pas pour demain, elle était une future maman. Une double maman même si Grâce et Daniella avaient mentionné qu'elle ne connaissait pas encore toute la famille... Elle ignorait ce que ça pouvait vouloir dire, mais elle aura l'occasion de voir ça plus tard. Ce fut déjà quelque chose, car outre le fait de se dire, future maman... Grâce était mineure... Si cela ne dérangeait ni la demoiselle, ni sa mère, elle avait un peu peur pour sa carrière. D'autant plus que son retour ici voulait dire revoir Tessou et cette dernière était devenue agent de police. Elle ne voulait pas lui créer de soucis donc pour le moment, cela était secret, elle profitait juste de leur retrouvaille, de voir cette petite Kyoko qu'elle n'avait vu que dans le ventre de sa mère avant qu'elle ne quitte la ville pour sa carrière. Il ne s'était encore rien passé de bizarre, elle avait vu cette jolie petite bouille d'amour tout en échangeant quelques mots avec cette Kara. Bien sûr, elle ignorait sa véritable identité, mais elle était heureuse de voir que Tessou avait su tourner la page et continuer. Peut-être avec l'aide de cette belle blonde, qui sait.

En cours de route, elle fut approchée par l'agence « Aoi Kitsune », une certaine Aoki Kou la voulait dans son agence. C'était compliqué de coupé les ponts avec son autre agence même si, il est vrai, Pattie agissait plus seule que via une agence, mais le salaire bien mieux et le fait qu'elle comptait rester ici un moment allait lui être profitable. Pour Aoki, pas de question spéciale, les boss ont dit qu'elle devait recruter Pattie Cosplay avec quelques balles dans son revolver de bons arguments et la voilà. Ce ne fut pas la chose la plus compliquée à faire, mais le fait qu'elle et Pattie doivent dîner chez les boss des boss, ça impressionnait un peu... Aoki n'avait pas tous les détails, mais pour la faire courte, sans dire que c'était eux qui dirigeant ses patrons, ils donnaient beaucoup à l'agence donc quand ils disent vouloir les rencontrer à dîner, elle devait dire oui. Un peu peur de ce qu'elle pouvait rencontrer sur place, elle avait toujours de quoi avertir Felicia si ça se passe mal. Une alarme et la Black Cat viendra les tirer d'affaire ! Pour ce soir, sa fiancée devait rester à la maison, ou en compagnie des filles, peut-être ? Une chose est sûre, par prudence, elle attendait à la maison...

Arrivant à bon port en limousine, les jeunes femmes s'étaient bien habillée pour l'occasion, pas de robe de soirée, mais de belles tenues élégantes et passe-partout. Quand elles descendaient de la voiture jusqu'à enfin rencontré celle qui semblait être leur hôte, Reina Morimoto, ce fut le défilé de domestiques. Elles étaient charmantes, mais au moins, ça en disait long sur le compte en banque de ces personnes. Il y avait une seconde blonde en sa compagnie, Leona, Aoki n'avait pas eu d'arbre généalogique, difficile à dire si c'était sa sœur, sa cousine, un lien mère-fille, elle n'irait pas poser la question, même si elles ne semblaient pas Japonaises d'origine, parfois ça peut être tabou. Les jeunes femmes s'installèrent tandis que Reina restait près de Pattie, Leona lui faisant face, Aoki était à côté de Pattie aussi, un peu en retrait. La formation était un triangle, Leona était la pointe et les trois autres étaient sur la même ligne, Aoki était en bout de ligne. Un peu étrange, étant l'agente, elle pensait devoir être plus mise en avant pour parler tarif et organisation, mais elle n'avait pas besoin de souligner cela.

« Très bien, Madame Morimoto, mais appelez moi Pattie, ce sera plus simple pour tout le monde. J'ai grandi ici, à part cette année où je bougeais un peu partout donc, il n'y a pas eu grand changement entre mon départ et mon retour. »

La ville n'avait pas trop changé, c'est au niveau de ses proches que ça avait changées. Cela concernait surtout Tessou, Ryota était un ami en commun, elle a fréquenté le couple de nombreuses années, entre le lycée et après et bien qu'elle soit partie alors que Tessou était à peine enceinte de quelques mois, elle pensait revenir en les voyant parent avec enfin une date de mariage maintenant que le bébé était sortie, mais, la vie en a décidé autrement.

« Je suis ravie de voir que vous souhaitiez me promouvoir au lycée. Je pense que, si club de cosplay, il y a, que ce soit au moins une occasion pour celles et ceux qui aiment cela, de s'affirmer. Je ne pense pas que ce soit une honte d'aimer ce genre de choses, incarner un personnage que l'on aime, ça aide beaucoup. Notamment pour celles et ceux qui aiment le théâtre, c'est se mettre dans la peau d'un personnage, de s'affirmer et quelque part, combattre sa timidité, sa gêne. »

Le sujet la passionnait, c'est sûr qu'elle a de la chance de faire un métier qu'elle aime et de bien gagner sa vie. La plupart des cosplayeurs, en dehors des grands noms, faisaient cela par plaisir, par passion, on ne pouvait pas dire qu'en vivre était facile. Aoki en profitait pour se montrer un peu plus aussi et, rapidement, montrer qu'elle cherchait déjà à mettre Pattie sous les feux des projecteurs.

« De notre côté, nous sommes en train de voir comment Pattie Cosplay pourrait participer plus facilement à plus d’événements. Nous n'avons pas pu encore voir de quoi était capable notre amie en chant, mais dans le pire des cas, elle pourrait toujours être mise en avant dans le prochain clip des Strawberry Gils. Dans le même cas de figure, nous avons quelques propositions de publicités. Nous n'allons pas la signer pour tout et n'importe quoi, mais une certaine marque de boisson, forte en Amérique, voulait promouvoir sa marque ici. Étant donné que c'est une marque saine, tant en produit qu'en réputation, nous songeons à y mettre Pattie ainsi qu'une autre de nos jeunes amies, mademoiselle Kroes. Une boisson lactée, une à la vanille, l'autre au chocolat, nous verront quel choix il serait plus judicieux de faire, mais je pense que nos deux amies ont leur potentiel pour cette pub. »

Pattie avec le goût chocolat pour faire ton sur ton en jouant avec sa couleur de peau caramel et ses cheveux noirs, ou vanille pour mieux faire ressortir le produit ? C'était encore à voir, concernant le meilleur choix. De nos jours, on catalogue facilement une pub raciste ou anti-woke pour une chose qui aurait fait zéro bruit il y a une dizaine d'années donc le choix était important pour ne pas se tromper. Mais voilà, à peine arrivée, comme demandé, Aoki cherchait déjà à mettre Pattie en avant. Pas simplement en l'agitant comme ça, il fallait mettre son talent en évidence, mais voilà, il y avait déjà deux pistes !

[Leona Morimoto]

C’était bien elle. Leona savait qui était vraiment Reina, que, si elle était officiellement sa grande-sœur, elle était en réalité sa mère, et qu’elle avait pris possession il y a longtemps du corps d’une femme, une aviatrice. Reina était naturellement heureuse de voir Pattie, et encore plus à l’idée de lui annoncer qu’il y avait un peu de Morimoto en elle… Du moins, pas au sens strict, il était plus juste de dire qu’il y avait du Thompson dans les Morimoto. Leona se demandait si elle devait la considérer comme sa belle-sœur, ou sa cousine. Bien sûr, elle ne dirait rien. Cette soirée a priori très professionnelle allait doucement dériver. Patricia et Aoki expliquèrent qu’elles étaient favorables à un festival de cosplay au lycée, le souhait d’Aoki étant de promouvoir la carrière de Pattie Cosplay. Reina hocha la tête, visiblement en accord avec cette vision des choses.

« Très bien, Pattie… Dans ce cas, tu peux m’appeler Reina, et ma sœur… Leona. »

Reina sourit doucement, tandis qu’on amenait les premiers plats. C’était une vraie maison de riches, avec un traiteur spécial qui avait confectionné une série de plats dignes d’un restaurant gastronomique. Peu de contenu, mais du contenu de qualité ! Des plats issus de la gastronomie locale, essentiellement des fruits de mer. On proposa également à Aoki et à Pattie un vin d’accompagnement, servi par un impeccable sommelier en costume avec redingote.

« Le cosplay est une pratique qui est en forte hausse, que ce soit au Japon, ou dans le reste du monde. Je pense que tu as les qualités requises pour te faire connaître du monde entier, Pattie. Et cela, ça me plaît, et ça me motive. Peut-être pourrais-tu faire un duo avec cette Doutzen Kroes ? En tout cas, je pense que tu as le potentiel de participer à des festivals internationaux. Vois-tu, notre famille sponsorise des évènements de ce genre, comme la Japan Expo, en France. C’est un évènement populaire où des cosplayers commencent à se rendre. Je pense que tu as le bon potentiel et le bon management pour t’y rendre. »

Comme on pouvait s’y attendre de la part de Reina, elle était ambitieuse, et soucieuse que le monde entier désire Patricia Thompson, l’envie et l’idolâtre.

« Doutzen est également étudiante au lycée Jinmu, et elle fait partie du Club social, intervint alors Leona, qui avait déjà couché avec la blonde à frange. En tant que Présidente du Club social, je serai ravie que tu participes à des séances de préparation. J’ai beaucoup de candidats idéaux à te présenter pour organiser un genre de festival du cosplay au lycée. Les Strawberry Girls pourraient aussi y participer, autour d’un évènement caritatif. Cela assurerait ta promotion, et nous donnerait l’occasion de nous rapprocher, Pattie-chan. »

[Patricia Thompson]

C'était une étrange soirée qui se présentait à elles, Pattie avait déjà vu ce genre de choses, ne serait-ce que sur les réseaux sociaux, des amies cosplayeuses qui montraient une belle soirée, car elles étaient invitées dans tel ou tel événement, pour y faire de la pub, évidemment, mais une personnalité si importante dans cette ville ? Certes, la demande venait de plus haut que son nouveau manager, mais elle restait souriante et polie, elle gardait quand même une carte de méfiance dans un coin de sa tête. Les deux sœurs blondes continuaient de parler de leur projet, elles les laissaient parler tandis que les plats arrivaient à table. Elle ne voulait pas paraître impolie, mais elle avait de la chance que les deux sœurs ne soient pas japonaises, pas physiquement, mais peut-être bien des Japonaises comme Pattie, née ici ? Quoi qu'il en soit, elle se permettait de souligner quelque chose.

« Je n'ai rien contre l'idée que cette Doutzen participe à du cosplay, comme vos candidates, mais je dois quand même préciser une chose. On fait du cosplay, car on aime ça, qu'on est au moins curieux d'essayer cela. On peux aimer regarder des films, ça ne veut pas dire qu'on sera à l'aise derrière une caméra, entouré d'une équipe de production. Le Cosplay, c'est l'envie d'incarner ses personnages favoris, ne serait-ce que par un point de ressemblance avec lui, ou une admiration qu'on aime chez ce personnage. Si on pousse une personne à se déguiser, sans qu'il ou elle, ne le connaisse, ça n'a que peu d'intérêt. Croyez-le ou non, les photographes comme les amateurs de cosplay le remarque. »

C'est comme ses filles que l'on déguise pour faire la promotion de tel jeu vidéo lors de convention ou salon, elles ne sont là que pour faire joli en général, on ne sent pas la passion d'incarner un personnage, de jouer le rôle, elles ne sont là que pour le chèque. Pattie était d'accord pour faire découvrir cet univers, mais pas en poussant les gens de force dans cette case. Il faut quelque chose qui nous pousse naturellement à vouloir s'y essayer, même en commençant petit comme avec des oreilles de chat et une fausse queue ? Ou une perruque, pas besoin de faire du sur-mesure et voir les choses en grand. Aoki se permettait de rebondir autrement, essayant de changer de sujet, de peur que sa passion dérange les sœurs Morimoto qui avaient peut-être déjà placé leur pion dans ce genre de projet.

« Selon la date, il serait possible que les Strawbbery Girl soient libres. Leur clip avec Doutzen a bien marché, assurant à nos petites idols une belle courber de progression. »

Aoki avait supervisé cela, dans un cadre professionnel et privée. Cela n'était pas encore dit publiquement, mais sa petite blonde avait sa favorite parmi ses petites fraises. Ce n'est pas un hasard, elle a prévu la chose, tout comme la chanson avait un sous-entendu d'amour libéré, elle avait pris le soin de tourner trois versions différentes, chaque version mettait en valeur Doutzen avec Kurumi ou Tiên ou Mei. Les trois versions tournaient, simplement pour plus de versions et plus de vue pour elles, mais quand sa liaison secrète – dans un premier temps – sera ébruitée, les gens se jetteront sur la version Doutzen X petite amie. Les gens aiment chercher le moindre détail pour assouvir leur curiosité. Sauf qu'Aoki voulait changer la chose. Au diable cette idée d'Idol à son public. Oui, elles devaient beaucoup à leur fan, mais pas de se priver d'amour. Doutzen aura une petite amie parmi les Strawberry, elle se montera avec et aucune excuse se sera fait des deux côtés. Sur ça, elle prenait exemple sur Hollywood, et même ailleurs. Pourquoi une star devait s'interdire de fréquenter quelqu'un ? Pour ses fans ? Ils devraient être heureux pour leur star, pas jaloux.

« Je l'ai entendu, si je ne m'abuse, la chanson évoque une rupture, mais aussi un début d'amour entre filles, non ? »
« En effet, je tiens à ce que mes petites fraises changent les codes. Je ne les force pas, elles sont libres d'aimé, garçon et/ou fille. Du moment que c'est une bonne personne, qui ne nuira ni à leur image, ni en profitant d'elles, je ne peux pas leur refuser ça. Vous avez sû remarqué donc ça ? »
« Oui, c'est sous-entendu ici et là sur certains forums, mais certaines paroles restent sous-entendues et floues, mais le clip renforce cette idée. C'est volontaire cette idée de trois clips différents ? »
« Pour qu'aucune ne sont plus mise en valeur que les deux autres. Elles auront leur chanson ou clip où l'une sera plus mise en avant que les autres, mais pour commencer, elles sont toutes équitables. »

C'était pour le moment la version officielle, il était plaisant de voir que son plan commençait à porter ses fruits. Mais bon, elles divergent un peu de ce que les Morimoto ont prévue, autant revenir à leur mouton.

« Je serais ravie d'aider, mais sans forcer qui que ce soit. Chaque passion se doit d'être fait avec le cœur. On peut aimer voir du cosplay, ou vouloir en faire en étant nul en couture. C'était mon cas au début, mais j'en connais plusieurs qui ont des pro qui font leur costume, ce n'est pas une honte. Je comprends qu'une personne débutante achète son costume sur un site ou en magasin, inutile de se ruiner pour faire ses premiers pas. Si cette personne aime ce qu'elle fait, elle comprendra avec le temps que ce genre de costume à de petits défauts et si elle veut se rapprocher de son idéal, elle devra les corriger elle-même ou trouver quelqu'un qui saurait le faire pour elle. »

Les costumes tout prêt ne sont pas indigne d'une personne débutante, c'est normal de commencer de cette façon si on ne sait pas coudre ou qu'on est en retard. Mais aucune personne faisant du cosplay sa véritable passion ou métier n'achèterait ce genre de chose. Les acheter à un professionnel, oui, le faire soi-même, encore mieux ! Mais l'acheter tout prêt dans ce genre de site/enseigne, non. Les cosplayeurs avaient leur éthique. Un pro n'aurait pas ce genre de chose sur lui, un vrai fan de cosplay finirait par le comprendre.

« Je suis d'accord pour participer et tendre la main à celles et ceux qui voudraient s'y essayer, mais pas les forcer. »

[Leona Morimoto]

Tandis que les femmes parlaient, des domestiques avaient amené un grand platine tourne-disque pour accompagner en musique le dîner. Si Leona écoutait tout type de musique, Reina, influencée par Kelly, écoutait souvent les musiques des années 1900. C’était un premier signal qu’elle envoyait à Patricia Thompson. Bien qu’ils étaient originaires des États-Unis et étaient Sino-Américains, les Thompson avaient aussi des origines françaises, et y avaient passé du temps. Reina mettait donc des musiques que Patricia avait dû entendre jeune, et ce d’autant plus que le Japon avait toujours aimé les musiques classiques françaises, Edith Piaf ayant toujours été très populaire. C’est ainsi que le tourne-disque laissa s’échapper l’inoubliable voix d’Édith Piaf, chantant l’un de ses plus beaux morceaux, et qui accompagnaient donc les pensées d’Aoki sur les relations entre Doutzen et les Strawberries, « Hymne à l’amour » :

« J'irais jusqu'au bout du monde
Je me ferais teindre en blonde
Si tu me le demandais »

Difficile de ne pas faire le lien entre les Morimoto, dont la blondeur étincelante ressortait de ce repas. Elles ignoraient ce qu’Aoki avait en tête concernant Doutzen et les Strawberries. Elles savaient cependant que Doutzen les appréciait. Membre du Club social, Doutzen était une amante de Leona dont les Morimoto prenaient soin, non seulement en raison de sa grande beauté, mais aussi parce qu’elle était proche des Petrovski. Elle était donc un maillon essentiel dans la « pax civilis » que les Morimoto mettaient en place entre les grandes organisations criminelles de la ville. Reina hocha la tête quand Pattie observa qu’elle voulait bien participer à ce genre d’évènements, mais sans forcer qui que ce soit.

« Nous ne forcerons personne, ma chérie… Mais je pense qu’il n’y a pas besoin de forcer tes fans à vouloir se cosplayer, ni les Strawberries… Elles sont très populaires.
- Une idol girl qui tombe publiquement amoureuse, c’est risqué, Kou-san. Mais bon, j’imagine que vous le savez… Et Doutzen aime bien vos petites starlettes. »

Idol girl, c’était une vie de rêve, mais aussi extrêmement stricte.

« Vous allez devoir y réfléchir sérieusement, Aoki. Si vos petites fraises s’affichent officiellement avec d’autres personnes, elles risquent des problèmes… Des paparazzis, des fans hargneux, ce genre de choses. Toi comme moi, nous savons que les gens qui tournent autour de Doutzen n’ont pas spécialement envie d’avoir l’éclairage de médias intrusifs… »

Cela ne la regardait pas, bien sûr. Leona fronça brièvement les sourcils, en comprenant que l’instinct maternel prenait le dessus. Aoki n’était pas sa fille, mais elle était l’agente de Patricia Thompson, qu’elle considérait comme étant sa nièce.

« Enfin, je dispose d’un système de médias, nous aurons l’occasion d’en reparler. Sache juste que ton choix sera le mien… Mais j’ai surtout souhaité profiter de cette soirée pour parler avec toi, Pattie. »

Reina lui sourit à nouveau, tandis que les serveurs amenaient les premiers plats.

« Comment te sens-tu à Yoake ? C’est un sacré déménagement que tu as fait… On m’a dit que tu étais proche des Venay. Est-ce que tu te fais à cette nouvelle ville ? »

[Patricia Thompson]

Une musique française, ancienne, se jouait en fond, mais Aoki y faisait peu attention, Patricia non plus. Elle en savait un peu sur ses racines, mais elle était née ici, au Japon, même sans nom et prénom, ni même de yeux bridés, elle était aussi japonaise qu'Aoki Kou. Ses parents s'y sont installés bien avant sa naissance, bénéficiant ainsi de la nationalité, naturellement héritée pour Pattie. Donc, même si son anglais était parfait, à part pour des conventions, elle n'a jamais été longtemps aux USA, et jamais passé par la France encore. Quant à Aoki, elle savait ce qu'elle faisait. Elle était bien placée pour savoir qu'idol, chanteuse ou star de cinéma, homme comme femme, on évitait de montrer un quelconque couple avec un/e autre, personne du showbiz ou non. Elle n'aimait pas cette mentalité. Elle aimait son pays, mais pourquoi ailleurs, une chanteuse va être prise en photo avec sa moitié, on va juste se montré curieux de cette autre personne et ici, c'est presque un crime ? Bien sûr, même ailleurs, il y a des fans hardcore qui pourraient désapprouver la relation de sa star fétiche avec ce mannequin, mais ici, c'étaient presque tous les fans qui pourraient avoir cette pensée ! C'est pourquoi elle voulait faire un double coup. Le montrer, sans le cacher, l'assumer et en plus, avec une personne du même sexe, étrangère qui plus est ! Elle va faire changer les mentalités, pas du premier coup, elle y arrivera...

Bien sûr qu'une personne qui a des fans, qu'ils soient dix ou un million, leur devait beaucoup, mais ça ne veux pas dire être là corps et âme. Alors quoi, si demain une star qui a dix millions de fans veux pouvoir fréquenter quelqu'un, elle doit avoir l'accord de tout le monde, comme une enfant voudrait celle de ses parents ? C'est ridicule. Elle ne va pas non plus coucher avec tout ses fans pour qu'elle puisse agir librement, même un porno n'aurait pas un scénario aussi insensé ! Cela faisait un moment qu'elle travaillait son plan, ça va marcher, elle y croit. Les Morimoto n'insistaient pas plus dessus, laissant Aoki gérer cela si elle disait avoir les moyens de réussir cela. Recentrées sur Pattie, elles parlaient de Yoake, mais la mention des Venay manqua de lui faire recracher son verre. Les Venay... Oui. Elle avait été piégée... Du moins, c'est ce qu'elle pensait au début, mais elle s'était attaché à ses trois femmes, sa petite Grâce chérie, Daniella et sa sœur... Elle était bien obligée, les trois Venay attendaient ses enfants... Pattie avait fait fort... Si au départ, elle pensait juste en assumer les conséquences, elle s'y était attachée.

Aoki n'allait pas fouiner autant dans le passé des gens, et dans leurs liens, on lui avait presque obligé de la prendre sous son aile, c'est tout. Mais vu sa réaction, le sujet était au moins secret ? Preuve que non pour elles. Reste à savoir ce qu'elles pouvaient savoir sur elle aussi ?

« O-oui, depuis peu... Mais, j'ai grandi ici, à Yoake. J'ai juste eu une année chargée où il était plus simple pour moi de vivre sur les routes pour booster ma carrière en faisant des convention et des vlogs un peu partout au Japon plutôt que retourner deux ou trois jours ici pour repartir. »

C'était un peu plus qu'un an. En partant, Tessou était enceinte, à son retour, sa fille Kyoko avait déjà un an, et son amie, dans son malheur, avait retrouvé l'amour, une jeune femme américaine qu'elle comptait lui présenter un jour. Pour le moment, elles avaient juste pris le thé en parlant de leur jeunesse. Rien de bien méchant. Pattie avait grandi ici, depuis toute petite donc ça lui avait fait bizarre d'y rester loin et y revenir, c'était bizarre, ça avait autant changer que c'était resté identique.

« Yoake n'a pas vraiment changé, il y a bien des petits changements ici et là, mais c'est toujours la ville que j'ai connue. »

Forcément en un peu plus d'un an, des commerces ont changé, de nouvelles personnes sont arrivée ou partie comme ses parents qui ont déménagé ailleurs, mais au final Yoake restait la même. Aoki n'en rajoutait pas, consciente qu'elles voulaient parler à Pattie pour le moment, inutile de donner son avis. Pattie tentait de noyer le poisson et ne pas évoquer le sujet des Venay, c'était encore tout frais, elle avait du mal à se dire ce qu'elle a fait ce soir-là... Elle allait être maman, trois fois, de personnes de la même famille, dont une mineure. Si ça se savait – et elles le savaient sûrement – elle risquait la prison. Elle se faisait doucement à cette nouvelle vie, même si elle habitait encore son appartement, il était question d'emménager chez elles, d'être plus proche de sa future femme et de sa nouvelle famille. Son retour à Yoake était surprenante, ça oui. La ville n'avait pas changé, mais son quotidien, lui...

[Leona Morimoto]

Patricia avait grandi à Atarashï Yoake. Cela, les Morimoto le savaient, car elles s’étaient renseignées. Elle était passée entre les mailles du filet, car elle avait étudié à un autre lycée que le lycée Jinmu. Et, finalement, le destin la rappelait à Atarashï Yoake. Pour Reina, c’était un signe évident, le signe que leur famille devait s’agrandir. Patricia indiqua que la ville n’avait pas beaucoup changé, et les Morimoto acquiescèrent.

« Eh bien, il y a eu cette attaque de Dieux olympiens, mais la ville s’est bien reconstruite. Nous sommes toujours là pour y veiller, nous, les Morimoto.
- Ta période de vagabondage est donc terminée ? Tu comptes t’installer ici ? »

Elles savaient que Pattie n’avait encore aucun bien immobilier. Locataire ? Si elle était passée par une agence immobilière, les Morimoto l’auraient su, car toutes les agences rendaient compte aux Morimoto de ce qu’elles faisaient. Alors, elle était peut-être passée par un particulier, mais c’était peu probable. Non, elle devait sûrement chercher un logement. Les Morimoto conservèrent cette information, et le repas se poursuivit. Après Edith Piaf, de la musique classique se diffusa ensuite dans le salon, aussi bien occidentale que japonaise. On servit ensuite les plats, tandis que les Morimoto interrogèrent Patricia Thompson et Aoki Kou sur des choses et d’autres, notamment sur la carrière professionnelle de Pattie, et sur le développement de « Aoi Kitsune », l’agence d’Aoki. Celle-ci commençait à avoir quelques stars, et le chiffre d’affaires de l’agence s’envolait. Reina suggéra à Aoki de faire attention à ses déclarations fiscales, et proposa le cabinet comptable des Morimoto.

Reina expliqua ensuite sa philosophie :

« Notre famille veille depuis toujours sur la prospérité économique de cette ville. C’est une philosophie que nous tenons depuis l’ère Sengoku. Nos ancêtres protégeaient cette ville et ces marchands alors que le shogunat ne le pouvait plus. Cette tradition a repris de plus bel après la Seconde Guerre Mondiale, nous avons veillé sur les Yoakïotes, et nous continuons à le voir. C’est pour cela que nous sommes ravies de vous voir, Patricia Thompson. Vos talents de cosplayeuse font de vous une étoile montante, et je ne souhaite pas que des formalités administratives ou des déclarations fiscales viennent encombrer votre talent. Tu peux nous voir comme des mécènes. »

Une tradition très ancestrale, celle de riches notables qui finançaient et nourrissaient les artistes pour qu’ils puissent exprimer leur talent sans avoir à se soucier des contraintes matérielles. Les plats se multiplièrent. Ils étaient peu consistants, mais délicieux, et nombreux, entrecoupés de petits pains, ce qui faisait que, peu à peu, l’estomac se remplissait. Le majordome annonça finalement une pause culinaire d’un quart d’heure avant le dessert. Reina s’absenta avec Aoki, et Leona invita Patricia dans un salon adjacent. On y trouvait un piano magnifique, un canapé rembourré, une cheminée, une harpe… Un salon musical.

Fait curieux, Leona avait pris la main de Patricia, et la rapprocha surtout d’une tapisserie murale représentant le grand arbre généalogique des Morimoto.

« Tu vois, notre famille est très grande, Pattie. Mais la lignée principale s’est quasiment éteinte pendant la guerre. Reina-sama est pour ainsi dire la dernière survivante du clan. »

En regardant, Patricia pourrait voir un premier phénomène étonnant. Selon la frise, Leona était la fille de Reina et… D’Aphrodite. Et sa naissance remontait aux années 1950. Officiellement, on disait que Leona était la petite-sœur de Reina. Et, tout en haut de la frise, il y avait la Reine Himiko, la légendaire épouse de l’Empereur Jinmu, le fondateur du Japon.

« Dis-moi, Pattie-chan, est-ce que tes parents t’ont déjà parlé de ton arrière-grande-tante ? L’aviatrice Kelly Thompson, celle qui a combattu pendant la guerre… »

[Patricia Thompson]

Pattie à jamais ici maintenant ? Surement. Ce n'était pas impossible qu'elle aille voir ailleurs avec le temps, mais ses racines sont ici, puis maintenant avec les Venay, trois enfants vont changer sa vie donc elle va devoir assumé et assurer aussi. Même si elle n'en était pas encore là, forcément, Grâce, sa mère et sa tante voulaient que Pattie habite au manoir, ce qui était logique, la « mère » de leur enfant se devait d'être là, mais, sans vouloir les abandonnées, elle profitait que ce ne soit que le début pour avoir besoin de paix, seule. Apprendre qu'on va être parent, c'est déjà une grosse nouvelle. Multipliée par trois, avec trois femmes différentes ? Ça faisait beaucoup trop ! Au moins, elles comprenaient, elles n'allaient pas la rendre captive, mais, autant d'un coup en une soirée, on comprenait que Pattie avait besoin de souffler seule pour faire le point. Sa carrière, ses amies ici, ça pouvait l'aider à penser à autre chose en faisant du rangement dans ses pensées.

Tout ce repas était délicieux, raffiné et si l'offre de combattre une phobie administrative était tentante, elle préférait lire le contrat avant de signer quoi que ce soit. Une notion de base pour toute personne voulant voler de ses propres ailes. Durant la pause, son agent s'éloignait avec l'une des deux, laissant Pattie avec la plus jeune des sœurs, l'amenant dans une pièce raffiné, avec plusieurs instruments. Elle n'a jamais été douée pour ça, Tessou avait un peu fait de batterie au lycée cela dit, mais il n'était pas question de son amie, là. Leona l'amenait devant un arbre généalogique, le genre de chose qui met en valeur la lignée. Tous ses noms ne lui disaient rien, certains sonnaient occidentaux, il y avait même une aphrodite... un surnom sûrement. Tout comme dessus, Leona et Reina étaient parents, mais pas sœurs... c'est pas rare chez les familles, surtout bourgeoises d'avoir le même nom, pour entretenir l'héritage. Leona était loin d'avoir soixante-dix ans. Majeur, pourquoi pas, elle ne connaissait pas son âge exacte. Mais pas plus vielle que sa mère.

« Mes parents m'en ont parlé un peu. Forcément, pilote pendant la Seconde Guerre mondiale, c'est quelque chose qui fait briller lors de dîner en famille. »

Chez des amis ou autres, ça mettait de suite la barre très haute. Mais Pattie ne connaissait pas tout de sa famille. Ses parents étaient d'ici, ils sont arrivés très tôt au Japon et Pattie est née Japonaise. Pour elle, elle était Japonaise, malgré sa couleur de peau et ses yeux qui n'étaient pas en amande. Elle n'avait pas honte d'avoir du sang américain dans les veines, mais, toute sa vie était ici, ses racines étaient ici. Ses parents n'étaient pas venus seuls ici, sa tante était venue aussi, elle avait fini par épouser un Japonais plus tard. Elle avait une cousine qui devait être au lycée maintenant ? Hayase. Elle n'était pas spécialement proche d'elle, non pas qu'elle ne s'entendaient pas, mais la dernière fois qu'elle l'avait vue, Pattie était au lycée justement, s'amusant et vivant sa vie de presque adulte, là où sa cousine jouait encore à la poupée. Ça ne faisait pas beaucoup de points communs.

« Mais c'est à peu près tout ce que je sais. Mes parents ne l'ont jamais connue donc, ça n'aide pas à parler de bons souvenir. »

Eh oui, enfin, elle n'en était pas triste, mais pour elle, ce n'était qu'un nom dans leur famille. Ce qu'elle avait fait était déjà grand, mais pas historique non plus. On saluait sa mémoire, c'est déjà bien.