The Multiversity

[Lissandre Verrières]

Une semaine était passée depuis l’embauche de la nouvelle maid pour la villa Verrières. Pendant ce laps de temps, Lissandre Verrières était retournée au lycée donnée la suite de son cours. Elle en avait eu un seul avec Hosoo. Une seule possibilité de voir « sa » Belle-Maîtresse. Et pour quel résultat ? Un à base de frustration. Car depuis que les deux femmes s’étaient quittées au centre commercial ? Il n’y avait eu que de court échanges. En fait, il n’y en avait véritablement eu qu’un. Un échange de papiers administratifs pour professionnaliser le contrat. Ce n’était pas un jeu de rôle. CDI ? CDD ? Salaire ? Rayon de déplacement accepté ? Tant et tant de clauses sur lesquels se mettre d’accord. Le contrat final n’avait pas encore été signé par les deux parties.

Quant à la période du lycée, Lissandre Verrières n’avait rien laissé paraitre de son expérience avec Hosoo Ienaga. Une relation normale entre une prof temporaire et une élève. Aussi normale que cela puisse être dans un cours de littérature dérivant sur le genre qu’était la pornographie. Mais pour en revenir à l’essentiel : Hosoo n’avait pas eu d’entrevue privée. Que ce soit pour parler sérieusement de leur relation. Ou pour « tâcher » à nouveau une porte de toilettes…

Puis un SMS avait déclenché une notification dans le téléphone portable de la lycéenne : « Rendez-vous au temple [XXX] ce soir pour 22h00. Tenue de maid non exigée. A ta convenance. Car je ne voudrais pas que tu te retrouves en sueurs après la montée de tant de marches. XOXO »



Le temple qu’avait choisi Lissandre n’était pas de ceux qu’on pouvait qualifier de « commercial ». Dans le sens où il ne faisait pas partie des circuits touristiques. Il n’était pas facile d’accès. Il n’avait pas une bonne réputation. En fait, il semblait presque être devenu un « secret ». Affiché aux yeux de tous, mais tout le monde étant comme devenu aveugle. Comment Lissandre en était venue à le choisir ? Sans importance. Ce n’était pas ce qui importait dans l’immédiat. (bien que cela puisse être en lien avec sa femme Fönn. Mais pour attester de ce genre de lien, il fallait passer par « l’Oeil ». Que certains surnommaient même Noeilnoeil).

La soirée était donc bien avancée. Les arbres étaient hauts et participaient à empêcher les lueurs du ciel de passer. Même sans brouillard, il y avait une aura de mystère en ce lieu. Qui gagna en importance lorsque les différents braseros s’allumèrent le long de l’ascension faites de vieilles pierres. Certains fendillées. D’autres comme enveloppées dans un duvet de mousse. En fait, au lieu d’être effrayant, le lieu paraissait surtout reposant. Exilé du temps ?

Lissandre se trouvait à m hauteur de l’ascension. Bien entendu qu’elle était arrivée en avance. Et si elle portait toujours sa combinaison de latex rose moulant, elle portait par-dessus un long manteau couleur ténèbres. Elle voulait se fondre dans l’environnement. Pour un jeu de rôle potentiel à venir. Mais attention, ce n’était pas non le genre de Lissandre de porter autant de noir. En ouvrant ce grand manteau lui descendant jusqu’aux chevilles, l’intérieur était d’or et de motifs « tissu Jacquard ».

Mais Lissandre n’était pas seule. Plus inquiétant, elle n’en savait rien. Ca ne faisait pas partie de ses plans nocturnes. Si elle avait su qu’une femme à la peau blafarde, aux yeux rouges dont une lame de guillotine semblait davantage un accessoire qu’une mise à mort à venir… Anna et son manteau-corbeau. Un oiseau de mauvais augure au service d’une Entité malveillante.



Hosoo finirait par rejoindre Lissandre. Rien que cet instant instaurerait le jeu de leur relation. Maline Belle-Maîtresse qui se tenait quelques marches plus haut. Prenant de haut sa nouvelle employée. Et ce sourire malicieux. A le voir, il n’y avait aucun doute à avoir. Jamais Lissandre avait oublié Hosoo. Elle s’était jouée d’elle. Jamais elle n’avait lâché les rênes du contrôle. Durant toute la semaine, elle avait joué avec le temps. Elle avait fait bouillonner la lycéenne. Quelles bêtises avait-elle du commettre pour extérioriser cette frustration ! Lissandre pouvait presque deviner un relâchement sur ses « victimes » écolières. Quelle idée plaisante qu’Hosoo ait « abusé » de ces copines dans les toilettes. Se serait-elle rendu compte du poids de ce lieu dans leur « mythologie » à toute deux ?

« Hosoo… »

Cette voix un peu basse. Lancinante. Terriblement sensuel !

A partir de cet instant, le temps n’avait d’autre choix que de se séparer en deux. Deux présents ? Un présent immédiat et un présent proche ? Peu importait réellement l’écoulement de cette force qui ne savait jamais revenir en arrière ou prendre le temps d’une pause. Rares étaient les élus à pouvoir manipuler Temps.

Dans ce temps présent, Hosoo avait une chance de dialoguer avec sa Belle-Maîtresse ? Car plus haut ?... Une figure immense, à la peau rouge, aux crocs saillants de sa gueule et détenant un kanabo posé sur son épaule patientait. Un oni…



Un gardien ? Un assassin ? Ni Lissandre ni Hosoo n’aurait le temps de répondre. Sitôt les deux femmes ayant posé un pied sur le point le plus haut, c’est-à-dire sur le parvis du temple derrière une dernière arche torii : alors l’oni attaquerait !

La chasseuse de démons devrait alors démontrer son talent nocturne à celle qui ne serait plus qu’une…faible ? femme. Si cela pouvait l’aider à respirer, qu’Hosoo laissait une opportunité à l’oni d’attaquer Lissandre ? Alors la chasseuse de démons découvrirait que le latex rose était en partie hôte d’un symbiote type slime. Des tentacules roses très « girly » capable de contrer, ralentir et même blesser un terrible démon !!

Et si cela était tout…

Car en coulisse ? De chaque côté du temple plus loin là-bas, quatre êtres observateurs. En premier regard ? Une impression de joie. Quatre artistes dont la composante commune évoquait le clown. Mais à écouter dès le premier instant son instinct ? Du malaise. De l’inquiétude. Ces quatre artistes du Cirque avec un « C » majuscule…

Mais Hosoo n’aurait pas le temps de s’occuper de ces quatre-là. Ils n’agissaient pas de toute façon. Au contraire de l’oni !

Mais, une deuxième fois mais donc, ce temps n’était peut-être pas pour maintenant. La jeune Hosoo pourrait vouloir converser durant quelques réponses. Le temps de la joute pouvait attendre. Ce serait à elle de plonger dans l’action lorsque le temps (IRL) serait venu.

[Hosoo Ienaga]

Une semaine ! Hosoo avait poireauté une foutue semaine avant d'enfin pouvoir revoir le visage de cette corruptrice en puissance qui avait su la faire jouir comme elle n'avait jamais joui auparavant.
Ce n'était... pas tout à fait exact.
Tout d'abord - et ce dès le troisième jour - la dernière année s'était rabattue sur Chizuru Asa, l'idole de sa classe, pour calmer sa frustration sexuelle. Inspirée par l'art buccal de Belle Maîtresse, Hosoo Ienaga put faire d'elle son premier cobaye. Une opération qui fut couronnée de succès, la kunoichi ayant laissé étalée derrière elle, à même les oreillers trempés, une ravissante poupée couverte de sueur...
Elle, au moins, m'en aura donné, des nouvelles !
Après la petite beauté coiffée d'une queue de cheval, il y en avait eu deux autres dans différents contextes. Dont un mâle - un bellâtre de moindre importance - qui, hélas, n'avait pas su la satisfaire autant qu'elle vis-à-vis de lui. Le lycéen avait su garder sa langue sur leur joute en plein milieu scolaire. En fait, il l'avait peut-être un peu trop gardée dans sa bouche pendant leurs ébats...
A cause de Lissandre Verrières, l'intrépide Hosoo était devenue beaucoup plus difficile et critique avec ses partenaires.
On s'en fout ! Aujourd'hui, j'ai-un-ren-dez-vouuuus~
Dans un temple, avec sa superbe prof' et employeuse à mi-temps qui, à cette occasion, ne lui avait pas imposé le port de sa tenue de domestique.
La dernière fois, lors de notre petite séance d'essayage dans ce centre commercial, je crois me souvenir qu'elle m'avait suggéré de ne pas abuser du noir.
Pour l'avoir laissée en plan une semaine entière, Hosoo avait donc décidé de ne porter... que du noir ! Soit un pantalon et un haut cintrés, avec entre ces deux éléments vestimentaires une bande de chair douce et de muscles taillés joliment découverte. Le tout assorti à un blouson ample.
Me voilà prête à me faire enguirlander !
Le temple n'était pas la porte à côté. Hosoo prit donc un petit peu d'avance sur l'horaire, espérant arriver sur les lieux sous les coups de vingt-et-une heures quarante-cinq au maximum. Elle ne voyait aucun souci à patienter là-bas. Au pire profiterait-elle de l'attente pour aiguiser son ninjato.

C'est plutôt glauque comme endroit...
La kunoichi n'était pas dépaysée par son environnement. D'autant plus qu'il ne faisait pas tout à fait sombre sous les arbres, avec toutes ces lampes qui jouxtaient les marches montantes vers le sanctuaire austère.
Elle leva les yeux et, moitié surprise, la vit.
Trop tard, dirait-on : Belle Maîtresse m'a devancée.
La magnifique blonde paraissait fière. Non : elle l'était complètement, avec son petit sourire supérieur au coin des lèvres !
Les oreilles d'Hosoo eurent vite fait d'absorber le petit son qui avait jailli de ses lèvres pleines. Un nom - le sien - lâché avec un délicieux soupçon de volupté.
Brrr !
La lycéenne réprima un frisson qui n'était absolument pas dû à la température ambiante.

- Madame Lissandre, répliqua Hosoo, aussi sagement que possible. Je ne m'attendais pas à vous revoir si tôt. Une semaine de silence, tout de même ! C'est si peu...

Fadaises ! Ce fut foutrement long. Hosoo avait vu le temps passer, et pas qu'un peu ! Un moment qu'elle avait trouvé proprement détestable hors des plus petits qu'elle avait écoulé de façon, disons, très sportive et sulfureuse...
La kunoichi était parvenue à hauteur de l'ancienne actrice porno.

- Sans vous, les cours étaient d'un ennui mortel. Les trois premiers jours, ma concentration s'était comme... volatilisée ? Un peu comme vous, à vrai dire ! Et puis d'ailleurs, où étiez-vous passée pendant tout ce temps ? Vous avez démissionné pour pouvoir tourner un nouveau film en douce ? Vous êtes bien conservée, c'est un fait, mais bon... il serait préférable que vous vous ménagiez. N'est-ce pas pour cela que vous avez adopté une bonne à tout faire, Belle Maîtresse ?

Toujours aussi culottée, la bougresse des ombres !
Hosoo se permit un petit rire avant de reprendre la parole, chemin faisant.

- Comment se portent vos plus grandes ? Mélissandre et Marmelade ! La première m'a presque manquée autant que vous. Je crois même avoir rêvé, l'espace d'une nuit sans saveur, être retournée dans sa chambre pour lui chiper quelques-uns de ses effets personnels~

Une maladie chez elle ! Parviendrait-elle à contenir durablement ses pulsions de cleptomane chez les Verrières ? Cela restait à prouver.
Entre-temps, toujours plus de marches furent grimpées...
Hosoo n'avait pas encore senti la présence de cette lourde entité démoniaque qui les attendait tout en haut.

- Il me reste une question indiscrète à vous poser. Ça, j'espère que vous ne l'avez pas oublié ! Et qu'elle est à l'épreuve du temps. Que vous ne me l'avez pas décomptée sous prétexte que je suis en train de vous enquiquiner avec mes innocentes petites questions insignifiantes.

Elle ne perdait pas le nord, la fourbe !
Hosoo gloussa pour la deuxième fois.
Elles avaient escaladé de nouvelles marches.
Les deux protagonistes s'immobilisèrent, face à face, une bonne poignée de marches avant de poser le pied sur la dernière.

- Pourquoi avoir choisi ce lieu en particulier ? s'enquit-il soudainement, une toute petite ombre dans le regard. Avez vous quelque chose à cacher ? Parce qu'il s'agit de vous, madame Lissandre, je préfère vous prévenir : en ce moment même, je porte une arme sur moi.

Dès lors, l'ambiance ne fut plus tout à fait la même...

[Lissandre Verrières]

Répondre aux questions. C’était un principe de base pour avoir une conversation. Mais quand l’opération devenait séduction : les règles n’étaient plus les mêmes. Laisser la « jeunesse » s’exprimer et conserver son manteau de mystère. Pour cette génération qui regardait des vidéos en vitesse multipliée par deux, l’attente deviendrait probablement vite insupportable.

Non loin de la frontière de la dernière marche, Hosoo n’en put plus. Ses tentatives de faire réagir sa Belle-Maîtresse avaient toutes échoué jusqu’à maintenant. Et donc l’air espiègle s’était fait rembarré par une menace armée ?...

« Hosoo… »

Un seul mot lâché. Son prénom à elle. Et l’intonation était égale à celle subie. Si Hosoo comptait vraiment menacer une des héritières Verrières, elle allait avoir du répondant.

« Si tu crois que je sois idiote à m’éloigner dans un endroit aussi isolé que celui-ci sans moyen de défendre ma vie, et ce, en sachant que je porte une certaine étiquette m’annonçant comme une personne riche… J’espère vraiment que c’est une maladresse de ta part et non autre chose. »

Il y eut un instant très pesant. Cette petite blonde qui devait avoir quoi, quelque chose comme seulement dix ans supplémentaires par rapport à elle ? Ce petit bout de femme engoncée dans son latex rose excentrique. Comment pouvait-elle posséder une telle aura d’autorité ?

Un clignement des yeux. Et le sourire mutin revint ! Le pouce et l’index vinrent pincer la joue d’Hosoo.

« Tu me poses tant de questions alors que j’ai à peine répondu aux deux premières de notre défi. Je ne crois pas que ce soit le moment de les approfondir. Mais essayons tout de même de te donner quelques élements. Voyons, je fais un effort de mémoire pour revenir le plus loin en arrière possible ? Non, c’est trop réfléchi pour quelqu’un comme moi. Donc, tu me demandais pourquoi ce rendez-vous dans un temple en haut d’une montagne ? Si je te disais qu’il n’y a pas si longtemps, j’ai lu un hentai sur internet où une jeune femme arrivait peu vêtue pour quelque session d’exhibitionnisme : ce serait une réponse suffisante pour toi et tes beaux yeux ? ♥ »

Ce petit cœur ponctuant sa phrase ? C’était assurément une stratégie de séduction. C’était calculé. Même si Lissandre appréciait beaucoup Hosoo, il n’y avait pas ce magnétisme exceptionnelle qu’elle avait eu avec sa femme. Une différence de maturité ? Peut-être. Toujours était-il que Lissandre donnait de son temps, cette ressource la plus précieuse au monde, pour cette presque-adulte capable d’arroser les portes des toilettes d’un établissement public.

« Mais dis-moi, ma très chère employée serviable qui, je l’espère avant de venir, a bu une grande quantité d’eau pour… « s’hydrater ». Est-ce un problème d’habitude ou une tentative de rebellion ? Il me semblait pourtant t’avoir démontré par les mots et les actes qu’il fallait abandonner le noir. Et je te vois venir. Tu vas me demander pourquoi moi j’en porte ? Ce doit être parce que je compte me dissimuler dans les ombres tandis que je t’afficherais dans une forme d’humiliation en pleine lumière : hi hi ! »

Lissandre grimpa une marche supplémentaire. Ce n’était pas encore le sol du haut de la colline. Les événements funestes n’étaient donc pas encore déclenchés. La femme et la « fille » avaient encore le temps de la conversation.

« Oh ! Et concernant l’acte d’effraction doublé de vol dans ma villa ? Mon système de surveillance a enregistré bien assez de preuve pour te menacer de tout ce qui me plaira. Mais je suppose que tu le savais ? Que, bien que ma magnifique Mélissandre ait pu te taper dans les mirettes, tout cela n’était qu’une tentative d’attirer mon attention alors que je faisais exprès de t’ignorer ? »

La main de Lissandre plongea dans la poche de son manteau. Elle en ressortit une petite culotte qu’elle porta à ses narines.

« Il me semble que c’est la tienne. Ce n’est pas une supposition, bien entendu. Je SAIS que c’est la tienne. J’ai la preuve vidéo durant laquelle tu l’as enlevé pour te masturber si proche de ma Mélissandre endormie. Savais-tu qu’à son réveil, elle est venue me demander où était passée un de ses sextoys ? Et toi, sais-tu où il se trouve le précieux sextoy de ma Mélissandre ? Hi hi ! »

[Hosoo Ienaga]

Comme pour pallier à ce qui avait tant ressemblé à une menace préemptive, Hosoo leva ses mains à hauteur d'épaule, paume tournée vers son enseignante qui ne l'était plus que de nom.

- Considérez plutôt ma déclaration comme une méprise, répondit-elle avec un petit sourire guindé. Je ne voulais surtout pas prétendre que vous faites une proie facile, incapable de vous défendre pas vous-même.

Puis elle ajouta... moins sérieusement encore :

- Sans quoi l'intrépide chasseuse que je suis vous aurais dévalisée depuis longtemps~

Cela n'avait pas vexé l'intéressée, bien au contraire !
Lissandre Verrières ne se fatigua pas à répondre à toutes ses questions. Sans doute parce qu'elle savait Hosoo intarissable, et qu'elle voulait prendre son temps pour la cuisiner ? Cette succulente perspective plaisait beaucoup à la lycéenne. En réalité, elle n'en voulait pas à sa prof' de l'avoir mise de côté une semaine durant. La troisième année n'était pas rancunière. Ce silence radio lui avait donné l'occasion de se défouler sur des partenaires bien plus facile à prendre en main. Parce que si son entrevue dans les toilettes avec Belle Maîtresse avait bel et bien mis une chose au clair, c'était surtout son manque d'expérience en matière de galipettes.
Et non : il s'avère que, contre toute attente, Hosoo Ienaga ne pratique pas assez le sport de chambre pour poser de sérieuses difficultés à une vraie professionnelle.
A ses yeux, Lissandre était presque devenue son idole : une Chizuru Asa, avec les étoiles en moins et la maturité en supplément !
Elle continuait de la charrier.

- La réponse n'est pas claire, rétorqua effrontément Hosoo. Parce que si c'était le cas, vous m'auriez demandé de vous rejoindre au mieux en petite tenue, au pire en tenue d'Eve. Qui sait si j'aurais refusé, en guise de représailles ?

Elle-même ? Elle aurait accepté le deal, et ce sans jamais se faire remarquer en cours de route.
Belle Maîtresse pointa alors du doigt sa tenue - sombre, comme elle avait du mal à le supporter. Soit l'idéal pour attirer son attention, à défaut de s'accaparer celle des autres.

- Vous ne m'avez pas non plus demandé de venir vous taquiner en robe de flamenco.

Plaisanteries ou non, Hosoo s'attendait à ce que son employeuse lui donne une nouvelle leçon.
Et elle l'imaginait ô combien méritée !
Lissandre Verrière lui conta alors une anecdote dans laquelle figurait Hosoo la vilaine voleuse. L'innocente lycéenne s'immobilisa sous le coup de la surprise.

- Pardon ? Vous êtes en train de me dire que... j'ai souffert d'une crise de somnambulisme "cleptomanique", et que vous l'avez immortalisée en image ?

Son rêve surréaliste de la semaine dernière n'en était pas vraiment un ?
Hosoo réfléchissait intensément à la cachette où elle aurait pu ranger le matériel de Mélissandre, mais rien ne lui revint en mémoire...

- Vous me faites marcher, pas vrai ? Je ne suis tout de même pas stupide au point de vous... mais quoi ?!

De sa poche, Belle Maîtresse avait sorti une petite culotte dont elle était persuadée qu'elle lui appartenait. Une preuve matérielle, donc ! La matérialisation de son manque de pudeur, de surcroit.
La lycéenne eut un mouvement de recul.

- J'aurais commis une bourde pareille ? Moi, une ombre dans la nuit ?! Mais c'est complètement insensé !

Elle avait fait montre d'autant de négligence ? A un tel point ?!
Proprement Impensable - même pour une potentielle somnambule !
Hosoo n'en croyait ni ses yeux ni ses oreilles. Plus encore lorsque sa prof' remplaçante fit mention de son plaisir solitaire à côté d'une Mélissandre endormie. Laquelle n'ayant pas compris comment l'un de ses jouets avait fait pour quitter son sanctuaire.
Choquée, la lycéenne plaqua ses mains sur sa tête. Ses yeux étaient si grands ouverts qu'ils semblaient sur le point de jaillir de leurs orbites.

- Mais... mais... mais ! Le pire dans tout ça, c'est que je n'en sais foutre rien !

Frustrée, elle fendit l'air d'une geste de la main. Dans la continuité de son mouvement, elle se retrouva de dos par rapport à son enseignante... qui finit par se rendre compte qu'elle ne tenait plus la culotte. Hosoo l'ayant "récupérée" pour la renifler à son tour.
L'absence de son odeur la fit alors tiquer.
C'était un piège !
De nouveau, elle fit face à la rusée mère de famille.

- Ce n'est pas mon parfum !

S'écria-t-elle en brandissant le sous-vêtement.
Elle pointa du doigt la menteuse.

- Et n'essayez surtout pas de me faire croire que vous l'avez lavée !

Ce n'est pas parce qu'elle était diablement séduisante qu'elle pouvait la manipuler à sa guise.
Rejetant le menton d'un côté, Hosoo croisa les bras sur sa poitrine.

- Vous avez attendu une semaine pour me chambrer ? Pff ! Je mérite tout de même mieux que ça...

Si elle n'avait pas mieux en stock, la lycéenne était prête à lui faire la gueule. Et pour au moins une fichue semaine !
Pas rancunière pour un sou, la belle Hosoo.

[Lissandre Verrières]

Hosoo était rapide. Lissandre n'avait pas compris comment elle s'était faite dérobée la petite culotte. Elle se retourna et observa l'adolescente qui débutait sa crise. Ce n'était pas ça qu'elle recherchait. Ce n'était pas intéressant. Et ce n'était certainement pas excitant. Elles avaient toutes les deux fait grimper la tension sexuelle. Lissandre refusait que tous leurs efforts soient perdus pour une raison si stupide.

Alors ses yeux se posèrent sur veux de la "gamine". Elle ne méritait pas mieux en titre à ce moment. Lissandre joua de sa séduction passive. On lui avait déjà dit qu'elle pouvait "électriser". Si Hosoo n'y réagissait pas alors elle pourrait redescendre les marches et mettre fin à leur petite collaboration nocturne.

"Tu devrais retirer ton manteau..."

La voix était grave. Une voix maternelle. Une autorité de prof. Un sous-entendu clairement sexuel.

"Tu dois avoir chaud... Et puis, tu souhaitais me montrer ton corps, oui ?"

Lissandre s'approcha comme un félin. Lentement, autoritairement et sensuellement. Il y avait un danger dans cette femme enfoncée dans son latex moulant rose. Dissimulée, cette fois, derrière un manteau sombre.

Son doigt vint glisser sur la ceinture abdominale, cette peau à nue entre deux tons de noir.

"Chuuuut... Tu parles trop. Tu t'emportes trop vite. Quand tu te trouves avec une adulte, tu dois avoir un meilleur contrôle de toi."

Ses lèvres se rapprocherent de celle de la "boudeuse". Bien entendu, elle n'aurait pas ce baiser. Elle ne le méritait pas. Mais voir le visage de sa Belle-Maitresse si près devrait lui permettre de se reconcentrer sur l'essentiel.

"J'ai bien entendu tes provocations. J'ai bien compris que tu voulais à tout prix te retrouver très vite toute nue. J'aurai pu nous tricoter un scénario. Faire monter l'intensité vers un climax. Et tu sais ce qui arrive quand tu te laisses embarquer dans mon rythme. Nulle besoin d'aller interviewer la porte des toilettes du centre commercial, nous sommes d'accord ?"

Sa main glissa depuis ses lèvres, en passant par sa petite poitrine pour finir par se poser à nouveau sur ses abdominaux qu'elle exhibait si fièrement. Mais avant d'arriver au niveau de son nombril, il n'y eut jamais de contact. La main était là. Si proche. Et pourtant si loin. A peine un centimètre dair entre la pulpe de ses doigts et ses lèvres envieuses. A peine un centimètre pour ressentir le toucher de sa Belle-Maitresse au niveau de ses tétons. Rien. Parce que Lissandre devait reprendre le contrôle. Hypnotiser. Être une sirène ensorcelante.

"Alors nous allons aller dans ton sens. Tu vas retirer ton haut et ton pantalon. Et nous allons découvrir les surprises au-dessous. Et quand ce sera fait, nous grimperons enfin cette dernière marche et atteindrons le temple. J'espère que tu ouvriras tes jolies lèvres uniquement pour dire des choses pertinentes. C'est entendu ?"

Poser le pied sur le sol déclencherait alors les ennuis. Et ce serait TRES pertinent de prévenir sa Belle-Maitresse du danger. Mais pour ça, encore fallait-il qu'elle se soit laissée ensorceler et obéit à tout sans redevenir un moulin à paroles. Le genre de bâtiment qui brassair surtout de l'air...

[Hosoo Ienaga]

Le ton employé ne plaisait pas à Belle Maîtresse. Hosoo le comprit rien qu'à son regard, qu'elle lui renvoyait.
Voilà qui jette un froid...
Sa prof' allait s'en remettre. Elle était plus robuste qu'elle en avait l'air. Moralement parlant, en tout cas. La kunoichi ignorait ce que valait Lissandre Verrières dans un contexte martial. Et elle n'était pas très pressée de le découvrir.

- Retirer mon manteau ?

Le ton avait à nouveau changé. Belle Maîtresse avait retrouvé son costume. Son job à temps partiel.
Cette autorité fit trembler intérieurement la tout sauf sage lycéenne.
Celle-ci haussa les épaules, laissant tomber son manteau qui s'étala lourdement en travers des marches.

- Comment savez-vous vous ça ? Vous êtes médium ?~

Hosoo la laissa lui tourner autour. La caresser du bout des doigts au niveau de son ventre découvert.
En prenant cette attitude coquine, Belle Maîtresse aspirait à lui donner une nouvelle leçon.
La boniche était tout ouïe. Ses yeux fixaient ceux de sa supérieure... ou plutôt ses lèvres tentatrices.

- Okay ! Je me tais et j'écoute.

Ce qui pénétra dans ses oreilles lui rappela effectivement le moment culminant de leur dernière entrevue en un lieu propre, public et humide. Notamment cette fameuse porte que la plus jeune avait souillé sous le coup d'une trop vive jouissance.
Hosoo en conçut de l'embarras. Mais de façon modeste, attention ! Un peu de rouge sur ses joues jaunes.
Sauf que le grain de sa peau tendait à vouloir rejoindre les doigts de la charmeuse. Cette chair de poule presque douloureuse qui menaçait de la faire perdre tout contrôle. De par son caractère effronté, la lycéenne parvenait à conserver un pied ancré dans la réalité. C'était là ce que voulait combattre Lissandre pour la rendre esclave de sa personne.

- Je ne suis pas sûre de pouvoir récidiver. L'occasion était... assez particulière~

Elle se souvenait l'avoir implorée de lui brouter le minou en retour. Ce qui avait donné lieu à un refus, ainsi qu'à un douloureux moment de solitude sur la cuvette des toilettes.
Hosoo essayait donc de résister. De trouver le point d'équilibre qui lui permettrait de savourer pleinement cette relation exotique.
Belle Maîtresse exigeait qu'elle se mette en sous-vêtements. La maid eut un sourire narquois.

- Cela veut dire que je suis supposée pénétrer dans un temple dans mes plus beaux atours ?

Pour le délicat plaisir de Lissandre, son ensemble sportif avait chu à ses pieds, dévoilant une silhouette fuselée couverte par deux petites pièces. Un soutien-gorge et un string en dentelle rose bordés d'un imprimé floral ; de quoi apporter un peu de couleur et de vie à la jeune espionne, qui s'était indubitablement inspirée de la combinaison en latex de Belle Maîtresse.

- J'y suis retournée, lui confia Hosoo.

Juste au cas où l'idée de me recontacter vous aurez traversé l'esprit, ajouta-t-elle, avec un soupçon d'aigreur, en pensée.
Elle regarda de l'autre côté des marches.
Il y avait quelque chose là bas. Quelque chose qui lui était familier mais qu'elle n'arrivait pas à identifier...
L'influence de Lissandre avait un effet sur ses sens. Sur sa vigilance de kunoichi.

- Êtes-vous absolument certaine qu'il n'y a personne, par là-bas ? Parce que moi non.

Dans le doute, elle s'accroupit pour fouiller dans ses vêtements. C'était son épais manteau qui renfermait son précieux ninjato.
Belle Maîtresse allait-elle la laisser se promener avec pareil attirail ?

[Lissandre Verrières]

Hosoo bavassait et ça en disait long sur sa personne. Lissandre y décelait un manque de maturité tout à fait normal au vu de son âge. C’était aussi un manque de confiance en elle. Peut-être un caractère qui ne supportait pas le silence. Mais de ce dernier point, elle avait un doute. Rien que par la caméra de surveillance qui avait filmé une séance plutôt… « humide » dans la chambre de Mélissandre. Et il y avait aussi, évidemment, son côté ninja.

Mais son employée était obéissante et c’était un bon point. Qui plus est de découvrir le choix des sous-vêtements. Il fut mentionner rapidement l’endroit de l’achat mais Lissandre ressentit autre chose qui suivit. Ce ne fut pas formulé à voix haute. Elle mit cela sur un scénario qu’elle avait du se créer et qui n’était pas arrivé. Ou peut-être que l’actuel n’allait pas assez vite pour elle. Dans ce dernier cas, c’était elle qui gérait le rythme et elle savait y faire. Dans le premier cas évoqué, cela appartenait au passé et elle n’avait aucun pouvoir sur le temps. Elle n’avait aucun « pouvoir » tout simplement. (certes, en omettant l’allié passive de Mélissandre la combinaison symbiote rose fluo. Et surtout moulante aux yeux de la lycéenne qui pourrait finir par baver sur la plastique de sa Belle-Maîtresse ?)

« C’est un choix très pertinent. »

Lissandre s’était approchée. Elle avait eu la volonté de laisser glisser le bout et seulement le bout de son doigt sur la menue poitrine de sa protégée. Mais cette dernière avait « encore… » décidé de changer leur dynamique. Après la menace qu’elle avait représentée, elle en évoquait une au sommet non loin du temple.

« Qui te dit que je suis venue seule ? Tu m’en voudrais si j’étais venue avec Mélissandre ? »

Ce qui n’était pas le cas. Et de la façon dont elle l’avait présenté, Hosoo le comprendrait. Et même si elle pouvait apprécier une jolie jeune femme en petite tenue et tenant une arme : la voir rechercher son ninjato dans sa veste continua à fissurer l’ambiance qu’elle avait posé marches après marche. Tout allait éclater au sommet ? Ca ne lui plaisait pas. Et elle perdit de sa superbe sur son visage. Plus de sourire aguicheur. Même cette « luminosité » joviale qui la caractérisait avait gagné quelques teintes du côté terne.

« Je suis déçu. Tu doutes. Tu me résistes. Mais pire que tout, tu m’as menacé et tu as amené une arme. Tu croyais quoi ? Que j’allais… »

Son pied se posa sur le sol au sommet.

« …t’attaquer ? »

Son deuxième pied quitta totalement les marches et alors l’oni jaillit. Trois mètres démoniaques. Il marchait d’un pas assuré. De ceux qui savent qu’il n’y aura aucune adversité devant eux. Ce lourd kanabo rouge posé sur son épaule. Il tenait l’arme d’une seule main comme si elle ne pesait rien. Et ce rictus… Ces longues canines qui lui ressortait de la gueule comme on les imaginait ficher sur l’archétype des trolls bleus. Mais lui était rouge. De faciés. Et du sang qu’il allait faire couler.

« Quoi ?! »

Il y eut un rire de la part de l’oni.
Sa combinaison symbiote tremblota : elle avait senti le danger. Il fallait protéger Maman Lissandre !

« Mais ! »

Un tentacule rose frappa au niveau de la cheville de l’oni. Un tentacule qui paraissait être une extension de la combinaison de latex. Mais peu importait le pourquoi du comment à ce moment. Lissandre n’était pas une guerrière et il valait mieux que cette version de Mélissandre ne combatte pas trop… (…cthulhu… ….) Il fallait se concentrer sur le fait que, si la cheville de l’oni était toujours en place : la blessure le ralentirait.

Même avec la peur fichée au ventre, Lissandre s’interposa entre elle et sa protégée. Ses bras s’ouvrirent de chaque côté, comme si cela permettait de déployer un bouclier résistant. Il n’en était rien. Mais Lissandre avait un fort insinct maternel maintenant. Et il importait peu qu’Hosoo soit arrivée récemment dans sa vie : d’une manière ou d’une autre, elle faisait partie de sa famille.

!!! SPECIAL !!! 13/13
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« Le Cœur.

Celle qui rassemble.

Celle qui est recherchée par le Baron Kowai et son Cirque.

Celle qui est aussi recherchée par les Araignées Supérieures via la SpiderWitch.

Celle qui s’acoquine avec les démons.
Celle qui adopte des enfants des Grands Anciens, à savoir les slimes.
Celle qui passe un marché avec une vampire pour obtenir le pouvoir de voyager à travers tous les mondes.

Celle qui n’étiquette pas le monde par une couleur de peau, de race ou de préférence sexuelle.
Celle qui vit à fond en étant le personnage principal de sa saga.

Celle qui porte une tenue moulante de latex rose.
Le rose romantique.
La magie rose sexuelle.

La femme.
Plaisir de donner et recevoir.

La mère.
Instinct maternel et protection.

L’exploratrice.
De la villa Verrières au multivers.
En passant au temps présent par le manoir Warren pour un jour futur poser ses pieds dans la Taverne.

Un nœud dans la Grande Tapisserie.

Une « simple » femme. »

.

[Hosoo Ienaga]

Hosoo sourit. Elle avait le sentiment d'avoir marqué des points ! Ou plutôt d'en avoir récupéré. Cette rencontre là n'était pas comme les autres ; elle possédait un petit quelque chose de compliqué. Probablement que l'instinct de la chasseuse de démons n'aidait pas à alléger cette atmosphère mystique ? Heureusement pour Belle Maîtresse, la lycéenne n'était pas totalement sur ses gardes. Sans quoi elle n'aurait pas retiré ses vêtements...

- Merci pour votre généreuse appréciation~

Puis la récupération du ninjato. Retour à l'instinct guerrier que sa professeure ne comprenait pas. Encore une fois, cela se voyait à son visage. L'absence de ce sourire mutin qui, hélas, la vieillissait plutôt qu'autre chose.
Lissandre Verrières avait du mal à apprécier la chose. Hosoo la sentait sur le point de partir. De laisser tomber.
De la laisser tomber.

- Non, attendez !

Hosoo ne se laissa pas distancer. Elle grimpa le peu de marches qui les séparait et... le vit.
Cet oni armé d'une massue garnie de pointes.
Je le savais !
D'emblée, son visage s'était assombri.

- Tch ! Vous comprenez pourquoi, maintenant ?

La kunoichi s'apprêta à entrer en mouvement quand la combinaison de Lissandre la prit de court. Un tentacule rose en jaillit, frappant le monstre musculeux à la cheville. Ce dernier n'eut guère le temps d'abaisser son arme ou même de bouger la jambe. L'attaque était aussi vive que celle d'un serpent.
Ça, par contre, je ne l'aurais jamais cru possible.
Mais il était bien trop tôt pour s'extasier sur le système d'auto-défense de cette combinaison flashy : le monstre au visage grimaçant n'avait pas été mis hors d'état de nuire !
Belle-Maîtresse se plaça sur sa trajectoire, les bras levés au-dessus de ses flancs comme pour la protéger.
La kunoichi eut un sourire en coin.

- Ce ne sera pas nécessaire, professeure.

L'instant d'après, elle disparut de derrière son dos. D'une impulsion, Hosoo avait filé sous ses bras pour se retrouver à la hauteur du démon ! Du moins... plutôt à celle de son ignoble faciès. Soit en suspension dans l'air, les jambes fléchies en une posture dynamique, avec la lame de son ninjato ramenée en arrière.

- Tu as vraiment une sale gueule !

Avec des mouvements trop rapides pour être captés par un œil humain, la kunoichi frappa deux fois. En croix !
Hosoo retomba souplement aux pieds de l'oni. La scène semblait s'être figée.
La Chasseuse de démons n'avait pas cessé de sourire.

- Par bonheur, je suis toujours là pour arranger ça.

La marque de son tranchant véloce s'imprima brutalement entre les yeux de guerrier maléfiques ! De l'ichor à haute pression en jaillit. La tête du diable bascula en arrière.

- Ne descendez pas de cet escalier, madame Lissandre. Je sens qu'il y en a d'autres, dans les parages...

C'était aussi son job de la protéger. De faire le ménage pour elle.
Elle s'était remis en garde. Accroupie, un bras plié devant son visage. Main au bout de laquelle s'étirait son acier meurtrier, qu'elle tenait à l'envers.

- N'inversons pas les rôles : c'est à votre employée de vous protéger !

Elle repartit à l'assaut, tournant autour du géant furieux comme un insecte insaisissable. Celui-ci n'eut d'autre choix que de la cibler, elle, l'enquiquineuse au sabre. Car son tranchant continuait de le faire saigner comme s'il se trouvait au cœur d'une tempête ! Mais à chaque fois qu'il abattait sa matraque, seule la pierre volait en éclats. Des éclats qui se mêlaient à ses effusions d'hémoglobine.
La légèreté de son adversaire lui portait préjudice.

[Lissandre Verrières]

Partagée était un excellent mot pour définit l’état d’esprit de Lissandre. Il y avait une menace très sérieuse face à elles deux. Mais ce n’était plus si « nouveau » que ça. Non qu’elle rencontrait des démons à tous les coins de rue aussi souvent que le marché revenait toutes les semaines. Et il n’était pas question de revenir sur son CV récent et ses rencontres démoniaques. Hosoo pourrait apprendre tout ça en temps et en heure.

Donc il y avait la menace démoniaque d’une part. Et de l’autre part, justement, Hosoo. Son élève. Son employé. Une femme encore fille mais plus vraiment non plus. Prise entre l’adolescence et l’âge adulte. Et tout à fait capable de prendre soin d’elle. Son arme et sa façon de bouger en attestait. Ce qui devait beaucoup infléchir sur l’inaction de Lissandre qui était pourtant nanti d’une slime dans sa combinaison parfaitement capable de se débarrasser de l’oni.

*Sauf que voilà, avec cette distance, je ne peux pas m’empêcher d’apprécier cette lingerie rose en mouvement. C’est… un peu comme un retour en arrière. Quand j’étais plus jeune, il y a quelques années, et que je voulais révolutionner le porno. En créant de longs films, ou des séries à succès, mêlant habilement fantasy et porno. Elle… est parfaite ? Est-ce que, dans un moment complètement inopportun, je suis en train de vraiment me demander si je ne devrais pas la faire tourner ? *

Son corps entra en action. Ce fut plus fort qu’elle. Il y avait là une opportunité en or. Ce fameux terme qui revenait de plus en plus souvent. Avec une majuscule. Mais pas aujourd’hui. Pas maintenant alors que Lissandre sortait son téléphone portable de son manteau charismatique pour commencer à filmer la scène.

« Fais attention ! »

Son cœur avait battu si fort. C’était stupide. Lissandre n’avait pas craint pour la vie d’Hosoo. Elle avait craint que l’arme de l’oni déchiquette le soutien-gorge. Ouf, il n’en était rien.

Et puis, petit pas après petit pas, elle commença à faire le tour des deux combattants. Parce que ça rendait toujours bien une rotation autour d’un combat.

Sans réaliser que, ce faisant, elle se rapprochait des différents acteurs du Cirque. Mais ceux-là ne comptaient pas rentrer en action. Pas maintenant. Bien que… il serait si facile pour eux de la capturer. D’emmener « le Cœur » auprès du Baron Kowai. Dans ce territoire de ténèbres où les couleurs n’avaient pas leur place.

Non. Pour le moment, c’était Hosoo VS l’oni.

« Si tu pouvais te réceptionner proche de moi, ce serait super pour faire un gros plan sur ton corps. Si dynamique ! Si musclé ! Si photogénique ! »

Lissandre s’immergeait totalement dans sa lubie de jeunesse. Et elle se savait protégée au cas où elle ferait n’importe quoi. Son « bébé » était à l’affût. Elle le sentait en elle. Elle était mécontente. Et inquiété. Et affamée. Car ce genre de slime se nourrissait généralement de sucreries et de sexe. Et elle reprenait sa casquette de réalisatrice de X. Donc dans une partie de son esprit, au-delà du danger de la situation, il y a avait une partie d’elle qui fantasmait sur ce que pouvait être la verge d’un oni et comment il s’en servait. Elle en était encore à se demander si… non. Elle voulait que ce soit elle qui accueille ce mandrin en elle.

*Stupide Lissandre : hi hi ! *

« Allez Hosoo ! Je te promets un nettoyage et un massage en cas de victoire ! Bien entendu, ce sont mes mains sur ton corps ! Hi hi ! »

[Hosoo Ienaga]

La Chasseuse de démons attaquait avec la volonté de tuer. Mais pour abattre pareille montagne, elle devait d'abord fragiliser l'édifice. Générer à sa surface des failles plus importantes. Raison pour laquelle sa lame zébrait si rapidement le monstre, à des endroits clés, sans pour autant parvenir à le faire tomber. Malgré sa célérité, la kunoichi se voulait avant tout très patiente. Elle n'avait pas peur de se prendre un mauvais coup. Elle ne paraissait aucunement gênée par la présence de sa professeure qui, de toute manière, en savait déjà trop sur ses "hobbies".

- Je gère.

Mais l'avertissement de son employeuse ne la visait pas elle, en particulier ; c'était l'état de son accoutrement qui préoccupait celle qui, dès lors, la filmait avec son portable.
Dans un moment pareil ?
Oui, tout à fait !
Alors que le monstrueux démon japonais luttait pour conserver son équilibre, que son corps balafré par endroits dégoulinait d'un sang mauvais, Lissandre Verrières jouait carrément les caméramans.
Par-dessus son épaule, Hosoo lui jeta un regard confus.

- Est-ce que vous vous rendez bien compte de ce que vous me demandez ?

Forcer une acrobatie afin de retomber avec un parfait contrôle entre la maniaque du cinéma et l'autre mastodonte armé d'une fichue massue !
Les yeux de sa professeurs ressemblaient à ceux d'une fanatique ; ils étaient si ronds que l'on eût l'impression qu'ils étaient sur le point de jaillir de leurs orbites. En revanche, le ton qu'elle avait utilisé était très plaisant à l'oreille. La kunoichi y avait perçu une généreuse dose d'admiration. Et cela, venant d'une ancienne actrice porno à gros palmarès, l'excitait dangereusement.
Ajoutez à ce tableau la promesse d'un nettoyage et d'un massage et alors...
Le regard de la Chasseuse de démons flamboyait.

- Je fonce lui faire mal avec style !

Bien sûr : l'oni n'en avait cure de toutes ces imbécilités ; il frappa comme un sourd, pulvérisant les pavés où son adversaire avait fait une bien sale promesse. Cette dernière n'avait pas été faite en l'air, par contre. Seule Hosoo s'était "envolée", avec sa détente incroyable et sa grâce aérienne. Son ninjato siffla au moment de la retombée. Deux coups nettes, quasi invisibles, qui eurent pour effet disgracieux de sectionner le bras armé du colosse au niveau de l'articulation du coude.
Il ne put réprimer un râle de douleur.
Le genre à faire sourire perversement une sadique qui tenait les cornus en horreur !

- Il te reste un bras pour te défendre. Tu es sûr de ne pas vouloir l'utiliser ?

Le sacrifier aurait été un terme plus adapté. Mais le géant était trop en rage pour se soucier des mots et de leurs nuances. Il avait entrepris de piétiner la kunoichi. Sauf que celle-ci avait bondi en effectuant un joli salto arrière, pour finalement retomber sur son énorme genou avant de sauter de plus belle ! A l'aune de son bond, elle trancha l'air. Un revers létal et précis, qui dessina une large fente sous le menton relevé du démon. Lorsque ce bourru imbécile émit un gargouillis étouffé, Hosoo atterrit pile à cet endroit que lui avait recommandé Belle Maîtresse.
Encore accroupie, sa lame ramenée dans son dos, elle lâcha :

- Je ne l'ai pas épargné non plus~

Peu de temps après sa réplique, le bras restant de l'oni chut à ses pieds dans un bruit mat.
Hosoo profita de son énième éclat de douleur pour se tourner vers sa professeure et, d'une main, lui adresser le "v" de la victoire non sans lui décocher un clin d'œil.

- Pour celui-là : terminé l'autosatisfaction !

Tout suffocant, incapable d'endiguer cette fuite colossale, le démon finit par s'écrouler lourdement dans son propre jus.
Sa tueuse se redressa élégamment et, d'un coup de bras, débarrassa sa fine lame de l'ichor noir, éclaboussant de ce fait l'allée qui menait aux portes du temple.

- Un de moins.

Elle y avait pris un certain plaisir. Mais pouvait-on le comparer à celui de la vicieuse preneuse d'images ?
Ses sens toujours en alerte, Hosoo étudiait tout de même sa réaction du coin de l'œil.

[Lissandre Verrières]

Hosoo était parfaite ! Lissandre avait laissé échapper un rire de folie. Parce que ça ne pouvait être que ça : de la folie. L’une voulait filmer son élève en pleine bataille avec un immense démon. Et l’élève répondait positivement en lâchant une petite punchline. « Lui faire mal avec style ! » ? Il ne fallait pas être totalement saine d’esprit pour vouloir chorégraphier une bataille à la vie à la mort sans filet de sécurité. Et sans préparation.

« Wow ! »

La caméra avait tremblé sous le choc de la surprise. Ce n’était pas tous les jours qu’on assistait à un bras qui tombe. Ce n’était pas normal, de toute façon. Même s’il s’agissait d’un démon. Pourtant, Lissandre n’en fut pas plus horrifiée que cela. Probablement dû à son train de vie incroyable de ces derniers temps (depuis sa rencontre avec sa femme Fönn). Et aussi parce qu’elle était excitée et que son élève aussi. Et que ces deux excitations semblaient se nourrir l’une l’autre. Par contre, mieux valait ne pas parler de cercle vertueux pour cette situation…

Hosoo avait atterri à l’endroit parfait. Lissandre avait tout enregistré. Et alors que la guerrière s’auto-congratulait, une pulsion tenailla et fit agir avant que la raison ne s’installe. Une main vint se poser derrière le crâne, ramenant les lèvres de l’étudiante vers celle de sa professeure pour un baiser passionné. Le tout avec son autre main qui ne perdit rien de cet instant érotique. Car cette main tenait le téléphone portable qui continuait à tout enregistrer.

« Tu es exceptionnelle, Hosoo. Je suis ravie d’avoir investi mon temps sur toi. Et je te promets que tu ne le regretteras pas. »

Elle l’embrassa une seconde fois. Mais chastement. Il y eut vraiment juste un contact entre leurs lèvres. Rien à voir avec le précédent baiser qui avait vu les langues s’entortiller. Leur souffle manqué. Et leur salive partagée.

(et peut-être aussi qu’Hosoo avait réalisé, durant ce baiser, une « troisième » main qui l’avait caressé. Lissandre étant excité, la Mélissandre qui était sa combinaison moulante de latex rose en avait profité pour commencer à « manger ». C’était après tout en grande partie une slime dont le régime était à base de sexe)

Il y eut alors quelques notes provenant d’une contrebasse…
L’obscurité sembla gagner en épaisseur.
Dans les ombres aux alentours de l’unique tente, des tâches de couleur. En réalité des ballons. Non, en réalité : des têtes…
Et puis un homme sortit et se présenta aux deux femmes qui venaient de s’embrasser. Il s’introduisit sous le nom de Livide.

Livide : « Belle soirée, mesdames. »

Il y alla même d’une courbette élégante. Il était habillé tout de blanc. Les pompons sur son vêtement. Son attitude. Beaucoup de détails faisait penser au clown blanc. Blanc, livide. Peut-être était-ce de là qu’il avait choisi son nom. Un nom de scène très probablement. Il se releva et darda de ses yeux… rouge ? Lissandre. Puis Hosoo. Et revint sur Lissandre. Cette dernière, au vu du maquillage de traits noirs barrant ses yeux, pensa que la couleur de ses yeux devaient provenir de lentilles.



Livide : « Il va être temps de nous accompagner, mesdames. »

Ses mains si gracieuses, toujours dans les airs. Les extrémités de ces mêmes mains venaient de noircir, non ?...

Livide : « Le Baron Kowaï désire s’entretenir avec le Cœur Rose. »

C’était une évidence maintenant. Il n’y avait pas que les extrémités de ses mains qui avaient noircis. Tout l’être de Livide noircissait. Son sourire n’était plus agréable. Comme s’il avait baissé le masque. Il n’y avait pas que ça. Le blanc de ses yeux n’étaient plus. Le blanc était devenu noir. Ce ne pouvait donc pas être des lentilles…

*Sa joue… C’est un détail que je n’avais pas vu ? On croirait que sa joue va s’ouvrir en deux sur une gueule monstrueuse… *



Livide : « Mesdames, si vous refusez de coopérer, nous serons obligés d’utiliser tous les moyens que le Cirque a à sa disposition. »

Les quatre clowns n’étaient pas présents pour un spectacle divertissant. Ils étaient devenus ses figures de cauchemars vivants. Et c’était sans compter Livide qui venait de parachever sa transformation ? Sa gueule s’était ouverte en deux pour une dentition cauchemardesque. Son manteau lui-même semblait être une mimique. Car de ses deux épaules avaient naquis deux gueules.

Le plus petit des quatre clowns étaient déjà à un mètre de la guerrière estudiantine. Il s’était approché si rapidement à l’aide de ses pirouettes. Il semblait inoffensif. A cause de sa taille. Mais ses yeux paraissaient immobiles. Un regard à la Adams. Quoique, il paraissait finalement plus poupée vivante qu’autre chose.

[Hosoo Ienaga]

Les lèvres de Belle Maîtresse tombèrent sur les siennes d'un seul coup ! Cette prof-là pouvait se montrer extrêmement rapide dans des conditions pareilles. Hosoo n'avait pas chercher à l'éviter. Elles ne s'accordaient que trop bien, entre folles lubriques.

- Hmnnnh~

Après lui avoir jeté un regard langoureux, Hosoo déplaça ses yeux chauds sur l'objectif du smartphone qui la filmait toujours. Elle se passa même la langue sur les lèvres telle une gourmande prête à en redemander. La bouche de sa professeure l'attirant comme une guêpe avec le sucre.

- Oh, mais je ne le regrette déjà pas, Belle Maîtresse ! Bien au contraire~

Le plaisir de son enseignante faisait également le sien. Ses attentes ? Les siennes aussi !
Elles s'embrassèrent encore une fois. Un doux baiser, cette fois-ci. Beaucoup plus bref. Plus sage.
En parallèle, Hosoo sentit confusément quelque chose la toucher, plus bas. Là où les mains de sa professeure, occupées à la frotter ailleurs, n'auraient pu la caresser. Un peu étrange mais...
Pas désagréable.
Un son insolite résonna dans l'air. Comme une plainte grave, avec une touche musicale.
La kunoichi darda son regard vers ce qu'elle s'imaginait être l'épicentre de cette bizarrerie. Là-bas, l'obscurité semblait avoir gagné en volume, en consistance... Des ombres rondes et inquiétantes s'y découpèrent paresseusement. En gagnant en couleur, elles s'affirmèrent, s'imposant à leurs yeux sous la forme de ballons flottants.
Animée par son instinct de survie, Hosoo se plaça tout de suite devant Lissandre Verrières.
Un clown au visage blanc comme neige sortit des ténèbres, se présentant à elles sous le nom de Livide.

- Personne ne s'appelle comme ça, marmonna la lycéenne entre ses dents. C'est un pseudonyme.

Ce "belle soirée" qu'il leur avait souhaité en guise de salutations sonnait faux. La tueuse de démons fronça les sourcils, adoptant une posture défensive plus ramassée. Elle était prête à bondir. A user de sa vélocité pour trancher cet énergumène qui ne lui inspirait rien de bon.
Elle en eut la conviction en l'entendant leur demander - exiger ? - de les accompagner.

- Même pas en rêve, grogna-t-elle.

Leur interlocuteur avait commencé à se transformer. Du côté de ses extrémités, notamment. Un noir de plus en plus profond. De plus en plus étouffant. Le clown avait délaissé son sourire factice, lentement remplacé par une expression située entre la tristesse et la déception...
Il avait dit quelque chose au sujet d'un Baron (Kowaï) et d'un Cœur Rose.
Méfiante, Hosoo n'osait pas le quitter des yeux pour consulter sa compagne qui répondait parfaitement à ce critère coloré.

- Vous connaissez ce drôle de type ?

Elle en doutait fort !
Les yeux du clown, d'un rouge déjà très atypique, s'étaient rempli d'un noir d'encre.

- Ce truc est définitivement malfaisant...

La menace était à la fois réelle et cauchemardesque. Elle avait d'ailleurs continué à muter en quelque chose d'asymétrique, de proprement infernal ! Des gueules dentelées ayant poussé un peu partout sur ce costume ridicule. A la place de la collerette, des épaules et...
Sa bouche s'est élargie ? Ce ne sont plus des dents mais des crocs que je vois là !
Un monstre - voilà ce que le clown grimaçant était devenu.
Hosoo s'aperçut qu'elle avait été hypnotisée par son apparence. Ce qui avait permis à l'un de ses camarades - le plus petit - du Cirque de l'approcher. Un mètre. Seulement cent petits centimètres séparaient cette nouvelle menace du duo féminin !

- Tsss ! Hors de ma vue.

Sans plus se poser de question, la kunoichi trancha dans le vif ! Sa lame décrivit un arc de cercle mortel, fauchant l'image résiduelle de ce clown haut comme trois pommes ; le vrai - l'authentique ! - s'étant dévié sur une fulgurante pirouette. C'est tout juste si le regard de la chasseuse de démons, pourtant surentraîné, était parvenu à le suivre.
Aussi petit que rapide.
Ce n'était pas bon signe.
Le nain peinturluré et le clown monstrueux n'étaient pas seuls ; deux autres spécimens du même acabit les accompagnaient. Un musicien masqué ainsi qu'un troisième bouffon sans tête. Ce qui n'était pas tout à fait vrai : une multitude de ballons colorés - ceux qu'elle avait discernés dans cette dense obscurité - étaient raccordés par des fils au centre de sa collerette.
Toujours sans oser détourner le regard de ce spectacle incongru, Hosoo demanda à sa professeure :

- Alors ? Vous m'en voulez toujours d'avoir amené une arme avec moi ?

Elle souriait jaune.
Qui attaquer en premier ? Le musicien, le nain, l'homme-ballons ou bien le nain super rapide ?
Petit problème : la kunoichi ne pouvait pas se permettre de quitter son poste ; avant toute chose, elle voulait protéger le "Cœur Rose".

[Lissandre Verrières]

Hosoo lui demanda si elle connaissait ce clown qui se faisait nommer Livide.

« Je ne le connais pas. »

Les réponses les plus concises étaient les meilleures dans ce genre de situation.

Voilà qu’une espèce de clown-mimique se faisait voler la vedette par un petit clown très rapide quand il ruait en mode « ballon ». Avant de revenir vers le reste du groupe dont l’un d’eux, justement, avait des ballons pour têtes. Au pluriel. Sans compter cet autre qui jouait une musique pesante. Etait-il comme ce batteur dans les galères ? Il allait imposer un rythme à ses alliés et plomber le moral de ses ennemies ?

« Il faudra qu’on reparle de cette arme que tu apportes en « date ». »

Même dans cette situation, il n’était pas question de se reposer complètement sur Hosoo. Certes, Lissandre ne la sous-estimait pas. Il aurait été insensée de sa part de le faire après l’avoir vu combattre et vaincre l’oni géant. Mais il n’était pas question de cesser leur « petit jeu de rôle » non plus. Surtout que, sans être une combattante, Lissandre avait les moyens de se défendre. En fait, elle avait même moyen de laisser Mélissandre prendre le contrôler et d’attaquer.

Livide : « Vous parlez, vous parlez et vous n’obéissez pas… »

Quelques mots et le clown-aux-gueules avait rattrapé l’attention des deux femmes. Chacun de ses mots semblait apporter davantage de ténèbres à l’arrière-plan. Chacune de ses interventions semblait aussi appesantir l’air. Etait-il un véritable poison pour ce monde ? Un vecteur poisseux pour que le mal s’écoule et noie tout de sa boueuse substance ?...

Livide : « Roule-ta-boule, occupe-toi de la tueuse de démon. »

Le plus petit des clowns sauta droit à la verticale. Ce faisant, il gigota des pieds dans les airs pour exprimer son contentement. Il possédait presque un côté toonesque. Mais à côté du maléfique Livide, sa normalité le rendait d’autant plus effrayant. A la façon de ces lieux vides, cette nouvelle mouvance des « backrooms ». Ses deux petits yeux bleus fixèrent Hosoo.

Les yeux bleus étaient encore au loin. Et pourtant les réflexes d’Hosoo la prévinrent qu’il ne fallait plus se fier à sa vue ! Un instinct salvateur lui permit de faire un bond et de se retrouver hors de sa portée. Fort heureusement, le ridicule ne tuait pas. Car le fameux Roule-ta-boule, bien très (trop !) proche en demeurait…inoffensif ? Où était l’arme mortelle ? Ce petit visage fiché dans une expression souriante, ces petites mains si vides… Où était le DANGER ?!

Plus loin, Livide observa l’évolution de cette situation en se pourléchant sa gueule de monstre non pas d’une langue perverse, mais de deux. Il s’adressa alors au clown musicien.

Livide : « Maestro, joue-toi de ta marionnette et va me capturer le Cœur Rose de vos pattes à tous les deux. »

Tous les deux ? Quelle étrange erreur alors que…non. Livide n’avait pas commis d’erreur. L’énorme basse se…dépliait. La partie métallique qui touchait le sol était sculptée d’une tête qui…ouvrit ses yeux ! Le derrière de l’instrument de musique déployait quatre paires de pattes. Pourquoi fallait-il toujours qu’il y ait des araignées ? Pas seulement une araignée. L’instrument était une véritable chimère. Déjà parce que la tête de fer était humaine. Et aussi parce que le manche devint une queue recourbée à l’image d’un scorpion. Queue qui présentait aussi un visage, mais celui d’un crâne. Une tête vivante et une tête morte ? Mieux valait se méfier des deux opposés.

Les mains de Maestro étaient tendus dans les airs. Selon comment la lumière s’infiltrait, on pouvait discerner les fils du marionnettiste reliés à la chimère musicale. Cette dernière s’élança vers Lissandre !

Nulle crainte pour Hosoo qui devait gérer Roule-ta-boule. Mélissandre vint au secours de sa maman et se déploya. La combinaison moulante de latex rose devint vivante et des tentacules de la même matière et couleur fouettèrent l’air entre le précieux Cœur Rose et la chimère faite de bois et de métal.

[Hosoo Ienaga]

Belle Maîtresse lui reprochait toujours d'avoir apporté son ninjato ? Malgré les circonstances, elle n'avait pas l'air prête à lâcher le morceau.

- On en reparlera, confirma la kunoichi. Si l'on survit à votre "date".

Elle n'était pas dupe. Leur situation n'était pas à prendre à la légère.
Et cette lourde musique que jouait l'autre spécimen de foire, à l'autre bout du temple...
Je n'aime pas du tout cette atmosphère.
Livide n'arrangeait rien non plus ! Ce personnage était devenu monstrueux aussi bien de corps que de voix.
Il attendait "naturellement" que ses proies lui obéissent bien gentiment.
Il ordonna à "Roule-ta-boule" de s'en prendre à Hosoo. Le petit clown rondelet avait l'air très excité à cette idée.

- Ton nain a beau être rapide, il ne me fait pas p-... ?!

Mue par un réflexe de survie, Hosoo bondit souplement en retrait. Il lui avait suffit de croiser le regard de Roule-ta-boule pour sentir un danger imminent. Sauf que ce même danger avait cessé de remuer et, finalement, ne l'avait pas attaquée.
Mais alors c'était quoi, ce ressenti ?
Accroupie au sol dans une position défensive, elle grogna quelque chose d'inintelligible entre ses lèvres pincées.
De son côté, Livide donna de nouveaux ordres. "Maestro" entra sur la piste de danse. Il lâcha son instrument, qui s'avérait être une sorte de marionnette à l'effigie d'une bête chimérique possédant une queue repliée comme celle d'un scorpion. Hosoo discerna les fils quasi transparents qui reliaient l'instrument muté aux mains du musicien polyvalent.

- Soyez extrêmement prudente, souffla Hosoo à son employeuse.

Lissandre Verrières était prévenue. Sa combinaison moulante répondit aussitôt à l'agression du pantin diabolique. Elle défendait sa porteuse à base de contre-attaques tentaculaires ! Un spectacle saisissant auquel la kunoichi ne pouvait pas assister.
Roule-ta-boule se repliait déjà sur lui-même, formant avec son corps une sorte de boulet de canon.
Hosoo le vit s'élever dans les airs comme un fantôme. Il y eut un moment de flottement avant que la boule clownesque ne lui fonce dessus.

- Bon sang !

De justesse, elle s'esquiva. Le projectile vivant fila comme une flèche, déchirant un tentacule rose au passage, avant de s'arrêter net en dépit des lois de la physique et de se tourner vers sa cible.
J'aurais dû apporter mes kunais.
Toujours avec la même célérité, son ennemi revint à la charge. La tueuse de démons se remit en mouvement, cavalant avec agilité à travers le temple. Par moments, elle fendait l'air de son sabre. Mais Roule-ta-boule mesurait bien chacune de ses trajectoires, évitant la lame effilée avec une adresse proprement consternante.
A ce rythme-là, je vais m'épuiser inutilement.
Hosoo ne voyait plus qu'une seule solution : l'utilisation du Ka-jutsu.
Peut-être qu'en incendiant ce boulet de canon, elle parviendrait aussi à le faire exploser ?
Pour obtenir pareil résultat, la tueuse de démons allait devoir se concentrer très fort. Sauf que, d'une part le temps lui manquait pour ce faire, d'autre part des ballons suspects avaient commencé à s'éparpiller un peu partout au-dessus de la zone.
L'œuvre du dernier collaborateur de Livide, sans doute !
Que leur préparait-il donc, ce maudit fourbe ?

[Lissandre Verrières]

Pour le moment, la combinaison slimesque de Lissandre donnait le change au monstre chimérique. Les pattes de l’inquiétant instrument de musique muté s’opposait aux tentacules de latex rose. Une parfaite représentation entre le Bien et le Mal. Non que Lissandre était un modèle de pureté. Sa carrière dans le monde de la pornographie était déjà une belle éraflure sur cette « armure de pureté ». Mais le rose flashy s’opposait au bois ténébreux. Visuellement, c’était fort.

« Essaie de sectionner les fils de contrôle de la marionnette ! Ah ! Je parlais à Mélissandre, pas à toi Hosoo ! »

C’était la pression du combat qui avait déclenché une réaction de la sorte. Habituellement, Lissandre parlait via une sorte de télépathie avec son symbiote. Mais elle s’était exprimée à voix haute et la finalité avait été de déconcentrer sa partenaire. Avec un adversaire aussi petit que rapide, le moindre retard dans les réactions de la ninja-maid pourrait être… fatal. Leurs adversaires attaquaient avec la volonté de tuer.

Lissandre détestait quand elle se retrouvait ballotée ainsi. Elle n’était pas une guerrière. Heureusement tout de même que, malgré sa vie « exceptionnelle » récente, elle s’était très peu retrouvée dans des batailles. Mais à sa manière, elle était elle aussi une marionnette. Au lieu de fil, c’était des tentacules qui la faisait bouger dans une direction puis une autre. Heureusement qu’elle n’en était pas malade.

*Infiltre toi sous les pierres du sol. Prends notre ennemi par surprise, ma Mélissandre ! *

Le latex rose s’étira et plongea dans le sol. Mais il y avait tant de tentacules en action, pour attaquer, pour défendre, pour se déplacer, que le dénomme Maestro ne vit pas la stratégie s’enfouir et progresser sous leurs pieds à tous. La statégie fonctionna ! En se relevant soudainement, le latex affûté comme une lame de katana trancha tous les fils de la main droite. La créature chimérique était à moitié opérationnelle. L’autre moitié se cassa la gueule et… dans un geste imprévisible, une patte s’enfonça dans la cuisse de Lissandre…

Elle se retint de hurler. En partie parce que l’adrénaline combattait le système nerveux. En partie aussi parce qu’elle luttait contre Mélissandre qui devenait folle de rage. Lissandre devait la calmer. Elle savait qui était son effrayant ancêtre. Shoggoth. (hrp : petit doute. Il me semble que c’est un nom composé que m’avait donné Alice) Une entité aux proportions indicibles. Un vecteur de chaos. Et Mélissandre commença à devenir incontrôlable. Elle enfla. Les tentacules perdirent de leur « belle forme ». La consistance devint chaotique.

« Hosoo ! Prends garde à nous ! Mon bébé passe en mode berserk. J’essaie de la calmer ! Mais fais attention à toi ! Je suis désolé ! »

Le Maestro était toujours vivant. Son arme-marionnette privé de la moitié de sa mobilité et de son efficacité.
Roule-ta-boule possédait une vitesse surnaturelle.
Les têtes-ballons étaient en place dans le ciel nocturne comme d’inquiétants satellites.
Et Livide observait tout cela avec un rictus effrayante et large. Même la perte de contrôle de la slime ne l’avait pas fait reculer. Il paraissait comme un chef d’orchestre et un spectateur. Cette passivité le rendait étrangement d’autant plus effrayant et menaçant…

[Hosoo Ienaga]

Mélissandre ? Belle Maîtresse s'était adressée à sa fille ainée ? Hosoo ne la voyait pourtant nulle part, dans les parages ! Elle avait tout de même arrêté son regard suspect sur la combinaison de sa professeure. Le seul outil qui lui permettait de tenir tête au Maestro et à sa maudite marionnette...
Elle portait du rose, la dernière fois que je l'ai vue. Un vêtement moulant, très près du corps, semblable en tous points à celui de sa mère, réfléchit la kunoichi. Mélissandre n'est pas humaine - ça je l'ai bien compris. Mais la découvrir sous cette forme ? ainsi collée au corps de sa mère ?
Hosoo avait encore un peu de mal à y croire. Mais la menace des ballons, plus pressante, l'inquiétait bien davantage que les étonnantes particularités de la maison Verrières.

- Il va effectivement falloir qu'on discute, toutes les trois, grommela-t-elle en conservant son principal adversaire dans sa ligne de mire.

Par bonheur, le nain clownesque avait cessé de bondir partout. Planté sur ses jambes courtaudes, il ne bougeait plus d'un iota.
C'est maintenant ou jamais !
Hosoo composa des signes avec une main. Des mouvements rapides qu'elle effectua juste à côté du duel mouvementé entre le Maestro et Lissandre Verrières.
Suite à une attaque souterraine de tentacules rosées, la marionnette mutante avait déjà perdu la moitié des fils qui la reliaient à son propriétaire. Dressée sur ses pattes insectoïdes, elle combattait toujours. Contre une Mélissandre informe et diablement excitée !
Du coin de l'œil, la kunoichi vit des pavés voler.
L'instant d'après, Belle Maîtresse lui pria de faire attention. Sous prétexte que son "bébé était passé en mode berserk".

- Honnêtement, je la préfère montée sur ses longues jambes !

Vu les circonstances, il était pourtant question d'un mal nécessaire. Hosoo n'allait pas juger l'arme qu'était devenue Mélissandre dans le feu de l'action. Elle avait d'autres nains à fouetter !
Celui qui lui tenait tête avait d'ailleurs complètement disparu.
Hein ?! Où est-il passé ?
De ses yeux seuls, la tueuse de démons sonda les environs. Elle perçut du mouvement dans les hauteurs. Au niveau des ballons, qui émettaient d'ailleurs des bruits caractéristiques. Comme si quelque chose frottait contre la matière plastique. Le petit clown bondissait d'un ballon à l'autre, les faisant descendre un peu plus bas à chaque fois qu'il faisait pression dessus.
Ce minus se fout de ma gueule. Il est grand temps que je le fasse flamber !
Hosoo porta sa main libre à ses lèvres. Formant un cercle entre son pouce et son index, elle souffla très fort dedans. A l'aide du Ka-jutsu, la kunoichi expira une longue langue de feu. Cette dernière lécha le globe rouge sur lequel sautillait le nain. Le ballon s'illumina et... EXPLOSA ! Première explosion, qui en entraîna d'autres toutes aussi violentes et assourdissantes.
L'onde de choc résultante faucha Hosoo, l'envoyant valdinguer dans le décor !
Et Lissandre Verrières, alors ? Et Mélissandre ? Mère et fille étaient suffisamment proches pour subir les conséquences de cette explosion en chaîne.