The Multiversity

[Gine]

Le voyage n'avait pas été compliqué depuis Terra. Le couple n'eut rien de plus à faire que de prendre son courage à deux mains et de traverser, ensemble, un portail de consistance aqueuse vers l'inconnu. Ils furent tous deux recrachés de l'autre côté, leurs pieds plongés dans un sable aussi fin que chaud. Une chaleur doublement luminescente dans la mesure où elle provenait non pas d'un astre solaire mais de deux ! Le ciel était partagé entre ces globes incandescents. L'un brillait d'un jaune éclatant tandis que l'autre éclaboussait sa partie de monde d'un bleu quasiment nocturne.
Rien que ce spectacle était saisissant !



Gine, pour sa part, avait les yeux levés dessus. Avec bien entendu une main en visière, l'autre étant serrée sur la sénestre de son compagnon renard.

- Quel endroit incroyable, souffla-t-elle, aussi béate qu'émerveillée.

Est-ce qu'il faisait jour ou nuit ? La Saïyajin aurait été incapable de le dire ; de son simple avis, les deux réponses se valaient.
D'émotion, ses doigts se resserrèrent un chouïa supplémentaire autour de ceux de Kamiye.
En descendant légèrement, son regard brillant explorait le feuillage dru des palmiers qui s'étiraient vers la voûte céleste. Il voyagea jusqu'à l'horizon - aveuglant du côté du soleil jaune - où de cotonneux nuages blanc s'étaient amoncelés.

- Comment se nomme ce petit coin de paradis ?

Sur cette plage envoûtante, une eau turquoise et transparente s'écrasait en de paisibles vagues.
Gênée par un bruit d'écoulement constant, Gine tourna la tête.
Derrière eux, plusieurs portails étaient alignés là. Des failles spatio-temporelles de différentes couleurs qui reliaient bien des univers !
La femme à queue de singe, qui se sentait observée, remarqua, non loin d'eux, une sorte de petit bonhomme assis sur un coquillage presque aussi grand que lui. Ses cheveux bouclés coiffés d'une couronne de fleurs tropicales, l'être en question les toisait derrière des lunettes de soleil rondes. A ses poignets, à ses chevilles comme à son cou pendouillaient plusieurs breloques composées de perles colorées. Détail plus atypique encore : la créature, dans sa posture décontractée, possédait de petites ailes de fée attachées dans son dos.



- Ma foi, c'est un joli petit couple que nous avons là ! les interpella-t-il de sa voix enjoué.

Gine en conçut immédiatement de l'embarras.

- Euh... Merci ?

- 'Y a pas de quoi, ma p'tite dame !

Plein d'entrain malgré son attitude relâchée, il ne laissa guère le temps à Gine - et moins encore à Kamiye - de rebondir. D'un index boudiné, il les pointa tour à tour.

- Jolis cœurs, vos tenues à tous les deux sont clairement inadaptées à ce fabuleux séjour.

Avec un petit sourire rusé, il ajouta :

- Vous me voyez contraint de vous filer un p'tit coup de pouce~

Il claqua des doigts. Les vêtements de Gine et de Kamiye se décomposèrent en un nuage de poussière étoilée. Résidus mystifiants qui s'agrégèrent sur leur peau en un maillot taillé sur mesure !
En baissant les yeux sur sa silhouette, la Saiyajin se découvrit sous ses nouveaux atours.



Elle en rougit copieusement, en plus de pousser un petit cri.

- Hiiii !!! Mais q-q-q-q-que... (Elle manqua s'étrangler.) Comment avez-vous... ?!

Trop honteuse pour continuer à chevroter, elle finit par accepter sa condition et par se taire, ses joues enflammées.
Bien sûr : Kamiye eut, entretemps, lui aussi droit à son propre lot féerique !
L'être de magie, qui n'avait même pas pris la peine de se présenter, les salua bien bas avant de leur indiquer la plage :

- Bienvenue à la Plage des Confins Mutliversels !

D'un mouvement de main, il les enjoignit à se presser.

- Ne restez pas plantés là, mes tourtereaux des sables ! D'autres vacanciers vont finir par vous rentrer dedans.

Il y en avait déjà qui s'étaient installés sur des serviettes. Mais avant cela, ces bonnes gens s'étaient tous rendus près d'un cabanon où l'on distribuait le matériel de plage. Car comme Kamiye et Gine avant eux, ils avaient atterri ici les mains vides et sans trop savoir à quoi s'attendre.

[Kamiye Goupile]

Kamiye ne parvenait à apprécier autant l’endroit que Gine. Le sable et le soleil n’étaient pas tout de suite égales à bons souvenirs. A cause de leur traversée du désert récente… Et puis, il y avait de la magie dans ce lieu. Ce n’était pas normal qu’il fasse jour et nuit à la fois. Il n’y avait même qu’un pas à franchir pour passer de l’un à l’autre. Encore et encore. C’était plus fort que lui. Avant l’émerveillement, il y avait la peur.

Et ce fut elle qui le ramena. Inconsciemment, en reserrant sa main dans la sienne, elle le ramena de son sombre paysage mental. (de là même à évoquer un territoire propice au passage d’une Locomotive…). Toujours était-il qu’elle l’avait ramené auprès de lui ! Et il dut se concentrer, elle lui posa une question. Il répondit à voix basse. Presque gêné d’être si inutile…

« Je ne sais pas… »

Mais elle n’avait pas de temps à perdre. Force de caractère ? Expérience d’une vie mouvementée ? Peu importait, Gine était ancrée dans le présent et appréciait déjà chaque détail. Kamiye, lui, n’aima pas l’idée que d’autres personnes (non ! couple) puissent venir. Ce n’était pas un « oasis de paix » s’il devait craindre l’inconnu étant ces étranges à venir…

Parce qu’il était faible, il se « cacha » derrière Gine. Même d’un si petit être. Même d’un petit bonhomme bien familier qui était surement capable de vous vendre des choses dont vous n’aviez pas besoin. Kamiye se réfugia derrière Gina et ne participa pas à la conversation.

Et puis…

« Wow… »

Il en fut bouche bée.

« Tu es magnifique. »

Mais son compliment fut supplanté par le petit bonhomme tout plein de fougue. Gine était si belle qu’il ne s’intéressa plus au nom du lieu ou encore au fait que d’autres personnes allaient venir. Il était sous le charme. Hypnotisé. Il n’y avait plus que Gine à ses yeux et à son esprit. Tout le reste ne comptait plus.

« Tu es magnifique. »

Ce maillot de bain une pièce lui allait à ravir. En fait, ça réveillait même des envies en lui.

Il ne réalisa pas que lui aussi était en « tenue de plage ». Allez savoir pourquoi, le petit bonhomme ? La magie qui avait une volonté ? Peu importait quoi ! avait décidé qu’il ne porterait qu’une sorte de culotte marron à lacet. Il y avait un côté « sauvage ». Un côté « île ». Surtout qu’on lui avait fait porter une sorte de coller ? D’écharpe ? De soutien-gorge ? Quelque chose qui semblait appartenir à une petite tribu paradisiaque vivant à l’écart de tout dans des îles reculées.

(cette tenue serait allée parfaitement au fait que Kamiye soit une femme. Il ne l’était pas. Pas dans cette version du multivers. Mais cela mettait en évidence son corps gracile. Efféminé. Oui, sur cette plage, il était indéniable que Kamiye était beau. Dans une vie plus moderne, il aurait aisément pu suivre une carrière de mannequinat)

Il se rapprocha de Gine. Sa main commença un chemin. Mais elle ne savait plus si elle devait être romantique et se poser sur sa joue. Ou bien plus « animale » et explorer ce maillot de bain à la texture si étrange qu’elle renvoyait de reflets.

Malheureusement ? La ficelle de sa culotte se détendait déjà sur sa cuisse droite. Il ne le remarqua pas.

[Gine]

Gine et Kamiye, en s'écartant prudemment des portails, avaient donc choisi de respecter les consignes de sécurité du gnome aux petites ailes de fée. La première avait pris le second par la main. Sans trop se rendre compte qu'il avait bien failli se risquer à la peloter en public. Ce qui, dans ce contexte, aurait sans doute embarrasser Gine, qui n'était déjà pas très à l'aise dans sa tenue bigrement serrée.

- Au fait...

Elle n'alla pas plus loin. Pas tout de suite. Ce petit blanc sonore n'en était pas tout à fait un : il y avait pas mal d'animation à côté. Notamment à proximité de ce cabanon où l'on distribuait les fameuses serviettes de plage.

- Toi aussi, tu... tu es magnifique.

Elle se surprit à le dévorer des yeux. Yeux qui s'arrondirent un peu plus à la vue de cette ficelle brune et détendue, du côté de son entrejambe masculin, qui menaçait de faire glisser la culotte brune le long de sa cuisse.
Les joues toujours aussi rouges, Gine se couvrit pudiquement la bouche avant de lui indiquer d'un doigt tout tremblant :

- Ton maillot ! Il... va tomber !

Elle fut plus rapide ! Lâchant sa main qu'elle tenait, la Saïyajin s'était accroupie à mi-hauteur pour s'occuper de ce menu désagrément. Elle fit un joli nœud et sourit de soulagement avant qu'un couple qui les dépassait glousse en les surprenant ainsi.

- 'Y en a qui perdent vraiment pas de temps, lâcha la femme qui, étant donné son bronzage, avait déjà du se dorer la pilule quelque part avant de venir ici.

- J'vois ça ! (Il jubila.) Hé, vous deux ! Si vous voulez faire des choses, 'y a un espace réservé pour ça, de l'autre coté.

Du pouce, il leur indiqua ledit endroit qui se trouvait derrière une colline dévorée par d'immenses palmiers. En concentrant son ouïe par là bas, il était possible d'y entendre des gémissements. Nombreux, apparemment. Car il était surtout question d'un coin consacré aux couples échangistes en mal de frissons.
Gine s'était précipitée pour se remettre debout.

- C-ce n'est pas ce que vous croyez !

L'homme lui répondit par un "tss" incrédule accompagné d'un mouvement de main dédaigneux. Lui était persuadé du contraire.
Ce couple hautain s'en alla prendre du matériel du plage.
La femme à queue de singe les observa faire un instant avant de prendre sa décision :

- Tant pis pour les serviettes. On fera sans. Ou nous verrons ça plus tard ! Allons plutôt par là bas.

Elle pointa du doigt une direction où les sons n'étaient pas légion. Une zone nimbée d'un feu jaune et innocent, qu'elle espérait aussi paisible qu'accueillante. Ils coururent y trouver refuge. Mais ce qu'ils y découvrirent était d'une... tout autre nature.



Un régiment d'hommes à pinces de crabe se tenaient là. Ils étaient nombreux oui ! Bien charpentés, pour la plupart. Et ils n'avaient pas l'air commode.

- Halte là ! fit l'un d'entre eux en claquant des pinces. Au nom du Grand Crabitou, je me vois dans l'obligation de vous demander ce que vous êtes venus faire sur notre portion de plage !

- Euh... Vous voulez dire que c'est votre territoire ?

- Tout à fait, madame ! Vous ne pouvez pas y entrer sans la permission de notre chef adoré.

Gine se pencha vers son compagnon pour lui glisser à l'oreille :

- Je n'ai pas très envie de les contrarier. Nous ferions peut-être mieux d'aller voir ailleurs...

Mais cela ne leur était déjà plus possible. Le couple s'en aperçut rien qu'en se retournant. Tandis qu'ils parlaient, des hommes-crabes en avaient discrètement profité pour les encercler.

- Trop tard, souffla sensuellement un spécimen aussi pataud qu'il était barbu.

- C'est la faute à pas de chance : vous avez posé le pied sur le sable qu'il ne fallait pas fouler, surenchérit un cas au physique plus athlétique.

Qu'est-ce qui était le plus effrayant entre leurs visages d'adjudant ou leurs slips de bain qui dissimulaient à peine leur érection ?
Et surtout : est-ce que l'on tolérait les viols au sein de cet environnement ?
Gine fronça les sourcils.

- Qu'est-ce que vous comptez nous faire, au juste ? Nous pincer les fesses ?

- Ça, et bien d'autres choses ♥

Les pinces claquèrent de concert.
C'était horripilant !
Le séjour ne s'annonçait peut-être pas aussi beau que prévu...

[Kamiye Goupile]

Qu’il avait vite rougi quand Gine s’était mise à genoux devant lui. Il avait cru QUE- !! Son cœur battait la chamade alors que la féroce guerrière qu’elle était refaisait un nœud de ses doigts agiles. C’était mignon un tel fait ordinaire chez une personne aussi extraordinaire que Gine. Ca ne fit que l’aimer davantage.

Et puis… il y eut la révélation que c’était très loin d’être une plage déserte. Kamiye avait du se positionner des œillères en arrivant. (peut-être aussi que le maillot de Gine avait participé à cet aveuglement…) Mais présentement, il était mal à l’aise. Il rechercha rapidement la main de Gine pour avoir du soutien. Il baissa la tête. Ses oreilles s’aplatirent. Il voulait partir…

En fuyant, l’air s’était un peu allégé. Mais ça avait duré si peu de temps. La pression étreignit Kamiye. Sa main se resserra sur celle de Gine. Décidément, il voulait vraiment partir ! Cette plage, il ne l’aimait pas du tout. Si c’était le prix à payer pour le maillot de bain de Gine, c’était trop cher payé… Parce que Kamiye ne comprenait pas ce qu’il voyait. Des torses d’hommes, des bras de crabe et pas de jambes. De toutes petites jambes de crabe. Et, ah… non. Ils avaient bien des jambes humaines. Mais ils étaient tous sur leurs jambes repliées et la pointe de leurs doigts de pied. Ils se déplaçaient si bizarrement…

« O-on ne veut vraiment pas v-vous embêter ! S’s’il vous plaît !... »

Il déglutit. Il y avait tant d’hommes. Même accroupis, Kamiye voyait bien à quel point leur masse musculaire était bien au-delà de la sienne. Il était petit… Il était fin… Et il était beau. Efféminé, même. Lui aussi allait se faire pincer les fesses. Il mit sa main de libre dessus, comme si ça pourrait lui servir de bouclier. Quelle désillusion… Il ne voulait pas que les hommes-crabes retirent leur slip de bain pour exposer leur sexe en érection.

« Je… C’est ma femme ! »

Mince alors ! Il n’allait pas subir à chaque fois tout de même, oui ? Son cœur battait très vite. Il fit un pas pour se placer devant Gine. Ce qui était ridicule. Cela ne servait à rien étant donné qu’il y avait un cercle parfait qui les entourait.

« Vous ne devez pas faire ça. Nous pincer les fesses et les autres choses parce que, PARCE QUE elle est enceinte ! »

Vérité ? Mensonge ? Ca importait peu à ce moment. Kamiye espérait attirer la pitié des hybrides face à lui. Peut-être qu’ils avaient un code d’honneur ? Peut-être qu’ils auraient de la pitié ? Ou peut-être même qu’ils le féliciteraient d’avoir trouvé pareille moitié et d’avoir réussir à lui faire un enfant. Kamiye ne savait pas. L’adrénaline lui montant à la tête, il commit peut-être une bêtise en ajoutant :

« Et si ça ne suffit pas, vous n’avez qu’à m’emmener auprès de votre Grand Crabitou ! »

Cela pouvait passer pour un défi. Un duel ? Kamiye réalisa qu’il n’avait aucune idée si ce « Grand Crabitou » était un de ces hybrides mais seulement un autre, plus grand ? Plus costaud ? Plus quelque chose ? Ou alors, et c’était la pire des solutions, c’était une sorte de dieu. Etant donné qu’il y avait une petite fée sur cette plage, pourquoi pas une sorte de divinité absurde ? Il n’en savait rien. Et il se doutait déjà qu’il ne servirait à rien. Encore… Et que ce serait Gine qui lui sauverait les fesses. Encore…

[Gine]

La Saïyajin s'apprêtait à les défendre tous les deux quand l'annonce de son compagnon claqua dans l'air. Kamiye s'était affirmé, osant même se placer devant sa femme pour tenir tête aux hommes-crabes qui avaient subitement cessé de claquer des pinces. Le silence était soudain retombé dans les rangs. Il allait sans doute très vite se gorger des rires moqueurs de la vilaine troupe mais...

- Oh, Kamiye...

Il était trop craquant !
Son attitude protectrice lui avait mis le feu aux joues, à la femme à queue de singe. Mal à l'aise, celle-ci se dandina sur place.
Son homme si noble justifia aussitôt sa vaillante réaction, prétextant qu'elle était enceinte de lui.
Ce qui était vraisemblable, mais surtout très vrai.
je ne suis pas sûre que ce soit une très bonne idée de le leur avoir leur annoncé....
Elle s'était figée, les mains posées sur son ventre, son regard baissé sous le coup d'un embarras plus prononcé.
Plus courageux que jamais pour défendre sa petite famille, l'hybride renard poussa le bouchon entre plus loin en proposant aux hommes-crabes de l'emmener auprès du Grand Crabitou en personne.
Certains parmi leurs harceleurs émirent un sifflement outré. D'autres s'agitèrent en marchant rapidement d'un côté puis de l'autre.
De toute évidence, Kamiye venait de mettre un sacré coup de pied dans la fourmilière !
Avant que les vilains ne réagissent, Gine lui posa une main rassurante sur l'épaule.

- Tu m'épates, Kamiye ! Moi aussi, tout compte fait, j'ai bien envie de voir à quoi ressemble leur chef...

Elle souriait. De la confiance débordait de ses traits.
Un homme-crabe sacrément baraqué se dressa face au couple. Il était suffisamment large et imposant pour que son ombre parvienne les couvrir tous les deux.

- Une entrevue avec notre guide suprême ? Rien que pour vos beaux yeux ? Ha ! Et puis quoi encore ? N'allez pas croire qu'un gringalet et un ouistiti puissent avoir le droit de-

Sans attendre la fin de son monologue, Gine leva la main et lui fit exploser la caboche !
Tout le monde avait sursauté.
Il y eut de nouveau un silence. Des échanges de regard. Une profonde incompréhension sur ce qu'il venait de se passer à l'instant...
Le visage de la Saïyajin était froid comme la glace, et sa main tendue encore fumante.

- Je vous interdis de me traiter comme un petit singe !

Elle tourna la paume de sa main vers les plus gros spécimens. Tous se mirent à reculer en se protégeant derrière leurs lourdes pinces.
Ils avaient peur. Ils n'avaient jamais soupçonné l'existence du ki. Ces gens-là vivaient de façon complètement tordue dans leur petit monde de brutes épaisses.

- Même tarif pour ceux qui se moqueront de mon Kamiyou, qui est beaucoup plus précieux à mes yeux que votre fichu Crabitou !

Blasphème ! Leur entourage eut un mouvement d'humeur. S'ils n'attaquèrent pas tous en même temps, c'est surtout parce que la peur de se faire griller la tronche ne les avait pas encore quittés...

- Si je peux me permettre... ?

L'individu avait levé une pince. Comme un élève en classe estivale qui demande poliment avant de prendre la parole.
Le sentant tout de suite plus conciliant que les autres, Gine hocha la tête à son attention.

- Exprime toi sagement, et je promets qu'il ne te sera fait aucun mal.

Sous le regard mitigé des siens, l'intéressé, après un bref moment d'hésitation, finit par se jeter à l'eau :

- La femme est une guerrière plutôt violente. Même si elle a la progéniture du faib-... (Le froncement de sourcils de Gine le força immédiatement à se reprendre.) ...de son petit homme dans le tiroir, je pense que ça ne dérangera pas notre boss de les rencontrer tous les deux.

S'ensuivit des murmures. Les hommes-crabes se concertaient entre eux alors que celui qui avait entamé un véritable dialogue s'était muré dans les silence.

- Tu débloquerais pas un peu, toi ? intervint un protestataire. Cette gonzesse a des bombes à la place des mains, je te signale ! Elle pourrait parvenir à le blesser, ou pire encore...

Il n'était pas le seul à penser ainsi. Pourtant, il y en avait d'autres qui voyaient les choses autrement :

- Moi, j'ai foi en notre Maître. Le feu de cette femme ne pourra pas traverser sa sainte carapace - jamais !

- Et puis, il y a aussi son champion, leur fit sournoisement remarquer un autre.

- Ouais, c'est vrai, ça !

Ils se mirent tous à parler en même temps.
Gine, qui avait croisé les bras sur sa poitrine et qui tapait impatiemment du pied dans le sable, dut se racler très fort la gorge pour leur rappeler leur présence.

- On a pas toute la journée : décidez-vous, où bien je redeviens violente !

Elle se donnait de grands airs bien qu'elle n'avait aucune envie d'endosser ce rôle d'anti-héros.
Devant eux, les hommes-crabes s'écartèrent pour finalement former une longue haie d'honneur. Avec un grand sourire forcé sur le visage, ils inclinèrent leurs pinces en un geste qui se voulait invitatoire.

- C'est par là, madame !

Plus droite que jamais, Gine eut un reniflement dédaigneux à leur attention.

- Bien ! Merci.

Elle regarda Kamiye et, glissant ses doigts dans les siens, l'encouragea chaleureusement :

- Allons-y, Kamiyou ! Ensemble, comme deux amoureux~

Accompagnés par la horde de crustacés, Ils traversèrent la plage, foulant le sable doux et chaud sur près d'une lieue. Les rochers, jusqu'alors rares dans le décor, s'étaient sensiblement multipliés. Au bout du chemin, ils étaient devenus suffisamment nombreux pour former une grande caverne au sein de laquelle le trio put entrer. Un unique homme-crabe s'était risqué à les accompagner. C'était celui qui, le premier, avait émis la possibilité de cette entrevue avec leur grand chef. Il les guida à l'intérieur de l'antre dont le plafond, au cœur de la pénombre, s'élevait si haut qu'on ne le voyait pas.
Au bout d'un moment, sans crier gare, il s'inclina.

- Grand Crabitou ! Je... non, nous, plutôt, avons pris la courageuse décision de vous amener ces quelques voyageurs.

Il y eut un grand bruit - pareil à un raclement. Quelque chose d'immense s'était redressé. Deux lumières rouge apparurent au beau milieu de ce condensé de noirceur, où les contours d'une ombre gigantesque se découpaient à peine. Une tête jaune, couronnée de trois pics, sortit des ténèbres pour mieux inspecter ses "invités".

- Il est vraiment immense, souffla Gine, une main posée sur son cœur battant alors que sa taille lui rappelait immanquablement celle de sa propre forme simiesque et dévastatrice.

Outre ses proportions gargantuesques, le Grand Crabitou paraissait rudement âgé avec les tentacules qui pendaient de sa mâchoire inférieure, son absence totale de dentition, les quelques coquillages ayant fusionné avec sa carapace et les vieilles algues accrochées à ses aspérités. L'on ne voyait toujours pas son corps, que l'on devinait pourtant couvert de plaques solides et de pointes mal équilibré.
Ce monstre était-il lui aussi un être hybride ? Croisé avec un géant, en ce cas !
Sa voix grave et grinçante retentit alors dans le repaire :

- Qui ose me déranger pendant ma sieste ?

Le guide s'était gardé de toute réponse. Il laissait ce soin aux deux autres ; et notamment à celui, en particulier, qui les avait foutu dans ce royal pétrin.

- Cette caverne est mon sanctuaire, reprit le géant sur un même ton. La plage qui l'entoure est mon territoire. J'y fais régner ma loi, que cela n'en déplaise aux intrus. D'ordinaire, mes sujets n'ont aucun mal à les en éloigner. Ou à en abuser. Mais vous... je vous sens différents des autres. Alors je me répète : qui pensez-vous être pour oser venir jusqu'ici et m'adresser la parole ?

Gine, qui n'avait pas encore moufté, lança un regard en coin à son compagnon.
Est-ce qu'il avait un plan ?
Elle l'ignorait. Même si, à ce stade, avec cette découverte énorme, elle commençait légèrement à en douter...

[Kamiye Goupile]

« Ah ! »

Lui qui avait tenté de s’imposer auprès des hommes-crabes venait de perdre toute contenance en découvrant l’absence de tête d’un crustaçoïde. Au moins ne s’était-il pas uriné de peur sur lui. Il aurait du alors sprinter pour plonger dans la mer. Ce qu’il avait envie de faire mais pour d’autres raisons. Seulement, Gine n’avait pas l’esprit aux vacances présentement.

La suite était complètement hors du contrôle de Kamiye. Ce qui, il fallait bien qu’il se l’avoue, l’arrangeait. Il n’avait pas peur de dire que c’était elle qui portait la culotte dans leur couple, comme le voulait l’expression. Et puis, quand c’était elle qui le défendait, il éprouvait une sorte de fierté à être faible. Son faible à elle.

Ca n’allait pas s’arranger si ce Grand Crabitou avait une patte dans la religion. Kamiye n’était pas croyant. Et il ne voulait pas approcher d’un pseudo saint. Parce qu’il y croyait vraiment moyen qu’une bande d’hommes-crabes comme eux vouent une sorte de culte à un saint tout à fait sérieux. Et puis son attention diminua. Il se réfugia dans son monde intérieur. Seuls ses yeux gardant contact avec ce délicieux maillot de main couleur émeraude.

Et voilà qu’il se trouvait sous l’œillade de Gine dans cette grotte avec un être qui ne lui donnait qu’une envie : celle de fuir au plus loin. Mais Gine était là. Sa protectrice à portée de bras. Sa chaleur. Son foyer. Il était hors de question de s’éloigner d’elle. Il ne voulait pas la poursuivre à nouveau et la retrouver dans un pitoyable état. Sans compter que ce Grand Crabitou avait dit quelque chose qui ne lui avait pas plu. Donc il prit la parole le premier.

« Nous sommes des vacanciers ! Et une famille ! »

Est-ce qu’il serrait le poing ou entrelaçait ses doigts avec les siens à elle ? Finalement l’index accusateur s’éleva dans les airs.

« J’ai entendu dire qu’on vous prenait pour un saint. Moi je crois plutôt que vous jouez au roi et abusez de beaucoup de choses. De la crédulité de vos hommes-crabes, par exemple. Et puis ! Et puis il ne faut pas abuser des gens. Ce n’est pas bien. Il faut le faire avec leur consentement. Vous comprenez ? »

Le Grand Crabitou était vraiment énorme. Il suffirait qu’une de ses deux grandes pinces racle le sol jusqu’à lui et il finirait surement en purée de renard contre le mur… Mais il devait s’affirmer. Et il savait qu’il pouvait s’y essayer avec sa puissante guerrière de femme.

« Alors si vous voulez conserver votre bout de plage, il va falloir changer. Parce que je me dis qu’il y a des gens doués pour guider les autres. Peut-être que vous l’êtes aussi. Parce que j’ai quand même l’impression que les hommes-crabes vous respectent. Certains ont peur, c’est sur. Mais je préfère voir le meilleur. »

Il ne fallait pas qu’il la regarde. Il se réfugierait derrière elle. Et aussi, il n’était pas certain de pouvoir se concentrer. Elle était vraiment trop belle dans son maillot de bain. Il voulait prendre une de ses grosses bouées et dériver au large avec elle. Peut-être boire de l’alcool. Ceux avec pleins de couleurs. Il voulait essayer des choses sur cette plage où il faisait jour et nuit en même temps. Mais il ne pouvait pas. A cause du crabe sénile sans dentier.

« Et je vous dois aussi des excuses. Je n’ai pas été poli. Moi je m’appelle Kamiye Goupile. Et voici ma femme Gine. Mais pas forcément Goupile. Et, euh… Est-ce qu’on peut donc trouver un terrain d’entente tous ensemble ? »

[Gine]

Le ton était monté. Kamiye y avait mis du sien, oui ! Cet hybride renard frêle mais qui, pour une raison que le Grand Crabitou semblait mésestimer, n'était pas dépourvu de cette gouaille qui avait le chic de rider même les plus puissants. Contrairement au crabe gigantesque, Gine ne grimaça pas ; elle souriait de fierté. Avec ses paroles sans filtre, son chéri était un doux mélange d'innocence, de vulnérabilité et même d'autorité !

- Gine Goupile, releva la femme à queue de singe en hochant la tête. Je trouve que ça me va bien~

Sobre confirmation d'amour !
Le Grand Crabitou lui coula à peine un regard, les deux petites lueurs rouge brillant dans ses orifices oculaires rebutant à quitter le visage du jeune éphèbe. L'intensité qu'y lut l'homme-crabe qui avait amené le couple dans sa caverne intima ce dernier à manifester son indignation :

- Impertinent freluquet ! Comment un pauvre petit bout d'homme comme toi peut-il oser mettre en doute la sainteté de notre guide suprême ?!

Sans plus réfléchir, le fidèle tendit ses larges pinces vers Kamiye.
En moins d'une seconde, une ombre tomba du plafond, s'abattant sur l'agresseur avec une telle force qu'il le fit à moitié disparaître dans le sable ! Gine, qui s'était positionnée un demi pas devant son compagnon, s'avisa de ce nouveau spécimen. Un autre homme-crabe bipède dont la mutation penchait bien plus du côté animal que de l'autre. Une masse compacte et trapue, constituée d'une cuirasse bardée de pointes dorsales sous laquelle se gonflait une puissante musculature. Cette monstruosité, visiblement taillée pour le combat au corps à corps, possédait des pinces oranges un peu plus fines que celles de ses congénères inférieurs. Des vêtements élimés lui couvraient les tibias, la taille ainsi que le buste. Pour verrouiller le haut de ses loques, une ceinture en cuir agrémentait cet ensemble fade et sans couleur.



- Tu n'aurais pas dû t'exprimer sans y avoir été invité, fit le nouveau venu d'une voix profonde, qui sonnait étouffée comme dans un casque.

Ce que le monstre, parodie arthropode d'un certain Doom Slayer, donnait curieusement l'impression de porter ?

- L'autre s'est fait piétiner comme un rien, souffla la Saïyajin, inquiète, avant de relever ses yeux sur le gros morceau. Alors c'est vous, le champion du Grand Crabitou ?

- Lui-même, répondit-il. Arthropss, dit le Broyeur. (Ses yeux oranges consultèrent le Grand Crabitou.) Dois-je les supprimer en votre honneur ?

Gine s'était aussitôt raidie.
Le Grand Crabitou eut un vague mouvement de pince.

- Inutile. Le donneur de leçons s'est excusé pour avoir eu la langue aussi pendue. Je me rabaisserais en désirant sa mort.

La Saïyajin soupira de soulagement ; elle n'avait pas du tout envie de se battre avec cette espèce de démon cuirassé.

- Comptez-vous leur laisser la vie sauve ?

- Il est encore un peu tôt pour le dire. (Ses immenses pinces claquèrent.) Reste en retrait, Arthropss. Ces... vacanciers pourraient nous être utiles.

Le Champion ne moufta pas.
Hissée sur la pointe des pieds, Gine leva la main bien haut. Cela suffit à attirer l'attention du Grand Crabitou. Et comme il l'interrogeait du regard...

- Excusez-moi, commença-t-elle tout doucement, je voulais juste vous signifier que tout ce que je sais faire, c'est la cuisine et me battre - avec une préférence certaine pour le premier de ces arts. (Elle désigna Kamiye.) Mon homme est très doué pour m'assister, alors si nous pouvons vous rendre un service en échange de votre hospitalité...

- L'ouverture d'un terrain d'entente, songea à voix haute le Grand Crabitou en se grattant distraitement la barbe avec l'une de ses pinces. Cela pourrait bien nous être bénéfique.

Il laissa planer le silence. Prenant son mal en patience, Gine ne chercha pas à le combler - même si l'envie lui démangeait les cordes vocales.

- Nous avons un problème autrement plus urgent que le vôtre, finit-il par avouer. Un envahisseur bien moins loquace que vous, avec qui il nous est donc impossible de négocier...

- Le Grand Pollueur, devina Arthropss. L'envahissante pétro-pieuvre.

Le Grand Crabitou remua son énorme tête chauve.

- Elle les ferait griller en un rien de temps, poursuivit son champion. Vous aviez raison ; face à un tel adversaire, ces deux-là ne sont pas sortis d'affaire.

Refoulant ses angoisses, Gine demanda alors :

- Vous avez donc besoin de notre aide pour en venir à bout ? C'est à ça que vous voulez en venir ?

Le grand guide des hommes-crabes poussa une sorte de gloussement caverneux.

- Ce monstre vous laminerait en un rien de temps...

Les poings sur les hanches, la Saïyajin fronça les sourcils d'agacement.

- Je ne comprends pas. Qu'est-ce qui vous intéresse, alors ?

- J'attends de vous deux que vous fassiez le ménage, déclara-t-il. Que vous nettoyer la plage après son passage. Une tâche horriblement salissante, mais qui pourrait bien nous permettre de trouver un terrain d'entente... tous ensemble.

- Vous nous accorderiez l'asile en échange de ce travail ?

- Mieux : une fois la basse besogne accomplie, je vous léguerai la dite portion de mon territoire contesté.

Gine n'était pas stupide : pareille acquisition impliquerait déjà de pouvoir tenir tête à la créature ; ce qui n'était pas gagné d'avance, à en croire Arthropss. La Saïyajin parut y réfléchir très sérieusement avant de se rappeler qu'elle n'était pas toute seule dans cette histoire. Elle s'intéressa donc à Kamiye.

- Je pense pouvoir les surprendre... et nous offrir de belles vacances, sourit-elle. Sauf qu'il n'est pas question que je mette en danger notre couple sans obtenir ton consentement.

Il avait son mot à dire. Car même si elle le protégeait, il était l'homme. C'était leur enfant qu'elle avait dans le ventre - ou du moins qui s'y développait paresseusement.

[Kamiye Goupile]

Sa main s’était resserrée sur celle de Gine. Une bouffée de chaleur l’avait envahi du cœur vers la tête en passant par la coloration de ses joues. Gine Goupile ! C’était vraiment lui donner trop d’importance. C’était plutôt à lui de prendre son nom à elle. Et voilà déjà qu’à l’amour, la guerre venait reprendre le flambeau. Un impressionnant hybride crabe apparut d’il ne savait où. Il n’avait pas les réflexes d’une guerrière. Il était si limité, lui… Mais ce crabe en armure lui évoquait une bizarre fusion avec une mine sous-marine hérissée de pointes. Il n’avait pas du tout envie que leur nouvel adversaire explose. SI cela était possible. Non, décidément, il ne voulait pas savoir. Et encore moins expérimenter !...

Kamiye avait complètement perdu le contrôle avec l’arrivée du Champion. Son seul réconfort, pour le moment, était qu’en s’excusant, il leur avait offert une sorte de protection temporaire. Le Grand Crabitou ne pouvant leur donner la mort si facilement. Et voilà que sa Gine prenait l’initiative. Forte en cuisine et un peu moins en combat ? Kamiye aurait ouvert les yeux de surprise s’il ne devait pas gérer sa fierté ébréchée. Il n’était bon qu’à assister. Preuve oral en était faite de sa faiblesse…

(et pourtant, cela ne le dérangeait pas d’être la chose de sa femme puissante. Elle tenait à lui. Elle voulait s’occuper de lui. Cela le remplissait d’une joie que jamais personne d’autre ne lui avait offert)

*Le Grand Pollueur ? L’envahissante pétro-pieuvre ? Je n’aime pas beaucoup ces noms… Ce n’est pas du tout rassurant ! *

La conversation s’était poursuit mais la tête de Kamiye tournait. La peur ? Très probablement… C’était un terrible poison. Sauf qu’un sourire le ramenait à la réalité. Et pas n’importe quel sourire. Le plus beau. Celui qui était au-dessus d’un maillot de bain magnifique et tentateur. Et elle voulait son avis ! Son consentement.

« Oui. Bien sur que oui. Euh… »

Sauf qu’il dut faire un effort de mémoire pour comprendre ce qu’il avait signé. Nettoyer une plage ? C’était largement dans ses compétences ! Il allait leur prouver que sa presque vie entière à être esclave et s’occuper des déchets des autres allaient devenir une force.

« Nettoyer une plage ? Tu peux compter sur moi, Gine. Si tu es une très forte guerrière, je suis un très fort nettoyeur. Ca oui ! »

Il en faisait des tonnes. Comme de montrer son petit biceps et de le contracter pour la forme. Gine en avait un bien plus massif. Mais Kamiye était motivé et c’était ça le principal. Il ne fallait pas se battre, juste nettoyer. Une situation qui serait résolu sans affrontement : c’était très bien. Ça lui mettait du baume au cœur. Et puis, un petit côté de son esprit se projetait. Une petite plage pour juste tous les deux… Pour juste lui et le maillot de bain qui moulait toutes les formes généreuses et athlétiques de sa Gine. Elle qui voulait prendre son nom de famille. C’était comme promettre à son papa et à sa maman que leur famille ne disparaitrait pas. Une seconde chance avec la plus merveilleuse des femmes du monde. Non, de tous les mondes !

« On va s’en occuper de la plage ! Alors, il suffit juste de me dire où se trouve les balais et les seaux. Les produits et les éponges. Tout. Et aussi m’indiquer où il faudra jeter les ordures. Ne vous inquiétez pas, une fois que j’aurai tout le matériel et que j’aurai compris les pièces, couloirs et autres particularité du bâtiment : je serai parfaitement autonome. Enfin, je sais que ce n’est pas un château, mais je me comprends. Donc, on commence maintenant ! Enfin, c’était une question. Pardonnez mon enthousiasme. »

Qui pouvait vraiment sourire et se complaire d’une tâche (simple) de nettoyage, franchement ?

[Gine]

Oui ? Oui hésitant ? Oui intimidé ? Non ! Le renard avait rebondi avec enthousiasme ! Il allait se montrer utile. Nettoyer la plage ? C'était tout à fait dans ses cordes ! Cette perspective faisait son bonheur. Ce qui n'aurait pas été pareil sans la présence de Gine, qui le protégerait de tous les dangers pendant qu'il œuvrerait. La joie et la confiance débordantes de Kamiye Goupile éclaboussèrent tout le monde ! Y compris le Grand Crabitou et son champion massif.
Le premier des crustacés eut un rire à la fois lugubre et grinçant.
Gine, pour sa part, eut comme un mauvais pressentiment...

- Voyez-vous ça ! La fougue de la jeunesse, gloussa-t-il. Malheureusement, ces outils humains que tu as cités ne te seront d'aucun secours pour cette épuration. Et il n'y a pas non plus d'endroit, sur cette portion de plage, où stocker les reliquats toxiques du Grand Pollueur.

- Hein ? Je ne comprends pas où vous voulez en venir...

Elle regarda Kamiye d'un air contrit. Cela lui faisait de la peine d'apprendre qu'il ne pourrait pas lui venir en aide comme il entendait si bien le faire...

- Ne prenez pas cet air déçu. Moi, le Grand Crabitou, je vais personnellement octroyer à ce morceau d'homme les moyens de ses ambitions.

Anticipant l'accomplissement de cette promesse insensée, son champion s'écarta du couple.
Le Grand Crabitou ne laissa guère le temps à Gine de se mettre en travers de sa route. Il pointa une de ses lourdes pinces vers l'hybride, ses yeux rouges s'illuminant avec intensité. Un rayon d'énergie du même coloris traversa l'espace qui séparait son appendice monstrueux du frêle renard. Cette force impossible tétanisa d'abord l'ensemble de ses muscles, avant de le soulever dans les airs au beau milieu d'un flamboiement de magie.

- Arrêtez ! Mais qu'est-ce qui vous prend ?!

La Saïyajin s'apprêtait à lui foncer dessus comme un missile quand quelque chose d'incroyablement lourd la percuta, l'envoyant bouler sur le côté.

- Assagis-toi. Sa Crustamisation ne fait que commencer.

Ce gros salaud lui avait flanqué un coup d'épaule ! Gine, une main plaquée contre ses côtes, gémit et se redressa.

- La Crustamisa... quoi ? (Elle secoua violemment la tête.) On s'en fiche ! Vous lui faites mal, et je refuse que ça continue ainsi !!

- Tu es en position ni d'exiger ni de te plaindre, répliqua froidement Arthropss. Contemple sa transformation, ou meurs inutilement.

- Ni l'un ni l'autre ! cria la guerrière en engageant la confrontation.

- Encore peu de patience, sourit monstrueusement le Grand Crabitou.

Alors que la fine musculature du renard se gonflait par saccades en vue de se trouver un compromis stable, ses bras congestionnés et veinés s'étirèrent des deux côtés ! Au bout de ceux-là, ses mains se couvrirent d'une nouvelle épaisseur plus rocailleuse. Le long de ses poignets, telle une seconde peau, poussèrent des membranes protectrices. L'énergie crépitante qui entourait son corps se condensa brutalement, se refermant sur lui avec une telle pression qu'il allait sans doute s'imaginer mourir écrasé en une minuscule boule de chair. Heureusement, il n'en fut rien ; la magie se dilata brutalement dans un flash et, sans plus de cérémonie, le libéra de sa gangue brûlante.
Kamiye s'effondra sur les genoux. La chute, pourtant haute de trois bons mètres, ne lui infligea aucun dégât.
Son corps avait non seulement gagné en robustesse mais aussi en chaleur. Un feu mystique qui grondait entre ses gros doigts carapaçonnés.



Le Grand Crabitou avait relâché son emprise sur l'ancien esclave.
Le hasard voulut qu'à cet instant précis Gine, qui se tenait tête au Broyeur, freina sur ses talons jusqu'à lui.
Sentant la puissance qui irradiait de ses membres supérieurs, la Saïyajin arrêta son regard interloqué sur ses mains enflées.

- Mais tu... ?

- Une seule pensée, la coupa le Grand Crabitou en s'adressant à son partenaire, et un brasier pur jaillira de tes puissantes mitaines. Telle est ma bénédiction - la Crustamisation ! Tu t'en serviras pour réduire en poussière le poison de la pétro-pieuvre. Car il n'existe aucun lieu, en ce monde, qui mériterait d'être souillé par les déjections de cette abomination. As-tu saisi l'importance de ta mission et la valeur de ce présent ?

- Il a ses limites, précisa Arthropss en regardant Gine. Vous feriez mieux de ne pas traîner. Son effet prendra fin bien assez tôt pour que vous vous inquiétiez de sa disparition.

Le Grand Crabitou n'était pas fou au point de confier durablement un tel don à un nettoyeur sorti de nulle part. Par ailleurs, lui n'en craignait pas les effets.

[Kamiye Goupile]

« Qu-quoi ?... AaaAhH ! Je veux retourner par terre ! Giiine ! »

Est-ce que c’était sa propre colère qui lui congestionnait les bras ? Il se fichait même que Courroux soit de retour et le possède. Il était hors de question qu’on fasse du mal à sa Gine ! Mais la paralysation était puissante. L’incompréhension également. Il avait entendu parler d’un terme barbare « crustamisation » ? Il ne savait pas ce que ça signifiait et- !

Plus rien. Plus d’air dans ses poumons. La pression était intense dans son corps. Allait-il mourir, compressé d’une force invisible et invincible ? Il allait diminuer jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de lui. Comme une publicité distribuée sur la plage qu’on réduisait à l’état de boulette afin de se débarrasser du détritus. Kamiye était inutile…

Il tomba.
Il était toujours vivant.
Il n’entendait plus rien.
Il constatait ses mains malades. Gonflées… Comme si elles avaient passées trop de temps dans l’eau. D’ailleurs, il y avait des membranes comme chez les poissons qui lui sortaient des poignets.
Il-…

Il releva la tête vers Gine. Il voulait pleurer. Se réfugier tête contre son corps.
Mais le Grand Crabitou parla. Monologua serait plus juste. L’information mit un temps avant de devenir compréhensible. Ce qui permit au Champion au nom imprononçable d’y aller de son conseil.

« AH ! »

Kamiye s’éveilla à la compréhension. Il bondit en arrière pour mettre trois longueurs de bras avec celle qu’il aimait.

« Ne m’approche pas ! Je ne veux pas te faire de mal ! »

Car il faisait partie de ses hommes qui avaient peur du pouvoir. L’ivresse n’était pas la réaction première chez le renard. Il craignait pour la vie de Gine. Il regardait ses mains comme si deux monstruosités capable soudainement d’ouvrir les yeux allaient se mettre à lui parler.

« Nettoyer par le feu ?! C’est une méthode brutale et guerrière ! Le recyclage est pourtant mieux que la destruction ! »

Savait-il seulement ce qu’était le concept de recycler ? Peu importait. Kamiye ne se sentait pas bien dans ses « gantelets de feu ». Il n’était pas d’accord avec la méthode pour « nettoyer ». Il pensa même à retourner les flammes contre le Grand Crabitou. Mais il se savait trop faible et avait trop peur des conséquences. Le crabe monstrueux l’avait manipulé sans avertissement. Il s’était cru mourir. Certaines sensations bloquées dans sa mémoire à court terme.

Alors il s’avoua vaincu…
Il baissa la tête et prit la direction de la sortie de la grotte. Il ne parla que pour annoncer ceci à Gine :

« Ne m’approche pas. Reste toujours éloignée. Je ne veux pas te blesser. Je ne veux pas te tuer parce qu’une sorte de Dieu a placé une sorte d’arme entre mes mains de faible… »

[Gine]

C'était déjà trop pour Kamiye ! L'hybride mit aussitôt de la distance entre eux. Gine voulut le rejoindre, mais son hurlement l'en empêcha. Figée entre le champion du Grand Crabitou et son homme, une lueur de peur et de compréhension traversa son regard.
Soudain, elle s'était vue en lui. Comme si leurs rôles s'étaient inversés. Et cela lui fit mal - au plus profond de son être.

- Non, Kamiye, je...

Le concerné explosa. Il n'était pas un guerrier, et encore moins un incinérateur sur pattes ! Ses mains ne lui convenaient pas ; elles étaient devenues un poids pour lui. Un problème par-dessus le problème. Avec celles-là, il n'oserait plus jamais la toucher.
Gine se sentait comme prise de vertige.

- Qu'importe tes états d'âme, petit être ! La pétro-pieuvre doit disparaître, et c'est par ma voix que ce devoir vous revient.

Abattu, Kamiye n'insista pas. Il tourna les talons et se mit à marcher en direction de la sortie. La Saïyajin s'empressa bien sûr de le suivre. Elle dut toutefois mesurer la longueur de ses pas ; son renard ne voulait pas la blesser par accident. La peur de l'atteindre avec ce nouveau pouvoir le rongeant intérieurement.

- ...

Elle ne trouvait pas les mots dans cette grotte. Elle ne les trouva pas non plus à la lumière du jour.
Ce fut le Broyeur qui prit la parole. Arthropss ne se gêna pas pour dépasser le couple, quitte à leur administrer un petit coup d'épaule au passage.
Gine, plus proche de lui que Kamiye, gémit en se tenant le bras.

- J'ai de plus en plus l'impression de vous guider vers votre propre mort, lâcha-t-il de sa voix profonde. Ce n'est pas bon pour nous. Ce n'est bon pour personne.

Accélérant le pas, il prit un peu d'avance. Après quoi, de dos par rapport à eux, il s'arrêta net. Lentement - très lentement - sa tête se tourna à demi. Une lueur menaçante éclaira son œil jaunâtre.
La femme à queue de singe s'immobilisa et, d'un geste, intima Kamiye à faire de même.
Elle fronça les sourcils.

- Où voulez-vous en venir ?

Le Broyeur pivota sur ses appuis. Sa pince droite pointa le jeune renard.

- Si tu ne te défends pas, gamin, je vais te broyer ici et maintenant.

- Quoi ?!

Arthropss chargea son amant ! Gine, les bras croisés sur sa poitrine, se glissa urgemment dans sa trajectoire. Le choc fut si intense qu'il la projeta par-dessus son protégé. Elle s'écrasa lourdement dans le sable chaud.

- Allez ! Prouve-moi que j'ai tort, le gringalet !

Il lui fonça dessus. Et cette fois-ci, Gine n'aurait pas le temps d'intervenir.

[Kamiye Goupile]

Ce monstre avait envoyé valser sa Gine sans attention. Il dut lutter contre lui-même en fermant les yeux. Ses mâchoires fermées, il luttait contre cette sensation que des crocs poussaient… Il se retint d’ouvrir la bouche. Que ce soit pour demander si elle allait bien. Car il redoutait surtout de CRIER.

Mais le Champion à l’exosquelette entendait aller au bout de son plan. Il rua sur Kamiye !

« Non ! Je ne veux p- !... »

La charge violente l’interrompit dans sa réponse orale. Il fut à son tour expédié quelques mètres derrière lui.

Maintenant, le Champion les toisait tous les deux. C’était toujours difficile de poursuivre un combat quand il n’y avait pas d’adversité en face. Mais son devoir requérait qu’il aille au bout de ce carnage unilatéral…

Arthropss : « Mieux vaut que tu meurs de ma pince ici et maintenant… »

Il y eut un changement dans l’atmosphère. Si Kamiye ne faisait rien, il allait mourir. Le langage non-verbal et l’aura de son adversaire, devenu ennemi, allait être létal. Mais le changement était double. Soudainement, le Renard prit appui sur la pince ouverte qui se referma sans lui sectionner un membre. De ses deux mains appuyées sur la pince, il grimpa. Bondit en prenant appui dans le creux du bras. Prit appui sur une tige de fer enfoncée dans le dos pour se retrouver dans le dos du Champion.

« J’ai été gentil. Retouche à ma femme sans prendre en considération le bébé et je te ferais ébouillanter vivant. »

Kamiye semblait avoir vieilli. Le Renard n’était plus roux mais grisâtre. Sa poitrine nue était maintenant recouverte d’une fine fourrure. Le blanc de ses yeux avait commencé à rougir. S’il n’était pas complètement transformé, c’était bel et bien les traits de Courroux qui conquérait le corps.

« Je ne veux pas me battre. Je veux briser toutes les chaînes de violence. Ma famille ne vivra pas mes épreuves. Je leur offrirais un monde meilleur. Et je ne veux pas que ce soit en versant le sang. Encore… Alors, excuse-moi. Je n’aurai pas dû te menacer. Excuse-moi et restons-en là, oui ? »

Un sourire ponctua sa demande diplomatique. Il ferma ensuite les yeux pour reprendre le contrôle. Sa colère s’était manifestée sous la forme de son alter ego. Mais en repensant au pourquoi il s’était manifesté, et donc en repensant à la façon dont Gine avait été renvoyé… une pulsion de colère revint nourrir l’âme de Courroux. Il devait être davantage concentré !

[Gine]

- Ougfh !

Ecrasée à plat dos dans le sable, Gine dut prendre un moment pour s'en remettre. Il lui fallut d'abord retrouver de l'oxygène, la terrible charge d'Arthropss ayant complètement vidé ses poumons de leur air. Entre ses deux hémisphères, c'était surtout celui de devant qui l'avait fait le plus souffrir.
Le Champion du Grand Crabitou était-il devenu fou ?
Non. Il pensait simplement agir pour le mieux.
Un mieux qui impliquait la mort d'un pion fragile et inutile.
Sauf que l'homme-crabe se trompait lourdement sur le compte de sa "victime".

- K-Kamiye... ?

L'intéressé avait changé. Gine le voyait, maintenant. Le menacé était devenu le menaçant. Et il s'était accroché au dos d'Arthropss, qui lui ne bougeait plus. Un renard devenu singe ? Non. Plutôt un Kamiye en passe de laisser le dangereux Courroux prendre le dessus sur sa personnalité diplomatique.
La Saïyajin grimaçante se redressa...

- Je constate que tu n'es pas si faible, lâcha leur adversaire.

Venait-elle d'entendre comme un sourire dans sa voix profonde ?
Gine n'en était pas sûre.
Quoi qu'il en fût, Arthropss fit descendre ses bras le long de son corps cuirassé.
Ce combat, qui aurait dû être une simple exécution, avait perdu tout sens à ses yeux.

- Tu peux descendre sans craindre pour ta vie ; tu m'en as prouvé la valeur...

Il regarda Gine, qui avait récupéré ses appuis.

- Ainsi que l'importance de ta femelle.

Une fois débarrassé de sa charge, il reprit automatiquement la marche.

- Ne traînez pas.

La Saïyajin a l'air bête marqua un certain temps d'arrêt avant de hocher doucement la tête à l'intention de son compagnon.

- Je crois qu'il a voulu te tester...

Elle ravala sa salive. D'une certaine manière, la soudaine animosité d'Arthropss était plus dangereuse que la demi transformation de Kamiye. Car si les deux savaient plus ou moins se contrôler, le renard à la grise fourrure n'était plus sous le commandement de personne sinon de ses propres sentiments qui respiraient la bonté et la non-violence.

- Essayons de ne pas trop lui en vouloir, d'accord ?

Plutôt que de progresser seule dans le dos de ce monstre à pinces, Gine préférait de loin évoluer au côté de son brave compagnon.

- Merci, Kamiyou.

Parce qu'il s'était comporté en défenseur, et non en contre-attaquant.
Qu'il le veuille ou non, elle profita de sa proximité pour lui toucher les mains. Ces mains mutées qui ne lui inspiraient que de la peur et du dégoût, à cet homme sensible mais pas aussi vulnérable qu'il en donnait l'air.

- Exploite ce pouvoir avec le même état d'esprit, et je t'assure qu'il ne nous arrivera rien de mauvais.

Elle lui décocha un petit sourire. Ils durent ensuite se remettre en route.


- Nous y sommes, annonça le Broyeur.

Ils s'étaient arrêtés face à cette large portion de sable. Une zone effectivement polluée par des monticules d'algues prises dans une sorte de mélasse noirâtre et puante. Il y en avait partout ! Les plus gros se situaient vers les terres alors que les plus petits et plus étendus, eux, formaient des arcs de cercle concentriques étouffants depuis la mer. Quelques vagues moussues s'échouaient mollement sur la plage déserte. En dehors de leur roulement plus ou moins régulier, seuls quelques courants d'air se faisaient entendre.

- La pétro-pieuvre semble s'être absentée, constata Athropss. Restez sur vos gardes. Le Grand Pollueur ne sera pas aussi magnanime que je l'ai été avec vous.

Il s'écarta du groupe.
Gine en profita pour suggérer à son homme :

- Viens. Allons nous exercer par là-bas.

Elle lui indiqua un tas énorme qui ressemblait davantage à du dégueulis moisi qu'à des déchets marins prisonniers du mazout.

[Kamiye Goupile]

Il s’en voulut tellement d’avoir cédé à la pulsion de serrer le poing et d’armer ce bras pour… blesser Gine. Parce qu’elle avait osé toucher cette main « gantée » qui ne lui appartenait plus. Mais il ne la blessa pas. Aucune blessure physique, de cela il y avait certitude.

« Excuse-moi… »

Puis le trio changé d’une nouvelle dynamique reprit la marche. Et arriva dans une plage plus noir que jaune. Cet endroit paradisiaque (et un peu effrayant d’avoir la journée coexistant avec la nuit) l’était de moins en moins. Kamiye voulait partir. Tout ça lui plaisait de moins en moins…

Il laissa échapper une sorte de grommellement sourd à l’intention d’entraînement.

*Heureusement qu’elle est là. Gentille, douce et attentionnée. Et aussi… *

Ses yeux se perdirent à nouveau dans ses formes athlétiques moulées par le maillot de bain émeraude. Il craquait. Une douce chaleur remonta à ses joues en même temps qu’un sourire chassa sa mine contrariée. Il demeura néanmoins la transformation inachevée vers Courroux. Mais ce n’était définitivement pas Courroux : c’était bel et bien Kamiye aux commandes.

« C’est moche… » lâcha-t-il en se rapprochant des choses prisonnières de la substance noire.

Ce fut ensuite à ses mains transformées de s’approcher des déchets. Comme l’espèce de Dieu-Crabe l’avait dit, le pouvoir se déclencha d’une seule pensée. Mais Kamiye retint la déflagration et ne produisit qu’une lumière et d’un dégagement de chaleur qui fit onduler l’air.

« Mais je ne sais pas si ça veut dire qu’on doit tout brûler… Et si on faisait une erreur à faire ce que la première personne nous disait de faire ? J’ai l’impression de faire un retour en arrière… De redevenir l’esclave à qui on fiche un seau d’eau glacée contre le torse, un balai et un couloir humide à nettoyer… »

Il aurait préféré utiliser cette nouvelle source de chaleur pour faire plaisir à celle qui allait devenir la maman de ses petits renards. Mais ce n’était pas le moment d’avoir des pensées « impures ». Surtout qu’il avait toujours peur de la blesser. De la brûler… Ou même simplement de détruire ce joli vêtement moulant.

« Mais si tu insistes pour que je brûle tout, je le ferais. C’est toi la guerrière. C’est toi la femme forte. Moi, je préférerais que tu me quittes. Je veux dire, que tu t’envoles et que tu essaies de trouver cette pétro-pieuvre. Qui sait ? Peut-être qu’on pourrait réussir à lui parler ? On a bien réussi à parler à un gros gros crabe. Et moi je suis en partie renard. Alors pourquoi pas avec une sorte de pieuvre ? »

*Elle doit me trouver naïf et stupide. Surtout que je ne dois pas ressembler à grand-chose entre mon corps tout fin, un demi-Courroux et ce cadeau empoisonné qui ressemble à des menottes à pouvoirs… *

[Gine]

Bien sûr : son trouble dut à sa récente mutation ne l'avait pas quitté si facilement. Kamiye restait sur les nerfs mais Gine savait qu'il ne lui ferait aucun mal. Il était en mesure de la reconnaître, et donc d'agir en son sens... en leur sens. Avec le temps, la Saïyajin était parvenue à différencier Courroux de Kamiye ; le caractère de l'un n'avait rien à voir avec celui de l'autre.
Les mains rangées dans le bas du dos, elle le regarda user de ses pouvoirs incinérateurs.
En un instant, le tas de déchets marins s'était comme éclipsé !
Effectivement : c'est très dangereux.
Une pensée qu'elle conserva pour elle-même. Là où Kamiye, qui avait toujours besoin d'être rassuré, exprima les siennes à voix haute. Lui qui disait avoir l'impression d'être revenu en arrière, sous son ancienne condition d'esclave. Sentiment qui alourdit le cœur et l'estomac de Gine, qui avait contribué à sa libération pour au final... quoi ? tomber sous le joug d'un groupe d'hommes-crabes fanatiques ?
La Saïyajin soupira.
Je comprends sa vision des choses. Ce doit être tellement frustrant...
Elle n'en ressentait qu'une bribe alors que lui, avec son passé traumatisant...
Comme Gine ne l'avait pas coupé dans son monologue, Kamiye avait repris la parole pour lui suggérer de le... de le quitter ?!
Son visage s'était comme décomposé à cette idée.

- Quoi ?! Mais nous... ?

L'homme avait eu vite fait de clarifier sa pensée - et elle n'était pas du tout celle qu'avait crainte la future mère de ses enfants. Aussitôt, les battements cardiaques de la Saïyajin décrurent, son souffle revenant petit à petit à la normale.

- Tu m'as fait une de ces peurs...

Elle avait tout de même entendu sa suggestion : celle de tenter une approche pacifique avec le Grand Pollueur. D'un hochement de tête, elle approuva, prenant dans le même temps de la hauteur.

- Je vais la trouver et tenter d'initier le dialogue, confirma-t-elle non sans y ajouter un compromis : sans trop m'éloigner de toi ; il n'est pas question que je te laisse seul trop longtemps !

N'attendant guère de réponse, elle fila comme un courant d'air. Ils se trouvaient du côté diurne de la plage. La présence de ce ciel bleu lui apportait un certain réconfort en ces heures troubles. Cet endroit avait l'allure d'un petit coin de paradis, et pourtant les créatures qui l'occupaient avaient quand même trouvé le moyen de le pervertir. En y pensant, Gine fit inconsciemment le rapprochement avec ce dangereux pouvoir que le Grand Crabitou avait prêté à son amant. Et si ce dernier avait raison ? Que l'élimination de la pétro-pieuvre n'était pas la solution ?

- Ces vacances deviennent franchement délicates, grommela la songeuse.

Alors qu'elle survolait prudemment la zone, Gine en profita pour décocher des boules d'énergie sur quelques amas noirâtres. Ils flambèrent presque instantanément, éclaboussant le sable d'une lueur orangée.

- Remarque : un peu de ménage ne serait quand même pas de trop.

La femme à queue de singe poursuivit dans l'effort quand elle capta une présence étrangère. Elle baissa la main, tournant son regard curieux dans la direction concernée où elle ne voyait encore rien.
Il faut que je me concentre davantage.
Fermant les yeux, elle se focalisa sur cette obscure source d'énergie. A sa grande surprise, Gine se rendit compte qu'il n'y en avait pas deux mais trois de regroupées au même endroit.
Nous ne sommes pas seuls ?
Cette portion de plage n'était-elle pas censée être déserte ?
Quand elle rouvrit les yeux, une détonation retentit dans le lointain !

- Et c'est parti !

Gine fonça vers ce qu'elle s'imaginait être son objectif.


Elle ne s'était pas trompé ! La pétro-pieuvre, imposante, sombre et huileuse, brillait par son impressionnante présence...



Le monstre n'était pas seul ; deux protagonistes lui tenaient tête. Dont une jeune femme aux cheveux blancs et à la peau verte, habillée d'un bikini violet...



...qui faisait équipe avec un homme chauve paraissant tout droit sorti d'un film de science-fiction.



Gine, qui avait tout le loisir de les observer de là-haut, put constater qu'ils étaient tous les deux armés. La première tenait une sorte de gros pistolet blanc tandis que son comparse soulevait un énorme fusil mitrailleur.

- On ne lâche rien, Gargan ! On va la capturer, cette saloperie ! s'exclama Arxa. Faisons lui sauter ses tentacules.

- Plus facile à dire qu'à faire, grogna l'autre entre chacun de ses tirs improbants. Cette saloperie a beau être énorme, elle bouge étonnamment vite.

Pour éviter le gros des attaques, Gine remarqua que la pétro-pieuvre s'aplatissait et glissait sur le sable. Elle y laissait des traces ; sa souillure noirâtre et gluante, en l'occurrence. Et lorsque un tir avait le malheur de ricocher dessus, le tout s'enflammait avant d'exploser dans une cacophonie infernale !
La Saïyajin, dont l'ouïe était plus sensible que la normale, grimaça en portant une main à l'une de ses oreilles.
Où est passé Arthropss ?
L'homme-crabe cuirassé avait forcément dut entendre tout ce barouf !
Pourtant, elle ne le voyait toujours pas arriver...
Gine avait comme un mauvais pressentiment.

[Kamiye Goupile]

Sa Gine était quand même très mignonne. Cette fière guerrière capable d’exploits surhumains. Elle s’était décomposée à cause d’un bête quiproquo. Elle avait cru perdre son « Kamiyou » comme elle le disait. Lui n’avait réussi qu’à sourire en toute réponse. Y avait-il vraiment besoin d’ajouter des mots pour exprimer ce qu’il pensait ? Non, selon lui.

Et elle partit dans les airs. Un autre de ses formidables pouvoirs. Kamiye en oublia la « malédiction » du Dieu Crabe. Sa petite femme était vraiment formidable. Elle l’avait même écouté pour tenter de converser au lieu de bataille. C’était super ! Bon, il se retrouvait tout seul. Temporairement ! Mais il était quand même sacrément content de pouvoir espérer.

*Je vais quand même la suivre. On ne sait jamais. Et puis, peut-être qu’elle sous-entendait ça aussi. Quand elle m’a dit, amoureusement, qu’elle ne voulait pas me laisser tout seul trop longtemps. *

Sans s’être concerté, les deux amoureux agirent de concert. Que ce soit le feu alien ou les flammes des abysses, chacun des deux fit s’étioler les « déchets » noirs de celui qu’on leur avait présenté comme l’ennemi à abattre. Alors Kamiye se mit à trotinner, réussissant à positiver sous ce grand soleil. Cette mer qui donnait envie de se baigner (même s’il ne savait pas nager… mais il pourrait apprendre. Il voudrait que sa Gine-chérie lui apprenne en posant ses mains sur son corps incapable : il en rougit rien que d’y penser !).

Au loin (enfin, pas trop quand même, il fallait bien que Kamiye rejoigne prochainement l’action), des coups de feu furent tirés. Kamiye effectua une glissade dans le sable et s’arrêta pour tendre ses deux grandes oreilles.

BOUM !!!

Par réflexe, il se recroquevilla sur lui-même. Ses mains nouvellement gantés venant rabattre ses grandes oreilles de renard sur sa tête. Il trembla un instant. Se souvint de la bataille contre ce terrible monstre dans la forêt avec les ex-esclaves. Cet ogre… Il se souvint de tant de cadavres. De la transformation de son amoureuse en singe géant et berserk…

« GINE ! »

Il se releva en même temps qu’il cria son nom. Mais elle était hors de portée de sa (petite) voix. Alors il sut qu’il n’avait pas le choix. Son visage exprimant sa résolution, il sprinta à en perdre haleine. A manquer de combustible dans ses poumons. C’était du feu au-dedans. Mais il était hors de question de ralentir. Chaque seconde pouvait compter !

Chaque seconde pouvait être la dernière !!!

« Gine ! »

Ca ne servait à rien de crier son nom à nouveau. Mais ça le rassurait en partie. Parce qu’il était dans l’action. Parce que peut-être elle pourrait l’entendre. Aussi parce que cela le déculpabilisait ? Il n’avait rien à se rapprocher. Gine était une grande fille. Une guerrière expérimentée. Mais il s’en voudrait tellement de la découvrir blessée…

Et il finit par arriver. Il découvrit cet homme froid en armure verte. Cette femme à la peau verte, (un autre vert) qui, bizarrement, lui fit penser à son amoureuse. Comme si elles partageaient toutes deux des traits en commun. Mais Kamiye ne réfléchit pas plus à ce point.

« Gine !! »

Il enchaîna pour cette femme aux cheveux de sagesse qui s’exprimait vulgairement avec son arme effrayante.

« Arrêtez de tirer ! On veut lui parler ! Pourquoi toujours cette violence ?! Mais ARRÊTEZ A LA FIN !! »

[Gine]

La situation avait pris une tournure aussi alarmante qu'inattendue : la pétro-pieuvre faisait face à deux inconnus bien déterminés à la coincer dans leurs filets. Dans cette optique, le couple guerrier essayait de l'affaiblir au mépris de tout le reste. Les tirs fusaient vers la créature tentaculaire, rebondissant parfois sur sa silhouette huileuse, ricochant sur les amas de poisse qui rougissaient avant d'exploser en retour !
C'était le chaos. Un barouf sonore pour celle qui, à ce stade, semblait grandement hésiter à s'en mêler...
Quand un cri familier attira son attention, le regard de Gine tomba sur les frêles épaules de son cher et tendre.
Kamiye l'avait suivie, et il ne manquait pas de souffle pour beugler à l'attention de ceux qui en avaient après le Grand Pollueur.

- Kamiye !

Elle descendit en flèche au moment où une nouvelle explosion retentit. Le bang sonore la fit dévier de sa trajectoire initiale. La Saïyajin dut s'y reprendre à deux fois pour se stabiliser.
Et pendant ce temps-là, du côté du monstre et de ses chasseurs, le combat continuait à faire rage !
Plutôt que d'avoir recourt à des explications civilisées, le dénommé Gargan s'était suffisamment approché de l'inopportun renard pour le repousser d'un coup d'épaule.

- Va jouer ailleurs minus ! Ici, c'est une zone de guerre.

- Qu'est-ce que tu glandes, Gargan ? Ne t'occupe pas de lui ! N'arrête pas de tirer et... Waaaaaaah !!

Elle dut bondir en arrière pour éviter de se faire broyer par cet épais tentacule garni de pointes acérées. Son atterrissage, plutôt laborieux, la fit s'écraser sur le cul, juste entre la sécurité relative des jambes de son garde du corps.

- Ouille... mais quelle saloperie !

Comme Arxa tenait toujours son flingue, elle en leva la gueule fumante vers la créature - toute proche - qui les surplombait et pressa la détente.
Contre toute attente, l'appareil n'émit rien d'autre qu'un misérable cliquetis. Comme s'il était... enraillé ?

- Connerie ! surenchérit la peau verte avant de darder un regard mauvais au renard qui était affalé à ses côtés. Ne reste pas là à me regarder d'un air aussi con, espèce de crétin ! Rampe tout de suite te mettre à l'abr-

- RAAAAAAHHHH !!!

La mitrailleuse de Gargan hurlait en même temps que lui ! Certains de ses traits traversaient sa cible de part en part sans toutefois que cela paraisse l'ébranler ; mais il y avait plus terrible encore que l'inefficacité de ses assauts de décérébré : la pétro-pieuvre, massive et cruelle, était déjà prête à les écraser tous les trois. Se soulevant du sol à l'aide de ses tentacules les plus en retrait, elle déploya l'ensemble de ses appendices antérieurs à la manière d'une étoile de mer !
Ils n'auraient pas le temps de lui échapper.
Alors, en désespoir de cause, Arxa s'accrocha à Kamiye et hurla :

- Iiiih !! C-c'est la MEEEEEEEERDE !!!

Le sort en était-il jeté pour ceux-là ?
Non !
Gine, qui s'était glissée dans le dos du monstrueux céphalopode, avait refermé ses bras enveloppés de Ki autour de ses tentacules qui lui servaient d'appuis. Les traits congestionnés, la Saïyajin tira brutalement dessus en hurlant, ramenant le tout en arrière avec une force qui défiait la logique. La pétro-pieuvre s'écrasa de tout son poids juste devant l'homme-renard, la peau verte et le chauve qui avait cessé de faire feu. Ils furent tous les trois éclaboussés par un sable piquant.
Sans cesser de forcer sur ses muscles, la femme à queue de singe fit décrire un arc de cercle à son monstrueux adversaire avant de le balancer à la flotte !
Elle ne prit pas le temps d'observer sa descente, préférant s'assurer que les autres allaient bien.

- Ça va ?! Vous êtes toujours entiers ?

Ils en avaient l'air !
Arxa s'était décollée de Kamiye pour cracher ces grains de sable qu'elle avait reçus dans la bouche.
Gine soupira de soulagement. Son Ki éteint, elle prit Kamiye par les bras, l'aidant à se redresser aux cotés du chauve en combinaison.

- C'était quoi, cette projection ? Comment vous avez fait pour l'envoyer...

- Qu'importe ! le coupa la guerrière en décochant un coup d'œil à son compagnon. La pétro-pieuvre va revenir se venger. Et ça ne va pas être une partie de plaisir de la convaincre de s'en aller sans faire d'histoire...

Au loin, parmi les flots houleux, les cornes de la créature se découpaient parmi les vagues.
Une lueur d'un bleu océanique brillait dans ce qui servait de yeux au Grand Pollueur.
Arxa Cheelks, qui avait retrouvé un peu de sa dignité perdue, déglutit en voyant le céphalopode réapparaître.

- Quelle poisse ! J'ai comme l'impression que je peux faire une croix sur mon réservoir à combustible...

Gine la regarda avec incrédulité.
C'était dans un intérêt aussi égoïste que cette alien comptait capturer la pétro-pieuvre ?
Les mâchoires carrées et l'air particulièrement viril, Gargan s'avança d'un pas déterminé.

- J'crois pas qu'on en ait terminé, elle et moi.

Après tout, cette version de l'Unité A-Syn-Crown se voulait aussi brutale que bagarreuse ; elle n'était pas très regardante des statistiques de l'adversité.

[Kamiye Goupile]

Par réflexe, Kamiye avait refermé ses bras autour de la dame à la peau verte. Pas à un seul moment avait-il pensé à abuser de la situation. Pas plus qu’il n’avait imaginé que cela pourrait provoquer un drama inutile et se déclenchant dans un moment inopportun. Non, il avait agi parce qu’il était bon et qu’il souhaitait protéger les gens sans a priori. Pourtant, il s’en serait bien passé de ce cri qui frappa ses deux grandes oreilles de renard sensible…

« Ca va, toi ? »

Elle ne l’entendit pas. Gine l’avait aidé à se relever mais avait autant coupé le guerrier que son amoureux. Patient, et se sachant tout en bas de la pyramide de puissance, Kamiye attendit son tour. Et il répéta sa question à sa « douce ».

« Ca va, toi ? Tu ne t’es pas fait mal à manœuvre ainsi la sorte de pieuvre ? Je suis sur que tu vas me dire que ça va alors que tu as trop forcé… »

Kamiye était protecteur. Trop parfois. Il savait qu’elle n’était pas en sucre. Mais c’était plus fort que lui, il s’inquiétait. Et il s’inquiétait de savoir que le niveau d’inquiétude pourrait être bien plus fort quand il devrait s’occuper de leur petite portée… Mais ce n’était pas le moment !

« Je ne vois pas comment on pourrait le battre. Ni toi avec ta force, ni eux avec leurs armes. Et je ne vois pas pourquoi mes gants fonctionneraient mieux que leurs armes à eux. Donc vraiment, moi je dis qu’il faut arrêter de combattre et parler avec la créature. Qui veut venir avec moi ? Qui veut m’aider à ouvrir le dialogue ? »

Bien plus loin sur la plage, une jeune femme essayait de profiter de ses vacances. Pour une fois qu’elle n’était pas dans un plan galère… A bien y regarder, elle partageait un physique qui avait trait à ceux d’Arxa et Korë. Actuellement, elle était étendue sur une serviette de plage et ne portant qu’un bikini rouge. Cela et un chapeau pointu, avec une sorte de sourire jaune et deux boutons rouge pour les yeux. Le couvre-chef lui permettait de conserver le haut de son visage et donc ses yeux à l’ombre. Mais rien qui ne pouvait empêcher les oreilles d’entendre les explosions et le corps de ressentir les secousses.



??? : « Mais c’est pas vrai ! Je te jure que si c’est toi, Kazuma, tu vas-… »

Mais il n’était pas là. Elle le vit en se redressant. Par contre, elle découvrit une belle gerbe d’eau après qu’un truc massif y ait été jeté. Soudainement, elle eut envie de déverser toute sa magie en un seul coup ! Ca la démangeait. Et il fallait qu’elle le fasse. Une fois tous les jours ! Alors elle se releva et sa main se resserra autour de son bâton de magicienne.

??? : « Plus sombre que le noir, plus sombre que les ténèbres, fusionne avec mon pourpre intense. Il est temps de s'éveiller, de descendre à ces frontières et d'apparaître comme une distorsion intangible. Danse, danse, danse ! Qu'une force destructrice inonde mon torrent de puissance, une force destructrice sans pareille ! Renvoyez toute la création à sa source ! Sortez de votre abîme ! L'humanité ne connaît pas de technique offensive plus puissante ! C'est l'attaque magique ultime ! Explosion ! »

[Gine]

Comme il ne s'était pas encore jeté à corps perdu vers la créature des enfers, Gine ne chercha pas à retenir le grand chauve à la mitrailleuse. Kamiye se souciait de son état de santé ; elle se fit un devoir de lui répondre dans la seconde :

- Je dirais que tu as vu juste ; j'ai le haut du dos et les bras qui me tirent un peu. Reste que je considère ces petits désagréments comme une bonne fatigue !

Loin d'être rassuré, l'homme-renard insista pour qu'ils modifient complètement leur approche. Et puisqu'ils ne disposaient pas de la puissance nécessaire pour éliminer le monstre, Il en voulait une diplomatique - et surtout pas militaire.

- Je veux bien t'aider à l'ouvrir tout court, lui répondit Gargan. A quoi ça va nous servir de lui causer ? Après tout ce qu'on a essayé de lui mettre, cette horreur pseudo-marine va obligatoirement essayer de nous cramer le cul !

- Gargan a raison. La... « pétrio-pieuvre », comme vous l'avait appelée, nous regarde d'un sale œil.

Ils ignoraient pourtant un détail qui aurait pu paraître anodin - mais qui ne l'était en rien. Un autre personnage avait jeté son dévolu sur cette plage. Une jeune femme en bikini rouge, coiffée d'un chapeau de sorcière. Une magicienne qui n'avait pas oublié d'emporter son bâton avec elle. Et accessoirement une vacancière que tout ce barouf avait légèrement incommodé. Cette dernière récita une incantation à voix haute. Huit phrases qu'elle chanta à tue-tête avant de brandir son arme avec vigueur.

Au sein de son groupe, Gine fut la première du lot à lever les yeux sur cette impressionnante colonne de cercles incandescents et parallèles qui étaient apparus au-dessus du bord de mer...

- Bah... ? C'est quoi, tous ces disques ?

Arxa, la main en visière, ajouta dans un souffle :

- Aucune idée. Mais ça brille de mille feux...

Par chance, Gargan était équipé d'un capteur thermique directement relié à son cortex cybernétique. Il mesura rapidement la température de cet édifice incompréhensible et... en conçut aussitôt l'infinie dangerosité.

- Tous à terre !!!

Ce disant, l'armoire à glace en combinaison futuriste fit volte-face. Il renversa Arxa avant qu'elle ait le temps de dire « ouf ! », la recouvrant de tout son corps en vue de la protéger de la déflagration à venir. L'air avait déjà commencé à rougir et crépiter de façon alarmante lorsque la Saïyajin lâcha :

- Oh, bon sang !

Se fiant à son instinct de protection plus qu'à celui de sa propre survie, elle attrapa Kamiye par les bras, le projeta au sol et imita Gargan en lui servant de bouclier humain.
Lorsque la gigantesque explosion frappa de plein fouet le Grand Pollueur, les flammes passèrent au-dessus du quatuor désespéré juste avant que l'onde de choc ne les balaye comme s'ils ne pesaient rien !

[Kamiye Goupile]

Kamiye n’entendait plus rien. Ça sonnait dans ses oreilles ! Et il avait chaud. A cause de l’explosion cataclysmique incompréhensible depuis son point de vue. Mais pas seulement. Certes, il y avait aussi la réaction en chaîne du pétrole explosif. Mais vraiment pas seulement, il y avait une autre chaleur sur lui. Contre lui. Et surtout très agréable…

« GINE ! EST-CE QUE TU VAS BIEN ? QUELLE HORREUR ! TU DOIS ETRE TELLEMENT BRULÉE !!! »

Le Renard ne se rendait pas compte qu’il hurlait. Il était en état de choc après avoir assisté et ressenti de si proche une magie bien trop dangereuse. Quel genre de femme se spécialisait à fond et sans hésiter sur un unique sortilège de cette ampleur ? C’était parfaitement idiot. Et si Megumin ne s’était pas trouvée si loin, Kamiye en colère lui aurait passé un savon !

(avant de s’excuser plus tard, une fois l’adrénaline redescendue…)

Et puis tout en lui se confronta. La peur de découvrir sa guerrière mortellement touchée à l’envie de ressentir le corps de son amante dans ce maillot de bain qui l’avait hypnotisé dès le premier regard. Il voulait la faire rouler-bouler pour reprendre le contrôle mais craignait d’aggraver son cas en incrustant des milliers de grains de sable dans ces plaies. Simultanément, il voulait rester sous elle, l’embrasser et qu’elle fasse de lui des choses qu’on ne devait pas faire avec deux inconnus belliqueux juste à côté d’eux.

***

Ailleurs sur cette plage multiverselle, un autre couple découvrait cet endroit incroyable. (quand il n’était pas sous le joug d’un pseudo crabe géant divin ou d’une grosse pieuvre explosive) Le Renard ressentit une étrange sensation. Une connexion indicible avec une version alternative de lui-même sans comprendre. Mais c’était une sensation familière, il l’avait déjà ressenti. Toutefois, ce qui passait après l’explosion de Megumin, et la position intime avec sa Gine le fit bien vite oublier cette sensation de retrouver son double multiversel.

C’était donc Camille et Korë qui passait par là. Le premier y était allé de son petit caprice. Il désirait que son amante soit vêtue d’une robe blanche diaphane. Il comptait bien exhiber sa perversité et la figer à jamais dans quelques clichés photos. Car il était venu avec un appareil qui pendait à son cou via une sangle. Bien entendu, s’il avait imposé cette petite robe estivale, il était tout naturel que cette dernière lui impose également un code vestimentaire.

Camille : « C’est incroyable comme endroit ! »

Ne luttant pas contre ses désirs, il s’autorisa à passer ses mains autour de sa taille pour la coller contre lui. Pour cela, il avait fait tourner son appareil photo pour qu’il pende dans son dos. Ainsi, son dos à elle pouvait se coller contre son ventre à lui.

Camille : « Ce sera parfait pour un de nos jeux, euh, étranges. »

Une première nuit à jouer avec de la cire de bougies. Une autre nuit à jouer avec un métal quasi organique et magique. Ces deux-là ne parvenaient pas à faire les choses « normalement » et simplement.