Je m'en étais douté.
L'immoralité de certains ressortait chaotiquement au beau milieu de la bataille. Sans avoir eu l'occasion de se défendre, un "frère d'armes" mourut un couteau planté entre les omoplates. Le traître fut néanmoins rapidement neutralisé par une neko armée d'une dague à laquelle était fixée une chaîne tandis qu'un autre type, peut-être un peu moins lâche que le meurtrier, en avait profité pour s'enfuir à toutes jambes.
Un choix qui ne regarde plus que ce grand solitaire.
Ils avaient brisé le cercle. Les plus téméraires d'entre-eux avaient le droit de quitter les lieux au risque de se faire alpaguer un peu plus loin. Gine ne pouvait guère le leur reprocher. Par ailleurs, elle n'avait pas le temps d'endosser le rôle de moralisatrice ; plusieurs hallebardiers s'évertuaient à la tenir en respect. Il fallait féliciter leur courage car, malgré leurs jambes tremblantes et la peur d'être atomisés qui leur ternissait le regard, ces hommes continuaient à faire face.
- Vous ne devriez pas insister. Plus aucun de vos collègues ne le devrait.
Elle agita son bâton au moment où les hallebardiers s'échangeaient un regard. L'un d'eux bascula en arrière, le nez brisé et la visière tordue. Le second bascula sous son coéquipier vaincu, qui l'avait à moitié renversé avant que l'arme contondante de Gine ne fauche définitivement ses appuis et le contraigne à l'immobilité. Le troisième entreprit une attaque piquée, qui n'était qu'une feinte en vue de frapper plus efficacement. Mais la femme à queue de singe ne se fit pas avoir. Elle passa au-dessus de la hallebarde avant d'atterrir à pieds joints sur son manche. Avec son bâton, elle cueillit le garde à la tempe. Suffisamment fort pour le réduire au silence, mais pas assez pour prendre sa vie.
C'était mieux ainsi. Ou disons que Gine préférait y croire...
- Bien ! On continue... ?!!!
La Saïyajin se sentit comme foudroyée ! Quelque chose s'était agrippé à sa queue de singe. Et ce "quelque chose" n'avait pas fait semblant ! Lâchant son bâton, Gine tomba à genoux non loin de ce garde qu'elle avait heureusement assommé. Vidée de ses forces, elle rencontrait toutes les peines du monde à ne pas se vautrer par terre et dut produire un effort colossal pour ne fusse que couler un regard par dessus son épaule dénudée.
Ses yeux troubles reconnurent Kamiye.
- Je... quoi ?
Il lui parlait. Elle ne comprenait que la moitié de ce qu'il disait - et encore ! Les mots "passages", "murs", "petits couloirs" et "Maître" lui étaient parvenus. Gine ne chercha pas tout de suite à leur donner un sens. La fatigue la terrassait, et chaque seconde relevait d'une lutte pure et dure pour ne pas complètement s'aplatir au sol, à la merci du premier rigolo de passage.
- Non... s'il te plaît... ne touche pas à... à ma... ma qu...
Enhardi par cette première victoire, un insurgé, sans trop regardé où il allait, bouscula Kamiye. Son pied buta dans quelque chose qui trainait là. Le bâton de Gine, en l'occurrence. Tout en roulant se perdre au loin, l'arme avait du même coup retrouvé sa forme initiale - celle d'un manche rétracté, autrement plus discret qu'un bâton de combat. Dans le processus, l'esclave avait manqué de peu d'écraser les doigts de Gine. Il s'excusa très sommairement auprès de Kamiye avant de suivre le mouvement initié par les autres. Et tant pis pour les retardataires !
Il ne s'était pas posé davantage de question en voyant la Saïyajin ainsi prostrée et comme tenue en laisse par un hybride plus chétif qu'elle.