«
Hope est liée au Phénix. Je suis liée au Phénix. Et le Phénix va atterrir en Latvérie. Fatalis a conçu un artefact pour y stocker le Phénix… Je l’ai senti, et j’ai aussi senti que les choses allaient mal se passer. C’est la raison pour laquelle je ne souhaite pas emmener Hope en Latvérie. »
Pour celle qui avait failli commettre un infanticide, on sentait que Madelyne revenait de loin. Mystique avait, elle aussi, abandonné Kurt, elle avait même tenté de le tuer dans un moment de folie, persuadée qu’il s’agissait d’Azazel, ce démon qui l’avait manipulé, et alors même qu’elle était convaincue d’être stérile. Seule Mystique était à même de la comprendre, et, maintenant plus que jamais, Madelyne le percevait. Hope était comme leur fille, et, si cela n’excluait pas qu’elles conçoivent un jour une fille (quoi de plus facile pour Mystique ?), pour l’heure, Madelyne pensait à Hope, et à ce passé tenace qui refusait de partir. Son retour, Hope, puis le Phénix… Tout cela n’était pas lié au hasard, elle an avait l’intime conviction.
Délaissant donc Mélinda et Hope, Madelyne retourna à l’orphelinat. La police était présente ainsi que les pompiers et les ambulances. Elle n’eut qu’à faire parler ses pouvoirs télépathiques pour qu’on la laisse tranquille, et elle se rapprocha des filles qui l’aidaient à gérer l’orphelinat. Il y avait cette élève, Doutzen Kroes. Madelyne lui indiqua qu’elle et Mystique allaient s’absenter pour plusieurs jours, et que, pendant ce temps, il fallait laisser les enquêteurs faire leur travail, et qu’elle ferait sa déposition ensuite. Ensuite, les deux femmes rejoignirent l’aéroport, et embarquèrent à bord du premier avion pour la Latvérie. Un long voyage en plusieurs escales, où Madelyne utilisait de ses pouvoirs pour trouver sans problème des places.
C’est à bord de son vol qu’elle se renseigna un peu sur les mercenaires qui avaient attaqué l’orphelinat. Elle avait saisi un nom, et, en faisant des recherches, elle découvrit rapidement ce qu’elle voulait, à commencer par un article de
The Economist centré sur la PDG d’Armacham :
Geneviève Aristide.
L’ascension fulgurante de Armacham.
Incorporée au sein du groupe ORCHIS, Armacham est aujourd’hui l’image de ces nouvelles multinationales à l’image de marque propre. Spécialisée dans l’armement, Armacham a établi son siège social et ses installations à Fairport, qui n’était qu’un simple village avant que la firme ne s’y installe…
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L’illusion d’un « monde en paix ».
On se souvient tous de la démonstration saisissante d’Armacham au Forum Davos. La dirigeante de la firme, Geneviève Aristide, y a rappelé que la guerre était malheureusement une nécessité, fustigeant l’aveuglement de l’Occident pendant des années. « Nous avons vécu pendant des années dans la douce utopie d’un monde en paix, d’un monde où la guerre serait bannie. Malheureusement, ce monde est une réalité. Nous nous focalisons à juste titre sur la guerre en Ukraine, mais il existe une vingtaine de guerres actives à travers le monde, sans parler de tous les conflits larvés. Qu’on le veuille ou non, la guerre est une réalité dont il nous faut tenir compte. »
Le projet d’Armacham est de concevoir une armée de soldats psychiques, des clones. Face aux critiques des ONG, Madame Aristide a toujours balayé les accusations, en rappelant que sa firme fait régulièrement l’objet d’enquêtes d’agences de sécurité fédérales, et que tous les rapports ont conclu à la viabilité de son projet. « Nous ne nous substitutions pas au vivant, nous a-t-elle martelé. Cela, je peux vous le certifier. Nos soldats sont des enveloppes vides. Il faut les voir comme des animaux dociles. Ils n’ont aucune conscience qui leur soit propre, ni aucune âme. Pensez à tous ces jeunes gens qui se sacrifient, qui finissent mutilés à vie, ou même morts. Avec notre système, nous pouvons éviter tout cela. Vous connaissez sûrement des proches qui ont des connaissances marquées par la guerre, marquées dans leur chair et dans leur âme. Là où les autres se tournent vers la robotique, nous restons sur l’humain. Un robot ne réfléchit pas, il se contente de faire ce qu’on lui dit. Nos soldats seront capables de discernement, d’agir, et d’éviter les pertes civiles. »
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Au cœur de tout : Paxton Fettel et le gène-X.
Comment fonctionne les clones ? C’est à l’occasion du sommet de l’OTAN à Vilnius que Armacham, pressentie pour l’un des plus gros contrats de ces dernières années avec l’OTAN, a tenu à expliquer son système. « Nos soldats sont de deux ordres : le fantassin, et le commandant. Le fantassin suit les ordres que son commandant lui donne, et, comme nos soldats sont issus de la même matrice, du même séquençage génétique, nous pouvons les coordonner à un niveau inégalé. Idéalement, et à terme, chaque section disposera d’un Sergent, le tout obéissant à un Commandant. C’est le Commandant qui relaie les ordres par le biais de la télépathie, et qui anime les soldats. Ainsi, l’état-major dispose d’une relation directe avec ses soldats, et peut ainsi donner des ordres à la seconde près. Le fantassin étant relié à son commandant, il est impossible que celui-ci désobéisse à un ordre. »
Là où les généticiens et les scientifiques d’Armacham ont été inspirés, c’est en menant très tôt des recherches sur le gène-X, ce fameux gène à l’origine de la mutation, et qui panique tant nos concitoyens. Loin d’y voir une malédiction, Madame Aristide y a vu une bénédiction, la promesse d’un avenir meilleur. Pour cela, au cœur de tout ce système, les clones ont tous été conçus à partir du même modèle : celui du « Patient-Zéro », le soldat Paxton Fettel. « Orphelin, Paxton a été recueilli par les services sociaux. C’est un télépathe, un télépathe de niveau Omega, a précisé Madame Aristide. Nous l’avons détecté dans le cadre de nos programmes socio-éducatifs, et nous l’avons appris à utiliser ses pouvoirs, à les contrôler. Nos recherches sur le gène-X nous permettent ainsi de déterminer lesquels de ces clones disposent de pouvoirs psychiques, et lesquels n’en ont pas… Pour cela, les commandants disposent d’un gène-X dominant, alors que les soldats ont un gène-X récessif… »
Madelyne resta assez pensive, se demandant ce que tout cela dissimulait. D’autres articles évoquaient l’essor économique de Fairport, une ville fondée lors de la ruée vers l’or, qui avait connu son heure de gloire, mais qui était sur le déclin, avec des carrières profondes qui avaient fermé et des puits de pétrole qui s’étaient asséchés. Armacham avait reconstruit et amélioré la ville, et prévoyait d’organiser un défilé spécial d’ici quelques mois, pour célébrer le lancement officiel de son premier bataillon de soldats psychiques. Quant à sa PDG, Madelyne apprit qu’elle était d’origine française, et que ses parents avaient connu jeunes la Shoah.
Ensuite, l’avion arriva en Latvérie. Madelyne et Mystique rejoignirent le Grand Hôtel de Fatalistadt. Madelyne trouva rapidement un homme qui avait une invitation ce soir au grand gala que Fatalis organisait au Château. Elles rejoignirent sans peine sa suite.
Ronald Thornston était un cadre dirigeant de la Roxxon. Madelyne l’endormit rapidement avec ses pouvoirs, puis entra dans la suite avec Mystique.
«
Tu vas prendre son apparence, ma chérie… Nous devons rejoindre cette fête, et en découvrir plus sur le Phénix, et sur ce que Fatalis mijote. »
Depuis la baie vitrée, on pouvait voir l’énorme château qui se dessinait, surplombant la capitale. Tenant toujours la main de Mystique, Madelyne se retourna alors vers elle, et lui sourit doucement, avant de lui caresser tendrement la joue.
«
Mais nous avons plusieurs heures de battement avant cela… »
Et elle alla l’embrasser…